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Boris Vian : L'Écume des jours

Publié le 22/02/2012

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INTRODUCTION Cinquante ans après sa parution, L'Écume des jours s'affirme résolument comme un roman qui étonne, qui déroute souvent, qui agace ou qui amuse selon qu'on est davantage sensible aux tics d'écriture du « Transcendant Satrape », ou, au contraire, à ses inventions verbales et à sa sensibilité poétique. Après l'engouement des années 60-70, la présente édition nous donne à relire avec quelque recul et une passion mieux maîtrisée un des romans les plus audacieux de l'après-guerre, propre à séduire un jeune public. L'Écume des jours, un classique?
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« Sullivan, le plus célèbre de ses pseudonymes.

Les Morts ont tous la même peau ajouté à ce titre lui vaudra d'êtrecondamné pour outrage aux moeurs.Journaliste, il collabore à diverses revues dont Jazz Hot, Combat, Les Temps modernes.Son talent d'écrivain donna également naissance à des nouvelles dont Les Fourmis (recueil, 1949), des poésies dontJe voudrais pas crever (recueil publié en 1962), des pièces de théâtre dont Le Goûter des généraux.

Il s'essayemême à l'opéra et écrit Fiesta, pour Darius Milhaud.Ses romans saisissants complètent et couronnent l'éventail de ses activités littéraires : L'Arrache-coeur (1953) estdominé par le personnage tyrannique d'une mère possessive, L'Automne à Pékin, L'Herbe rouge...Par son génie d'inventeur, Boris Vian, méconnu de son vivant, devint rapidement un mythe après sa mort précoce(1959), fascinant le public par ses passions, son oeuvre dense et éclectique et ses idées antimilitaristes. «L'histoire d'amour la plus poignante de notre temps» De L'Ecume des jours, Raymond Queneau a dit qu'il s'agit de « l'histoire d'amour la plus poignante de notre temps».Attachante, elle l'est par la simplicité de son déroulement, et par la fraîcheur de son style qui lui confère une valeurlittéraire indéniable : Vian, inventeur des mots, a traduit -une histoire simple dans un langage nouveau.

Sa plumeétonnante a mêlé au paradoxe la fantaisie, à l'absurde l'émotion, à la comédie la tragédie.

Il a créé un mondefascinant car entièrement fondé sur le langage : un « langage-univers » où les mots sont pris au pied de la lettre(par exemple : on exécute une ordonnance au moyen d'une guillotine), où les mots sont des créations (par exemple: la sacristoche, l'antiquitaire, le pianocktail...).Si le langage vit, les objets sont dignes de réactions : ils se modifient comme en écho à l'intrigue.

Par exemple,lorsque la maladie transforme l'histoire en tragédie, l'appartement s'étrique et s'éteint progressivement.

Quant aumal qui dévore la vie de Chloé (sans doute la tuberculose), il est concrétisé par un nénuphar, tandis que son «remède » a l'exquis parfum des fleurs, à l'image de la fragile épouse.Toujours par le biais de la fantaisie, Vian aborde de grands thèmes comme le travail, dans ce qu'il a d'absurde etd'abrutissant pour l'homme (la suprématie de la machine), l'horreur de la guerre, auxquels sont confrontés ses hérosaux âmes pures d'adolescents.

Rappelons le superbe passage où Colin, bien malgré lui, transforme sa production defusils en tiges fleuries.En un mot, Boris Vian a créé un espace poétique émaillé de symboles dont la richesse et la complexité sont inscritesen filigrane, tout au long du roman. EXPLORATION 1.

La structure narrative peut fournir l'occasion d'un premier repérage, relativement aisé : la période heureuses'étend ainsi sur deux phases distinctes, avant et après l'apparition de Chloé (chap.

I à X, puis XI à XXII, jusqu'aumariage).

Puis s'amorce le lent déclin, avant tout perceptible dans la contrariété des désirs : le voyage de noces etses incidents, la maladie de Chloé (chap.

XXIII à XXXII), le diagnostic (XXXIII à XL), puis le second voyage, forcécelui-là, assorti de son cortège d'obligations : vente du pianocktail, rétrécissement accentué de l'espace, etc.(chap.

XLI à XLVI).

Nouvelle maladie de Chloé ; le travail ; folie de Chick et assassinat de Partre (chap.

XLVII à LIX); enfin, dernières tentatives pour sauver Chloé, sa mort et son pitoyable enterrement ; suicide de la souris (chap.LX à LXVIII) : des actions de plus en plus précipitées, des échecs de plus en plus violents, de moins en moinsréversibles : telle apparaît la loi narrative du récit.2.

Dans la continuité de cette première approche, on peut entamer une étude comparative du merveilleux sur lesdeux versants du roman.

Les jeux verbaux et/ou antilogiques agrémentent la vie des personnages, ou, au contraire,l'altèrent et la contrarient : ainsi, à l'issue du repas qui réunit Colin et Chick, au début du roman, le pianocktail offreun équivalent gustatif à leurs sentiments (p.

29); de même, gonflé du désir d'être amoureux (p.

57), Colin voits'accumuler les présages, jusqu'à la rencontre de Chloé, qui le comble (p.

64).Au contraire, le versant descendant du récit, avec sa lumière glauque et son espace rétréci, multiplie les obstaclesà la réalisation du désir : les vitres refusent de laisser passer la lumière (p.

140), l'appartement devient inhabitable (p.

282) et Chloé exsangue ne peut plus répondre au désir de Colin (p.

283). 3.

Le statut des personnages, enfin, pourrait donner lieu à un aperçu des portraits dans le roman (Colin, p.

19; Chick, p.

21; Alise, p.

39; Isis, p.

42; Chloé, p.

66), à la fois fondés surdes stéréotypes, sur des clichés, et, brisant ces stéréotypes, par le mode d'expression ultra-conventionnel, cultivant volontairement le décalage et la maladresse.

Exemple, à propos deColin : « Il était assez grand, mince avec de longues jambes, et très gentil » (p.

20).

D'où laremise en cause du statut des personnages, et même du héros, a priori sans traits distinctifs, sans passé, sans épaisseur psychologique, mais par là même plus perméables à l'identification du lecteur, plus aptes àsoutenir ses projections mentales, à la manière des héros de bandes dessinées.. »

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