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Alors il avait coupé l'air en croix avec son chapeau, ce qui était le signal convenu pour dire que tout était perdu.

Publié le 04/11/2013

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Alors il avait coupé l'air en croix avec son chapeau, ce qui était le signal convenu pour dire que tout était perdu. À ce signal le roi avait rebroussé chemin et avait disparu. Aussitôt de Mouy, enfonçant les deux larges molettes de ses éperons dans le ventre de son cheval, avait pris la fuite, et tout en fuyant avait jeté les paroles d'avertissement que nous avons dites, à La Mole et à Coconnas. Or, le roi, qui s'était aperçu de la disparition de Henri et de Marguerite, arrivait escorté de M. d'Alençon, pour les voir sortir tous deux de la hutte où il avait dit de renfermer tout ce qui se trouverait non seulement dans le pavillon, mais encore dans la forêt. D'Alençon, plein de confiance, galopait près du roi, dont les douleurs aiguës augmentaient la mauvaise humeur. Deux ou trois fois il avait failli s'évanouir, et une fois il avait vomi jusqu'au sang. - Allons ! allons ! dit le roi en arrivant, dépêchons-nous, j'ai hâte de rentrer au Louvre : tirez-moi tous ces parpaillots du terrier, c'est aujourd'hui saint Blaise, cousin de saint Barthélemy. À ces paroles du roi, toute cette fourmilière de piques et d'arquebuses se mit en mouvement, et l'on força les huguenots, arrêtés soit dans la forêt, soit dans le pavillon, à sortir l'un après l'autre de la cabane. Mais de roi de Navarre, de Marguerite et de De Mouy, point. - Eh bien, dit le roi, où est Henri, où est Margot ? Vous me les avez promis, d'Alençon, et corboeuf ! il faut qu'on me les trouve. - Le roi et la reine de Navarre, dit M. de Nancey, nous ne les avons pas même aperçus, Sire. - Mais les voilà, dit madame de Nevers. En effet, à ce moment même, à l'extrémité d'une allée qui donnait sur la rivière, parurent Henri et Margot, tous deux calmes comme s'il ne se fût agi de rien ; tous deux le faucon au poing et amoureusement serrés avec tant d'art que leurs chevaux tout en galopant, non moins unis qu'eux, semblaient se caresser l'un l'autre des naseaux. Ce fut alors que d'Alençon furieux fit fouiller les environs, et que l'on trouva La Mole et Coconnas sous leur berceau de lierre. Eux aussi firent leur entrée dans le cercle que formaient les gardes avec un fraternel enlacement. Seulement, comme ils n'étaient point rois, ils n'avaient pu se donner si bonne contenance que Henri et Marguerite : La Mole était trop pâle, Coconnas était trop rouge. XXI - Les investigations   Le spectacle qui frappa les deux jeunes gens en entrant dans le cercle fut de ceux qu'on n'oublie jamais, ne les eût-on vus qu'une seule fois en un seul instant. Charles IX avait, comme nous l'avons dit, regardé défiler tous les gentilshommes enfermés dans la hutte des piqueurs et extraits l'un après l'autre par ses gardes. Lui et d'Alençon suivaient chaque mouvement d'un oeil avide, s'attendant à voir sortir le roi de Navarre à son tour. Leur attente avait été trompée. Mais ce n'était point assez, il fallait savoir ce qu'ils étaient devenus. Aussi, quand au bout de l'allée on vit apparaître les deux jeunes époux, d'Alençon pâlit, Charles sentit son coeur se dilater ; car instinctivement il désirait que tout ce que son frère l'avait forcé de faire retombât sur lui. - Il échappera encore, murmura François en pâlissant. En ce moment le roi fut saisi de douleurs d'entrailles si violentes qu'il lâcha la bride, saisit ses flancs des deux mains, et poussa des cris comme un homme en délire. Henri s'approcha avec empressement ; mais pendant le temps qu'il avait mis à parcourir les deux cents pas qui le séparaient de son frère, Charles était déjà remis. - D'où venez-vous, monsieur ? dit le roi avec une dureté de voix qui émut Marguerite. - Mais... de la chasse, mon frère, reprit-elle. - La chasse était au bord de la rivière et non dans la forêt. - Mon faucon s'est emporté sur un faisan, Sire, au moment où nous étions restés en arrière pour voir le héron. - Et où est le faisan ? - Le voici ; un beau coq, n'est-ce pas ? Et Henri, de son air le plus innocent, présenta à Charles son oiseau de pourpre, d'azur et d'or. - Ah ! ah ! dit Charles ; et ce faisan pris, pourquoi ne m'avez-vous pas rejoint ? - Parce qu'il avait dirigé son vol vers le parc, Sire ; de sorte que, lorsque nous sommes descendus sur le bord de la rivière, nous vous avons vu une demi-lieue en avant de nous, remontant déjà vers la forêt : alors nous nous sommes mis à galoper sur vos traces, car étant de la chasse de Votre Majesté nous n'avons pas voulu la perdre. - Et tous ces gentilshommes, reprit Charles, étaient-ils invités aussi ? - Quels gentilshommes, répondit Henri en jetant un regard circulaire et interrogatif autour de lui. - Eh ! vos huguenots, pardieu ! dit Charles ; dans tous les cas, si quelqu'un les a invités ce n'est pas moi. - Non, Sire, répondit Henri, mais c'est peut-être M. d'Alençon. - M. d'Alençon ! comment cela ? - Moi ? fit le duc. - Eh ! oui, mon frère, reprit Henri, n'avez-vous pas annoncé hier que vous étiez roi de Navarre ? Eh bien, les huguenots qui vous ont demandé pour roi viennent vous remercier, vous, d'avoir accepté la couronne, et le roi de l'avoir donnée. N'est-ce pas, messieurs ? - Oui ! oui ! crièrent vingt voix ; vive le duc d'Alençon ! vive le roi Charles ! - Je ne suis pas le roi des huguenots, dit François pâlissant de colère. Puis, jetant à la dérobée un regard sur Charles : Et j'espère bien, ajouta-t-il, ne l'être jamais. - N'importe ! dit Charles, vous saurez, Henri, que je trouve tout cela étrange. - Sire, dit le roi de Navarre avec fermeté, on dirait, Dieu me pardonne, que je subis un interrogatoire ? - Et si je vous disais que je vous interroge, que répondriez-vous ? - Que je suis roi comme vous, Sire, dit fièrement Henri, car ce n'est pas la couronne, mais la naissance qui fait la royauté, et que je répondrais à mon frère et à mon ami, mais jamais à mon juge. - Je voudrais bien savoir, cependant, murmura Charles, à quoi m'en tenir une fois dans ma vie. - Qu'on amène M. de Mouy, dit d'Alençon, vous le saurez. M. de Mouy doit être pris. - M. de Mouy est-il parmi les prisonniers ? demanda le roi. Henri eut un mouvement d'inquiétude, et échangea un regard avec Marguerite ; mais ce moment fut de courte durée. Aucune voix ne répondit. - M. de Mouy n'est point parmi les prisonniers, dit M. de Nancey ; quelques-uns de nos hommes croient l'avoir vu, mais aucun n'en est sûr. D'Alençon murmura un blasphème. - Eh ! dit Marguerite en montrant La Mole et Coconnas, qui avaient entendu tout le dialogue, et sur l'intelligence desquels elle croyait pouvoir compter, Sire, voici deux gentilshommes de M. d'Alençon, interrogez-

« XXI –Les investigations  Le spectacle quifrappa lesdeux jeunes gensenentrant danslecercle futdeceux qu’on n’oublie jamais,neles eût-on vusqu’une seulefoisenun seul instant. Charles IXavait, comme nousl’avons dit,regardé défilertouslesgentilshommes enfermésdanslahutte des piqueurs etextraits l’unaprès l’autre parsesgardes. Lui etd’Alençon suivaientchaquemouvement d’unœilavide, s’attendant àvoir sortir leroi deNavarre àson tour.

Leur attente avaitététrompée. Mais cen’était pointassez, ilfallait savoir cequ’ils étaient devenus. Aussi, quand aubout del’allée onvit apparaître lesdeux jeunes époux, d’Alençon pâlit,Charles sentitson cœur sedilater ; carinstinctivement ildésirait quetout ceque sonfrère l’avait forcédefaire retombât surlui. – Il échappera encore,murmura Françoisenpâlissant.

Encemoment leroi fut saisi dedouleurs d’entrailles si violentes qu’illâcha labride, saisitsesflancs desdeux mains, etpoussa descris comme unhomme endélire. Henri s’approcha avecempressement ; maispendant letemps qu’ilavait misàparcourir lesdeux cents pasqui le séparaient deson frère, Charles étaitdéjàremis. – D’où venez-vous, monsieur ?ditleroi avec unedureté devoix quiémut Marguerite. – Mais… delachasse, monfrère, reprit-elle. – La chasse étaitaubord delarivière etnon dans laforêt. – Mon faucon s’estemporté surunfaisan, Sire,aumoment oùnous étions restésenarrière pourvoirle héron.

–Et où est lefaisan ? – Le voici ; unbeau coq,n’est-ce pas ? Et Henri, deson airleplus innocent, présentaàCharles sonoiseau depourpre, d’azuretd’or. – Ah !ah !dit Charles ; etce faisan pris,pourquoi nem’avez-vous pasrejoint ? – Parce qu’ilavait dirigé sonvolvers leparc, Sire ; desorte que,lorsque noussommes descendus surlebord de larivière, nousvousavons vuune demi-lieue enavant denous, remontant déjàverslaforêt : alorsnousnous sommes misàgaloper survos traces, carétant delachasse deVotre Majesté nousn’avons pasvoulu laperdre. – Et tous cesgentilshommes, repritCharles, étaient-ils invitésaussi ? – Quels gentilshommes, réponditHenrienjetant unregard circulaire etinterrogatif autourdelui. – Eh !vos huguenots, pardieu!dit Charles ; danstouslescas, siquelqu’un lesainvités cen’est pasmoi. – Non, Sire,répondit Henri,maisc’estpeut-être M. d’Alençon. – M. d’Alençon !comment cela ? – Moi ? fitleduc. – Eh !oui, mon frère, reprit Henri, n’avez-vous pasannoncé hierquevous étiez roideNavarre ? Ehbien, les huguenots quivous ontdemandé pourroiviennent vousremercier, vous,d’avoir accepté lacouronne, etleroi de l’avoir donnée.

N’est-ce pas,messieurs ? – Oui !oui !crièrent vingtvoix ; viveleduc d’Alençon !vive leroi Charles ! – Je ne suis pasleroi des huguenots, ditFrançois pâlissant decolère.

Puis,jetant àla dérobée unregard sur Charles : Etj’espère bien,ajouta-t-il, nel’être jamais. – N’importe !dit Charles, voussaurez, Henri,quejetrouve toutcelaétrange. – Sire, ditleroi deNavarre avecfermeté, ondirait, Dieumepardonne, quejesubis uninterrogatoire ? – Et sije vous disais quejevous interroge, querépondriez-vous ? – Que jesuis roicomme vous,Sire,ditfièrement Henri,carcen’est paslacouronne, maislanaissance qui fait laroyauté, etque jerépondrais àmon frère etàmon ami,mais jamais àmon juge. – Je voudrais biensavoir, cependant, murmuraCharles,àquoi m’en tenirunefoisdans mavie. – Qu’on amène M. de Mouy, ditd’Alençon, vouslesaurez.

M. de Mouy doitêtrepris. – M. de Mouy est-ilparmi lesprisonniers ? demandaleroi.

Henri eutunmouvement d’inquiétude, et échangea unregard avecMarguerite ; maiscemoment futdecourte durée.Aucune voixnerépondit. – M. de Mouy n’estpoint parmi lesprisonniers, ditM. de Nancey ; quelques-unsdenos hommes croient l’avoir vu,mais aucun n’enestsûr. D’Alençon murmuraunblasphème. – Eh !dit Marguerite enmontrant LaMole etCoconnas, quiavaient entendu toutledialogue, etsur l’intelligence desquelsellecroyait pouvoir compter, Sire,voici deux gentilshommes deM. d’Alençon, interrogez-. »

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