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Autrui: sympathie, contagion, confusion ?

Publié le 27/02/2004

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Bien plus, je puis comprendre selon Max Scheler des émotions que je n'ai jamais éprouvées moi-même. Je lis dans ce visage une pureté, une candeur que je n'aurais pas soupçonnées auparavant. Ce regard furieux me signifie une qualité, une intensité de haine que jamais je n'aurais cru possibles. Pradines écrit dans cette perspective que « nous pouvons sympathiser même avec des sentiments que nous ne saurions éprouver soit qu'ils nous dépassent soit au contraire que nous les dépassions, avec la tristesse de Jésus à Gethsemani ou avec les petits chagrins d'un enfant». La connaissance d'autrui bien loin de me renvoyer comme dans la théorie de l'analogie à des expériences familières, élargit au contraire mon horizon, m'apporte d'incessantes révélations. Heidegger : la disparition de l'autre dans le "on" * La confusion résulte, pour Heidegger, d'une emprise des autres sous la forme du "on". Le "on" n'est personne de déterminé et c'est tout le monde. Chacun devient semblable à tout autre et se dissout dans l'existence commune. Il se produit un nivellement de toutes les possibilités d'être selon une conformité à la moyenne.* Ce schéma aboutit à l'indistinction des êtres et à l'irresponsabilité de tous : ainsi dans l'anonymat des foules, « chacun est l'autre et personne n'est soi-même ».

« Heidegger : la disparition de l'autre dans le "on" • La confusion résulte, pour Heidegger, d'une emprise des autres sous laforme du "on".

Le "on" n'est personne de déterminé et c'est tout le monde.Chacun devient semblable à tout autre et se dissout dans l'existencecommune.

Il se produit un nivellement de toutes les possibilités d'être selonune conformité à la moyenne.• Ce schéma aboutit à l'indistinction des êtres et à l'irresponsabilité de tous :ainsi dans l'anonymat des foules, « chacun est l'autre et personne n'est soi-même ». Le ON déploie sa véritable dictature (Heidegger). C'est dans « Être & Temps » qu'Heidegger est amené à analyser notre moded'être quotidien et médiocre, qu'il caractérise par la « dictature du On »,c'est-à-dire le fait que l'opinion publique, la façon commune de vivreensemble, nous déchargent de toute responsabilité et nous empêchent d'êtrenous-mêmes.Heidegger entreprend de remettre en chantier une question, celle quel'histoire de la philosophie aurait « oubliée » et recouverte : la question dusens de l'Être.

Pour ce faire, il juge nécessaire d'expliciter ce qu'est l' « étant» pour qui une telle question se pose.

C'est-à-dire, pour l'exprimer grossièrement, ce qu'est l'homme, ou plus précisément ce qu'Heidegger nomme le « Dasein ».Selon Heidegger, nous ne sommes pas d'abord des sujets isolés, comme le suggérait Descartes, mais nous sommestoujours présents au monde, et par là même avec autrui.

L'être en commun, l'appartenance au monde sont donc desdonnées originaires.

Loin qu'un sujet isolé et assuré de lui-même vienne à la rencontre d'autrui : « Le monde est àchaque fois toujours déjà celui que je partage avec les autres.

Le monde du Dasein est un monde commun.

» En cesens, la solitude et l'isolement sont des modes dérivés et secondaires de cette commune appartenance au monde.Mais, si l'on procède à l'analyse de ce qu'est le « Dasein » médiocre, immergé dans la quotidienneté , dans sesrapports les plus fréquents avec les autres, ce qui se révèle est précisément le fait que « chacun est l'autre et nuln'est lui-même », c'est-à-dire que « dans le quotidien ce qui se révèle c'est un mode d'être inauthentique, une pertede soi.

»Les analyses de la façon commune et habituelle d'être ensemble montrent que nous avons à subir une sorte depression de la masse, du « on », qui manifeste en chacun de nous la possibilité de perdre ou de recouvrir ce quenous sommes, pour nous décharger de nos responsabilités et nos possibilités les plus propres, en nous réfugiantderrière l'opinion publique.« Dans la préoccupation pour ce qu'on a entrepris avec, pour, et contre les autres, se manifeste constamment lesouci d'une différence vis-à-vis des autres.

»En ce sens, consciemment ou pas se manifeste en nous une sorte d'amour-propre, ou, si l'on veut, de « distance »à l'égard de l'autre.

C'est précisément ce type de préoccupation qui nous place, là encore le plus souvent à notreinsu, « sous l'emprise d'autrui ».

Dans la mesure même où nous nous préoccupons du monde public, nous subissonsson emprise : alors même que nous souhaitons faire preuve de distance, ce souci manifeste notre dépendance nonpas à l'égard de tel ou tel, d'un être déterminé, mais à l'égard du public, du « On ».« Dans l'utilisation de transports publics, dans l'emploi de l'information, tout ressemble à l'autre.

Nous nousréjouissons comme on se réjouit, nous voyons, nous lisons et nous jugeons de la littérature et de l'art comme onvoit et juge, plus encore nous nous indignons de ce dont on s'indigne.

»Ce qui est bien sûr remarquable, c'est que ce « On » n'est littéralement personne, il n'est en aucune façon «quelqu'un », et là réside sa puissance.

Il ne s'agit pas de quiconque nous imposant quelque chose, il s'agit de notrepropre alignement sur un mode d'être commun et essentiellement médiocre, dans lequel notre véritable « qui » seperd et se dilue.

« C'est dans cette non-imposition et cette imperceptibilité que le On déploie sa véritable dictature.»Vivre sous le règne du On, c'est d'abord se réfugier dans la médiocrité de l'anonymat, mais c'est par suite, bien plus,se refuser à toute responsabilité :« Comme le On prédonne tout jugement et toute décision, il ôte à chaque fois au Dasein toute la responsabilité.

LeOn ne court pour ainsi dire aucun risque à ce qu'on l'évoque constamment [...] C'était toujours le On et pourtant onpeut dire que « nul » n'était là.

»Ce nivellement, cette médiocrité et cette façon d'éviter toute originalité (« Tout ce qui est original est aussitôtaplati en passant pour du bien connu, tout ce qui a été conquis de haute lutte devient objet d'échange ») serévèlent au mieux dans les bavardages sur la mort.En effet, dans la mort, il en va du tout de mon existence : la mort est ce qui est absolument propre et mien.

Aussil'angoisse devant la mort est-elle en quelque sorte l'angoisse devant la liberté, devant notre être au monde.

Et s' «il est exclu de confondre l'angoisse de la mort avec la peur de décéder », c'est précisément que « l'angoisse de lamort est angoisse « devant » le pouvoir-être le plus propre, absolu, indépassable ».La capacité d'assumer la possibilité de la mort propre, et par suite de se découvrir comme être au monde , commejeté, librement, dans le monde, a donc partie liée avec la capacité du Dasein d'être soi.Or, précisément les bavardages du On à propos de la mort, là encore sombrent dans l'inauthenticité et lerecouvrement.

Il s'agit de camoufler cette mort qui est la mienne en événement, en bien connu.« Si jamais l'équivoque caractérise en propre le bavardage, c'est bien lorsqu'il prend la forme de ce parler sur lamort.

Le mourir, qui est essentiellement et irreprésentablement mien, est perverti en événement publiquement. »

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