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Trop plein d'aventures pour qu'on puisse les résumer brièvement.

Publié le 15/12/2013

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Trop plein d'aventures pour qu'on puisse les résumer brièvement. Chapitre 16 Il n'y a pas, dans toute l'année, de mois où la nature ait un plus joli visage que durant le mois d'août. Le printemps a bien des charmes, et mai, certainement, est frais et joli, et son éclat est rehaussé par le contraste des frimas qui viennent de finir. Août n'a pas de semblables avantages : lorsqu'il arrive, nos sens sont accoutumés à la pureté du ciel, au verdoiement des prairies, au parfum embaumé des fleurs ; le brouillard, le givre, la neige et les glaces sont effacés de notre mémoire, comme de la surface de la terre. Et cependant, quelle saison charmante ! Les champs, les vergers, sont animés par la voix, par la présence des travailleurs ; les arbres, chargés de fruits, inclinent leurs branches jusqu'à terre ; les blés, réunis en gerbes gracieuses ou se balançant au souffle du zéphyr comme pour agacer la faucille, couvrent le paysage d'une teinte dorée ; une douce langueur semble répandue sur toute la nature, et l'on dirait même que la molle influence de la saison s'étend jusque sur les charrettes dont l'oeil aperçoit le mouvement uniforme à travers les champs moissonnés, sans que l'oreille soit déchirée par aucun bruit inharmonieux. Pendant que la voiture publique roule rapidement à travers les champs et les vergers qui bordent la route, des groupes de femmes et d'enfants, empilant des fruits dans des corbeilles ou recueillant les épis de blé dispersés, suspendent un instant leur travail, abritent leurs visages brunis par le soleil avec une main plus brune encore, et suivent les voyageurs d'un regard curieux ; quelque vigoureux bambin, trop jeune pour travailler, mais trop turbulent pour être laissé à la maison, se hisse sur le bord du grand panier où il a été emprisonné, et gigote et braille avec délices ; le moissonneur arrête sa faucille, se redresse, croise les bras et contemple la voiture qui passe auprès de lui comme un tourbillon ; les lourds chevaux de son char rustique suivent l'attelage brillant et animé d'un regard endormi, qui dit aussi clairement que le peut dire un regard de cheval : « Tout cela est fort joli à regarder, mais marcher lentement dans une terre pesante vaut encore mieux, après tout, que de galoper si chaudement sur une route pleine de poussière ! » Cependant les voyageurs volent, et, profitant d'un détour, jettent un dernier coup d'oeil derrière eux : les femmes et les enfants ont repris leur travail ; le moissonneur s'est courbé de nouveau sur sa faucille ; les chevaux de labour poursuivent leur marche mesurée ; et tout se montre, comme tout à l'heure, plein de vie et de mouvement. Une semblable scène ne pouvait manquer d'influer sur l'esprit délicat et bien réglé de M. Pickwick. Préoccupé de la résolution qu'il avait formée de démasquer le véritable caractère de Jingle, en quelque lieu qu'il pût le découvrir, il était demeuré d'abord taciturne et rêveur, réfléchissant aux moyens qu'il devait employer pour réussir dans son projet ; mais peu à peu son attention fut attirée par les objets environnants, et à la fin il y prit autant de plaisir que s'il avait entrepris ce voyage pour la cause la plus agréable du monde. « Délicieux paysage, Sam ! dit-il à son domestique. - Enfonce les toits et les cheminées, monsieur, répondit celui-ci en touchant son chapeau. - En effet, reprit M. Pickwick avec un sourire, je suppose que vous n'avez guère vu, toute votre vie, que des toits et des cheminées, du mortier et des briques. - Je n'ai pas toujours été valet d'auberge, monsieur, répliqua Sam en secouant la tête. J'ai été autrefois garçon de roulier. - Quand cela ? - Quand j'ai été jeté la tête la première dans le monde pour jouer à saute-mouton avec ses soucis. Donc, pour commencer, j'ai été garçon d'un charretier, et puis ensuite d'un roulier, et puis ensuite commissionnaire, et puis ensuite valet d'auberge. À présent v'là que je suis domestique d'un gentleman. Je serai peut-être un gentleman moi-même un de ces jours, avec ma pipe dans ma bouche et un berceau dans mon jardin. Qui sait ? je n'en serais pas surpris, moi. - Vous êtes un véritable philosophe, Sam. - Je crois que ça court dans la famille, monsieur. Mon père est dans cette profession-là maintenant. Quand ma belle-mère le tarabuste, il se met à siffler ; elle s'enlève comme une soupe au lait, et elle lui casse sa pipe : il s'en va pacifiquement, et il en rapporte une autre ; alors elle braille tant qu'elle peut, et elle tombe dans des attaques de nerfs : il ne bouge pas, il fume confortablement jusqu'à ce qu'elle revienne. C'est ça de la philosophie, monsieur !... - Ou du moins un très-bon équivalent, répondit en riant M. Pickwick. Cela doit vous avoir été fort utile dans votre vie errante, Sam. - Utile, monsieur ! vous pouvez bien le dire. Après que je me suis sauvé d'avec le charretier et avant que j'aie rentré avec le roulier, j'ai couché pendant une quinzaine dans un appartement sans meubles. - Un appartement sans meubles ! - Oui, les arches à sec du pont de Waterloo. Jolie chambre à coucher ; à dix minutes du centre des affaires. Seulement s'il y a quelque chose à lui reprocher, c'est qu'elle est un peu aérée. J'ai vu là des drôles de spectacles. - Ha ! je le suppose, dit M. Pickwick d'un air plein d'intérêt. - Des spectacles qui perceraient votre tendre coeur, monsieur, et qui ressortiraient de l'autre côté. On n'y trouve pas les mendiants réguliers ; vous pouvez vous fier à ceux-là pour savoir se tirer d'affaire. De jeunes mendiants, mâles et femelles, qui n'ont pas encore fait leur chemin dans la profession, s'y logent quelquefois ; mais c'est généralement les pauvres créatures sans asile, éreintées, mourant de faim, qui se roulent dans les coins sombres de ces tristes places ; les pauvres créatures qui ne peuvent pas se repasser la corde de deux pence. - Dites-moi, Sam, qu'est-ce que c'est que la corde de deux pence ? - C'est une auberge, monsieur, où les lits coûtent deux pence par nuit... - Pourquoi donnent-ils aux lits le nom de cordes ? - Que vous êtes donc jeune, monsieur ! Quand les ladies et les gentlemen qui tiennent ces hôtels-là ont ouvert leur bazar, ils faisaient les lits sur le plancher, mais ils ne faisaient pas leurs affaires. Au lieu de prendre un somme raisonnable pour deux pence, les logeurs s'y vautraient la moitié de la journée. Aussi, maintenant, ils ont deux cordes, éloignées d'à peu près six pieds, et à trois pieds du plancher, qui vont tout du long de la chambre, et les lits sont faits avec des grosses toiles tendues en travers. - Eh bien ? - Eh bien ! l'avantage du plan est visible. Tous les matins, à six heures, ils laissent aller une des cordes, et patatra, v'là tous les logeurs par terre. Ça les réveille fameusement, ils se relèvent de bonne humeur, et ils s'en vont comme des jolis garçons... Demande pardon, monsieur, dit Sam, en interrompant tout à coup son verbeux discours, c'est-il Bury Saint-Edmunds qu'est là-bas ? - Précisément, répondit M. Pickwick. » Bientôt après la voiture roula dans les rues propres et bien pavées d'une jolie petite ville, et s'arrêta devant une auberge située au milieu de la grande route, presque en face de l'antique abbaye. « Voici l'Ange, dit M. Pickwick, en regardant l'enseigne. Nous descendons ici, Sam. Mais il faut prendre quelques précautions. Demandez une chambre particulière et ne mentionnez pas mon nom ; vous comprenez. - Compris ! monsieur, » répondit Sam, avec un clin d'oeil intelligent. Il tira le portemanteau du coffre de derrière, où il avait été jeté à Eatanswill, et disparut pour faire sa commission. Une chambre particulière fut facilement retenue, et M. Pickwick y fut introduit sans délai. « Maintenant, Sam, dit M. Pickwick, la première chose à faire... - C'est de commander le dîner, monsieur, suggéra Sam : il est fort tard, monsieur.

« moi. – Vous êtesunvéritable philosophe, Sam. – Je crois queçacourt danslafamille, monsieur.

Monpèreestdans cette profession-là maintenant.

Quandmabelle-mère letarabuste, ilse met àsiffler ; elles’enlève commeune soupe aulait, etelle luicasse sapipe : ils’en vapacifiquement, etilen rapporte uneautre ; alors ellebraille tantqu’elle peut,etelle tombe dansdesattaques denerfs : ilne bouge pas,il fume confortablement jusqu’àcequ’elle revienne.

C’estçade laphilosophie, monsieur !… – Ou dumoins untrès-bon équivalent, réponditenriant M. Pickwick.

Celadoitvous avoir été fort utile dans votre vieerrante, Sam. – Utile, monsieur ! vouspouvez bienledire.

Après quejeme suis sauvé d’avec lecharretier et avant quej’aie rentré avecleroulier, j’aicouché pendant unequinzaine dansunappartement sans meubles. – Un appartement sansmeubles ! – Oui, lesarches àsec dupont deWaterloo.

Joliechambre àcoucher ; àdix minutes ducentre des affaires.

Seulement s’ilya quelque choseàlui reprocher, c’estqu’elle estunpeu aérée.

J’ai vu làdes drôles despectacles. – Ha ! jelesuppose, ditM. Pickwick d’unairplein d’intérêt. – Des spectacles quiperceraient votretendre cœur,monsieur, etqui ressortiraient del’autre côté.

Onn’y trouve paslesmendiants réguliers ;vouspouvez vousfieràceux-là poursavoir se tirer d’affaire.

Dejeunes mendiants, mâlesetfemelles, quin’ont pasencore faitleur chemin dans laprofession, s’ylogent quelquefois ; maisc’estgénéralement lespauvres créatures sans asile, éreintées, mourantdefaim, quiseroulent danslescoins sombres deces tristes places ; les pauvres créatures quinepeuvent passerepasser lacorde dedeux pence. – Dites-moi, Sam,qu’est-ce quec’est quelacorde dedeux pence ? – C’est uneauberge, monsieur, oùles lits coûtent deuxpence parnuit… – Pourquoi donnent-ils auxlitslenom de cordes  ? – Que vous êtesdonc jeune, monsieur ! Quandlesladies etles gentlemen quitiennent ces hôtels-là ontouvert leurbazar, ilsfaisaient leslits sur leplancher, maisilsne faisaient pasleurs affaires.

Aulieu deprendre unsomme raisonnable pourdeux pence, leslogeurs s’yvautraient la moitié delajournée.

Aussi,maintenant, ilsont deux cordes, éloignées d’àpeu près sixpieds, et àtrois pieds duplancher, quivont toutdulong delachambre, etles lits sont faitsavec des grosses toilestendues entravers. – Eh bien ? – Eh bien ! l’avantage duplan estvisible.

Touslesmatins, àsix heures, ilslaissent allerunedes cordes, etpatatra, v’làtous leslogeurs parterre.

Çales réveille fameusement, ilsse relèvent de bonne humeur, etils s’en vont comme desjolis garçons… Demande pardon,monsieur, ditSam, en interrompant toutàcoup sonverbeux discours, c’est-ilBurySaint-Edmunds qu’estlà-bas ? – Précisément, réponditM. Pickwick. » Bientôt aprèslavoiture rouladanslesrues propres etbien pavées d’unejoliepetite ville,et s’arrêta devantuneauberge situéeaumilieu delagrande route,presque enface del’antique abbaye.

« Voici l’Ange, ditM. Pickwick, enregardant l’enseigne.

Nousdescendons ici,Sam.

Maisilfaut prendre quelques précautions.

Demandezunechambre particulière etne mentionnez pasmon nom ; vouscomprenez. – Compris ! monsieur, » réponditSam,avecunclin d’œil intelligent.

Iltira leportemanteau du coffre dederrière, oùilavait étéjeté àEatanswill, etdisparut pourfairesacommission.

Une chambre particulière futfacilement retenue,etM. Pickwick yfut introduit sansdélai. « Maintenant, Sam,ditM. Pickwick, lapremière choseàfaire… – C’est decommander ledîner, monsieur, suggéraSam :ilest fort tard, monsieur.. »

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