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Auteurs: SPINOZA

Publié le 16/04/2012

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spinoza

Né en 1632 à Amsterdam, d'une famille juive portugaise, Spinoza reçoit une formation talmudique et philosophique. À vingt-quatre ans, il est exclu de sa communauté par les rabbins qui lui reprochent ses positions rationalistes. En marge des traditions, Spinoza développe une ouvre qui, de son vivant, reste à l'écart des circuits officiels de l'édition et de la censure, mais est présente dans de petits cercles d'amis cultivés. Sa publication sera posthume ; mais à la mort de Spinoza, en 1677, elle suscite déjà de nombreuses oppositions. Ce système, qui s'inscrit dans l'horizon de la philosophie rationaliste du XVIIe siècle, repose pourtant sur une définition traditionnelle de la philosophie comme connaissance de soi, du monde et de Dieu, qui conduit à la béatitude. Son but est éthique, mais une éthique qui se définit comme une philosophie de la joie et de la liberté. Le système de la nature, construit par une raison purifiée de toutes ses superstitions, est subordonné à l'affirmation d'une liberté joyeuse. La théorie de la connaissance dessine l'itinéraire d'un esprit qui se libère de l'imagination servile, premier genre de connaissance, borné au ouï-dire et au préjugé, pour accéder au deuxième genre, pensée rationnelle et logique qui est vraie mais générale, puis enfin au troisième genre, où, par une connaissance intuitive et singulière, il devient possible d'atteindre l'" amour intellectuel de Dieu ". Le premier pas consiste donc à abandonner l'idée d'une nature finalisée, créée par un Dieu personnel et transcendant, et organisée en vue de l'homme, centre de la Création. A cette construction illusoire née de nos craintes et de notre croyance aux causes finales, Spinoza oppose le système d'un Dieu comme totalité. Substance active, ce Dieu ni transcendant ni personnel exprime une infinité de choses sous une infinité de modalités, dont aucune n'est privilégiée : ni l'homme sur l'animal, ni l'esprit sur le corps. Mais Dieu comme puissance engendrant tous les êtres naturels, ou " nature naturante ", ne désigne pas une vie confuse. Dieu, structure rationnelle, est à la fois ce qui exprime et ce qui permet d'expliquer le monde. La substance infinie, qui est cause de soi, s'exprime sous les attributs Étendue et Pensée, qui eux-mêmes s'expriment ensuite sous les deux modes finis que sont les corps et les idées. Tout être particulier est donc situé, comme mode fini appartenant à un attribut précis, par rapport à la substance qui enveloppe toute la réalité. Ce système rationnel de la nature, où rien n'est sans cause et où toute cause est déterminable, libère notre imagination des mystères, des miracles, et du surnaturel. Ainsi, l'homme n'est pas la juxtaposition d'un corps et d'une pensée qui seraient deux réalités hétérogènes, mais l'unité dynamique d'un corps et d'une idée de ce corps. Cette réalité humaine est un fragment du tout de la nature et en exprime partiellement la puissance. Autrement dit, l'homme est, comme tous les autres êtres, essentiellement désir, conatus, persévérant dans son être. Même l'activité intellectuelle affirme cet effort. Le désir n'est pas propre au corps. Il est ce mouvement unique et essentiel où le corps et l'esprit augmentent en même temps leur puissance dans un sentiment actif de joie, ou la diminuent, d'où un sentiment passif de tristesse. A partir de ces deux passions fondamentales, Spinoza fait la genèse de tous les affects joyeux ou tristes, et les traduit en termes de variations de puissance selon les deux pôles que sont la liberté et la servitude. Ainsi, la passion affecte ensemble le corps et l'esprit parce qu'en elle, tous deux sont asservis et soumis à des causes non comprises. A l'inverse, comprendre l'ordre réel des choses et saisir notre place dans la causalité totale, c'est penser adéquatement et augmenter à la fois la puissance de notre esprit et celle de notre corps. La liberté ne réside donc pas dans une fuite hors de la nature, ni dans une négation ascétique du corps. Elle est réalisation, par la pleine compréhension des lois de la nature, des puissances conjointes du corps et de l'esprit. La connaissance parfaite libère de toutes les fausses pensées, en instaurant entre le tout de l'Etre et notre raison une relation réflexive, source de joie et accès à la béatitude. Une seconde naissance conclut ainsi l'itinéraire spirituel de l'Éthique, où la raison va, d'axiome en proposition, de Dieu comme structure abstraite du réel, à Dieu compris dans une intuition singulière qu'est l' " amour intellectuel de Dieu ". C'est ce sommet de notre vie et de notre désir que nous propose d'atteindre Spinoza, en construisant une réversibilité étonnante, difficile, entre connaissance parfaite, amour, vertu, liberté et joie.

spinoza

« âme et dans le monde une zone obscure où puisse se cacher un Dieu.

On doit exiger qu'ils dis­ tinguent tous les contours.

Spinoza n'a pas connu Pascal, mais il a étudié toutes les théologies, la juive et la chrétienne, et la théologie parle de Dieu, elle est discours et, comme tout discours sensé, elle se veut cohérente et veut révéler son objet.

Elle doit donc dire, comme les athées, des choses parfaitement claires.

Or, selon Spinoza, la théologie échoue et s'enlise dans les contradictions.

Certes, la religion spirituelle a raison : l'unique chose qui compte pour l'homme est son salut, l'union à Dieu, mais cette union ne peut être recherchée dans la crainte et le gémissement.

L'homme vraiment homme veut comprendre ce que Dieu est.

Croire, ne pas croire, c'est toujours croyance, et Spinoza, comme le théologien, a choisi la philosophie, c'est-à-dire le langage raison­ nable.

Il ne s'agit donc pas d'affirmer dans l'angoisse et le tremblement la présence de Dieu, mais bien de former l'idée de Dieu, de dévoiler, non l'existence, mais la nature vraie de Dieu.

La théologie a tout dit, il reste à comprendre.

Là est le secret de l'imperceptible ironie du philosophe qui sait ce que les autres entrevoient et pressentent sans savoir ce qu'ils voient.

Les théologiens ont voulu penser Dieu, le Dieu de la religionjuive et chrétienne; ils ont voulu former le logos qui fait paraître Dieu tel qu'il est, non tel que les représentations de l'image et du sentiment l'ont peint et sculpté.

Mais l'ont-ils assez pensé, avec la rigueur de l'esprit de vérité? Ils se sont perdus dans l'immensité obscure et ineffable de l'infini et de l'éternel, ils ont décrit un Dieu trop humain, faible, avare, fantomatique, un Dieu indigne.

Les questions traditionnelles ne sont pas absurdes mais elles ne sont qu'ébauches jamais conduites à leur fin, embarrassées par l'image de l'homme qui masque l'idée de Dieu telle que la révèle la raison.

Dieu, pensé raisonnablement, Dieu qui n'humilie pas la raison, mais l'honore, se révèle alors Deus siue Natura, la nature même des choses.

Par définition, Dieu est l'être absolu, ce qui est absolument substance, c'est-à-dire l'être qui est en soi et conçu par soi, qui n'est donc pas l'effet d'un autre et conçu par un autre concept, mais compréhensible et compris en lui-même, essence qui est existence, existence qui est nécessaire, qui est pleinement, la réalité intégrale, l'achèvement, la perfection.

N'est-ce pas ce que, de tout temps, les philosophes ont appelé Natura, la nature des choses? Or ce qui est pleinement réel n'est pas ceci ou cela ni la somme des êtres, mais le tout de l'être, le tout qui seul est l'.Ëtre.

La totalité seule est absolument intelligible parce que, seule, elle est absolument et elle se révèle être absolument parce qu'elle est absolument intelligible.

Toutes les autres choses ne sont que par elle, comprises en elle.

L'être absolu est sans limites, ce en dehors de quoi il n'y a rien, totalité infinie et compréhen­ sible comme infinie.

Ce n'est donc plus l'effrayante et attirante profondeur du Dieu obscur, la distance sans cesse renaissante qui laisse toujours à l'âme une course sans fin à accomplir, la trans­ cendance sacrée au seuil de laquelle l'homme demeure sans parole, abîme de petitesse; l'infini est au contraire l'idée claire, parfaitement conçue et qui fait concevoir tout autre, source de tout être et de toute intelligibilité.

L'infini n'est pas l'obstacle insurmontable de la raison, mais l'essence même de l'intelligibilité divine.

Tout être fini n'est que partiellement intelligible et ne devient compréhensible parfaitement que compris dans le tout.

Toute détermination est négation, c'est-à-dire : toute assignation de limites nie, exclut, quelque chose de l'infini qui est affirmation absolue, être positivement conçu.

Au principe de toute chose, il y a l'être infini qui le comprend, aux deux sens de ce terme : l'intègre et l'explique.

Les choses particulières sont donc des modifi­ cations de la substance infinie, tandis que la substance infinie n'est rien en dehors des modes dans lesquels elle s'explique et se développe.

Tel est le Dieu intelligible de Spinoza, le Dieu même des religions, pensé en vérité et sans concession aux imaginations de l'homme.

La philosophie est le langage raisonnable qui révèle ce Dieu comme le Tout infini de l'être dans son unicité : elle est donc système, liaison organique de tous les concepts de toutes les choses dans l'unicité du concept de Dieu.

«Athée de système», dit excellemment Bayle de Spinoza.

C'est en effet par le discours absolument cohérent que Dieu se révèle la substance même des choses et non transcendance au monde.

La révélation philoso­ phique n'est pas la parole sacrée que l'homme doit croire sans comprendre; elle est coextensive à l'être même, la transparence de l'être.. »

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