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Y a-t-il un acte qui ne soit pas désintéressé ?

Publié le 11/03/2004

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L'alternative est difficile à trancher, mais il faudra évaluer la pertinence de ces deux perspectives, en dégager les fondements, pour finalement proposer une réponse à la question de l'existence de l'acte désintéressé. Références utiles Kierkegaard, Le Journal du séducteur Pascal, Pensées Textes à utiliser Kant J'accorde volontiers qu'aucun homme ne peut avoir conscience en toute certitude d'avoir accompli son devoir de façon tout à fait désintéressée car cela relève de l'expérience interne, et pour avoir ainsi conscience de l'état de son âme il faudrait avoir une représentation parfaitement claire de toutes les représentations accessoires et de toutes les considérations que l'imagination, l'habitude et l'inclinaison associent au concept de devoir, or une telle représentation ne peut être exigée en aucun cas; de plus l'inexistence de quelque chose (par conséquent aussi d'un avantage qu'on a secrètement conçu) ne peut être de façon générale l'objet de l'expérience. Mais que l'homme doive accomplir son devoir de façon tout à fait désintéressée et qu'il lui faille séparer complètement du concept de devoir son désir de bonheur pour l'avoir tout à fait pur, c'est ce dont il est très clairement conscient; ou alors s'il ne croit pas l'être, on peut exiger de lui qu'il le soit autant qu'il est en son pouvoir de l'être : car c'est précisément dans cette pureté qu'est à trouver la véritable valeur de moralité, et il faut donc également qu'il le puisse.   Nietzsche Le christianisme, par le fait qu'il a placé au premier plan la doctrine du désintéressement et de l'amour, a été bien plus loin encore d'élever l'intérêt de l'espèce plus haut que l'intérêt de l'individu. [...] Pour l'espèce il est nécessaire que le malvenu, le faible, le dégénéré périssent : mais c'est à ceux-là que le christianisme fait appel, en tant que force conservatrice, renforçant ainsi cet instinct déjà puissant chez les êtres faibles, de se ménager, de se conserver, de se soutenir mutuellement. Qu'est la « vertu » et la « charité » dans le christianisme, si ce n'est cette réciprocité dans la conservation, cette solidarité des faibles, cette entrave de la sélection ? Qu'est l'altruisme chrétien, sinon l'égoïsme collectif des faibles qui devine que si tous veillent les uns pour les autres, chacun sera conservé le plus longtemps ?... Si l'on ne considère pas un pareil état d'esprit comme le comble de l'immoralité, comme un attentat à la vie, on fait partie de ce ramassis de malades et on en a les instincts... Le véritable amour des hommes exige le sacrifice au bien de l'espèce, - il est dur, il est fait de victoires sur soi-même, parce qu'il a besoin du sacrifice humain.

« Au cours du XVIIe siècle, La Rochefoucauld a quelque peu déstabilisé les esprits de son temps en bousculant lesidées que l'on se fait communément au sujet de la morale.

On imagine, par exemple, que l'homme généreux pratiquela générosité parce qu'il est généreux.

N'est-ce pas là une illusion ? Ne se glisse-t-il pas parfois un calcul derrière lagénérosité ? N'arrive-t-il pas que l'on se montre généreux afin de lier l'autre à soi par quelque don ou bien pour faireétalage de sa vertu devant les autres, en pratiquant une générosité ostentatoire ? Ainsi que l'a montré LaRochefoucauld avant que Pascal ne redise la même chose, les hommes sont en proie à l'amour-propre.

Aussi ont-ilsune idée derrière la tête et cherchent-ils à se faire plaisir en tout.

Si bien que rien n'est gratuit chez eux, tout étantmû par l'amour-propre.

Pour glorifier le vice et fustiger la vertu, Sade ne s'y prendra pas autrement.

La vertu estnaïve, soulignera-t-il.

Elle ignore la réalité du désir, de l'amour-propre ainsi que leurs stratégies.

Aussi échoue-t-elletoujours.

Alors que le vice, qui a des arrière-pensées, n'ignore rien de la réalité du désir et, de ce fait, prospère.Aussi faut-il être lucide et oser dire que la morale est une contradiction.

Voire une production contre nature.Soyons justes : il y a du vrai dans ce constat implacable.

Les hommes sont intéressés.

Et il serait naïf de croirequ'ils ne le sont pas.

Cela dit, soyons justes jusqu'au bout : est-il sûr que cela soit un vice ? Si l'intérêt désigne lecalcul égoïste qui utilise les vertus les plus nobles de l'humanité, il signifie aussi le plaisir que l'on prend à s'occuperde sujets moraux.

Comment ne pas voir que si la morale ne suscitait aucun intérêt et donc aucun plaisir en nous,celle-ci n'existerait pas ? Le généreux prend plaisir à la générosité.

Et alors ? Il y a des plaisirs bien plus coupables.Tant de personnes ont du plaisir à autre chose que la générosité ! En outre, que veut-on ? Que le généreux soittriste pour avoir le droit d'être généreux ? Kant a raison de dire qu'il faut que le sentiment moral soit désintéressé,et qu'il ne se mêle rien en lui venant du calcul individuel.

Il a raison, qui plus est, d'ajouter que la vraie moralité nese sait pas morale.

Elle est innocente.

Elle ne se dit pas, en étant morale, qu'elle est morale, se vantant de l'être.Cela dit, pour devenir moral en toute innocence, ne faut-il pas commencer par vouloir devenir moral ? Il est beau devouloir avoir les mains pures, a dit Hegel, mais encore faut-il avoir des mains ! Pascal, de ce fait, a eu raison deretourner la démarche de La Rochefoucauld, tout en percevant sa justesse.

Il y a en effet chez La Rochefoucauldun idéal déçu.

Il voudrait que les hommes soient « moralement moraux ».

Ce qui n'est pas possible.

Si les hommeséprouvent le besoin de devenir moraux, c'est qu'ils ne le sont pas et qu'ils ont besoin de l'être.

Ne leur reprochonspas de ne pas être déjà moraux, dès lors qu'ils s'efforcent de le devenir.

Laissons-leur du temps.

Il y a chez LaRochefoucauld, Sade et le scepticisme moral beaucoup d'idéalisme.

Comme ils attendent trop de la morale et qu'ilsne trouvent pas ce qu'ils en attendent, ils vont chercher dans l'immoralité, cette perfection à l'envers, ce qu'ils netrouvent pas dans la morale.

Il faut le savoir : les immoralistes qui prêchent une vie sans principes sont desparesseux de la morale, qui se donnent une morale sans morale (l'immoralité) pour ne pas avoir à faire un effortmoral.

Soyons donc simples.

Et ne jouons pas avec la morale.

Faisons l'effort de devenir moraux, sans nouspréoccuper de qui n'est pas moral.

A chaque jour suffit sa peine.L'intérêt n'est pas négatif.

C'est son détournement qui l'est.

L'intérêt renvoie à ce qui est intéressant.

Il est laréponse individuelle et passionnée à la valeur même de la morale.

D'où l'importance de s'intéresser.

Cela révèle de lagénérosité, un don de soi.Hannah Arendt a fait l'éloge de l'homme intéressé.

Elle a critiqué l'idéal d'un homme désintéressé.

Elle a défendu lapassion créatrice présente à soi, à la vie.

On découvre le logos, qui est relation source de toute raison, en étantrelié à soi.. »

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