Devoir de Philosophie

L'apprenti déposa la marmite sur le sol et activa le feu au moyen d'un soufflet.

Publié le 15/12/2013

Extrait du document

L'apprenti déposa la marmite sur le sol et activa le feu au moyen d'un soufflet. Son maître fourragea un instant parmi les charbons au moyen du crochet ; puis, le jugeant à point, il le saisit et se tourna vers l'étalon. Jacquemort se détourna et s'enfuit. Les poings serrés sur les oreilles, il courait, maladroit d'avoir les avantbras collés au cou, criant lui-même, pour ne pas percevoir les clameurs désespérées du cheval. Il s'arrêta après avoir atteint la petite place qu'il savait toute proche de l'église. Ses mains retombèrent le long de son corps. Le ruisseau rouge qu'il venait de traverser sur un léger pont de bois filait, sans rides, immobile et net. Un peu plus loin, La Gloïre nageait, haletant, pour ramener à sa barque un lambeau de chair pâle qui s'effilochait sous ses dents. V Hésitant, Jacquemort regarda autour de lui. Personne n'avait remarqué sa fuite éperdue. L'église était là, un uf, avec le vitrail bleu comme un trou par où le gober. Dedans, il y avait un murmure de chants. Jacquemort fit e tour et, sans se presser, gravit les marches. Il entra. Le curé, debout devant l'autel, battait la mesure. Une vingtaine d'enfants chantaient en choeur un cantique de première communion, dont les paroles astucieuses frappèrent vivement le psychiatre qui, pour mieux saisir se rapprocha de l'autel. L'aubépine, c'est une fleur La graisse, c'est du gras La m..., c'est du bonheur Jésus, c'est mieux que tout ça. L'herbe, c'est pour les bêtes La viande, c'est pour papa Les cheveux, c'est pour la tête Jésus, c'est mieux que tout ça. Jésus, c'est du rabiuxe Jésus, c'est en pluxe Jésus, c'est du luxe... Le psychiatre reconnut, à ce moment, que l'auteur du cantique devait être le curé et cessa de faire attention u poème, comptant qu'il lui serait facile d'en demander une copie. La musique avait ramené un peu de calme ans son esprit troublé. Ne voulant pas déranger le curé dans ses exercices répétitoires, il s'assit sans bruit. Il aisait frais dans l'église ; les voix des enfants résonnaient dans le vaste édifice, accrochant des échos aux entelures des parois. Laissant errer ses yeux çà et là, Jacquemort s'aperçut qu'on avait remis en place la chaire couvercle et que deux charnières volumineuses lui permettaient maintenant de se renverser sans rien casser. Il se rendit compte qu'il n'était pas revenu dans ce lieu depuis le baptême des trois salopiots, et pensa comme le temps passe, et le temps passait en vérité, car, déjà, l'ombre calmait la dureté du vitrail bleu, et les voix des enfants se faisaient plus douces ; ainsi va-t-il de la musique et de l'obscurité dont l'association est onctueuse et vous met un pansement sur l'âme. Il sortit apaisé et pensa qu'il fallait voir le maréchal-ferrant pour éviter de se faire bousculer par Clémentine au retour. Le soir allait venir. Jacquemort s'en fut vers la place du village, suivant du nez l'odeur de corne brûlée, qui flottait, imprécise. Il ferma les yeux pour ne pas se perdre et ses narines le guidèrent jusqu'à l'échoppe sombre où l'apprenti poussait un feu de forge à grand renfort de coups de soufflet. Devant la porte un cheval attendait son dernier fer. On venait de le passer à la tondeuse, sauf la partie inférieure des quatre membres, et Jacquemort admira ses belles fesses rondes, son dos un peu en creux, son poitrail puissant et sa crinière en brosse dure comme une bordure de buis. Le maréchal-ferrant sortit du trou noir. C'était bien lui que Jacquemort, une heure plus tôt, avait vu arriver par le chemin pour torturer l'étalon. - Bonjour, dit Jacquemort. - Bonjour, répondit le maréchal. Il tenait à la main droite, au bout d'une tenaille longue, un morceau de fer rouge. Au bout de son bras gauche, pendait un lourd marteau. - Lève la jambe, dit-il au cheval. Ce dernier obéit et fut ferré en un clin d'oeil. Une vive fumée bleue de corne carbonisée se dégageait et obscurcit l'air. Jacquemort toussa. Le cheval reposa son pied sur le sol et essaya son fer. - Ça va ? demanda le maréchal. Pas trop petit ? Le cheval fit signe que non, posa sa tête sur l'épaule du maréchal-ferrant, qui lui flatta les naseaux. Puis l'animal s'en alla d'un pas tranquille. Il y avait par terre des tas de petits paquets de poil, comme dans la boutique d'un coiffeur. - Ohé ! cria le maréchal à son apprenti. Tu vas venir balayer ça !... - Oui, dit la voix de l'apprenti. Le maréchal s'apprêtait à rentrer et Jacquemort lui posa la main sur le bras. - Dites... - Quoi ? demanda le maréchal. - Pourriez-vous passer à la maison de la falaise ? Un des enfants marche. - C'est pressé ? demanda l'homme. - Oui, dit Jacquemort. - Il peut pas venir ? - Non. - Je vais voir, dit le maréchal. Il entra dans sa forge, croisant l'apprenti armé d'un vieux balai, qui commença à rassembler le poil épars en un tas à l'aspect dégoûtant. Jacquemort s'avança jusque sur le seuil. Il faisait très sombre et on était aveuglé par le feu dont la tache orange éclaboussait les choses d'ombres disparates. Près de la tache, Jacquemort distingua l'enclume et, allongée à côté, sur un établi de fer, une forme vague, d'allure humaine, à laquelle la lumière venue de la porte accrochait un reflet gris métallique. Mais déjà le maréchal se retournait, ayant consulté son carnet et revenait vers lui. Il fronça le sourcil en voyant que Jacquemort s'était approché. - Restez dehors, dit-il. C'est pas un moulin, ici. - Je m'excuse, murmura Jacquemort, vivement intrigué. - Je passerai demain, dit le maréchal. Demain matin dix heures. Que tout soit prêt. J'ai guère de temps à perdre. - Entendu, dit Jacquemort. Et merci. L'homme rentra dans sa forge. L'apprenti avait fini de récolter le poil et y mit le feu. Jacquemort, prêt à tomber devant la puanteur, s'éloigna rapidement. Sur le chemin du retour, il remarqua une boutique de mercerie-couture. Il y avait, derrière la vitre, une vieille dame qu'on voyait distinctement dans la pièce éclairée. Elle était en train de finir une robe verte et blanche, garnie de broderie anglaise. Jacquemort s'arrêta, réfléchit et repartit. Un peu avant d'arriver à la maison, il se souvint que Clémentine portait exactement la même quelques jours plus tôt. Une robe rayée, vert et blanc, avec un col et des manchettes de broderie anglaise. Pourtant, Clémentine ne s'habillait pas au village ? Si ou non ?

« V Hésitant, Jacquemort regardaautourdelui.

Personne n’avaitremarqué safuite éperdue.

L’égliseétaitlà,un œuf, aveclevitrail bleucomme untrou paroùlegober.

Dedans, ilyavait unmurmure dechants.

Jacquemort fit le tour et,sans sepresser, gravitlesmarches.

Ilentra. Le curé, debout devantl’autel,battaitlamesure.

Unevingtaine d’enfantschantaient enchœur uncantique de première communion, dontlesparoles astucieuses frappèrentvivementlepsychiatre qui,pour mieux saisirse rapprocha del’autel.

L’aubépine, c’estunefleur La graisse, c’estdugras La m…, c’estdubonheur Jésus, c’estmieux quetout ça. L’herbe, c’estpour lesbêtes La viande, c’estpour papa Les cheveux, c’estpour latête Jésus, c’estmieux quetout ça. Jésus, c’estdurabiuxe Jésus, c’estenpluxe Jésus, c’estduluxe… Le psychiatre reconnut,àce moment, quel’auteur ducantique devaitêtrelecuré etcessa defaire attention au poème, comptant qu’illuiserait faciled’endemander unecopie.

Lamusique avaitramené unpeu decalme dans sonesprit troublé.

Nevoulant pasdéranger lecuré dans sesexercices répétitoires, ils’assit sansbruit.

Il faisait fraisdans l’église ; lesvoix desenfants résonnaient danslevaste édifice, accrochant deséchos aux dentelures desparois.

Laissant errersesyeux çàetlà, Jacquemort s’aperçutqu’onavaitremis enplace lachaire à couvercle etque deux charnières volumineuses luipermettaient maintenantdeserenverser sansriencasser.

Il se rendit compte qu’iln’était pasrevenu danscelieu depuis lebaptême destrois salopiots, etpensa comme le temps passe,etletemps passait envérité, car,déjà, l’ombre calmaitladureté duvitrail bleu,etles voix des enfants sefaisaient plusdouces ; ainsiva-t-il delamusique etde l’obscurité dontl’association estonctueuse et vous metunpansement surl’âme. Il sortit apaisé etpensa qu’ilfallait voirlemaréchal-ferrant pouréviter desefaire bousculer parClémentine au retour. Le soir allait venir.

Jacquemort s’enfutvers laplace duvillage, suivant dunez l’odeur decorne brûlée, qui flottait, imprécise.

Ilferma lesyeux pour nepas seperdre etses narines leguidèrent jusqu’àl’échoppe sombre où l’apprenti poussaitunfeu deforge àgrand renfort decoups desoufflet.

Devantlaporte uncheval attendait son dernier fer.Onvenait delepasser àla tondeuse, sauflapartie inférieure desquatre membres, et Jacquemort admirasesbelles fesses rondes, sondosunpeu encreux, sonpoitrail puissant etsa crinière en brosse durecomme unebordure debuis. Le maréchal-ferrant sortitdutrou noir.

C’était bienluique Jacquemort, uneheure plustôt,avait vuarriver par lechemin pourtorturer l’étalon. – Bonjour, ditJacquemort. – Bonjour, réponditlemaréchal. Il tenait àla main droite, aubout d’une tenaille longue,unmorceau defer rouge.

Aubout deson bras gauche, pendait unlourd marteau. – Lève lajambe, dit-ilaucheval. Ce dernier obéitetfut ferré enun clin d’œil.

Unevivefumée bleuedecorne carbonisée sedégageait et obscurcit l’air.Jacquemort toussa.Lecheval reposa sonpied surlesol etessaya sonfer. – Ça va ?demanda lemaréchal.

Pastrop petit ? Le cheval fitsigne quenon, posa satête surl’épaule dumaréchal-ferrant, quiluiflatta lesnaseaux.

Puis l’animal s’enallad’un pastranquille.

Ilyavait parterre destasdepetits paquets depoil, comme dansla. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles