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On entendait en bas un grondement immense, qui était la mer.

Publié le 30/10/2013

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On entendait en bas un grondement immense, qui était la mer. 'enfant voyait ce rêve. Subitement il se mit à trembler de tous ses membres, un frisson ruissela le long de son corps, il hancela, tressaillit, faillit tomber, se retourna, pressa son front de ses deux mains, comme si le front était un point d'appui, et, hagard, les cheveux au vent, descendant la colline grands pas, les yeux fermés, presque fantôme lui-même, il prit la fuite, laissant derrière lui ce tourment dans la nuit. I. BATAILLE ENTRE LA MORT ET LA NUIT 5 'homme Qui Rit VII. LA POINTE NORD DE PORTLAND Il courut jusqu'à essoufflement, au hasard, éperdu, dans la neige, dans la plaine, dans l'espace. Cette fuite le réchauffa. Il n avait besoin. Sans cette course et sans cette épouvante, il était mort. uand l'haleine lui manqua, il s'arrêta. Mais il n'osa point regarder en arrière. Il lui semblait que les oiseaux devaient le oursuivre, que le mort devait avoir dénoué sa chaîne et était probablement en marche du même côté que lui, et que sans doute le gibet lui-même descendait la colline, courant après le mort. Il avait peur de voir cela, s'il se retournait. Lorsqu'il eut repris un peu haleine, il se remit à fuir. e rendre compte des faits n'est point de l'enfance. Il percevait des impressions à travers le grossissement de l'effroi, mais ans les lier dans son esprit et sans conclure. Il allait n'importe où ni comment; il courait avec l'angoisse et la difficulté du onge. Depuis près de trois heures qu'il était abandonné, sa marche en avant, tout en restant vague, avait changé de but; auparavant il était en quête, à présent il était en fuite. Il n'avait plus faim, ni froid; il avait peur. Un instinct avait remplacé l'autre. Échapper était maintenant toute sa pensée. Échapper à quoi? à tout. La vie lui apparaissait de toutes parts autour de lui comme une muraille horrible. S'il eût pu s'évader des choses, il l'eût fait. ais les enfants ne connaissent point ce bris de prison qu'on nomme le suicide. Il courait. Il courut ainsi un temps indéterminé. Mais l'haleine s'épuise, la peur s'épuise aussi. Tout à coup, comme saisi d'un soudain accès d'énergie et d'intelligence, il s'arrêta, on eût dit qu'il avait honte de se sauver; il se roidit, frappa du pied, dressa résolument la tête, et se retourna. Il n'y avait plus ni colline, ni gibet, ni vol de corbeaux. e brouillard avait repris possession de l'horizon. 'enfant poursuivit son chemin. aintenant il ne courait plus, il marchait. Dire que cette rencontre d'un mort l'avait fait un homme, ce serait limiter 'impression multiple et confuse qu'il subissait. Il y avait dans cette impression beaucoup plus et beaucoup moins. Ce ibet, fort trouble dans ce rudiment de compréhension qui était sa pensée, restait pour lui une apparition. Seulement, ne terreur domptée étant un affermissement, il se sentit plus fort. S'il eût été d'âge à se sonder, il eût trouvé en lui mille utres commencements de méditation, mais la réflexion des enfants est informe, et tout au plus sentent-ils 'arrière-goût amer de cette chose obscure pour eux que l'homme plus tard appelle l'indignation. joutons que l'enfant a ce don d'accepter très vite la fin d'une sensation. Les contours lointains et fuyants, qui font 'amplitude des choses douloureuses, lui échappent. L'enfant est défendu par sa limite, qui est la faiblesse, contre les motions trop complexes. Il voit le fait, et peu de chose à côté. La difficulté de se contenter des idées partielles n'existe as pour l'enfant. Le procès de la vie ne s'instruit que plus tard, quand l'expérience arrive avec son dossier. Alors il y a onfrontation des groupes de faits rencontrés, l'intelligence renseignée et grandie compare, les souvenirs du jeune âge eparaissent sous les passions comme le palimpseste sous les ratures, ces souvenirs sont des points d'appui pour la ogique, et ce qui était vision dans le cerveau de l'enfant devient syllogisme dans le cerveau de l'homme. Du reste 'expérience est diverse, et VII. LA POINTE NORD DE PORTLAND 6 'homme Qui Rit ourne bien ou mal selon les natures. Les bons mûrissent. Les mauvais pourrissent. 'enfant avait bien couru un quart de lieue, et marché un autre quart de lieue. Tout à coup il sentit que son estomac le iraillait. Une pensée, qui tout de suite éclipsa la hideuse apparition de la colline, lui vint violemment: manger. Il y a dans 'homme une bête, heureusement; elle le ramène à la réalité. ais quoi manger? mais où manger? mais comment manger? l tâta ses poches. Machinalement, car il savait bien qu'elles étaient vides. uis il hâta le pas. Sans savoir où il allait, il hâta le pas vers le logis possible. ette foi à l'auberge fait partie des racines de la providence dans l'homme. roire à un gîte, c'est croire en Dieu. u reste, dans cette plaine de neige, rien qui ressemblât à un toit. 'enfant marchait, la lande continuait, nue à perte de vue. Il n'y avait jamais eu sur ce plateau d'habitation humaine. C'est au bas de la falaise, dans des trous de roche, que ogeaient jadis, faute de bois pour bâtir des cabanes, les anciens habitants primitifs, qui avaient pour arme une fronde, our chauffage la fiente de boeuf séchée, pour religion l'idole Heil debout dans une clairière à Dorchester, et pour ndustrie la pêche de ce faux corail gris que les gallois appelaient plin et les grecs isidis plocamos. L'enfant s'orientait du mieux qu'il pouvait. Toute la destinée est un carrefour, le choix des directions est redoutable, ce etit être avait de bonne heure l'option entre les chances obscures. Il avançait cependant; mais, quoique ses jarrets emblassent d'acier, il commençait à se fatiguer. Pas de sentiers dans cette plaine; s'il y en avait, la neige les avait effacés. 'instinct, il continuait à dévier vers l'est. Des pierres tranchantes lui avaient écorché les talons. S'il eût fait jour, on eût pu oir, dans les traces qu'il laissait sur la neige, des taches roses qui étaient son sang. l ne reconnaissait rien. Il traversait le plateau de Portland du sud au nord, et il est probable que la bande avec laquelle il tait venu, évitant les rencontres, l'avait traversé de l'ouest l'est. Elle était vraisemblablement partie, dans quelque arque de pêcheur ou de contrebandier, d'un point quelconque de la côte d'Uggescombe, tel que Sainte-Catherine Chap, u Swancry, pour aller à Portland retrouver l'ourque qui l'attendait, et elle avait dû débarquer dans une des anses de eston pour aller se rembarquer dans une des criques d'Eston. Cette direction-l était coupée en croix par celle que uivait maintenant l'enfant. Il était impossible qu'il reconnût son chemin. e plateau de Portland a çà et là de hautes ampoules ruinées brusquement par la côte et coupées à pic sur la mer. 'enfant errant arriva sur un de ces points culminants, et s'y arrêta, espérant trouver plus d'indications dans plus 'espace, cherchant à voir. Il avait devant lui, pour tout horizon, une vaste opacité livide. Il l'examina avec attention, et, ous la fixit de son regard, elle devint moins indistincte. Au fond d'un lointain pli de terrain, vers l'est, au bas de cette ividit opaque, sorte d'escarpement mouvant et blême qui ressemblait une falaise de la nuit, rampaient et flottaient de agues lambeaux noirs, espèces d'arrachements diffus. Cette opacit blafarde, c'était du brouillard; ces lambeaux noirs, 'étaient des fumées. Où il y a des fumées, il y a des hommes. L'enfant se dirigea de ce côté. l entrevoyait à quelque distance une descente, et au pied de la descente, parmi des configurations informes VII. LA OINTE NORD DE PORTLAND 7 'homme Qui Rit e rochers que la brume estompait, une apparence de banc de sable ou de langue de terre reliant probablement aux laines de l'horizon le plateau qu'il venait de traverser. Il fallait évidemment passer par là. l était arrivé en effet à l'isthme de Portland, alluvion diluvienne qu'on appelle Chess-Hill. l s'engagea sur le versant du plateau. a pente était difficile et rude. C'était, avec moins d'âpret pourtant, le revers de l'ascension qu'il avait faite pour sortir de a crique. Toute montée se solde par une descente. Après avoir grimpé, il dégringolait. l sautait d'un rocher à l'autre, au risque d'une entorse, au risque d'un écroulement dans la profondeur indistincte. Pour e retenir dans les glissements de la roche et de la glace, il prenait à poignées les longues lanières des landes et des ajoncs leins d'épines, et toutes ces pointes lui entraient dans les doigts. Par instants, il trouvait un peu de rampe douce, et escendait en reprenant haleine, puis l'escarpement se refaisait, et pour chaque pas il fallait un expédient. Dans les escentes de précipice, chaque mouvement est la solution d'un problème. Il faut être adroit sous peine de mort. Ces roblèmes, l'enfant les résolvait avec un instinct dont un singe eût pris note et une science qu'un saltimbanque eût dmirée. La descente était abrupte et longue, Il en venait à bout néanmoins. eu à peu, il approchait de l'instant où il prendrait terre sur l'isthme entrevu. ar intervalles, tout en bondissant ou en dévalant de rocher en rocher, il prêtait l'oreille, avec un dressement de daim ttentif. Il écoutait au loin, à sa gauche, un bruit vaste et faible, pareil à un profond chant de clairon. l y avait dans l'air en effet un remuement de souffles précédant cet effrayant vent boréal, qu'on entend venir du pôle omme une arrivée de trompettes. En même temps, l'enfant sentait par moments sur son front, sur ses yeux, sur ses oues, quelque chose qui ressemblait à des paumes de mains froides se posant sur son visage. 'étaient de larges flocons glacés, ensemencés d'abord mollement dans l'espace, puis tourbillonnant, et annonçant 'orage de neige. L'enfant en était couvert. L'orage de neige qui, depuis plus d'une heure déjà, était sur la mer, ommençait à gagner la terre. Il envahissait lentement les plaines. Il entrait obliquement par le nord-ouest dans le lateau de Portland. LIVRE DEUXIÈME. L'OURQUE EN MER . LES LOIS QUI SONT HORS DE L'HOMME La tempête de neige est une des choses inconnues de la mer. C'est le plus obscur des météores; obscur dans tous les sens u mot. C'est un mélange de brouillard et de tourmente, et de nos jours on ne se rend pas bien compte encore de ce hénomène. De là beaucoup de désastres. n veut tout expliquer par le vent et par le flot. Or dans l'air il y a une force qui n'est pas le vent, et dans l'eau il y a une orce qui n'est pas le flot. Cette force, la même dans l'air et dans l'eau, c'est l'effluve. L'air et l'eau sont deux masses iquides, à peu près identiques, et rentrant l'une dans l'autre par la condensation et la dilatation, tellement que respirer c'est boire; l'effluve seul est fluide. Le vent et le flot ne sont que des poussées; l'effluve est un courant. Le vent est visible ar les nuées, le flot est visible par l'écume; l'effluve est invisible. De temps en temps pourtant il dit: je suis là. Son Je suis là, c'est un coup de tonnerre. La tempête de neige offre un problème analogue au brouillard sec. Si l'éclaircissement de la callina des espagnols et du quobar des éthiopiens est possible, à coup sûr, cet éclaircissement se fera par l'observation attentive de l'effluve magnétique. LIVRE DEUXIÈME. L'OURQUE EN MER 38 L'homme Qui Rit Sans l'effluve, une foule de faits demeurent énigmatiques. A la rigueur, les changements de vitesse du vent, se modifiant dans la tempête de trois pieds par seconde à deux cent vingt pieds, motiveraient les variantes de la vague allant de trois pouces, mer calme, à trente-six pieds, mer furieuse; à la rigueur, l'horizontalité des souffles, même en bourrasque, fait comprendre comment une lame de trente pieds de haut peut avoir quinze cents pieds de long; mais pourquoi les vagues du Pacifique sont-elles quatre fois plus hautes près de l'Amérique que près de l'Asie, c'est-à-dire plus hautes à l'ouest qu'à l'est; pourquoi est-ce le contraire dans l'Atlantique; pourquoi, sous l'équateur, est-ce le milieu de la mer qui est le plus haut; d'où viennent ces déplacements de la tumeur de l'océan? c'est ce que l'effluve magnétique, combiné avec la rotation terrestre et l'attraction sidérale, peut seul expliquer. Ne faut-il pas cette complication mystérieuse pour rendre raison d'une oscillation du vent allant, par exemple, par l'ouest, du sud-est au nord-est, puis revenant brusquement, par le même grand tour, du nord-est au sud-est, de façon à faire en trente-six heures un prodigieux circuit de cinq cent soixante degrés, ce qui fut le prodrome de la tempête de neige du 19 mars 1867? Les vagues de tempête de l'Australie atteignent jusqu'à quatre vingts pieds de hauteur; cela tient au voisinage du pôle. La tourmente en ces latitudes résulte moins du bouleversement des souffles que de la continuité des décharges électriques sous-marines; en l'année 1866, le câble transatlantique a ét régulièrement troublé dans sa fonction deux heures sur vingt-quatre, de midi à deux heures, par une sorte de fièvre intermittente. De certaines compositions et décompositions de forces produisent les phénomènes, et s'imposent aux calculs du marin à peine de naufrage. Le jour où la navigation, qui est une routine, deviendra une mathémathique, le jour où l'on cherchera savoir, par exemple, pourquoi, dans nos régions, les vents chauds viennent parfois du nord et les vents froids du midi, le jour o l'on comprendra que les décroissances de température sont proportionnées aux profondeurs océaniques, le jour où l'on aura présent à l'esprit que le globe est un gros aimant polarisé dans l'immensité, avec deux axes, un axe de rotation et un axe d'effluves, s'entrecoupant au centre de la terre, et que les pôles magnétiques tournent autour des pôles géographiques; quand ceux qui risquent leur vie voudront la risquer scientifiquement, quand on naviguera sur de l'instabilité étudiée, quand le capitaine sera un météorologue, quand le pilote sera un chimiste, alors bien des catastrophes seront évitées. La mer est magnétique autant qu'aquatique; un océan de forces flotte, inconnu, dans l'océan des flots; à vau-l'eau, pourrait-on dire. Ne voir dans la mer qu'une masse d'eau, c'est ne pas voir la mer; la mer est un va-et-vient de fluide autant qu'un flux et reflux de liquide; les attractions la compliquent plus encore peut-être que les ouragans; l'adhésion moléculaire, manifestée, entre autres phénomènes, par l'attraction capillaire, microscopique pour nous, participe, dans l'océan, de la grandeur des étendues; et l'onde des effluves, tantôt aide, tantôt contrarie l'onde des airs et l'onde des eaux. Qui ignore la loi électrique ignore la loi hydraulique; car l'une pénètre l'autre. Pas d'étude plus ardue, il est vrai, ni plus obscure; elle touche à l'empirisme comme l'astronomie touche à l'astrologie. Sans cette étude pourtant, pas de navigation. Cela dit, passons. Un des composés les plus redoutables de la mer, c'est la tourmente de neige. La tourmente de neige est surtout magnétique. Le pôle la produit comme il produit l'aurore boréale; il est dans ce brouillard comme il est dans cette lueur; et, dans le flocon de neige comme dans la strie de flamme, l'effluve est visible. Les tourmentes sont les crises de nerfs et les accès de délire de la mer. La mer a ses migraines. On peut assimiler les tempêtes aux maladies. Les unes sont mortelles, d'autres ne le sont point; on se tire de celle-ci et non de celle-là. La bourrasque de neige passe pour être habituellement mortelle. Jarabija, un des pilotes de Magellan, la qualifiait «une nuée sortie du mauvais côté du diable[1]«. [1] Una nube salida del malo lado del diabolo. Surcouf disait: Il y a du trousse-galant dans cette tempête-là . LIVRE DEUXIÈME. L'OURQUE EN MER 39 L'homme Qui Rit Les anciens navigateurs espagnols appelaient cette sorte de bourrasque la nevada au moment des flocons, et la helada au moment des grêlons. Selon eux il tombait du ciel des chauves-souris avec la neige. es tempêtes de neige sont propres aux latitudes polaires. Pourtant, parfois elles glissent, on pourrait presque dire elles

« Il n'y avait jamais eusur ceplateau d'habitation humaine.C'estaubas delafalaise, dansdestrous deroche, que logeaient jadis,faute debois pour bâtirdescabanes, lesanciens habitants primitifs,quiavaient pourarme unefronde, pour chauffage lafiente deboeuf séchée, pourreligion l'idoleHeildebout dansuneclairière àDorchester, etpour industrie lapêche decefaux corail grisque lesgallois appelaient plin et les grecs isidis plocamos . L'enfant s'orientait dumieux qu'ilpouvait.

Touteladestinée estuncarrefour, lechoix desdirections estredoutable, ce petit êtreavait debonne heurel'option entreleschances obscures.

Ilavançait cependant; mais,quoique sesjarrets semblassent d'acier,ilcommençait àse fatiguer.

Pasdesentiers danscette plaine; s'ilyen avait, laneige lesavait effacés. D'instinct, ilcontinuait àdévier versl'est.

Despierres tranchantes luiavaient écorché lestalons.

S'ileût faitjour, oneût pu voir, dans lestraces qu'illaissait surlaneige, destaches rosesquiétaient sonsang. Il ne reconnaissait rien.Iltraversait leplateau dePortland dusud aunord, etilest probable quelabande aveclaquelle il était venu, évitant lesrencontres, l'avaittraversé del'ouest l'est.Elleétait vraisemblablement partie,dansquelque barque depêcheur oudecontrebandier, d'unpoint quelconque delacôte d'Uggescombe, telque Sainte−Catherine Chap, ou Swancry, pouralleràPortland retrouver l'ourquequil'attendait, etelle avait dûdébarquer dansunedesanses de Weston pourallerserembarquer dansunedescriques d'Eston.

Cettedirection−l étaitcoupée encroix parcelle que suivait maintenant l'enfant.Ilétait impossible qu'ilreconnût sonchemin. Le plateau dePortland açà etlàde hautes ampoules ruinéesbrusquement parlacôte etcoupées àpic sur lamer. L'enfant errantarrivasurundeces points culminants, ets'y arrêta, espérant trouverplusd'indications dansplus d'espace, cherchant àvoir.

Ilavait devant lui,pour touthorizon, unevaste opacité livide.Ill'examina avecattention, et, sous lafixit deson regard, elledevint moinsindistincte.

Aufond d'unlointain plide terrain, versl'est, aubas decette lividit opaque, sorted'escarpement mouvantetblême quiressemblait unefalaise delanuit, rampaient etflottaient de vagues lambeaux noirs,espèces d'arrachements diffus.Cetteopacit blafarde, c'étaitdubrouillard; ceslambeaux noirs, c'étaient desfumées.

Oùilya des fumées, ilya des hommes.

L'enfantsedirigea dececôté. Il entrevoyait àquelque distance unedescente, etau pied deladescente, parmidesconfigurations informesVII.LA POINTE NORDDEPORTLAND 37 L'homme QuiRit de rochers quelabrume estompait, uneapparence debanc desable oudelangue deterre reliant probablement aux plaines del'horizon leplateau qu'ilvenait detraverser.

Ilfallait évidemment passerparlà. Il était arrivé eneffet àl'isthme dePortland, alluviondiluvienne qu'onappelle Chess−Hill. Il s'engagea surleversant duplateau. La pente étaitdifficile etrude.

C'était, avecmoins d'âpret pourtant, lerevers del'ascension qu'ilavait faitepour sortir de la crique.

Toutemontée sesolde parune descente.

Aprèsavoirgrimpé, ildégringolait. Il sautait d'unrocher àl'autre, aurisque d'uneentorse, aurisque d'unécroulement danslaprofondeur indistincte.Pour se retenir danslesglissements delaroche etde laglace, ilprenait àpoignées leslongues lanières deslandes etdes ajoncs pleins d'épines, ettoutes cespointes luientraient danslesdoigts.

Parinstants, iltrouvait unpeu derampe douce, et descendait enreprenant haleine,puisl'escarpement serefaisait, etpour chaque pasilfallait unexpédient.

Dansles descentes deprécipice, chaquemouvement estlasolution d'unproblème.

Ilfaut être adroit souspeine demort.

Ces problèmes, l'enfantlesrésolvait avecuninstinct dontunsinge eûtpris note etune science qu'unsaltimbanque eût admirée.

Ladescente étaitabrupte etlongue, Ilen venait àbout néanmoins. Peu àpeu, ilapprochait del'instant oùilprendrait terresurl'isthme entrevu. Par intervalles, toutenbondissant ouendévalant derocher enrocher, ilprêtait l'oreille, avecundressement dedaim attentif.

Ilécoutait auloin, àsa gauche, unbruit vaste etfaible, pareilàun profond chantdeclairon. Il yavait dansl'aireneffet unremuement desouffles précédant ceteffrayant ventboréal, qu'onentend venirdupôle comme unearrivée detrompettes.

Enmême temps, l'enfant sentaitparmoments surson front, surses yeux, surses joues, quelque chosequiressemblait àdes paumes demains froides seposant surson visage. C'étaient delarges flocons glacés,ensemencés d'abordmollement dansl'espace, puistourbillonnant, etannonçant l'orage deneige.

L'enfant enétait couvert.

L'oragedeneige qui,depuis plusd'une heure déjà,étaitsurlamer, commençait àgagner laterre.

Ilenvahissait lentementlesplaines.

Ilentrait obliquement parlenord−ouest dansle plateau dePortland. LIVRE DEUXIÈME.

L'OURQUEENMER I.

LES LOIS QUISONT HORS DEL'HOMME La tempête deneige estune deschoses inconnues delamer.

C'est leplus obscur desmétéores; obscurdanstouslessens du mot.

C'est unmélange debrouillard etde tourmente, etde nos jours onneserend pasbien compte encoredece phénomène.

Delàbeaucoup dedésastres. On veut toutexpliquer parlevent etpar leflot.

Ordans l'airilya une force quin'est paslevent, etdans l'eau ilya une force quin'est pasleflot.

Cette force, lamême dansl'airetdans l'eau, c'estl'effluve.

L'airetl'eau sontdeux masses liquides, àpeu près identiques, etrentrant l'unedansl'autre parlacondensation etladilatation, tellementquerespirer. »

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