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CAS PRATIQUE : Prévention de la lutte contre la corruption

Publié le 10/03/2012

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CAS PRATIQUE : Prévention de la lutte contre la corruption

 

I /Les risques liés à la corruption

 

 

La corruption privée est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende il s’agit du fait, par quiconque, de proposer directement ou indirectement, à une personne qui n’est pas un agent public un avantage indu à une autre personne privée (article 445-1 et 2 du code pénal).Il s’agit d’un risque juridique puisque les faits énoncés soulignent que la société TBK a comme client des entreprises privées, ce type de corruption est visée à l’article  mais dans la mesure où dans 90% des cas de corruption il s’agit de corruption publique et qu’en outre la Convention de l’OCDE ne traite que de la corruption des agents publics.Par conséquent, il s’agit d’un risque moins important.

 

La France étant un pays signataire de la convention de l’OCDE contre la corruption de 1997 alors la société mère de TBK (étant implantée en France) ainsi que toutes ses filiales mêmes présentes dans un pays hors-OCDE seront soumises aux transpositions nationales de la Convention OCDE.  

 

Les lois du 30 juin 2000 et du 13 novembre 2007 sont les transposition de la convention OCDE à l’article 435-1 et suivants du code pénal qui punit le délit de corruption de  10 ans emprisonnement et de 150 mille euros d’amende.La première des lois a instauré la déductibilité fiscale des pots de vins faits à des agents publics étrangers, ce qui a bouleversé et accru les risques juridiques de condamnation pour le délit de corruption.  

 

La société TBK s’expose à un risque de corruption publique car il est possible de poursuivre les personnes morales à n’importe quel moment du contrat directement et indirectement et toute personne en lien avec l’entreprise, qui propose ou se voit proposer (corruption passive ou active) tout avantage quelconque (pécuniaire ou pas) à un agent public pour elle-même ou pour autrui (le trafic d’influence) afin d’obtenir qu’elle accomplisse ou s’abstienne d’accomplir (action ou omission) et punit des mêmes peines le fait de céder à une personne dépositaire de l’autorité publique chargée d’une mission de service public (il s’agit ici des situations d’extorsion).

 

La loi du 13 novembre 2007 a apporté deux innovations majeures par rapport à la loi de 2000 : il y a une assimilation des corruptions passive et active et du trafic d’influence à la corruption ce qui étend considérablement le champ d’application de la corruption

La définition française d'agent public est très large il peut s’agir de personnes dépositaires de l’autorité publique, celles investies d’un mandat électif et celles en charge d’une mission de service public (il peut donc s’agir d’un opérateur privé). La société TBK se trouve exposée à un plus grand nombre de cas possibles de corruption au vu de la large de la conception française de l’agent public.

 

Enfin un dernier risque juridique est à mettre en exergue, selon l’énoncé de l’espèce la société est côtée sur le NYSE ce qui signifie qu’elle (la société) est soumise aux règles du Foreign Corrupt Practices Act de 1977 dit FCPA. La société TBK risque de se retrouver poursuivie devant les juridictions américaines par le département de la justice américaine et par la secutities exchanges commission (SEC), le risque pour TBK est que les poursuites peuvent être aussi bien civiles que pénales. Le risque de sanctions pécuniaire est très élevé en l’espèce car aucun dispositif de prévention de la corruption ne semble avoir été mis en place alors que la US fédéral sentencing guideline prévoit une atténuation de peine (-90%) lorsqu’existe un  tel dispositif de prévention de la corruption conforme aux attentes américaines ou d’une aggravation de celle-ci (+400%) dans le cas contraire.

 

En outre, il est à noter que ces poursuites sont cumulatives ainsi une société comme TBK s’expose à un risque de poursuites pénales multiples devant les juridictions françaises et américaines. En d’autres termes cela contrevient au principe du « non bis in idem « qui prohibe une autre poursuite pour les mêmes personnes et les mêmes faits.

 

D’autres sanctions judiciaires peuvent être relevées notamment les peines de prison pour les dirigeants et la publicité de la sanction mais aussi des peines accessoires telles que les interdictions civiles, administratives, les confiscations,la fermeture d’établissement,l’exclusion de marché public,l’interdiction d’appel d’offre, d’affichage et de diffusion.

 

Le risque juridique est très important notamment au niveau des sanctions pécuniaires mais il existe d’autres risques parallèles qui peuvent s’avérer tout aussi dommageables.

Les risques de corruption pour une entreprise sont multipliés lorsque cette société détient une multitude de filiales dans différents pays car le contrôle anti-corruption qui pèse sur les dirigeants, se trouvant dans la société mère, se révèle plus inefficace et ce pour des raisons de distances. En outre, lorsque l’entreprise locale est implantée dans un pays non-OCDE le risque de corruption est croissant car la concurrence peut-être déloyale, en d’autres termes, les entreprises locales ne seront pas sujettes à la convention OCDE et aux lois françaises qui sont les plus stictes. C’est pourquoi, l’entreprise locale obtiendra plus facilement le marché public que le dirigeant de la filiale ce qui pourrait pousser le dirigeant  à s’exposer au risque de corruption. En l’espèce, la société TBK a des filiales implantées dans énormément dont certains ne faisant pas partis de la zone OCDE. Par ailleurs , les faits de l’espèce révèlent un autre risque de corruption il s’agit de la politique agressive de TBK à acheter des filiales un peu partout dans le monde le risque pour la holding est encore une fois de ne pas avoir la possibilité de pouvoir tout contrôler et tout auditer afin de vérifier la conformité des comptes des sociétés rachetées car il faut savoir qu’en cas de fusion/acquisition l’audit est primordial car le futur acquéreur est responsable des actes de corruption ayant eu lieu 3 ans avant l’acte de fusion/acquisition (sauf à y insérer une clause limitative de garantie)

 

Un risque tout aussi important peut-être le risque de réputation, c'est-à-dire lorsque la société est mise en examen mais est relaxée, elle est peut être judiciairement blanchie mais les différentes parties prenantes peuvent très bien condamner la société TBK et ce de manière encore plus dommageable qu’une condamnation judiciaire.

En l’espèce, la société TBK s’est spécialisée dans la destruction de parasites et de nuisibles ne semblent pas exposer énormément en matière de corruption (en comparaison du risque auquel s’expose une société pétrolière ou d’armement). A l’inverse, le risque réputationnel est très grand car une allégation de corruption pourrait avoir des conséquences fatidiques pour la société. Il pourrait s’agir par exemple d’un boycott de la part des différentes parties prenantes car on porte atteinte aux consommateurs finaux mais également aux fournisseurs, aux sous-traitants ainsi qu’à la validité des campagnes publicitaires. De plus, le recrutement, le maintien et l’engagement des collaborateurs devient de plus en plus difficile à assurer car l’entreprise n’inspire plus la confiance et par là même c’est toute l’intégrité qui est remise en cause.De surcroît, les allégations de corruption risquent d’influer sur les marchés financiers et par conséquent cela a un impact sur le cours de l’action qui se met à baisser sur les actionnaires ainsi que sur les futurs investisseurs qui seront réticents à se procurer des actions d’une société soupçonnée de corruption et enfin l’on voit mal une société tenter d’acquérir ou de fusionner avec une autre qui est entachée d’un acte de corruption et dans le cas contraire il y aurait des examens poussés pour l’acquisition qui sont longs et couteux et qui risquent de faire baisser la valeur de l’entreprise.

 

Il existe également un risque de déstabilisation étant donné le peu de crédit que l’on porte à une entreprise qui n’est pas « saine «, un ancien collaborateur pourrait se mettre à témoigner des pratiques occultes de son entreprise (comme ce fut le cas pour Thalès) ou ce témoignage viendrait d’un concurrent ou même se voir interdire la possibilité de commercer avec un pays.  Le manque de crédibilité pourrait instaurer un risque au niveau de la communication avec les medias ainsi qu’un risque à venir d’exclusion pour les contrats de banques multilatérales.

Un autre risque subsiste celui de ne pas avoir mis en place une politique explicite et effective de la prévention de la corruption entraînant les risques d’exclusion de consortium (de collaborations entre entreprises pour le commerce) ou ceux de non-consultation de la part des clients et au niveau des agences de notation, certification à cause du manque de crédibilité.

 

 

II /L’élaboration d’un plan de prévention de lutte contre la corruption

 

 

La mise en place d’un tel dispositif poursuit cinq objectifs majeurs : il s’agit de veiller à ce qu’aucun acte de corruption ne se (re)produise, d’armer les cadres pour résister aux tentatives d’extorsion, d’assurer la protection de l’entreprise face à toute déstabilisation liée à une accusation, d’éviter la diminution de façon durable ou significative du chiffre d’affaire et enfin de renforcer l’intégrité professionnelle à tous les niveaux.

 

Pour rendre effectif un dispositif de lutte contre la corruption, il faut tout d’abord prendre engagement formel de refus de la corruption car ne pas lutter explicitement c’est accepter implicitement la corruption. Pour gagner en crédibilité ce message doit émaner des dirigeants car ce sont eux qui doivent donner l’exemple. En l’espèce, la société TBK n’est pas dotée d’une direction de l’éthique ou de conformité ce qui laisse à penser que la volonté de s’engager dans une lutte contre la corruption est un message qui n’a pas du être bien relayé. En effet, montrer aux collaborateurs qu’un organe éxécutif est dédié notamment à cette lutte met en exergue l’engagement formel de la société concernant la lutte contre la corruption.

 

La société doit, en plus, prendre deux précautions car pour éradiquer la corruption un simple message est amplement insuffisant. Il faut proposer un plan de gestion de crise en cas d’allégation ou de poursuite pour ainsi inverser la charge de la preuve en démontrant toute la diligence de l’entreprise. Les maîtres mots en cas d’allégation sera de montrer la diligence et la transparence de la société car les sanctions s’en trouveront vraiment allégées, en d’autres termes dès qu’une information relative à un soupçon de corruption arrive à la direction générale ou éthique/compliance, il doit la relayer aux juridictions compétentes afin de montrer sa bonne collaboration et surtout souligner le fait que les dirigeants ne cherchent rien à cacher cela permet d’atténuer les peines mais également éviter les poursuites de dirigeants notamment lorsque les poursuites ont lieu aux Etats-Unis avec le principe du « plea bargaining « (le plaider coupable). La deuxième précaution vient compléter la première c'est-à-dire qu’il faut tenter d’apporter en amont des réponses aux questions que pourraient se poser les différents collaborateurs et du soutien de la part des dirigeants aux opérationnels. Les précautions relèvent de tout le travail que doit accomplir le COMEX (comité éxécutif) et plus particulièrement les directions juridique et éthique/compliance pour prèvenir tous risques de corruption.

 

Dans la continuité de la démarche de mise en place du dispositif tendant à lutter contre la corruption, il faut répondre à certains dilemmes. Le premier dilemme à résoudre est le dilemme stratégique est  soit de ne pas lutter contre la corruption et s’exposer aux risques soit bannir la corruption mais perdre des clients potentiels qui seront corrompus par d’autres entreprises. Malgré la tentation de céder à la corruption il faut toujours se rappeler que sur le long terme une entreprise corruptrice n’est pas viable. Le dilemme géographique est important, il pourrait se résumer par cette interrogation : Cela vaut-il le coup d’investir dans un pays où la corruption est tellement présente que pour être compétitif il faudra s’abaisser à des actes de corruption. La réponse n’est pas si aisée néanmoins il vaut mieux perdre quelques clients, marchés que de perdre toute éthique et intégrité. Le dernier dilemme que doit se poser la société c’est le dilemme fonctionnel quand aux risques auxquels s’exposent la société mère et les filiales à savoir que la société mère est peu exposée aux risques de corruption mais sa responsabilité se trouve engagée quoi qu’il arrive alors que l’on peut observer le phénomène inverse concernant les filiales. Il faut ainsi évaluer les rapports entre la holding et la filiale pour voir si le maintien de la filiale est nécessaire. Encore une fois si la filiale présente un risque de corruption trop important il vaut mieux arrêter l’activité ou la renouveller de manière à être moins exposée à la concurrence déloyale, il faut aussi mettre en place des correspondants éthiques ou des compliance officers qui assurent la liaison entre la holding et les filiales ce qui « réduit « les distances.

 

Pour mener à bien le processus de mise en place du dispositif contre la corruption, quatre actions doivent être effectuées. Premièrement, il faut informer c'est-à-dire montrer à l’ensemble des collaborateurs et des parties prenantes que l’entreprise se soucie des obligations nationales et de celles de l’OCDE grâce à un message clair, précis et concis par le biais d’un chapitre dédié à la corruption dans la Charte/Code Ethique par exemple pour souligner l’engagement de l’entreprise dans son soucis d’endiguer la corruption.

 

Deuxièmement, il faut former tous les collaborateurs et notamment ceux qui sont les plus susceptibles d’être exposés au risque de corruption comme par exemple les collaborateurs en charge du contrôle ou alors ceux qui sont amenés à traiter avec les différentes douanes. Les formations doivent être adaptées en fonction du lieu et du métier du collaborateur car en matière de prévention contre la corruption on se doit d’être le plus pragmatique possible et les risques diffèrent énormément selon les pratiques et les activités prévues pour chaque pays où la société est implantée. De surcroît les collaborateurs selon leurs postes au sein de la société ne représentent pas le même risque en terme de corruption, certains occupant des postes dits plus « sensibles « verront leur formation accrue. Toutefois, il est primordial que chaque collaborateur soit sensibilisé pour se sentir acteur dans cette lutte.C’est pourquoi, chaque collaborateur devra connaître l’étendue de ses prérogatives et sa responsabilité dans le cas d’une affaire de corruption ainsi que la responsabilité de chacun des supérieurs pour savoir quoi faire et à qui se réferer en cas de corruption.

 

Troisièmement, il faut équiper les collaborateurs d’outils tels que la charte éthique. Il faut également prévoir la possibilité pour chaque collaborateur d’avoir un accès direct et illimité au comité ou à la direction de l’éthique qui aura mis en place un manuel de référence,une procédure standardisée de conformité et des lignes d’alertes de dispositifs professionnels (whistleblowing)pour déceler tous manquements aux lois car chaque collaborateur devrait être le garant de l’entreprise dans la lutte contre la corruption et ainsi veiller au déploiement général du programme dans l’ensemble de l’entreprise pour assurer sa pérennité et améliorer l’efficacité du dispositif mis en place. Cependant, le premier des pré-requis est l’engagement formel de se poser contre la corruption or la distance est un risque supplémentaire de corruption, c’est pourquoi se sentir soutenu par un correspondant présent sur le lieu « sensible « peut aider car la pression de réaliser un excellent chiffre d’affaire peut pousser certains collaborateurs à la corruption, d’où la nécessité essentielle d’équiper de juristes, d’éthiciens ou de compliance officers les filiales à risques.

 

Enfin, il faut contrôler l’efficacité du système en place afin d’être sur que les engagements se traduisent de manière concrête et ce par le biais des contrôles internes et externes.Ces évaluations doivent être à la fois continues pour déceler des manquements à la conformité et bien sur y remédier. Les contrôles internes ayant pour but de régulariser certaines anomalies en présentant bien entendu l’avantage de ne pas être soumis à des actes de publicité si des sanctions devaient être prises. Ce contrôle interne doit se faire par le biais d’auditeurs internes ou de comités ad hoc. On peut également penser à des contrôles externes par exemple par le biais d’agence de certification ou de notation indépendantes qui pourraient avec des critères objectifs d’évaluation des résultats de l’entreprise relatifs à la mise en place du dispositif pour prévenir la corrution. Cela permet à la société de s’évaluer et de se rendre compte de tous les travaux qu’il lui reste à réaliser pour prévenir et minimiser les risques de corruption pour la personne morale et les dirigeants de par leur diligence (mise en place effective d’un dispositif) et leur transparence (bonne collaboration si besoin est).

 

En conclusion, il apparaît indispensable au vu du profil de la société TBK de mettre en place un dispositif de lutte contre la corruption car c’est une société à risques relativement forts et cela passe par la mise en place d’une direction de l’éthique/compliance qui pourra sans aucun doute mettre en place un dispositif effectif ce qui permettra de minimiser les risques car une condamnation judiciaire ou extra-judiciaires pourraient avoir des conséquences désastreuses et pourraient même causer la fermeture de l’établissement.

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