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Charles BAUDELAIRE : Hymne à la beauté

Publié le 16/09/2006

Extrait du document

baudelaire

Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l'abîme,  Ô Beauté ! ton regard, infernal et divin,  Verse confusément le bienfait et le crime,  Et l'on peut pour cela te comparer au vin.    Tu contiens dans ton oeil le couchant et l'aurore ;  Tu répands des parfums comme un soir orageux ;  Tes baisers sont un philtre et ta bouche une amphore  Qui font le héros lâche et l'enfant courageux.    Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres ?  Le Destin charmé suit tes jupons comme un chien ;  Tu sèmes au hasard la joie et les désastres,  Et tu gouvernes tout et ne réponds de rien.    Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques ;  De tes bijoux l'Horreur n'est pas le moins charmant,  Et le Meurtre, parmi tes plus chères breloques,  Sur ton ventre orgueilleux danse amoureusement.    L'éphémère ébloui vole vers toi, chandelle,  Crépite, flambe et dit : Bénissons ce flambeau !  L'amoureux pantelant incliné sur sa belle  A l'air d'un moribond caressant son tombeau.    Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe,  Ô Beauté ! monstre énorme, effrayant, ingénu !  Si ton oeil, ton souris, ton pied, m'ouvrent la porte  D'un Infini que j'aime et n'ai jamais connu ?    De Satan ou de Dieu, qu'importe ? Ange ou Sirène,  Qu'importe, si tu rends, - fée aux yeux de velours,  Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine ! -  L'univers moins hideux et les instants moins lourds ?

Ce poème se prête aisément à l'organisation d'un commentaire composé ou à la pratique de la lecture méthodique : les aspects dominants de sa thématique sont en effet faciles à distinguer les uns des autres, et à traiter par études synthétiques successives. Trois points ressortent clairement :

  1.  
    1. UNE CÉLÉBRATION DE LA FEMME

    2. L'AMBIVALENCE DE LA BEAUTÉ.

    3. L'ATTITUDE DU POETE.

baudelaire

« Mais, notons-le, s'interrogeant de la sorte, Baudelaire ne nous livre pas un traité philosophique.

Il écrit un poème.

Ilveut nous rendre sensible la Beauté, en composant un hymne dont il soigne les images et les accents.

L'étude dutexte ne devra donc pas se contenter d'un commentaire de l'idée, mais souligner la force de l'expression, la«beauté» même des vers qui chantent la Beauté. MOUVEMENT DU TEXTE La structure du texte repose sur une question qui revient sous diverses formes et qui ne reçoit sa réponse qu'à lafin du poème. La question (même quand le point d'interrogation est absent) porte toujours sur l'origine de la Beauté avecl'évocation de deux possibilités antinomiques. Vers 1 : «Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l'abîme,» Vers 9 : «Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres?» Vers 21 : «Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, » Vers 25 : «De Satan ou de Dieu, qu'importe? Ange ou Sirène,» Déjà un début de réponse au vers 21 («qu'importe»), reprise au vers 25 («qu'importe»; mais avec un point d'interrogation) et au vers 26 (« qu 'importe »).

Mais la vraie réponse n'arrive bien que dans les derniers vers (vers 26, 27 et 28). Jalonné par ces questions, ce texte a un mouvement oratoire.

La composition en est claire : Strophes 1 et 2 Première question, premières réponses.

Le poète interroge la Beauté sur sa double origine possible : le ciel oul'abîme.

A ce « ou », il répond aussitôt par un « et ».

Elle est à la fois infernale et divine ; cependant, la seconde strophe s'attache surtout à décrire les effets bénéfiques de la Beauté, l'ivresse qu'elle procure. Strophes 3 à 5 Approfondissant sa recherche, le poète relance son interrogation.

La réponse, une fois encore, remplace l'alternativepar l'union : la Beauté répand le bien (la joie) et le mal (les désastres), la fascination et l'horreur.

Mais cette fois, elle apparaît surtout comme maléfique, en raison de son pouvoir.

Le charme, la volupté, conduisent au meurtre ouau tombeau. Strophes 6 et 7 Imprévisible, ambivalente, la Beauté a de quoi effrayer : pourtant, le poète opte pour elle, en raison d'un nouveaucaractère : qu'elle vienne du ciel ou de l'enfer, la Beauté apporte l'Infini, ou du moins, permet d'échapper à lafinitude de notre monde. Cet ample mouvement n'est pas le seul principe directeur du poème : l'autre fil du texte est la constantepersonnification de la Beauté en Femme.

En opérant cette fusion, sur les détails de laquelle nous reviendrons,Baudelaire laisse entendre que ce qu'il énonce sur la Beauté (son ambivalence, sa puissance, sa porte d'infini) estaussi valable pour la Femme, c'est-à-dire pour l'Amour.

Les poèmes de l'Idéal, dans les Fleurs du Mal, exprimeront aussi bien l'idéal artistique que l'idéal amoureux ; la fascination du poète, dans l'un et l'autre domaine, comporterales mêmes risques, les mêmes ambiguïtés. ÉTUDE SUIVIE En suivant pas à pas le texte de Baudelaire, nous allons pouvoir en dégager la plupart des éléments, aussi bien ence qui concerne la complexité de l'idée que la mise en oeuvre des procédés poétiques.

Les matériaux ainsi dégagés(il faut bien les distinguer avant de montrer comment ils se fondent) pourront alors servir à l'élaboration d'uneexplication de texte, à une lecture méthodique ou à la rédaction d'un commentaire composé.. »

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