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Le beau n'est-il que l'objet d'une perception ?

Publié le 21/03/2004

Extrait du document

perception

Mais cette description nous laisse insatisfaits. Elle relève d'une approche éminemment réaliste. La saisie du beau ne pourrait s'effectuer que par rapport à des objets externes et réels, elle serait liée à la représentation de l'existence d'une chose. Voici qui pose problème comme nous allons le voir. D'autre part, quand j'appréhende le Beau, est-il bien vrai que mon expérience soit rigoureusement perceptive, qu'il n'y ait pas en elle autre chose, par exemple l'effervescence d'une émotion ? Ainsi faire du beau l'objet d'une perception sensi­ble semble, pour une double raison, poser problème. Le beau ne relève-t-il pas d'une autre description et d'une autre analyse ? B. Le Beau, objet d'une contemplation désintéressée. Quelle naïveté, en effet, que de vouloir faire de l'objet esthétique et du Beau des qualités ou des notions s'attachant au réel ! Le Beau n'est pas, à proprement parler, réel ; il se donne, apparemment, à moi, au sein d'une perception, dans le monde des apparences sensibles et des formes empiriques.

• Le plan progressif, par approfondissement de la notion de Beau, avec passage progressif vers un niveau d'étude de plus en plus métaphysique, semble particulièrement indiqué ici, de manière à bien mettre en évidence la nature de l'imagination esthétique et sa dimension ontologique. Voici ce plan.

  • A. Le Beau, objet de la seule perception sensible.
  • B. Le Beau, objet d'une contemplation désintéressée.
  • C. Le Beau est une Idée qui ne saurait en aucun cas être l'objet d'une perception. L'expérience métaphysique du Beau.

• La réponse au problème posé est sans ambiguïté : le Beau désigne une Idée et non point une réalité empirique.

perception

« On pourrait faire la même analyse à propos de tel air de musique : qu'est-ce que le Beau que j'appréhendelorsque je vais à un concert ? Faut-il y voir l'objet d'une perception réaliste ou, bien au contraire, s'attacher àl'élément d'irréalité de ce Beau ? Examinons et nous reprenons ici un exemple de Sartre - comment nous écoutonstelle symphonie jouée dans telle salle de concert.

A vrai dire, le Beau que nous saisissons n'est même pas perçu,aussi paradoxal que cela puisse paraître.

Remarquons la dimension quasi intemporelle de notre « audition ».

Lasymphonie de BEETHOVEN ou de MOZART que nous écoutons ne constitue pas un événement empirique à proprement parler.

La succession musicale qui m'est donnée ne forme pas une succession réelle se donnant dans un temps réel.Une perfection, une harmonie - « le Beau » - se présentent à moi, absolument hors de ma portée.

Le Beau, loind'être donné dans une perception, existe, hors du temps et de l'espace, hors du réel, hors de l'existence.

Il n'estpas perçu, il n'est pas écouté réellement, mais bel et bien atteint dans une autre sphère.

Je ne perçois pas le beau,il se donne à mon imagination déréalisante comme SARTRE l'a si bien montré à la fin de son essai, L'Imaginaire.

Le beau est toujours, en effet, « au-delà ».

En tant que tel, il ne désigne jamais une valeur s'attachant au réel maisune valeur que l'on peut seulement appliquer à l'imaginaire - et non point à la perception.

Nous ne pouvonssimultanément nous placer sur le plan esthétique - celui du Beau - et sur le plan perceptif.

Ils sont exclusifs l'un del'autre.

Quels arguments confirment cette thèse selon laquelle le Beau ne se perçoit pas à proprement parler ? Ilsemble qu'ici encore le flottement pénible que nous éprouvons quand la perception du réel objectif succède àl'imagination esthétique déréalisante soit une confirmation de notre thèse.

Se retrouver dans la rue à la fin d'unconcert n'est pas facile : ceci suppose le passage de l'imaginaire à la perception.

Bien entendu, dans certains cas,ce passage se fait facilement ; mais nous pensons que cette « transition » n'est simple et évidente que pour celuiqui ne s'est pas vraiment « ouvert » au Beau.

Tous ne sont pas en proie à la véritable « extase esthétique »,laquelle est arrachement au perçu. Ainsi la satisfaction esthétique, celle qui porte sur le Beau, étrangère au phénomène perceptif en tant que tel,constitue une satisfaction désintéressée se jouant sur le plan de l'imaginaire et se portant vers Vintelligible, et non point vers le perceptible.

Un dernier exemple tiré de La Nausée nous le montrera.

A la fin du livre, Antoine Roquentinécoute une musique qui le délivre et la beauté de cette musique n'a rien à voir avec l'univers de la perception, celuides choses.

La beauté de la musique, qu'est-elle sinon la négation du monde perçu, la mise à distance du réel de laperception ? Quand Antoine Roquentin saisit cette beauté, il s'affranchit alors du monde perçu et des choses : leBeau, c'est la négation de l'univers perçu et c'est précisément pour cela que la beauté est le salut : par elle et parle Beau, Antoine Roquentin se délivre du réel et des choses.

« Sauvé », pense ROQUENTIN , lorsqu'il entend la voix dans le disque.

« La mélodie[...] elle-même est "hors de portée"[...].

Elle n'existe pas puisqu'elle n'a rien de trop,c'est tout le reste qui est de trop par rapport à elle.

» (La Nausée). Ainsi, nous savons maintenant que la saisie du Beau n'a rien à voir avec une expérience perceptive.

Elle estappréhension d'un intelligible.

Loin d'être perception, elle est imagination pure et, en même temps, effervescence del'émotion.

Cette seconde approche n'est-elle pas infiniment plus riche que la première ? Il semble qu'elle rendemieux compte du caractère désintéressé de la saisie du Beau.Néanmoins, si le Beau est bien davantage que l'objet d'une perception, il nous reste à tenter de comprendrel'expérience métaphysique du Beau.

Qu'est-ce que l'idée de Beau ? Si l'idée de Beau ne saurait être l'objet d'uneperception, il nous faut saisir l'épreuve humaine du Beau en sa signification la plus pure.. »

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