autobiographie

L'autobiographie est un genre neuf, inauguré par Jean-Jacques Rousseau à partir de 1765. L'étymologie grecque - auto "soi-même, bio "vie" et graphia, de graphhein "écrire", "écriture" - définit précisément la nature de ces oeuvres qui apparaissent à l'aube du XIXe siècle. Il s'agit de raconter, par le menu, l'histoire de sa propre vie. QUAND LE MOI N'EST PLUS HAISSABLE Dans les Essais, Montaigne, au XVI' siècle, annonce à son lecteur: "Je suis moi-même la matière de mon livre". Mais la démarche diffère de celle de Rousseau en ce que le maire de Bordeaux ne retrace pas les grandes étapes de sa vie. Il puise dans sa sensibilité comme dans les rencontres déterminantes de sa vie intellectuelle, sans chercher à donner à l'ensemble une cohérence chronologique. De fait, il nourrit les réflexions que son livre expose de son expérience d'homme et de lecteur. Montaigne revendique sa subjectivité plus qu'il n'invente un genre. C'est donc à Rousseau que revient l'honneur de "former une entreprise qui n'eut jamais d'exemple...". Les Confessions, rédigées entre 1765 et 1770, marquent bien une rupture radicale : Rousseau réclame le droit de présenter au lecteur la vie d'un homme "ordinaire". Avant lui, seuls les hommes illustres méritaient qu'on s'intéressât à leur existence. En outre, le soin de narrer leur vie exemplaire était généralement laissé à un historien (César, de ce point de vue, est un cas particulier). Rousseau prend lui-même la plume pour conquérir ce privilège des Grands. A l'origine de l'entreprise, il faut toutefois rappeler un désir de justification. Voltaire vient en effet de publier, en 1764, un court pamphlet, Le Sentiment des citoyens, dans lequel il accuse Rousseau d'avoir abandonné ses enfants. L'auteur de l'Emile doit répondre, mais la réponse excédera largement cet épisode particulier. Rousseau, pour se justifier, croit nécessaire de se dénuder : "Je me suis montré tel que je fus, méprisable et vil quand je l'ai été, bon, généreux, sublime, quand je l'ai été". En avouant ses fautes, il retire à quiconque la possibilité de l'incriminer injustement. Rousseau se confesse à son lecteur, mais il avoue surtout sa haine de l'injustice. Les Confessions sont avant tout un réquisitoire contre l'injustice naturelle des hommes. En inventant l'autobiographie, Rousseau réhabilite le "moi" si déprécié des écrivains du siècle précédent. Parler de soi n'est plus inconvenant, c'est désormais indispensable : Les Confessions ouvrent la voie au Romantisme.