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L'art n'est-il qu'une imitation de la réalité ?

Publié le 14/07/2004

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L'art est un reflet de la réalité, un miroir souvent déformant qui nous donne des choses une vision fausse, puisque nous prenons du plaisir à regarder des images de choses dont la vue nous est pénible dans la réalité. De plus, l'instinct d'imitation est naturel à l'homme, c'est ce qui le différencie des autres animaux. C'est la propension à l'imitation qui est à l'origine de toutes les productions esthétiques quelles qu'elles soient.

MAIS...

En art, l'imitation n'est pas un simple décalque de la réalité, mais une sorte de recréation qui transpose en figures une réalité ou un récit. C'est aussi une pirification des passions.

  • I) Créer une oeuvre, c'est imiter la nature.

a) Peinture et sculpture imitent la nature. b) La tragédie imite la vie. c) Tous les arts sont imitatifs.

  • II) L'imitation n'est pas, selon Aristote, pure copie du monde.

a) Le poète est un créateur. b) L'art est une source d'émotions inédites. c) L'art est purgatif.

.../...

« b) Toutefois, cette conception de l'art pose problème, car elle fait de l'artiste une sorte d'être surnaturel qui auraitle pouvoir de voir au-delà de ce que les autres voient.

Cette position pousse à faire de l'artiste un être mû par uneforce irrationnelle qui le transporte du côté de la vérité et laisse les autres dans l'illusion.

Si l'on accepte cetteperspective, on est obligé d'accepter également le fait que n'importe qui prétendant présenter la vérité dans sesœuvres artistiques pourrait avoir raison.

En l'absence d'un critère rationnel et objectif permettant d'évaluer l'artiste,toute subjectivité prétendument artistique obtient raison.

Ainsi le premier fou venu qui produit quelque chosepourra-t-il prétendre toucher l'absolue vérité du doigt, quand bien même tous les autres y resteraient insensibles.c) Par conséquent, postuler que l'art révèle le réel, c'est également tuer l'art, car c'est considérer qu'à chaque foisque quelqu'un se passionne pour son œuvre il devient un artiste.

Dès lors tout le monde peut être un artiste et l'artne produit plus aucune valeur ajoutée.

Si tel est le cas, alors l'art n'est plus rien du tout.

L'art comme catharsis. 3.a) Pour couper court à ces problèmes, nous pourrions envisager une position médiane qui nous ramène à Aristote :l'idée selon laquelle l'art est une stylisation de la réalité.

Aristote explique en effet dans sa Poétique qu'il existe deux types de mimèsis.

Si l'une se contente d'être une simple imitation de la nature, la deuxième l'imite également, mais en y ajoutant quelque chose, en opérant une sélection dans l'imitation.

Cette sélection donne à l'art une certainestylisation.

L'artiste ne se contente donc pas d'imiter la réalité, il l'interprète.

Une longue tradition va s'efforcer, en s'appuyant sur l'autorité d' Aristote dans la « Poétique », de montrer la légitimité de l'imitation en particulier et de l'art en général.

Aristote ne conteste pas que l'art soit imitation, mais il réhabilite l'imitation comme « naturelle », c'est-à-dire vraie. L'art n'est pas pour lui ignorance ou tromperie, mais une activité conforme à la « nature ».

Le mot « naturel » se trouve constamment répété dans le passage de la « Poétique » (1448 b) où l'origine de la poésie se trouve rapportée à deux causes « naturelles » « La poésie semble bien devoir son origine à deux causes, et deux causes naturelles.

Imiter est naturel aux hommes [...

] Il est naturel de prendre plaisir aux imitations [...

] » L'art émerge d'une spontanéité naturelle pré-artistique: de là il produit une sphère qui lui est propre et qui n'est nullementinférieure à la nature.

Car la formule célèbre de la Physique: « L'art imite la nature », ne signifie pas que l'art doive reproduire la nature, la copier, mais qu'il est capable de rivaliser avec elle, de produire comme elle.

L'imitationartistique constitue un mode de production autonome, analogue à la productivité créatrice de formes de la nature.

«L'art imite la nature » veut dire que produisant comme elle, il est même capable d'aller au-delà d'elle et d'accomplir ce dont la nature serait incapable.De plus, Aristote ne limite pas l'imitation à une représentation de ce que les choses sont.

Il est tout à fait légitime d'imiter aussi ce que les choses semblent être, le vraisemblable, et même ce que les choses devraient être, l'idéal.L'imitation « réaliste » n'est qu'une des trois manières fondamentales d'imiter : « Puisque le poète est imitateur tout comme le peintre et tout artiste qui façonne des images, il doit toujours nécessairement adopter une des troismanières d'imiter : il doit figurer les choses ou bien telles qu'elles furent ou sont réellement, ou bien telles qu'on lesdit et qu'elles semblent, ou bien telles qu'elles devraient être » (1460 b 7).

Il est légitime, dit Aristote , que tel peintre, Zeuxis par exemple, ait peint les hommes plus beaux qu'ils ne sont, car la ressemblance n'exclut pas l'embellissement.

À plusieurs reprises l'imitation est associée avec l'invention : « Ce n'est pas de raconter les choses réellement arrivées qui est l'oeuvre propre du poète, mais bien de raconter ce qui pourrait arriver » (1451 a 9).

Ainsi il y a un possible artistique qui tient à la cohérence de l'imitation, à sa logique interne, à sa généralité (qui fait que «la poésie est plus philosophique que l'histoire » parce qu'elle s'intéresse davantage au général qu'au particulier).

L'art doit « imiter » mais sans se soumettre à une exactitude factuelle, d'où la célèbre règle de la vraisemblance: « Il faut préférer l'impossible qui est vraisemblable au possible qui est incroyable » (1460 a). Aristote est le premier philosophe à analyser la nature du plaisir esthétique.

Ce plaisir implique pour lui une relation de connaissance: c'est une satisfaction née de la reconnaissance de l'objet imité.

« On se plaît à la vue des images parce qu'on apprend en les regardant et qu'on en déduit ce qui représente chaque chose, par exempleparce qu'on identifie telle figure avec telle personne » (« Poêtique », 1448 b).

Le plaisir esthétique, naturel, universel, et partant légitime tient à ce que l'oeuvre d'art appelle un raisonnement (implicite ou explicite) qui nousfait comparer le portrait à son modèle.

Peu importe que l'objet représenté soit beau ou laid, ce qui nous charme,c'est de retrouver intellectuellement cette relation mimétique entre l'art et la nature.

Contrairement à Platon , l'art n'est pas, de ce fait, ignorance, mais élargissement de la connaissance.

« Nous éprouvons naturellement du plaisir devant les imitations de la peinture, de la sculpture et de la poésie, et en présence de chaque objet fidèlementreprésenté, même si cet objet n'est pas attrayant en lui-même.

En ce cas nous n'éprouvons pas de plaisir par ceschoses mêmes, mais parce que nous les identifions par une sorte de raisonnement syllogistique et accroissons dela sorte notre connaissance » (1 971 b 4).

Le plaisir esthétique n'est pas une sensation, ni une illusion, c'est la satisfaction qui accompagne le jugement par lequel nous découvrons la conformité, la ressemblance entre l'oeuvreet ce qu'elle représente.Malgré cette légitimation, suivie de bien d'autres, la condamnation platonicienne réapparaît à maintes reprises dansla culture occidentale, mais plutôt sous la forme d'une suspicion ou réprobation morale qui englobe l'art, les artisteset leur mode de vie prétendument dissolu.

Ainsi en Angleterre le puritanisme obtient en 1642 la fermeture des théâtres.

Ainsi encore il faut rappeler que l'institution de la censure est extrêmement ancienne et persistante: elleexistait déjà à Athènes, fut exercée Par l'Église et Plus tard organisée par Richelieu en appareil d'État.

On se souvient du procès de Flaubert pour « Madame Bovary » (il fut acquitté) et de celui de Baudelaire pour « Les Fleurs du Mal » (il fut condamné).

Si aujourd'hui la censure théâtrale a cessé de s'exercer, une censure cinématographique continue de fonctionner sous le sempiternel prétexte de la protection de la jeunesse contre levice, l'indécence, la débauche et le crime.

Mis à part le problème de la liberté de la création, et celui d'une moralitépublique défendue par l'État, la question que pose l'existence de la censure est celle-ci: l'art doit-il être édifiant ?. »

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