Devoir de Philosophie

Toute vérité est-elle bonne à dire?

Publié le 20/07/2005

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La vérité n'est-elle pas un droit égal pour tout être raisonnable ? 
b)    Tout le monde n'a pas droit à la vérité
Poser que toute vérité est bonne à dire = principe qui tend à faire de l'honnêteté un devoir. Or, comme le souligne Constant, cité par Kant dans D'un prétendu droit de mentir par humanité : « Dire la vérité est un devoir. Qu'est-ce qu'un devoir ? L'idée de devoir est inséparable de celle de droits : un devoir est ce qui, dans un être, correspond aux droits d'un autre. Là où il n'y a pas de droits, il n'y a pas de devoirs. Dire la vérité n'est donc un devoir qu'envers ceux qui ont droit à la vérité. « illustration : Les misérables, de V. Hugo : Soeur Simplice, une nonne (!) cache Valjean et ne dit pas la vérité à Javert venu le trouver : elle dit qu'elle est seule et qu'elle n'a vu personne. Taire la vérité = bonne action car l'arrestation de Valjean, bien que voulue par la justice (incarnée par l'esprit borné et têtu de Javert), aurait été, aux yeux de soeur Simplice (au regard de la morale divine) la pire injustice.
Dire toujours la vérité est-il exigible moralement ? Pour le commun, il semble que non. Pourtant la vérité reste une valeur, un idéal. Et nous admettons volontiers qu’il faut refuser le mensonge. La problématique est donc de savoir si la vérité n’est qu'une illusion ou bien reste-elle une idée vitale et nécessaire ? On peut dès lors se demander en quoi la vérité est une valeur, pourquoi elle doit être recherchée, pourquoi il faudrait, par exemple, préférer la vérité qui dérange à l’illusion qui rassure et refuser le mensonge… : toute vérité est-elle bonne à dire ?

« Kant, Métaphysique des moeurs , « doctrine de la vertu », §9 « un homme qui ne croit pas lui-même à ce qu'il dit à un autre[...] a encore moins de valeur que s'il était une simple chose ». EXPLICATION : une chose a une valeur qui est instrumentale : la chose sert, elle a une utilité qui lui vient de sa fin. Au contraire, l'homme malhonnête, refusant de dire la vérité (croire à ce qu'il dit), porte atteinte « à la finalité naturelle de la faculté de communiquer ses pensées ».

Ainsi, toute vérité serait bonne à dire dans la mesure où il s'agit de dire ce qu'on pense ; poser qu'une vérité n'est pas bonne à dire et s'octroyer le droit de la passer soussilence = être moins qu'une chose.

Pour Kant, disjoindre parole et pensée, être malhonnête = se servir de son être physique « comme d'un purmoyen ( Sparchmaschine ) qui ne serait pas lié à une fin interne (la communication de ses pensées) » ; à l'inverse, chacun est tenu « à la condition de s'accorder avec la déclaration de celle-ci [communication de ses pensées] et ilest obligé envers lui-même à la véracité ».

Enjeu : la personne.

La véracité (qualité de celui qui dit la vérité) est un devoir envers soi-même : la malhonnêteté est une atteinte faite à soi.

Exple : Augustin : si mentir est un péché,que dois-je répondre, pour mon salut, à l'assassin venu trouver l'ami que je cache ? Réponse = « je sais où il estmais je ne vous le dirais pas ».

Mon salut et la vie de mon ami sont intacts.

b) puis-je ériger en loi universelle ma maxime ? Invoquer les circonstances pour justifier qu'une vérité n'est pas bonne à dire apparaît ainsi comme une forme de faiblesse [on remarque d'emblée que la solution proposée par Augustin est audacieuse et très courageuse].Disjoindre vérité et bien revient à se chercher des excuses, apparaît comme un prétexte pour échapper à ce devoirfondamental qui est de s'obliger à dire la vérité.

Kant formule cette idée ainsi « tu dois donc tu peux » : un impératif ordonne catégoriquement, et de ce fait, on ne peut pas ne pas s'y soumettre ; pouvoir désobéir à un impératif =faire que cet impératif n'en est pas un.

Or, comment sais-je que je DOIS dire la vérité quelle qu'elle soit ? S'octroyer le droit de taire une vérité = une maxime qui postule que « étant donné les circonstances, cette vérité n'est pas bonne à dire ».

Or, selon Kant, un tel précepte est sans valeur morale : je ne peux pas, en toute rigueur, ériger en loi universelle (valable pour tout homme) cette maxime.

Pourquoi ? Tout simplement parce quecelle-ci n'est pas suffisamment déterminée rationnellement car, comment déterminer formellement ces circonstances qui m'obligent à taire une vérité ? Pour Kant, ce qui est moral = ce qui peut valoir universellement, ce que je peux exiger de tout autre .

Or une telle exigence ne peut reposer que sur des principes formels : il s'agit de faire que la règle s'applique à tous sans considération à l'égard des contingences empiriques.

Transition :Si la vérité semble toujours moralement exigible, vouloir la vérité « à tout prix », n'est-ce pas une volontéeffrayante, suspecte ? Pascal a écrit : « on se fait une idole de la vérité même ».

Jusqu'où cette idolâtrie est-elle tenable ? Ne faut-il pas lui assigner des limites ? 3- QUELLE EST LA VALEUR DE LA VOLONTÉ DE VÉRITÉ ? Pour Nietzsche, la vérité telle qu'elle est envisagée du point de vue de la morale, exprime une certaine attitude par rapport à la vie : « Il ne faut pas avoir déjà au préalable avoir répondu Oui à la question de savoir si la vérité est nécessaire, mais encore y avoir répondu Oui à un degré tel que s'y exprime la principe, la croyance, laconviction qu'"il n'y a rien de plus nécessaire que la vérité, et que par rapport à elle tout le reste n'a qu'une valeur de second ordre" » ( Le gai savoir , §344).

Ce que montre Nietzsche, c'est que vouloir le vrai débute par une soumission presque religieuse (le § a pour titre « en quoi nous sommes encore pieux »).

Il y a comme un « amour fou » de la vérité qui subordonne à son objet tout le reste. Or selon Nietzsche, cette volonté n'est pas utile à la vie : « il se pourrait qu'un tel projet [...] soit un principe de destruction hostile à la vie...

« volonté de vérité » — cela pourrait être une secrète volonté de mort ».

C'est parce que la vie se caractérise primitivement comme apparence, devenir, changement, illusion et incertitude, que lavolonté de vérité ne peut que s'y opposer. Finalement, demander si toute vérité est bonne à dire, c'est faire surgir ce que des principes abstraits, éloignés du réel (Kant dit « formel et a priori), ont de dangereux ; c'est donc souligner ce qu'il y a de préjugés à faire de la vérité une valeur absolue, au sens politique du terme, c'est-à-dire qui n'admet aucunelimitation dans son exercice ou ses manifestations.. »

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