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Le bonheur se mérite-t-il ?

Publié le 28/01/2004

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Le bonheur n'aurait pas de valeur intrinsèque pour lui-même ou absolue mais une valeur relative à une action, à un faire, à une attitude. La question du mérite serait alors liée à la question de la valeur.  Définition des termes du sujet Le bonheur est généralement compris comme un état de satisfaction durable, qui pourrait d'ailleurs être considéré comme le but de toute vie humaine. Dire qu'une chose « se mérite », c'est dire plusieurs choses : que cette chose a une grande valeur, que son acquisition ne peut se faire qu'au prix de certains efforts, qu'elle est donc en quelque sorte la récompense ultime d'un dur travail fourni. Ce qui n'a pas à se mériter, c'est ce qui nous est dû quoi qu'il arrive, quoi que nous fassions : pouvons-nous nous considérer que nous avons le droit de prétendre au bonheur quoi que nous fassions ? Ou bien faut-il préférer une perspective impliquant une responsabilité de l'homme devant son bonheur, si bien que le bonheur apparaîtrait comme la récompense d'un travail sur soi ? Ces questions mettent en jeu la définition du bonheur : est-il un ensemble de conditions extérieures qui ne nous concernent que par chance ou par malchance, qui nous arrivent par accident et sur lesquelles nous n'avons aucune prise ? Ou est-il au contraire un ensemble de dispositions que nous prenons délibérément, et qui touchent tant nos conditions de vie extérieures que nos manières de réagir intérieurement à ce qui vient nous affecter ? Proposition de plan I. L'indétermination du concept de bonheur et des conditions de son obtention : la difficulté du sujet au plan épistémologique La première difficulté provient de l'indétermination du concept en jeu, celui de bonheur.

Le bonheur peut être défini avec Albert Camus comme « l’accord d’un homme avec la vie qu’il mène «. Arrêtons-nous un instant sur l’extrême pertinence de cette définition : en effet, elle est compatible avec la pluralité des définitions subjectives que chaque homme peut donner à la félicité. Le bonheur d’un homme n’est pas celui d’un autre, le seul lien entre leurs bonheurs respectifs est que ni l’un ni l’autre ne serait disposé à échanger le sien contre celui d’autrui. Ainsi, pour reprendre et développer la définition du bonheur par Albert Camus, nous pouvons dire que le bonheur est l’état d’un homme en accord avec la vie qu’il mène, c'est-à-dire le sentiment que sa vie correspond à ses valeurs et aux attentes purement subjectives qui sont les siennes par rapport à l’existence. « Mériter « quelque chose signifie y avoir droit à juste titre, c'est-à-dire être digne de louanges ou d’un châtiment en fonction de nos actes. En demandant si le bonheur se mérite, nous cherchons à déterminer s’il est la récompense de nos actes vertueux, s’il est dispensé aux hommes en fonction de leurs actes et proportionnellement à la bonté et à la vertu dont ils font preuve dans leur vie. Il semble que le bonheur est totalement indépendant d’une semblable dimension morale : s’il est l’accord d’un homme avec la vie qu’il mène, un être mauvais pourra être heureux sans mériter le bonheur d’un point de vue morale. Cependant, cette position pourra sans doute être nuancée au cours de notre travail, car il n’est pas certain qu’un homme puisse se satisfaire d’une vie sans vertu, être heureux en faisant le mal. Nous nous demanderons donc si le bonheur ne se mérite pas, s’il ne faut pas faire preuve de qualités morales pour l’obtenir. La question au centre de notre réflexion sera donc de déterminer si le bonheur est un accord subjectif de l’individu avec la vie qu’il mène indépendant de toute considération morale.

« commandements (proecepta) de la raison ; le problème qui consiste à déterminer d'une façon sûre et générale quelleaction peut favoriser le bonheur d'un être raisonnable est un problème tout à fait insoluble ; il n'y a donc pas à cetégard d'impératif qui puisse commander, au sens strict du mot, de faire ce qui rend heureux, parce que le bonheurest un idéal, non de la raison, mais de l'imagination, fondé uniquement sur des principes empiriques, dont onattendrait vainement qu'ils puissent déterminer une action par laquelle serait atteinte la totalité d'une série deconséquences en réalité infinie... II.

L'illusion de ce qui nous est dû On pourrait d'autre part comparer le traitement de la question du bonheur au traitement que fait ici Rousseau de laméchanceté, afin de produire un concept de la responsabilité qui nous permette de définir ce que serait le fait demériter le bonheur.

Le point central ici est la déresponsabilisation illusoire dont l'homme est capable :déresponsabilisation du criminel dans le texte de Rousseau, à rapprocher d'une déresponsabilisation par lui-même del'homme malheureux qui se plaint de son sort. Rousseau, L'Emile Les coupables qui se disent forcés au crime sont aussi menteurs que méchants : comment ne voient-ils point que lafaiblesse dont ils se plaignent est leur propre ouvrage ; que leur première dépravation vient de leur volonté ; qu'àforce de vouloir céder à leurs tentations, ils leur cèdent enfin malgré eux et les rendent irrésistibles ? Sans doute ilne dépend plus d'eux de n'être pas méchants et faibles, mais il dépendit d'eux de ne pas le devenir.

Et que nousresterions aisément maîtres de nous et de nos passions, même durant cette vie, si, lorsque nos habitudes ne sontpoint encore acquises, lorsque notre esprit commence à s'ouvrir, nous savions l'occuper des objets qu'il doitconnaître pour apprécier ceux qu'il ne connaît pas ; si nous voulions sincèrement nous éclairer, non pour briller auxyeux des autres, mais pour être bons et sages selon notre nature, pour nous rendre heureux en pratiquant nosdevoirs ! Cette étude nous paraît ennuyeuse et pénible, parce que nous n'y songeons que déjà corrompus par levice, déjà livrés à nos passions.

Nous fixons nos jugements et notre estime avant de connaître le bien et le mal ; etpuis, rapportant tout à cette fausse mesure, nous ne donnons à rien sa juste valeur. III.

Le travail du bonheur La conjugaison des perspectives des deux premières parties permet de proposer la solution suivante : à la notion demérite il faudrait peut-être préférer celle de travail – l'accent est ainsi mis sur la responsabilité de l'homme devantson bonheur plus que sur la qualité qui lui permettrait de l'atteindre.

Le bonheur alors se mérite au sens où il semblerefusé à celui qui ne met pas en application des pratiques de recherche du bonheur – la philosophie pouvant êtreune de ces pratiques.

C'est un sens restreint du mérite. Épicure Que nul, étant jeune, ne tarde à philosopher, ni, vieux, ne se lasse de la philosophie.

Car il n'est, pour personne, nitrop tôt ni trop tard, pour assurer la santé de l'âme.

Celui qui dit que le temps de philosopher n'est pas encore venuou qu'il est passé, est semblable à celui qui dit que le temps du bonheur n'est pas encore venu ou qu'il n'est plus.

Desorte que ont à philosopher et le jeune et le vieux, celui-ci pour que, vieillissant, il soit jeune en biens par lagratitude de ce qui a été, celui-là pour que, jeune, il soit en même temps un ancien par son absence de crainte del'avenir.

Il faut donc méditer sur ce qui procure le bonheur, puisque, lui présent, nous avons tout, et, lui absent,nous faisons tout pour l'avoir.

[...] Qui alors, estimes-tu supérieur à celui qui a sur les dieux des opinions pieuses,qui à l'égard de la mort, est constamment sans crainte, qui s'est rendu compte de la fin de la nature, saisissantd'une part que la limite des biens est facile à atteindre et à se procurer, d'autre part que celle des maux est oubrève dans le temps ou légère en intensité, qui se moque de ce que certains présentent comme le maître de tout, ledestin, disant lui, que certaines choses sont produites par la nécessité, d'autres par le hasard, d'autres enfin parnous-mêmes, car il voit que la nécessité est irresponsable, le hasard instable, mais que notre volonté est sansmaître, et qu'à elles s'attachent naturellement le blâme et son contraire.

[...] Ces choses-là, donc, et celles qui leursont apparentées, médite-les jour et nuit en toi-même et avec qui est semblable à toi et jamais, ni en état de veilleni en songe, tu ne seras sérieusement troublé, mais tu vivras comme un dieu parmi les hommes.

Car il ne ressembleen rien à un vivant mortel, l'homme vivant dans des biens immortels.. »

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