Chaque personne est-elle unique et irremplaçable ?

Si chacun de nous peut se définir comme une personne, la réalité de la personne n'est pas immédiatement donnée. Nous ne sommes jamais acquis à nous-mêmes une fois pour toutes, et si le point de départ de notre personne est le secret de notre intériorité, nous avons sans cesse à nous construire pour nous rapprocher d'une plus parfaite authenticité. Se personnaliser, c'est tenter de réduire la déchirure entre mon personnage social et l'image que j'ai de moi-même. Du point de vue extérieur, la personne ne se définit que par ses qualités, dans lesquelles le moi ne se reconnaît jamais tout à fait, comme l'a montré Pascal. Au pire, nous ne sommes sous le regard d'autrui qu'un personnage, pitoyable sujet cherchant à se faire pur automatisme, chose parmi les choses, mais jamais autrui ne peut déceler sous le masque l'effort d'auto-création libre qui seul me définit comme personne, unique et irremplaçable. Le pire ennemi de la personne est donc l'aliénation, soit le fait d'être ou de devenir autre que nous-mêmes. Le problème central de la personne est celui de l'individualité unique que nous avons à vivre au travers de multiples modèles sociaux, familiaux, où nombreux sont les faux-semblants publics et publicitaires qui nous font errer loin de nous-mêmes.