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L'autre comme condition de ma liberté ?

Publié le 25/06/2004

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■ La liberté est alors non pas tant un fait qu'une exigence dont l'homme doit se montrer digne. Autrui Désigne l'autre, en tant qu'il est cependant mon semblable. Autrui est un alter ego, c'est-à-dire à la fois un autre moi, et un autre que moi. C'est cet entrelacement du même et de l'autre en autrui qui fait l'objet d'un questionnement philosophique. La question de la liberté se pose à l'homme, parce qu'il est un sujet, autrement dit parce qu'il est conscient. Qu'est-ce qu'être conscient, en effet? Être conscient signifie d'abord qu'au moment où il sent, pense ou agit, l'homme a au même moment conscience de sentir, penser ou agir. Mais cela signifie aussi qu'il est capable de faire retour sur ses sentiments, ses pensées et ses actes, pour les juger, les condamner ou les revendiquer. Or l'expérience du remords ou du regret témoigne d'un écart possible entre l'acte et l'intention ou l'acte et ses conséquences. L'homme se trouve alors confronté à l'obligation d'admettre comme siens des sentiments, des pensées ou des actes sans pourtant pouvoir s'y reconnaître.

« « Je suis condamné à être libre » : cette affirmation de Sartre peut certessembler paradoxale.

Elle exprime cependant avec force que la liberté seconfond avec la définition même de l'homme.

Si l'homme est libre, c'est parcequ'il n'est pas un objet possédant des propriétés ou des caractéristiquesdéterminées une fois pour toutes, mais qu'il est, au contraire, un sujet, c'est-à-dire une conscience.

Or la conscience n'est pas une « chose », mais ce parquoi je me rapporte à quelque chose, dont je suis distinct : à ce passé que jene suis plus, au futur que je ne suis pas encore.

Prétendre expliquer sesactes à partir d'une nature donnée une fois pour toutes - que ce soit pours'en décharger, ou au contraire pour les revendiquer - c'est se tromper soi-même.

Car vouloir se ressaisir dans une identité rassurante est en faitimpossible : en l'homme « l'existence précède l'essence « Parce qu'il n'estrien, l'homme est condamné à se faire, autrement dit l'homme n'est que cequ'il se fait.

Mais par les choix qu'il fait, y compris les plus personnels, l'hommeengage du même coup l'humanité tout entière.

En choisissant d'être uncertain type d'homme, nous affirmons en même temps la valeur de ce quenous choisissons.

L'homme est « responsable de tous les hommes », nous ditSartre. Sartre doit son immense notoriété à la vogue de l'existentialisme (philosophie de la liberté et de la responsabilité), dont il fut considéré comme le fondateur,même si la lecture de la « Phénoménologie » de Husserl et de « L'Etre et le Temps » de Heidegger l'a profondément influencé.

Deux formules pourraient résumer sa conception de la liberté.

La première, que l'on trouve dans « Saint Genet » (1952): « L'important n'est pas ce qu'on a fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu'on a fait de nous .

» La seconde, qui figure dans un opuscule intitulé « L'Existentialisme est un humanisme » (Nagel) où Sartre répond à diverses objections formulées notamment, par les catholiques et les marxistes à sa conception existentialiste de l'homme: « L'homme est condamné à libre .

» Qu'est-ce que l'existentialisme ? C'est l'affirmation que, chez l'homme, l'existence précède l'essence.

Autrement dit,rien n'est donné d'avance à l'homme.

N'ayant pas d'essence préalable, l'homme se trouve condamné à choisirlibrement son essence : « Qu'est-ce que signifie ici que l'existence précède l'essence ? Cela signifie que l'homme existe d'abord, se rencontre, surgit dans le monde, et qu'il se définit d'abord.

L'homme tel que le conçoit l'existentialiste, s'il n'estpas définissable, c'est qu'il n'est d'abord rien.

il ne sera qu'ensuite, et il sera tel qu'il se sera fait. » L'homme n'est ni ceci ni cela.

Son existence n'est d'abord soutenue par rien.

C'est précisément parce que l'hommen'est d'abord rien qu'il se distingue de toute autre réalité et que son existence est liberté, ne peut qu'être liberté.

La chose qui est ceci ou cela, qui n'est que ce queue est, ne saurait être libre.

Un arbre ne peut jamais être quel'arbre qu'il est.

Un objet n'a pas à être : un coupe-papier, par exemple, est.

Tout objet matériel est.

L'hommen'est pas.

Il n'est pas d'avance ceci ou cela, ce qu'il va devenir n'est pas décidé d'avance.

L'homme est ce qu'il sefait: « Ainsi il n'y a pas de nature humaine, puisqu'il n'y a pas de Dieu pour la concevoir L'homme est seulement, nonseulement tel qu'il se conçoit, mais tel qu'il se veut, et comme il se conçoit après l'existence, comme il se veutaprès cet élan vers l'existence; l'homme n'est rien d'autre que ce qu'il se fait. » Et si l'homme n'est d'abord rien et doit librement choisir son essence, cela signifie qu'il est pure subjectivité,projet : « C'est aussi ce qu'on appelle la subjectivité.

et que l'on nous reproche sous ce nom même.

Mais que dire parlà, sinon que l'homme a une plus grande dignité que la pierre ou la table ? Car nous voulons dire que l'hommeexiste d'abord, c'est-à-dire que l'homme est d'abord ce qui se jette vers un avenir, et ce qui est conscient de seprojeter dans l'avenir L'homme est d'abord un projet qui se vit subjectivement, au lieu d'être une mousse, unepourriture ou un chou-fleur » La liberté est donc, pour Sartre , un absolu qui ne se choisit pas.

L'homme ne choisit pas d'être libre, il l'est, il ne peut que l'être.

Il l'est tout entier et toujours.

Il ne saurait être tantôt libre, tantôt esclave.

Ce que Sartre exprime sous cette formule : « L'homme est condamné à être libre .

» Si l'homme est celui qui se fait, ce projet réalise pas dans l'intimité douillette d'un ego refermé sur lui-même, maisne peut se réaliser que dans son rapport au monde et à autrui.

L'homme est « en situation ».

C'est-à-dire qu'il est « conditionné par sa classe », « son salaire », « la nature de son travail », conditionné jusqu'à ses sentiments et ses pensées.

Mais si l'homme ne peut pas choisir sa classe sociale, il peut se choisir lui-même dans sa «manière d'être ».

Sartre lui-même reconnaît en 1940 qu'il est « le produit monstrueux du capitalisme, du parlementarisme, de la centralisation et du fonctionnalisme », mais c'est à partir de cette situation familiale qui l'a constitué qu'il entreprend de se « personnalise r ».

D'où la formule : « L'important n'est pas ce qu'on a fait de nous, mais ce que nous faisons nous-mêmes de ce qu'on a fait de nous.

» La situation n'est pas quelque chose qui limite la liberté elle est ce à partir d'où commence la liberté.

C'est la raison. »

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