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La Chine de 1789 à 1918 (Histoire)

Publié le 27/02/2008

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Un siècle à peine suffit pour faire du prestigieux Empire dont les institutions remplissaient d'admiration les philosophes de l'Europe des Lumières un État anachronique offert à la convoitise des puissances impérialistes. Peu s'en fallut, en effet, que la plus grande nation du monde ne subisse le sort réservé à la Turquie, l'autre " homme malade " du XIXe siècle. Aux yeux des contemporains qui assistèrent, médusés, à cette inéluctable décadence, ce destin était imputable à une nécessité pour ainsi dire biologique ; il ne manqua pas de bons esprits pour soutenir, par exemple, que la " diplomatie des canonnières " était le seul langage susceptible d'être entendu par un peuple congénitalement incapable de prendre en main ses destinées. Il n'en demeure pas moins que la période fut marquée par toute une série de tentatives pour adapter la Chine au nouveau contexte international, tentatives dont l'échec est à mettre au compte tant des résistances intérieures que des ingérences étrangères.  
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« Un siècle à peine suffit pour faire du prestigieux Empire dont les institutions remplissaient d'admiration lesphilosophes de l'Europe des Lumières un État anachronique offert à la convoitise des puissances impérialistes.

Peus'en fallut, en effet, que la plus grande nation du monde ne subisse le sort réservé à la Turquie, l'autre " hommemalade " du XIXe siècle.

Aux yeux des contemporains qui assistèrent, médusés, à cette inéluctable décadence, cedestin était imputable à une nécessité pour ainsi dire biologique ; il ne manqua pas de bons esprits pour soutenir,par exemple, que la " diplomatie des canonnières " était le seul langage susceptible d'être entendu par un peuplecongénitalement incapable de prendre en main ses destinées.

Il n'en demeure pas moins que la période fut marquéepar toute une série de tentatives pour adapter la Chine au nouveau contexte international, tentatives dont l'échecest à mettre au compte tant des résistances intérieures que des ingérences étrangères.

Au moment où l'Europe traverse la longue crise de la Révolution française et des guerres napoléoniennes, l'énormeÉtat sino-mandchou qui s'étend sur plus de neuf millions de kilomètres carrés et compte environ trois cent cinquantemillions de sujets n'a pas d'égal dans le monde.

Ce n'est donc pas sans une apparence de raison que l'empereur Kia-ts'ing réitérait en 1816 les objurgations pleines de condescendance adressées vingt-trois années plus tôt au roid'Angleterre par son aïeul K'ien-long.

Mais la façade de prospérité et de puissance qui impressionnait tant lescontemporains masquait une situation intérieure de plus en plus critique.

Le trop rapide essor démographique qui sepoursuivit pendant les premières décennies du XIXe siècle avait non seulement compromis l'équilibre entre leshommes et la terre mais encore gravement perturbé le fonctionnement d'une machine administrative complexe etfragile.

Trop nombreux dans la grande plaine du Nord comme sur les riches alluvions du bassin du Yang-tseu, lespaysans conquièrent les collines du Centre et de l'Ouest dont les forêts font place à des champs de mais et depatates douces ou couvrent de plantations de thé les montagnes du Sud.

Renchérissement du prix de la terre etrelèvement de la rente foncière affectent directement une paysannerie qui n'assure désormais sa subsistance qu'auprix d'un travail de plus en plus intensif.

En l'absence d'une révolution technologique, l'artisanat, secteurtraditionnellement développé, ne peut que faire vivre, chichement, une population d'ouvriers mal rémunérés ouqu'offrir des revenus d'appoint aux paysans.

Le blocage de l'économie a des répercussions financières : tenu de faireface à des dépenses de plus en plus importantes avec des revenus inchangés, le gouvernement est réduit à desexpédients tels que la vente des titres universitaires ou le recours aux contributions " volontaires " extorquées auxmarchands.

La moralité de la vie publique tout entière est affectée ; l'administration devient synonyme de fraude,d'incompétence et de corruption.

Conséquence prévisible de cette carence des autorités, on voit alors se multiplierles mouvements séditieux et les sociétés secrètes qui trouvent un terrain particulièrement favorable auprès desvagabonds, des paysans sans terre et des déclassés de toute espèce qui n'ont plus d'espoir que dans unbouleversement général.

La crise de l'opium qui est à l'origine du conflit armé avec l'Occident doit être replacée dans ce contexte particulier.

Avant de représenter unemaladie sociale, la consommation d'opium est sentie comme un élément perturbateur du commerce extérieur et comme la cause principale dudésordre monétaire si préjudiciable à l'économie.

Strictement réglementé et limité depuis un siècle au seul port de Canton, le commerce maritimeavait pour fonction première d'irriguer l'économie en métaux précieux.

Un afflux constant d'argent était, en effet, nécessaire pour maintenir la fixitédu rapport entre le métal blanc, monnaie de compte, et une masse monétaire s'accroissant au rythme des émissions de sapèques de cuivre.

Il fallaitdonc que la balance commerciale demeure toujours favorable, d'où la constance des efforts de l'administration pour tenir les étrangers éloignésdes zones de production et pour limiter les importations au minimum.

Cette politique de hauts prix à l'exportation prévalut tant que l'Europe, quidisposait des réserves métalliques du continent américain, se montra disposée à assurer à n'importe quel prix son approvisionnement en thé, ensoie et en produits de l'artisanat de luxe.

Les premiers succès de l'expansion coloniale en Inde et la montée des intérêts manufacturiersbritanniques modifièrent radicalement la situation.

Au XIXe siècle, l'Europe est de plus en plus encline à considérer la Chine comme un marchépotentiel.

Après avoir tenté, sans beaucoup de résultats, d'écouler à Canton des métaux, du coton brut et des fourrures, les Anglais, devenuspratiquement les seuls partenaires commerciaux de l'empire Ts'ing à la faveur des convulsions de la Révolution française et des guerresnapoléoniennes, mirent au point un circuit triangulaire leur permettant d'assurer le financement de leurs importations de Chine grâce à la vente,semi-clandestine, d'opium de l'Inde.

Il va sans dire que l'état de décomposition dans lequel se trouvait alors l'Empire chinois explique en grandepartie l'accueil favorable réservé à la drogue.

De 1820 à 1835, le trafic de l'opium quadrupla, passant de neuf mille à trente-cinq mille caisses par an.Cette " expansion " entraîna un renversement de la balance commerciale qui détermina, par contrecoup, une forte dévaluation de la sapèque.Désireux d'en terminer avec cette situation critique, le gouvernement de Pékin dépêcha à Canton en 1839 Lin Tsö-siu P1997 , un expert financier particulièrement sensibilisé aux problèmes de l'opium.

Peu conscient de l'écrasante supériorité militaire de la marine britannique, le nouveaugouverneur agit avec brutalité, saisissant les stocks de drogue, arrêtant les contrebandiers et interrompant les opérations commerciales en vertudu principe de la responsabilité collective des marchands.

Ces mesures ne tardèrent pas à provoquer une puissante réaction des Anglais quin'eurent aucune peine à neutraliser les défenses du port.

Effrayé par cette démonstration de force, le gouvernement chinois révoque Lin qui estremplacé par un haut fonctionnaire mandchou temporisateur.

Le traité de Nankin qui met fin, en 1842, aux hostilités, donne l'occasion àl'Angleterre de régler en une seule fois un contentieux remontant à près d'un siècle et d'en terminer avec le confinement à Canton : cinq portsdonnant accès aux régions productrices seront désormais ouverts au commerce étranger qui bénéficie, en outre, d'un abaissement important desdroits de douane et de divers privilèges.

Cette libéralisation du commerce extérieur chinois ne donnera pas immédiatement les effets escomptés par les plénipotentiaires britanniques.D'une manière générale, le volume des échanges ne s'accrut guère, l'opium continuant à jouer un rôle essentiel dans leur mécanisme.

L'ouverturedes ports septentrionaux, et plus particulièrement de Shanghai qui, grâce à son statut privilégié, connut un développement rapide, entraînanéanmoins un transfert vers le Nord des activités commerciales dont les conséquences affectèrent gravement la situation économique du Sud.C'est donc une population touchée par la crise qui prêta une oreille attentive aux prédications de Hong Sieou-ts'iuan P1787 , un ancien maître d'école frotté de théologie chrétienne, qui annonçait, à grand renfort de miracles et de transes médiumniques, la réalisation imminente d'un" royaume céleste " égalitariste.

Encombrée d'éléments empruntés au christianisme et de réminiscences des doctrines millénaristes du passé, ladoctrine de la religion t'ai-p'ing (la " Grande Paix ", terme repris à la phraséologie d'anciens mouvements d'inspiration taoïque) était une réponse. »

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