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chacun sa chimère

Publié le 25/05/2013

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Baudelaire : étude d'un poème «  Chacun sa chimère « Sous un grand ciel gris, dans une grande plaine poudreuse, sans chemins, sans gazon, sans un chardon, sans une ortie, je rencontrai plusieurs hommes qui marchaient courbés. Chacun d'eux portait sur son dos une énorme Chimère, aussi lourde qu'un sac de farine ou de charbon, ou le fourniment d'un fantassin romain. Mais la monstrueuse bête n'était pas un poids inerte; au contraire, elle enveloppait et opprimait l'homme de ses muscles élastiques et puissants; elle s'agrafait avec ses deux vastes griffes à la poitrine de sa monture et sa tête fabuleuse surmontait le front de l'homme, comme un de ces casques horribles par lesquels les anciens guerriers espéraient ajouter à la terreur de l'ennemi. Je questionnai l'un de ces hommes, et je lui demandai où ils allaient ainsi. Il me répondit qu'il n'en savait rien, ni lui, ni les autres; mais qu'évidemment ils allaient quelque part, puisqu'ils étaient poussés par un invincible besoin de marcher. Chose curieuse à noter : aucun de ces voyageurs n'avait l'air irrité contre la bête féroce suspendue à son cou et collée à son dos; on eût dit qu'il la considérait comme faisant partie de lui-même. Tous ces visages fatigués et sérieux ne témoignaient d'aucun désespoir; sous la coupole spleenétique' du ciel, les pieds plongés dans la poussière d'un sol aussi désolé que ce ciel, ils cheminaient avec la physionomie résignée de ceux qui sont condamnés à espérer toujours. Et le cortège passa à côté de moi et s'enfonça dans l'atmosphère de l'horizon, à l'endroit où la surface arrondie de la planète se dérobe à la curiosité du regard humain. Et pendant quelques instants je m'obstinai à vouloir comprendre ce mystère; mais bientôt l'irrésistible Indifférence s'abattit sur moi, et j'en fus plus lourdement accablé qu'ils ne l'étaient eux-mêmes par leurs écrasantes Chimères. I.Situation dans le recueil  Chacun sa chimère est le poème VI (6). Il se trouve dans la dernière partie Spleen de Paris des Fleurs de Mal. II.Pistes de lecture Ce poème relate la rencontre du narrateur avec des hommes mystérieux portant des chimères. Baudelaire décrit un véritable paysage intérieur, fantastique et pathétique. Grâce à un récit allégorique, il esquisse un tableau saisissant de la condition de l'Homme et de celle du poète. Par ailleurs, l'auteur nous décrit un décor étrange qui est en réalité un puissant symbole du Spleen. En effet, la scène se déroule dans un monde complètement onirique, durant un temps indéterminé. III.Analyse Dans les quatre premiers vers, Baudelaire décrit le paysage. Il est alors caractérisé par « un grand ciel gris « et « une grande plaine poudreuse «. Cette répétition de l'adjectif « grand « nous donne l'impression d'être au milieu d'un endroit immense. Mais celle-ci est vite renforcé par la sensation de vide qui se crée grâce à l'anaphore « sans «. Cette gradation met en évidence l'absence de végétation. Dans ce paysage de désolation, fade et triste, le poète fait la rencontre d'un fantastique cortège d'hommes portant des chimères.

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