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Analyse de l'Olympia, de Manet

Publié le 21/02/2011

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manet

            L’Olympia est une œuvre réalisée par Manet en 1863. Au départ destinée à être affichée au Salons des Refusées – car elle ne respectait pas la convenance de l’époque -, elle ne sera finalement dévoilée au public que deux ans après son achèvement. Les controverses ayant suivies cette révélation ont été massives et axées sur deux sujets principaux : la prostitution et l’esclavagisme raciste. Bien que l’artiste ait évidemment incité le scandale par le biais de son œuvre, les récriminations ont été telles que sans le soutien de son ami, le célèbre poète Baudelaire, elles auraient probablement mis fin à sa carrière. 

 

            On retrouve dans le tableau de Manet, la position très similaire de la Vénus d’Urbino de Titien. La jeune femme est appuyée sur son bras et est à moitié allongée, sa main droite est refermée sur un pan de la couverture, tandis que sa main gauche cache son intimité. Ses jambes sont croisées et son regard est fixé sur le spectateur. Derrière elle, une servante noire lui apporte un bouquet de fleurs et, au contraire de sa maîtresse, ne semble pas remarquer notre présence. Le mobilier est beaucoup moins apparent, car une partie très importante de la pièce est dissimulée sous des rideaux de velours verts, dont on voit une partie de la tapisserie.

 

On peut diviser se tableau en trois plans : le premier délimité par le personnage principal, le second délimité par la servante et le troisième qui constitue le fond de la pièce, que l’on suppose être la prolongation d’un couloir. L’œuvre est également divisé en deux à l’horizontale. Comme dans le tableau de Titien, un muret derrière le corps de la femme allongée sépare cette pièce de ce qui semble conduire au cabinet de la maîtresse.

Le point de fuite se situe à l’intersection du regard de la servante, dans le prolongement de la ligne qui passe par la pointe des seins de la jeune femme et la ligne droite partant du rideau de velours et passant par son genou gauche.

 

Les couleurs sont vives et chaudes hors du décor. Manet utilise sa technique habituelle du mélange de couleurs à même la toile et on peut aisément voir que l’éclairage écrase volontairement les mélanges et les demi-tons sur le corps de la jeune femme. Les restes des contours noirs - ou blancs selon les éléments – ne sont pas effacés. On remarquera surtout le rappel des motifs fleuris de la couverture grâce au bouquet de la servante et le ruban rose dans les cheveux de la jeune femme. La couleur de peau de la servante qui se fond presque avec les ténèbres de l’arrière plan, met en valeur la blancheur des draps et la pâleur du corps de celle qui nous regarde. La couleur dorée que l’on retrouve sur les franges de la couverture, sur les chaussures, le bracelet et sur la parure de la femme donne une impression de richesse, qui amplifiée par sa posture, laisse supposer que sa fortune est due à l’utilisation qu’elle fait de son corps. Les deux matelas sur lesquels elle repose sont d’un rouge si foncé qu’on ne les remarque pas immédiatement. Ils se fondent avec le décor. Ainsi, le jeu de contrastes nous indique directement quels sont les détails importants et sur lesquels le spectateur doit poser les yeux : la jeune femme nue, le lit défait et le bouquet de fleurs. Ces trois éléments nous donnent une idée du contexte dans lequel nous nous trouvons et l’histoire est très peu dissimulée par Manet.

 

D’autre part, un détail, caché par sa couleur sombre nous fait presque oublier sa présence : un chat noir se trouve aux pieds de la maîtresse. Il a la queue redressée et le poil hérissé, symbole du désir masculin. Ses grands yeux verts nous fixent intensément. Le chat symbolise l’agitation et le pêché. Ainsi, il est aisé d’avancer que le scénario s’avère avoir lieu dans la chambre de la jeune femme que la servante vient déranger pour lui apporter les fleurs, présents d’un des clients de cette prostituée. Outre le fait qu’elle soit présentée nue sous l’œil du spectateur, sa présence la laisse indifférente et sa main ne cache pas véritablement son intimité, mais est appuyée contre sa cuisse. On constate également qu’elle n’a pas retiré ses chaussures, par négligence ou provocation, ce qui confirme l’idée qu’elle ne les a  pas enlevées par souci de commodité, mais aussi par souci de gain de temps dans le but d’accélérer la « consommation de la chair ».

 

Le tableau de Manet est une peinture figurative nous montre en même temps l’ « invisible ». Ce n’est pas véritablement ce qu’il y a devant les yeux du spectateur que ce dernier doit voir, mais ce qu’il cache, justement. Ce qui rend l’œuvre attirante, c’est davantage l’envie d’en connaître l’histoire, comme s’il pouvait être narré, plutôt que de le contempler en tant que tel, car il faut rappeler que Manet s’est inspiré de Titien pour ce tableau. Ce n’est donc pas pour un rendu plus beau que le modèle, déjà somptueux de la Vénus d’Urbino que l’Olympia a été faite, mais plutôt pour montrer du doigt les vices de sa société et dénoncer ce que tous savent et taisent.

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