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Alain: Démocratie et droit de vote

Publié le 12/04/2005

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Voter, ce n'est pas précisément un des droits de l'homme ; on vivrait très bien sans voter, si l'on avait la sûreté, l'égalité, la liberté. Le vote n'est qu'un moyen de conserver tous ces biens. L'expérience a fait voir cent fois qu'une élite gouvernante, qu'elle gouverne d'après l'hérédité, ou par la science acquise, arrive très vite à priver les citoyens de toute liberté, si le peuple n'exerce pas un pouvoir de contrôle, de blâme et enfin de renvoi. Quand je vote, je n'exerce pas un droit, je défends tous mes droits. Il ne s'agit donc pas de savoir si mon vote est perdu ou non, mais bien de savoir si le résultat cherché est atteint, c'est-à-dire si les pouvoirs sont contrôlés, blâmés et enfin détrônés dès qu'ils méconnaissent les droits des citoyens. On conçoit très bien un système politique, par exemple le plébiscite (1), où chaque citoyen votera une fois librement, sans que ses droits soient pour cela bien gardés. Aussi je ne tiens pas tant à choisir effectivement, et pour ma part, tel ou tel maître, qu'à être assuré que le maître n'est pas le maître, mais seulement le serviteur du peuple. C'est dire que je ne changerai pas mes droits réels pour un droit fictif Vote par lequel un peuple abandonne le pouvoir à un homme. AlainLa sûreté à laquelle Alain fait allusion au début du texte désigne bien sûr la sécurité dont la révolution française a fait l'un des droits du citoyen, opposable à l'arbitraire policier.
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« A - LA FONCTION DU DROIT DE VOTE 1 - Le vote, un moyen de préserver lesdroits de l'homme Le premier moment du texte établit clairement que le vote n'a pas sa fin lui-même.

Il n'est qu'un moyen en vue de lapréservation des autres droits de l'homme qui eux sont des biens en soi. Sécurité, égalité, liberté : il s'agit d'un droit de l'homme et de deux droits des citoyens, affirmés comme tels par ladéclaration de 1789.

La sécurité garantit tout simplement le droit de l'homme à la vie, la liberté et l'égalité rendentpossible dans le contexte de la cité la recherche de ce qu'Aristote appelait "la vie bonne". Reste à savoir comment le droit de vote peut aider à assurer la préservation de ces droits et surtout pourquoi il nepeut avoir d'autre utilité. 2 - Un nécessaire pouvoir de contrôle C'est l'objet du second moment du texte, on y voit Alain assumer sans réticence l'idée d'une démocratiereprésentative, dans laquelle les pouvoirs législatifs et éxécutifs ne sont pas exercés effectivement par le peuple,mais confiés par lui à des élus. Autrement dit, Alain souscrit à l'idée d'une distinction (sinon d'une opposition) entre "peuple" et "élite" gouvernante.Mais à cette réserve près qu'il récuse tout modèle aristocratique fondé sur la naissance ou la compétence : soitl'Ancien régime d'une part et d'autre part l'actuel "pilotage" technocratique des "sociétés complexes" dont les signesannonciateurs commencaient peut-être à poindre sous la troisième République observée par Alain. Habituellement considéré comme un pouvoir de choix (que veut dire "élection", sinon ?), le droit de suffrage estréduit par Alain à un pouvoir d'approbation ou de censure de "l'élite gouvernementale" candidate au renouvellementde son mandat.

Comme s'il pouvait suffire au citoyen de préserver par le vote ses droits fondamentaux, sans pourautant exercer une influence déterminante sur les orientations de la politique gouvernementale. 3 - Critique du recours au plébiscite Le dernier moment du texte oppose à la démocratie représentative une pseudo-démocratie plébiscitaire. L'usage bonapartiste du suffrage universel revient en effet à demander au peuple de dire une fois pour toutes amenau grand homme supposé savoir mieux que les sujets ce que est bon pour eux. B- UNE DISCUSSION POSSIBLE DES PROPOSD'ALAIN A LA LUMIERE DE L'HISTOIRE On pourrait cependant être tenté d'opposer à l'argumentation d'Alain la réflexion de Carl Schmitt, à la fin des années1920, sur la possibilité d'une pratique plébiscitaire de la démocratie.

L'appel direct au peuple par dessus la tête despartis et des corps intermédiaires, peut être, pour un chef d'Etat démocratiquement élu et soucieux des droits del'homme autant que du salut de l'Etat, un moyen de renforcer sa légitimité. C'est ainsi que la pratique gaullienne du référendum a permis à la cinquième République de triompher d'un certainnombre d'épreuves politiques et militaires, puis du gaullisme lui-même à l'occasion du référendum de 1969 dontchacun connaissait la dimension plébiscitaire. En revanche, Alain a pu observer en 1940, que c'est le vote majoritaire du parlement élu en 1936, et non unplébiscite, qui a placé entre les mains de Pétain les pleins pouvoirs, y compris en matière constitutionnelle.

Sanscompter que le régime de Vichy s'est soigneusement gardé de recourir à quelque élection que ce soit, fut-ce sous laforme d'un plébiscite. V - QUELQUES REFERENCES POSSIBLES Il pouvait être utile pour comprendre et expliquer ce texte de pouvoir situer Alain dans l'histoire (première moitié denotre siècle) et de connaître son engagement politique (aux côtés du parti de Daladier et d'Edouard Herriot). On pouvait aussi comparer sa conception de la démocratie à celle de Montesquieu, et l'opposer à celle de Rousseau(voir, respectivement, Esprit des lois , livre I, chapitre XIII ; et Contrat Social , livre III, chapitre IV).. »

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