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Les arts sont-ils un langage ?

Publié le 23/03/2004

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Par exemple, comme le note Peirce lui-même : « Dans certaines traditions médiévales, les personnages vicieux sont expressément et uniformément représentés de profil, et seulement de face dans l'art de l'ancienne Égypte. «

- « La différence de taille des silhouettes revêt des significations opposées selon les codes picturaux. «

* Se pose également le problème de la poésie. La poésie est-elle langage, en quel sens ?

* N'aurions-nous pas une répugnance à admettre qu'en un certain sens l'art est langage parce que (cf. René Huyghe dans son livre « L'Art et l'âme «) on s'imagine « qu'un art langage devrait fatalement s'astreindre à traduire en images, par une sorte de mot à mot visuel, des idées distinctes comme celles qui s'expriment par la parole et la plume « ? * Cependant tout ceci prouve simplement, qu'en un certain sens, l'art peut être un langage (dans la mesure où il peut être communication par signes). Mais l'est-il nécessairement ? Autrement dit la communication, la volonté de communiquer, est-elle consubstantielle à l'art, à l'activité artistique ? N'opère-t-on pas une réduction abusive lorsqu'on dit - même au sens ainsi défini - que l'art est un langage ?

La question nous convie à étudier de plus près bon nombre de lieux communs, aussi bien à propos du langage qu'à propos des arts. Bon nombre d'élèves de terminale, dissertant sur le langage, ont tendance à étendre à l'excès l'extension de la notion en parlant du langage des fleurs, de la peinture, de la musique... sans examiner les différences qui peuvent exister. À l'inverse, lorsqu'on parle des arts et notamment du travail de l'artiste, on dit facilement qu'il « veut exprimer quelque chose «, qu'il « cherche à nous dire, à nous communiquer ses états d'âme «, etc. On envisage donc l'art à travers le modèle du langage, sans se demander si ce dernier est pertinent C'est ce que nous sommes à présent invités à faire.

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« Introduction Évoquant le travail de l'artiste, on dit souvent qu'il veut « communiquer » quelque chose au public; à propos de l'art « engagé », on parle de son « message».

Les arts sont-ils donc un langage? Cette question nous invite à réfléchir sur la pertinence d'une métaphore très souvent employée.

C onstitue-t-elle unmodèle pertinent pour comprendre ce qui se passe entre les artistes et le public, ou risque-t-elle d'introduire des confusions?Nous envisagerons d'abord les raisons qui conduisent à l'usage si fréquent de cette image; nous examinerons ensuite les limites du modèle, en nousacheminant progressivement de l'idée de langage vers celle d'expression et d'interprétation. I.

Le langage des arts L'artiste veut dire quelque chose Une des origines de la métaphore est le mouvement d'expression : par l'oeuvre, l'artiste « s'adresse » au public, il lui « dit » quelque chose.

C'est évidentlorsque des arts comme la poésie ou le roman utilisent vraiment la parole; mais ils l'utilisent de façon indirecte.

On pense souvent que l'art, par exemple lapeinture ou la danse, est le meilleur moyen trouvé par l'artiste pour dire sa vie intérieure.

C'est encore plus frappant lorsque l'art doit véhiculer un «message » politique, lorsque l'art devient « engagé ».

Le message devient ici plus explicite car il ne doit pas y avoir de malentendu.Certaines choses ne peuvent se dire qu'à travers l'artDe même, il nous semble que les oeuvres d'art nous sont d'un précieux secours pour dire des choses que nous nous sentons incapables d'exprimer, parexemple l'amour ou la tristesse.

Une musique, une danse ne se substituent-elles pas à notre parole qui resterait plate et insignifiante?Code ou langage universel?Si les arts sont un langage, chaque art particulier est-il l'analogue d'une langue? Et dans ce cas, faut-il l'apprendre pour la comprendre? L'art serait-il leseul langage compréhensible part tous et immédiatement, sans apprentissage ? Il faut au moins une longue pratique pour en saisir toutes les nuances etcertains artistes semblent élaborer un code qui leur est propre et qui demande un long travail de déchiffrement.

Mallarmé, par exemple, refusaiténergiquement l'idée d'un art accessible sans effort. II.

Un langage muet ? Il semble donc qu'une analogie intuitive et générale soit plausible; mais peut-elle valoir dans le détail et servir de fondement à une analyse rigoureuse? Nemontre-t-elle pas alors des limites? Langue et langage Il faut remarquer tout d'abord, comme nous commencions à le suggérer en fin de première partie, que la question pose un problème d'homogénéité.

Parle-t-on de langage ou de langue, d'aptitude générale à la communication signifiante ou de systèmes concrets de signes? Peut-on vraiment dire que les artssoient un langage? L'analogie de la grammaire est-elle correcte pour penser l'architecture d'un tableau ou l'organisation des figures d'une chorégraphie? Quelle communication? De plus, il manque dans la plupart des arts une dimension essentielle dans le langage, celle de la communication vivante, du dialogue.

L'artiste crée; onpeut dire que par là il nous dit quelque chose, mais que pouvons-nous répondre, nous qui contemplons son oeuvre plus tard et en son absence?Surtout, pouvons-nous répondre dans la même langue ? Dans ce cas ce serait un échange d'oeuvres d'art et le dialogue serait réservé aux artistes entreeux. Enveloppement et explicitation Enfin, une des fonctions premières du langage est de dire un sens de façon à ce que chacun comprenne la même chose, pour éviter les malentendus.

En va-t-il de même pour les arts ? C hacun ne revendique-t-il pas une certaine liberté d'interprétation, voire un plaisir pur qui se passe de « compréhension » ?Parler ici de langage n'est-il pas alors un...

abus de langage ? III.

Langage et expression Ces réserves montrent que l'analogie doit être maniée avec prudence; on peut néanmoins lui trouver un sens pour penser le mouvement de l'ex-pression. Langage et symbole On peut d'abord souligner la présence fréquente, dans les différents arts, d'un symbolisme plus ou moins « codifié ».

Dans certains arts (religieuxnotamment) ou certaines écoles (Pétrarque et le sonnet amoureux) les symboles ou le cadre d'expression sont définis de façon assez stricte, parfois ilssont plus libres; dans tous les cas il s'agit de comprendre que l'art, s'il dépasse la simple décoration, renvoie à quelque chose, au-delà de sa matérialité, àun sens. Intériorité et expression Ce sens, l'artiste l'exprime sans savoir parfaitement à l'avance ce que sera le résultat.

Il en va de même lorsque nous parlons: nous nous lançons dans uneexpression avec une intention de signification qui parfois échoue : nous peinons à nous faire comprendre.

De même qu'un artiste rencontre souvent l'échec,de même le langage n'est pas un outil toujours docile. La patience du sens Cette visée de sens peut également valoir pour le « public ».

Le cas de la compréhension immédiate d'une phrase ou d'un discours vaut pour les messagesrelativement simples, mais nous faisons régulièrement l'expérience d'une nécessaire interprétation de ce qui nous est dit.

Nous nous portons au-devant dumessage à comprendre avec une intention de sens qui doit être souple, procéder par esquisses et révisions.

N'en va-t-il pas de même pour l'oeuvre d'art?La compréhension est indirecte car la signification est métaphorique? Conclusion Ce mouvement de la réflexion du simple dire vers l'expression ou la réception comme intention de sens ne nous conduit-il pas en fait à une circularité del'analogie? Il semble en effet que le cas de langage qui corresponde le mieux à l'art soit...

le langage poétique.

Et alors on affirme que les arts sont une formed'art.

Ce nouveau problème nous montre bien que l'analogie ne peut valoir que comme outil de compréhension qui ne doit pas être confondu avec unevolonté d'identification stricte.

L'analogie peut fournir des clefs d'interprétation, l'identification ne conduit qu'à des déformations et à l'effacement desparticularités de chaque terme.. »

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