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Alfred Jarry - Le canard sauvage en avril 1903: « La passion considérée comme course de côte » (commentaire)

Publié le 17/04/2012

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Barrabas, engagé, déclara forfait.

Le starter Pilate, tirant son chronomètre à eau ou clepsydre, ce qui lui mouilla les mains, à moins qu'il n'eût simplement craché dedans – donna le départ.

Jésus démarra à toute allure.

En ce temps-là, l'usage était, selon le bon rédacteur sportif saint Matthieu, de flageller au départ les sprinters cyclistes, comme font nos cochers à leurs hippomoteurs. Le fouet est à la fois un stimulant et un massage hygiénique. Donc Jésus, très en forme, démarra, mais l'accident de pneu arriva tout de suite. Un semis d'épines cribla tout le pourtour de sa roue d'avant.

On voit, de nos jours, la ressemblance exacte de cette véritable couronne d'épines aux devantures de fabricants de cycles, comme réclame à des pneus increvables. Celui de Jésus, un single-tube de piste ordinaire, ne l'était pas.

Les deux larrons, qui s'entendaient comme en foire, prirent de l'avance.

Il est faux qu'il y ait eu des clous. Les trois figurés dans des images sont le démonte-pneu dit « une minute «.

Mais il convient que nous relations préalablement les pelles. Et d'abord décrivons en quelques mots la machine.

Le cadre est d'invention relativement récente. C'est en 1890 que l'on vit les premières bicyclettes à cadre. Auparavant, le corps de la machine se composait de deux tubes brasés perpendiculairement l'un sur l'autre. C'est ce qu'on appelait la bicyclette à corps droit ou à croix. Donc Jésus, après l'accident de pneumatiques, monta la côte à pied, prenant sur son épaule son cadre ou si l'on veut sa croix.

Des gravures du temps reproduisent cette scène, d'après des photographies. Mais il semble que le sport du cycle, à la suite de l'accident bien connu qui termina si fâcheusement la course de la Passion et que rend d'actualité, presque à son anniversaire, l'accident similaire du comte Zborowski à la côte de la Turbie, il semble que ce sport fut interdit un certain temps, par arrêté préfectoral. Ce qui explique que les journaux illustrés, reproduisant la scène célèbre, figurèrent des bicyclettes plutôt fantaisistes. Ils confondirent la croix du corps de la machine avec cette autre croix, le guidon droit. Ils représentèrent Jésus les deux mains écartées sur son guidon, et notons à ce propos que Jésus cyclait couché sur le dos, ce qui avait pour but de diminuer la résistance de l'air.

Notons aussi que le cadre ou la croix de la machine, comme certaines jantes actuelles, était en bois.

D'aucuns ont insinué, à tort, que la machine de Jésus était une draisienne, instrument bien invraisemblable dans une course de côte, à la montée. D'après les vieux hagiographes cyclophiles sainte Brigitte, Grégoire de Tours et Irénée, la croix était munie d'un dispositif qu'ils appellent « suppedaneum «. Il n'est point nécessaire d'être grand clerc pour traduire : « pédale «.

Juste Lipse, Justin, Bosius et Erycius Puteanus décrivent un autre accessoire que l'on retrouve encore, rapporte, en 1634, Cornelius Curtius, dans des croix du Japon : une saillie de la croix ou du cadre, en bois ou en cuir, sur quoi le cycliste se met à cheval : manifestement la selle.

Ces descriptions, d'ailleurs, ne sont pas plus infidèles que la définition que donnent aujourd'hui les Chinois de la bicyclette : « Petit mulet que l'on conduit par les oreilles et que l'on fait avancer en le bourrant de coups de pied. «

Nous abrégerons le récit de la course elle-même, racontée tout au long dans des ouvrages spéciaux, et exposée par la sculpture et la peinture dans des monuments « ad hoc « :

Dans la côte assez dure du Golgotha, il y a quatorze virages. C'est au troisième que Jésus ramassa la première pelle. Sa mère, aux tribunes, s'alarma.

Le bon entraîneur Simon de Cyrène, de qui la fonction eût été, sans l'accident des épines, de le « tirer « et lui couper le vent, porta sa machine.

Jésus, quoique ne portant rien, transpira. Il n'est pas certain qu'une spectatrice lui essuya le visage, mais il est exact que la reporteresse Véronique, de son kodak, prit un instantané.

La seconde pelle eut lieu au septième virage, sur du pavé gras. Jésus dérapa pour la troisième fois, sur un rail, au onzième.

Les demi-mondaines d'Israël agitaient leurs mouchoirs au huitième.

Le déplorable accident que l'on sait se place au douzième virage. Jésus était à ce moment dead-head avec les deux larrons. On sait aussi qu'il continua la course en aviateur... mais ceci sort de notre sujet.

 

Alfred Jarry, « La passion considérée comme course de côte « (Le Canard sauvage, n° 4, 11-17 avril 1903)

Alfred Jarry, auteur du 19 / 20 eme siècle est connu pour ses œuvres burlesques se lance ici dans un domaine très apprécié à l’époque j’ai nommé la religion. Il veut en faire une satire en reprenant la passion du christ et la comparée à une course de cote comme son nom l’indique. Il met ici en scène des personnages bibliques aux côtés de personnages religieux ou non qui ne vivent pas à la même époque. IL créé un scénario léger et ironique qui transporte tous  ses personnages à travers un commentaire sportif. LECTURE DU TEXTE. Nous essaierons de voir dans quelle mesure ce texte retrace malgré tout la passion du christ mais qu’il est à la fois un parallélisme  de l’auteur à un fait divers de son époque.

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« reçu par le Christ.

Tout de suite après l’auteur évoque le plus célèbre symbole de la crucifixion qui est la couronne d’épines.

Il y fait allusion en la comparant à ce genre de pneus increvables.

L’image qu’on peut en avoir est une roue pleine de clous par exemple et imaginons Jésus avec sa couronne d’épines.

Relevons également la présence de Marie qui, comme dans le texte originel, accompagne son fils dans la mort.

Elle assiste dans les deux textes au calvaire de son fils qui est sa crucifixion. Néanmoins, on remarque dans une lecture plsu aprofondie du passage que Jarry ne fait absolument pas une réécriture du texte biblique, et pour commencer transpose l’histoire plus de 1000 ans après la crucifixion du Christ.

Les personnages sont devenus les acteurs d’une course de côte comme le nom de l’extrait l’indique, le gouverneur Pilate est devenu starter tandis que Saint Matthieu est présenté comme un remake de Thierry Roland.

L’auteur avoue lui-même ne pas s’intéresser particulièrement au récit « nous abrègerons le récit de la course » pour se concentrer sur des digressions ironiques et anachroniques.

Il nous dresse une mini biographie de la bicyclette en précisant que son histoire commence en 1890 soit bien loin de Jésus Christ.

Il cite de nombreux critiques, écrivains ou représentants de la religions catholique comme « Grégoire de Tours ou Juste Lipse ».

Il compare la passion du Christ avec la tragique course de côte de 1903 considérée comme étant la première course de côte où le comte Zborowski (citer dans le texte) perdit la vie au cours d’un accident.

Cet accident entraina le fameux « arrêté préfectoral » cité par Jarry qui fut en réalité une interdiction de pratiquer ce sport pendant 6 ans.

L’auteur pousse l’audace jusqu’à familiariser le vocabulaire d’une histoire sacrée avec les mots « pelle, pédales, bourrins, larrons, foire ».

Il a également recours à des anglicismes comme « dead-head » mais traduit également des mots de l‘époque comme « suppedeaum« qui est le cale pieds due crucifiés en terme plutôt banalisés « pédales » Les anachronismes volontaires sont poussés à l’extrême, on retrouve le must de la technologie de l’époque comme par exemple le kodak, les gentes de bois, le démonte pneu ou le pneu.. »

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