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Est-il absurde d'aimer une personne pour sa beauté physique ?

Publié le 04/09/2005

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physique
Certes on peut faire des expériences esthétiques frappantes, être bouleversé par une couleur, un visage, un corps, mais l'amour ne saurait tenir à cela. En effet dans l'amour c'est une personne que je vise et non un visage, c'est à un trait de caractère et à une conception du monde et non à une manière ou à une posture que je m'attache. III- Comment dissocier la personne de son physique ?             Or le défaut d'une semblable position est de croire que le réel peut-être découpé : la beauté physique ne saurait tenir aux critères génériques partout énoncés, elle est bien plutôt diffuse et singulière, elle ne peut être isolée de la personne comme un composant peut l'être d'un composé chimique. En somme nous voulons dire que les critères de la beauté sont déjà des abstractions de celle-ci, concrètement la beauté physique ne tient pas aux traits du visages, aux courbes du corps ou à la façon d'être coiffé, elle n'est pas l'addition arithmétique de caractère assignables mais une totalité indécomposable, un ensemble lié.             L'illusion procédant de la chirurgie esthétique est de croire que la beauté est paramétrable, or elle ne tient pas à des proportions objectivables, elle est l'effet d'un tout et non une composition de parties disparates, aussi la chirurgie esthétique produit-elle plus de monstres qu'elle ne crée de beautés du fait qu'elle croit pouvoir modifier un visage comme on en dessine un d'un trait de crayon. Sans aller jusqu'à souscrire aux pseudos-sciences telles que la physiognomonie, développée au XIXe siècle (les traits du visage sont censés révéler les caractères de la personne), on dira que le physique est toujours gros des traits de caractère de la personne, non qu'on puisse deviner ceux-ci à partir de cela mais qu'à force de connaître l'autre son physique devient pour nous poreux et à partir de ses attitudes corporelles nous sommes capables de savoir ce qu'il ressent.             Dans La structure du comportement Merleau-Ponty met en évidence cette communication des corps : la sympathie psychique passe par le corps, j'infère une attitude, un caractère, la préoccupation ou la joie d'autrui sur la base de la vision que j'ai de son corps. Dans cette optique nous pouvons dire que la beauté est toujours déjà le signe d'autre chose : la beauté physique déborde précisément le physique, sauf à commettre l'erreur de l'objectiver, de la séparer de la personne et de faire comme si la beauté n'était qu'un vêtement. Sous la beauté d'une femme ou d'un homme perce toujours une fragilité ou une force, une légèreté ou une gravité ; la beauté est déjà toujours charismatique, elle n'est froide et objective qu'hors du réel, sur les podiums de mannequinât ou dans nos publicités.

La sensibilité des hommes et des femmes à la beauté explique les attirances des uns envers les autres, or l'amour ne saurait se réduire à une attirance physique. L'amoureux est un passionné et non pas forcément un esthète, sauf à puiser dans les seuls contes de fées. Toutefois il est délicat de tracer la frontière entre la fascination qu'exerce la beauté et le sentiment amoureux : le visage de Liv Ullman est à la fois objet d'amour pour Bergman et sujet fétiche de ses films. Il faut se défaire de la dichotomie établie par une morale du sens commun : l'amour serait profond tandis que la beauté n'est que superficielle. Si l'on comprend que sous la beauté l'homme voit déjà percer quelque caractère ou quelque énigme on pourra se défaire d'un tel jugement.

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