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Cela peut-il être plus fort que moi ?

Publié le 16/02/2011

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• Remarquer qu'il ne s'agit pas de justifier (ou de s'indigner !) de telles paroles mais de chercher à leur donner sens.

• Se demander en quoi l'expression « c'est plus fort que moi « pose en elle-même problème, en quoi elle est pour le moins paradoxale. • De quel(s) moi peut-il s'agir : « Moi social «; « Moi organique « (corps propre); « Moi moral «?

• Problématique(s) de l'unité (ou unification) du « moi «, de l'éclatement du « moi «. • Problématique(s) du « moi sujet « et du « moi objet «. • Problématique psychanalytique du « moi « — « sur-moi « — « ça «.

« d'autres termes, c'est la volonté - ou son absence - qui doit dans tous les cas déterminer ma conduite.

Il n'est dèslors pas surprenant que Kant, qui place précisément la volontéau fondement de l'existence morale, refuse ce genre d'excuse : de son point de vue, aucune circonstance ne peutêtre « plus forte que moi », parce que mon existence, en tant que sujet moral, implique une liberté toujours entière,et nécessite que je sois défini comme « sujet rationnel », c'est-à-dire comme m'imposant à moi-même les loisauxquelles doit obéir ma conduite. [Il.

Inconscient et responsabilité] Une telle théorie du sujet moral est très satisfaisante pour qui veut affirmer que l'homme a en lui une dignité qui ledistingue du reste du monde : elle constitue en morale l'aboutissement de la conception classique du sujet, repérécomme doté d'une complète maîtrise sur ses pensées et ses actes.

Reste à savoir s'il demeure possible de seconsidérer, selon la formule d'Auguste dans Cinna, comme « maître de [s]oi comme de l'univers » à partir du momentoù l'on est attentif à l'existence, dans le sujet lui-même, de ce que Freud repère comme l'inconscient.Ce dernier, en effet, paraît nier la prétendue maîtrise.

À suivre la théorie psychanalytique, on s'aperçoit quel'individu effectue bien souvent des actes, prononce des paroles, prend des attitudes, qui paraissent êtreprovoquées par «plus fort que lui » : lapsus, actes manqués, tics, gestuelle signaleraient une sorte de déterminationinterne, et par ce qui est à la fois le plus profond dans le sujet et le plus méconnu de lui-même : l'ensemble despulsions, des désirs, des fantasmes qui résultent de sa biographie et qui, stockés dans son inconscient, l'amènent àfaire autre chose que ce qu'il voulait, à dire d'autres mots que ceux qu'il avait prévus.

On comprend alors la réactiondes esprits classiquement rationalistes face à de telles révélations : dans ces conditions, le sujet « n'est plus maîtrechez lui », il semble aussi déterminé ou peu rationnel qu'un animal (« la psychanalyse », dit Alain, « n'est qu'unepsychologie de singe »), condamné à être victime de « plus fort que lui ».

Comment, par exemple, traîner un violeuren justice s'il a la possibilité de faire valoir qu'il est la proie de pulsions « plus fortes que lui » et que, tout ensachant que son comportement est coupable, il n'a pas les moyens d'y échapper ? Le problème, de moral, devientjuridique, ou médical, et l'on sait que, de plus en plus, la condamnation du violeur à la prison s'accompagne d'uneobligation de traitement psychiatrique.Freud lui-même n'a pas considéré que l'existence de l'inconscient ouvrait la possibilité de nier la responsabilité del'individu : lorsqu'il affirme que « là où est le ça, le je doit advenir », cela signifie aussi que chacun a l'obligation,pour être authentiquement humain, de connaître ses pulsions et de s'en protéger - faute de quoi il deviendrait tropfacile de trouver à tout coup une excuse dans une enfance malheureuse ou dans les mauvais traitements que l'on asubis, pour s'abriter derrière l'allusion à des pulsions qui, bien que parfaitement « en moi », sont aussi « plus fortesque moi »... [III.

Des circonstances malgré tout « atténuantes »] Il n'en reste pas moins que, au tribunal, on peut tenir compte de «.circonstances atténuantes ».

C'est avant toutlorsque le sujet, au moment de son action, semble de façon peu contestable avoir perdu toute maîtrise sur lui-même, c'est-à-dire dans les cas avérés de « folie », passagère ou chronique.La notion de responsabilité entière semble en effet impliquer la « normalité » mentale du sujet, bien que l'onconnaisse toujours quelques difficultés pour définir cette normalité, puisqu'on sait combien la différence entre santéet maladie mentale, ou entre normalité et folie, est historiquement et culturellement variable (comme a pu lemontrer, en particulier, Michel Foucault dans son Histoire de la folie à l'âge classique).

Malgré tout, la « folie »semble à ce point soumettre le sujet à des formes d'action qu'il ne peut dominer, elle paraît à ce point contraire àl'existence même de sa volonté, qu'il est logique de considérer que sa responsabilité est suspendue.

Le malade quiest agité de mouvements compulsifs obéit bien à « plus fort que lui » : il ne contrôle plus ses gestes, son systèmenerveux ou musculaire, son corps ne lui obéit plus, il peut éventuellement constater lui-même que son besoin degesticulation est décidément « plus fort que lui ».

De même, l'obsessionnel qui, après s'être lavé les mains, se trouveamené à laver le lavabo, puis le savon, puis le torchon avec lequel il a essuyé le tout, puis à nouveau ses mainsavant de recommencer tout le cycle, s'il bénéficie d'un moment de calme, peut constater que toute cette agitationinutile provient de quelque chose qui est « plus fort que lui ».Si la « folie » fait bien problème, c'est précisément parce qu'elle soumet le sujet à des « forces » ou des « pouvoirs» qui nient sa propre volonté.

Le déséquilibre rompt toute maîtrise sur soi-même, en même temps que la strictepossibilité d'être responsable.

« La folie », disait déjà Rousseau, « ne fait pas droit » : elle n'est compatible ni avecune accusation, ni avec la responsabilité que cette dernière implique.

Dans ses cas les plus graves, elle n'est pasmême compatible avec la formulation, par le malade lui-même, d'un « c'est plus fort que moi », puisqu'il n'a plusconscience de ce que pourrait être un « moi ».

On est alors simplement obligé d'admettre que « c'est plus fort quelui ». [Conclusion] Parce que l'accès au bien suppose un effort du sujet sur ses propres tendances, on imagine mal un homme s'«excusant» de bien agir en affirmant « c'est plus fort que moi ».

Cela serait concevable, peut-être, dans le cas demystiques, se sentant appelés irrésistiblement vers le bien.

À l'inverse, une telle formule se manifesteéventuellement pour « excuser » une action mal orientée, mais elle implique une conception très insuffisante de lavolonté, et de l'intervention qui doit être la sienne dans la détermination interne de la conduite.

À l'exception du «malade », l'homme qui entend affirmer sa dignité, ou son humanité, doit en permanence faire effort pour ne pas. »

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