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Le bonheur est-il une illusion ? ou Le concept de bonheur est-il illusoire ?

Publié le 11/04/2011

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illusion

Les philosophies pessimistes et leurs critiques. Pour Schopenhauer (Le monde comme volonté et comme représentation), si les hommes sont condamnés au malheur, c'est au fond parce que la vie est absurde, elle n'a pas de but au sens où il n'y a pas de Providence créatrice qui lui en aurait assigné un: littéralement, les vivants naissent et meurent, pour rien. Ils sont tous animés d'une tendance naturelle aveugle à vivre et perpétuer leur espèce, que Schopenhauer appelle "vouloir-vivre", une expression dont il a soin de désamorcer toutes les connotations psychologiques: la sangsue elle-même est animée d'un "vouloir-vivre", cela ne signifie pas qu'elle a une psychologie proprement dite (les biologistes parleraient plutôt aujourd'hui d'un instinct de survie et de reproduction). Pour Schopenhauer, les désirs humains conscients ne sont fondamentalement que les expressions conscientes et polymorphes du vouloir-vivre constituant leur nature profonde. Pour prendre un exemple simple, l'amour - si romantique soit-il - n'est jamais que la manifestation consciente de la pulsion biologique incitant l'homme comme tous les animaux à perpétuer leur espèce. Le vouloir-vivre, impersonnel, n'a cure du bien-être des animaux qu'il anime - leur vie est une vie d'indifférence et de souffrance, que ne sauraient compenser les maigres satisfactions érotiques qu'ils obtiennent parfois.

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« difficilement satisfaits, il ne connaîtra qu'un malheur larvé, intermédiaire entre deux souffrances extrêmes - l'ennui(qui naît de la répétition et de la satiété) et la passion dévorante (qui naît de la contrariété).

C'est pourquoiSchopenhauer prône l'anti-procréationnisme, qu'il conçoit comme un authentique message moral voué à mettre finaux souffrances de l'humanité en mettant fin à l'humanité elle-même.

Etre bon, c'est ne pas enfanter - se garder detransmettre la vie, pour ne pas transmettre un mal de vivre inéluctable.

Pour les gens déjà nés, Schopenhauer prônel'anéantissement du désir dans l'ascèse, l'ascèse sexuelle notamment.

C'est notamment la lucidité philosophique surla condition malheureuse des hommes et ses causes qui peut amener le désir à s'étioler, pour accéder à latranquillité d'âme, la seule forme de "bonheur" disponible…En cela, Schopenhauer reprend à son compte le message moral des grands ascètes religieux (Jésus, Bouddha), touten rejetant sa dimension religieuse.

Mais pourquoi précisément Sch voit-il le désir d'un si mauvais oeil? Certains deses arguments ne peuvent-ils être au moins nuancés? # pour Schopenhauer, le désir en lui-même est une forme de douleur, qui n'est parfois pas moins atroce que lesdouleurs physiques les plus intenses.

Dans le même esprit, Platon dans le Gorgias comparait le désir à unedémangeaison.

Mais le désir n'est-il pas un sentiment plus complexe, plus ambivalent? Rousseau (Nouvelle Héloïse)parle d'un plaisir de désirer : désirer, c'est déjà jouir en imagination de l'objet désiré.

Et même si l'assouvissement dudésir peut décevoir, la jouissance par anticipation qui accompagnait le désir n'en était pas moins une jouissance.

Cfaussi le Don Juan de Molière, qui dit tirer son plaisir de l'effort de conquête plus que de la conquête elle-même.# pour Sch., le plaisir lié à l'assouvissement du désir a une teneur "négative" - il équivaut essentiellement à uneforme de délivrance: on est soulagé qu'enfin la douleur du désir cesse.

Mais la plupart des plaisirs n'excèdent-ils pasen réalité le simple soulagement?# pour Sch., toute satisfaction est satisfaction de désir, ce qui signifie que l'on ne peut jouir que de ce que l'on aau préalable désiré.

Mais n'expérimente-t-on pas parfois des plaisirs spontanés et impromptus, comme lorsqu'audétour d'un chemin, on découvre un coin de nature insoupçonné? Ne peut-on apprécier, et parfois vivement, uneactivité qu'aucun désir particulier ne nous incitait préalablement à mener? Etc.# pour Sch., les désirs/plaisirs habituels conduisent rapidement à la satiété.

Mais ne peut-on parer aux méfaits del'habitude en cultivant des plaisirs variés? Si peut-être le désir de possession arrive rapidement à satiété et neprocure plus à terme que de maigres satisfactions ponctuelles, ne peut-on trouver un plaisir plus stable et durabledans une diversité d'activités?Il ne s'agit pas ici de verser dans un optimisme béat: pour l'homme, le bonheur n'est certainement pas à portée demain.

Néanmoins, on voit que le nihilisme de Sch peut apparaître comme une forme de pessimisme excessif.

Sanspouvoir affirmer en toute certitude que la vie vaut d'être vécue, n'est-il pas au moins pertinent de parier qu'elle levaut? Une vie sans désir, n'est-ce pas la mort avant l'heure? N'est-ce pas, d'ailleurs, une vie nécessairementfrustrante? Ne vaut-il pas mieux parier sur le désir pour vivre une vie qui au total serait plus plaisante quedouloureuse?C'est en substance ce que Nietzsche suggère (Par delà Bien et Mal, Généalogie de la morale), notamment lorsqu'ilcritique l'idéal ascétique dont Schopenhauer aurait été l'un des grands représentants.

Sch avait beau rejeter leprovidentialisme chrétien, il n'en a pas moins transmis le message moral morbide selon lequel le désir est un malradical.

En réalité, c'est la "neurasthénie" idiosyncrasique du taciturne philosophe, neurasthénie en partie déterminéepar sa biographie et par le poison d'une culture philosophico-religieuse "érotophobe" (Platon, lechristianisme…) qui l'aurait amené à haïr le désir, et ensuite à "rationaliser" cette haine par une philosophiebiologique qui en réalité n'implique pas par elle-même l'impossibilité d'être heureux. D'autres auteurs partageant une même vision pessimiste de la condition humaine, insistèrent aussi sur deuxproblèmes supplémentaires:# pour Freud (Malaise dans la culture), les désirs les plus profonds et les plus vifs (en provenance du "ça", réservoirde pulsions agressives/sexuelles instinctives) sont précisément ceux que la morale/le "surmoi" réprime (c'est lacondition de la coexistence pacifique des hommes en société), ce qui crée chez l'homme une irréductible frustration.# l'homme, seul parmi les animaux, est conscient de sa propre mortalité, ce qui génère chez lui une irréductibleangoisse: pour Pascal (Pensées), la condition humaine est comparable à celle d'un condamné à mort au milieud'autres, qui voit ses compagnons exécutés les uns après les autres, et qui sait que son tour viendra forcémentsans savoir précisément quand). Les deux auteurs admettaient tous les deux une solution au moins partielle aux problèmes qu'ils soulevaient (la"sublimation" des désirs refoulés chez Freud, la croyance religieuse pour contrer l'angoisse chez Pascal).

Même sanssouscrire à de telles "solutions", ne peut-on penser plus simplement d'une part qu'un homme peut avoir une vieérotique relativement épanouie, susceptible de le rendre au moins relativement heureux (notamment dans dessociétés moins répressives qu'elles ne l'étaient par le passé)? Ne peut-on penser d'autre part que l'angoisseexistentielle, même chez l'athée, n'est pas forcément telle qu'elle le mine en permanence? Ne peut-on vivre sonathéisme avec une relative tranquillité d'esprit? Pascal soutenait que sans l'espoir prodigué par la croyance, l'hommepouvait tout au plus se ""divertir" (au sens étymologique: se "détourner" de l'idée de la mort en s'occupant l'espritpar le travail comme les jeux).

Pour Pascal, cette stratégie ne pouvait pas être réellement payante - il en ressortaittoujours davantage de peine que de plaisir.

Mais on peut rétorquer ici à Pascal ce que l'on pouvait répondre àSchopenhauer : rien ne permet d'établir de manière précise quelle quantité de plaisir peut être obtenue dans uneexistence, que ce soit "sans Dieu" ou "avec lui. En bref, il est impossible de répondre de façon catégorique à ces questions mais dans le doute, ne vaut-il pas mieuxparier sur la possibilité d'un certain bonheur que de partir perdant?. »

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