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« L'APPORT D'AUGUSTE COMTE DANS L'EVOLUTION DES SCIENCES SOCIALES »

Publié le 10/02/2011

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auguste

Le père de la sociologie moderne reste Auguste Comte (1798-1857), non seulement parce qu'il a forgé le terme de sociologie, mais encore parce qu'il est le premier à concevoir la possibilité et  la nécessité d'une science sociale constituant des faits sociaux spécifiques et irréductibles à d'autres phénomènes. En effet, si pour la conception, sinon pour la réalisation, Saint-Simon (1760-1825) avait annoncé une philosophie positive et une politique positive avant Auguste Comte, la science sociale que Saint-Simon envisage reste tributaire soit de la physiologie, telle que la conçoit Cabanis, soit de l'économie politique, telle que la propose Jean-Baptiste Say. Seul Auguste Comte recherche les conditions de l'autonomie d'une science nouvelle politique et sociale. Certes, le positivisme d'Auguste Comte n'est pas né de rien. Cela eût été contraire à la définition même du positivisme. Que l'on considère le positivisme comme une théorie ou comme une méthode, on retrouve toujours la même exigence de s'en tenir aux données des faits et à la relation légale de ces faits entre eux ; sans doute cette exigence n'est-elle pas sans poser bien des problèmes d'ordre épistémologique, mais elle a le mérite d'être celle de tous les grands esprits scientifiques de la tradition. Ce que Comte veut alors obtenir de lui-même et des autres, c'est-à-dire objectivement déduire de l'état positif de la science, c'est la naissance de la science sociale : la preuve de sa généalogie effective. A-t-il en cela réussi?  En quoi donc  a-t-il contribué à l’évolution  des sciences sociales ?

 

 

 

 

 

L'un des prédécesseurs directs du positivisme est d'Alembert qui énonce le principe même de la classification des sciences d'Auguste Comte : le principe objectif, qui entraîne la classification selon l'ordre naturel des connaissances. Le Discours préliminaire de l'Encyclopédie montre que l'expérience sensible nous apprend les diverses propriétés des corps ; celles-ci étant considérées séparément, nous découvrons que certaines appartiennent à tous les corps, comme l'impénétrabilité, qui suppose elle-même l'étendue, cette dernière est donc la propriété la plus générale et elle est l'objet de la géométrie. Aussi faut-il que la classification respecte l'ordre encyclopédique et l'ordre chronologique. Que cet ordre de succession soit vu finalement comme génétique, c'est une relation qu'établira le docteur Burdin cité par Saint-Simon, relation génétique que Comte mettra à profit pour déduire et asseoir la nouvelle science sociale. Ces quelques indications permettent déjà de remarquer que les « faits sociaux « ne sont pas « donnés « : le positivisme pris au pied de la lettre serait la caricature du positivisme tel que Comte le repense. Les seules données véritables sont pour Comte les sciences déjà existantes dont il est alors nécessaire d'établir la hiérarchie selon la positivité, selon l'abstraction, selon la généralité. Le « critère objectif « lui-même se précise à nos yeux : il ne représente pas ce que veut un empirisme intégral mal compris, puisqu'il ne s'agit pas de réaliser l' « accord de la pensée avec son objet «, accord pour lequel il faudrait déjà a priori connaître la pensée et l'objet. Le « critère objectif « concerne ici non le réel face à la pensée mais le réel de la pensée elle-même ; et cela, dans son résultat : les sciences positives. On se rend alors compte que le véritable critère de l'épistémologie positiviste, ce ne sont ni les « données des faits «, ni la « réalité «, qui ne sauraient, les unes et les autres, n'apparaître comme données et réelles que saisies dans le cadre d'une pensée déjà élaborée au cours de l'histoire des sciences ; le véritable critère, c'est le concept de science positive en tant qu'il résulte lui-même d'une histoire objective de l'intelligence humaine. C'est de ce point de vue qu'il faut partir pour aborder les efforts accomplis par Auguste Comte en vue de constituer une « science sociale «. C'est le point de vue d'une épistémologie créatrice ; elle explique la raison des recherches de Comte, dont le dessein n'était pas de donner à l'humanité un certain nombre d'affirmations que l'on avait déjà émises avant lui, ainsi que les répertorie justement Henri Gouhier dans une semblable introduction : « ... Le monde n'est plus la création; ce n'est même plus un réseau de causes issues d'une cause première mais une armature de lois - la supériorité de l'homme tient à la complexité de son organisme et non à la présence d'un principe immatériel - la raison, liée à cette organisation perfectionnée, n'a pas pour fin la contemplation de l'intelligence ou l'union à une suprême intelligence, mais la conquête de l'univers pour le plus grand avantage de l'homme - la morale est terrestre comme notre destin ; le progrès des techniques et la philanthropie sont les seuls moyens efficaces de faire disparaître le mal dans un monde sans péché - le progrès coïncide avec le développement de la raison qui conquiert l'univers par la connaissance et ce progrès s'exprime dans l'avènement d'un esprit qui explique les choses sans Dieu ni âmes, en raisonnant à partir d'observations exactes - les récents progrès de la biologie prouvent que cet esprit doit maintenant rendre scientifique l'étude des phénomènes humains - la morale et la politique seront des sciences d'application dépendant de la science de l'homme, de même que la médecine est une science d'application dépendant de la biologie - la philosophie est l'ensemble des sciences « (Œuvres choisies d'Auguste Comte, Aubier, Paris 1943, p. 35).

Ce que Comte veut donc obtenir c'est la naissance de la science sociale et son émergence. L'histoire de la sociologie a montré les difficultés et la lenteur de cette mise au jour; il reste qu'Auguste Comte en a formé un dessein net, épistémologiquement fondé; il en a vu également ses lointaines et utiles conséquences pour l'humanité.

 

 

 

Voyons comment se forme ce dessein. Dès le premier opuscule de philosophie sociale, en 1819, le jeune « publiciste « escompte que la politique deviendra un jour une science positive : sans doute ce vœu est-il depuis longtemps celui de Saint-Simon, mais l'opuscule fait une distinction remarquable entre les désirs politiques et les opinions politiques, les opinions se présentant généralement comme ménageant la réalisation des désirs : attente souvent déçue, selon le philosophe car ce qu'il nous faut, ce ne sont pas des « opinions « politiques mais des « connaissances « politiques certaines ou positives. Ces courtes pages prennent toute leur valeur avec le second opuscule dans lequel Auguste Comte expose sa conception d'une histoire générale, c'est-à-dire scientifique et qui, dans un vaste mouvement d'ensemble nous apporte la connaissance des séries et des systèmes de faits, nécessaires à notre intelligence de la « politique «, mais aussi constituant le fondement d'une organisation scientifique de la politique. C'est avec le troisième opuscule, en 1822, que Comte élabore le dessein de constituer une « science politique « ou une « physique sociale «, une « science sociale «, les « travaux théoriques de la réorganisation sociale « la « vraie politique «, la « politique théorique «, l' « état positif de la politique « ; tous ces termes désignant la science sociale dans le troisième opuscule, ou Plan des travaux scientifiques nécessaires pour réorganiser la société. Ainsi, le premier opuscule apporte l'idée que la politique est affaire de compétence scientifique, le second discerne les deux mouvements dont le concours constitue la Révolution occidentale:

 

un mouvement de désorganisation et un mouvement de réorganisation auquel (c'est ce qui apparaîtra dans le troisième opuscule) appartient l'organisation théorique de la politique ; et, le troisième opuscule attaque les travaux permettant l'accomplissement de cette nouvelle science.

L'inventaire des méthodes positives constitue la seule logique objective qu'admette Auguste Comte. Ainsi les mathématiques usent surtout de la déduction, et l'induction y est presque nulle ; l'astronomie demande une grande observation ; la physique permet l'expérimentation qui modifie un élément du problème parmi les autres éléments constants ; la chimie utilise aussi l'expérimentation, ainsi que la classification et la nomenclature; la biologie ajoute à toutes ces méthodes la méthode comparative et synthétique ; la science sociale use en outre de la méthode historique, dont le Second opuscule est une remarquable démonstration. En procédant à l'application convenable de la méthode positive fondée par Bacon, Descartes et Galilée, Comte a donc entrepris de « traiter la science sociale comme une nouvelle et dernière section de la philosophie naturelle « (lettre à Armand Marrast du 7 janvier 1832). L'étude de la science sociale demande la connaissance exacte des lois déjà découvertes et concernant les ordres de phénomènes moins compliqués. Toutefois, dans le quatrième tome du Cours de philosophie positive, Comte affirme apporter du moins les fondations de la science sociale, à défaut de cette science constituée elle-même, et entend fixer sur des bases positives les conditions de possibilité de cette science. D'une part, la science sociale présuppose les sciences positives antérieurement constituées, d'autre part, la philosophie positive présuppose la science sociale; ce qui signifie que la philosophie positive est une hypothèse fondée sur l'hypothèse de la science sociale et qu'elle ira se développant au fur et à mesure que se développera la science sociale. Dès le Plan des travaux scientifiques nécessaires pour réorganiser la société, ou premier Système de politique positive, Auguste Comte a affirmé la spécificité de la sociologie, quant à son objet et quant à sa méthode. Bien qu'il s'agisse alors plutôt de « science politique «, science que Comte présente comme historique et sociale, Montesquieu est critiqué pour avoir exagéré l'importance de la « forme de gouvernement « ; aussi les faits ne sont-ils pas alors véritablement liés, ils ne sont que rapprochés. L'importance du climat est également considérée par Comte comme excessive : l'action du climat peut accélérer ou retarder l'évolution historique mais ne peut la changer. Comte est soucieux d'établir la loi de l'organisation humaine selon la marche naturelle de la civilisation, ou histoire générale. Au contraire, cette marche progressive a été vue par Condorcet mais non présentée dans une série homogène groupant les faits selon leurs véritables rapports. En outre, Condorcet est prématurément d'avis d'appliquer les mathématiques à la science sociale : cela ne serait possible d'après Comte qu'à une étape très perfectionnée de cette science. Aussi, Cabanis a-t-il tenté à son tour de rendre positive la science sociale, mais en la faisant directement dépendre de la physiologie : même si la physique sociale est une branche de la physiologie, et même si l'histoire de la civilisation n'est que la suite de l'histoire naturelle de l'homme, comme Comte l'admet, il n'en reste pas moins que l'observation directe du passé est nécessaire. La science sociale telle que Comte la propose se fonde sur l'histoire qui permet l'étude du mouvement général et d'ensemble, tandis que les faits particuliers sont appréhendés ensuite.

 

 

 

Pour conclure, retenons que nous avons donc considéré le dessein d’Auguste Comte de faire asseoir la science sociale et l’entreprise de  la voir émerger. L’apport de Comte a été un apport conceptuel avec le positivisme, la loi des trois états et bien d’autres.  De plus, Comte pense constamment aux lointaines et utiles conséquences de cette ultime instauration positive que serait l'instauration de la science sociale. En fait, elle résoudrait d'après lui tous les problèmes politiques, et comme tout est politique, et qu'il n'y a pas, pour Comte, de distinction entre le domaine public et le domaine privé, la science sociale résoudrait tous nos problèmes. Cette sociologie de l'organisation et du consensus serait aussi notre panacée. On peut résumer l'effet majeur de la reconnaissance de la science sociale effectivement positive, c'est le service social sur la base d'un capital sans capitalistes, le capital étant la garantie de la survie d'une génération à l'autre.

auguste

« - Représentation philosophique d'ensemble du problème de l'illusion et de son statut général. Les puissances d'illusion dans le récit symbolique de Platon, «Allégorie de la caverne», La République, livre VII. Une condition déchue, génératrice d'illusions.

Cf.

Pascal, Pensées (édition Brunschvicg 83 : « L'homme n'est qu'unsujet plein d'erreur, naturelle et ineffaçable sans la grâce.

Rien ne lui montre la vérité.

Tout l'abuse; ces deuxprincipes de vérités, la raison et les sens, outre qu'ils manquent chacun de sincérité, s'abusent réciproquement l'unl'autre»). Le recensement des différentes illusions qui conduisent l'homme à l'erreur, d'après Bacon (Novum organum, I):illusions liées à la succession des théories qui se contredisent, au langage quotidien dépourvu de rigueur, auxpréjugés issus d'une éducation et d'un milieu, à l'empirisme ou, au contraire, au goût de la spéculation abstraite,etc. — L'approche génétique des différents types d'illusion. L'illusion géocentrique comme illusion de perspective.

Cf.

Copernic, Lettre-préface au De revolutionibus orbiumceles-tium : «...

Le cours apparent des étoiles n'est qu'une illusion d'optique, produite par le mouvement réel de la Terre et parles oscillations de son axe.

» L'illusion finaliste comme produit de l'imagination humaine.

Spinoza, Éthique, I (Appendice). L'illusion du libre arbitre comme ignorance des causes véritables de l'action.

Spinoza, Lettre à Schuler (ÉditionsGarnier-Flammarion, tome IV, Lettres, lettre 58). L'illusion du dogmatisme métaphysique.

Kant, Critique de la raison pure (Dialectique transcendantale). L'illusion idéologique selon Marx.

A une explication de l'origine de l'inversion idéaliste (a), Marx associe une étudedu mécanisme par lequel se constitue l'illusion d'autonomie de l'idéologie (b). a) Cf.

Introduction à la Critique de l'économie politique (Éditions Sociales, page 165). « Pour la conscience — et la conscience philosophique est ainsi faite que pour elle la pensée qui conçoit constituel'homme réel et, par suite, le monde n'apparaît comme réel qu'une fois conçu —, pour la conscience, donc, lemouvement des catégories apparaît comme l'acte de production réel (...) dont le résultat est le monde.

» b) Cf.

L'idéologie allemande, première partie (Éditions Sociales), et L.

Feuerbach et la fin de la philosophie classiqueallemande, de F.

Engels (in Études philosophiques, Éditions Sociales, page 56) : « Chaque idéologie, une fois constituée, se développe sur la base des éléments de représentation donnés etcontinue à les élaborer; sinon elle ne serait pas une idéologie, c'est-à-dire le fait de s'occuper d'idées commed'entités autonomes, se développant de façon indépendante et uniquement soumises à leurs propres lois (...) Queles conditions matérielles d'existence des hommes, dans le cerveau desquels se poursuit ce processus mental, endéterminent en fin de compte le cours, cela reste chez eux nécessairement inconscient, sinon c'en serait fini del'idéologie.

» L'étude des illusions liées aux valorisations effectives inconscientes.

Bachelard, Psychanalyse du feu, (ÉditionsIdées/ Gallimard). • Corrélations. La réflexion sur les origines des illusions occupe une place décisive dans la philosophie.

On peut la référer, entreautres, aux questions suivantes: — le langage (cf.

la rhétorique comme puissance d'illusion et la théorie de l'obstacle verbal) ; — l'imagination (cf.

le fantasme comme scénario imaginaire, et les illusions de la vie affective); — le jugement (cf.

le pouvoir de distanciation de la volonté par rapport à la « force » des représentations) ; — la religion ; — l'idéologie (question optionnelle — problème des illusions collectives) ; — la métaphysique (les illusions du dogmatisme);. »

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