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Comment se connaît-on soi-même ?

Publié le 27/03/2004

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Je ne me connaîtrais pas si je n'appréhendais immédiatement ce qu'il n'est en effet donné qu'à moi de saisir : cette face de mon histoire personnelle que j'appelle ma vie intérieure. Sans la conscience, je m'apparaîtrais comme une chose parmi les choses. C'est cette conscience qui, dès qu'elle est attentive à ses propres opérations, constitué l'observation subjective. Mais une telle observation, ne peut réaliser à la rigueur la connaissance de soi. A) DÉFAUTS DE L'INTROSPECTION. D'abord l'introspection est imparfaite à bien des titres. Elle exige un effort dont beaucoup sont incapables : je m'intéresse moins naturellement à mes idées ou à mes tendances qu'à leurs objets ou à leurs points d'application, au monde utile qui m'entoure, matériel ou social. L'observation interne est surtout difficile dans les situations où elle serait le plus précieuse : quand leur gravité nous distrait de nous-mêmes, ou, parce qu'elle nous émeut, rend toute attention impossible. Généralement, l'introspection dénature ce qu'elle veut saisir ; nous changeons nos attitudes dès que nous les contemplons au lieu de les vivre seulement. D'ailleurs, nous ne sommes pas indifférents au résultat d'une enquête qui porte sur nous-mêmes, et la prévention, ici plus qu'ailleurs, trouble la vision.

« II.

— La connaissance objective de soi. A) CONNAISSANCE PAR LES ACTES. Nous nous connaissons par nos actes.

Pour nous-mêmes, nos désirs s'affirment et s'éclairent par les mouvementsqui les accomplissent.

Une passion naissante se révèle souvent à celui qui la porte par les démarches insolitesqu'elle lui inspire et dont il peut d'abord s'étonner, alors que cette orientation nouvelle de la conduite était déjàclaire pour l'entourage. B) CONNAISSANCE PAR LES oeUVRES. Nous nous connaissons par nos oeuvres.

Un peintre prend une conscience plus distincte de son intention à mesurequ'il la réalise sur la toile par le dessin, les ombres et les couleurs.

Il estime plus lucidement et plus objectivementson propre mérite artistique quand il s'est détaché de lui-même, qu'il perçoit sur un même plan, dans une galeried'art, ses tableaux parmi ceux d'autres artistes, oubliant en quelque mesure ceux dont il est l'auteur. C) CONNAISSANCE PAR L'OBSERVATION D'AUTRUI. La perception du comportement des autres nous découvre nos propres dispositions, et cela par deux voies.D'abord, ce qui en nous est le plus constant nous est aussi le plus dérobé.

Ainsi sommes-nous insensibles àl'atmosphère dont nous sommes ordinairement baignés.

Seuls, nous nous connaissons mal parce que nous necessons pas d'être ce que nous sommes.

Mais la conduite d'autrui fait souvent contraste avec notre comportement; et ce contraste nous manifeste ce que, de nous-mêmes, nous aurions ignoré sans lui ; ce qu'ont les autres et quinous manque, ce qui manque aux autres et que nous avons : « Que ces hommes sont courageux ! Je ne me seraispas cru si lâche.

» « Quelle misère autour de moi ! Je ne me serais pas cru si bien loti.

»D'autre part, nous ignorons, tant que nous sommes fermés sur nous-mêmes, ce qui, de notre caractère, resteimplicite, ou n'émerge que discrètement et furtivement dans notre conduite consciente.

Mais ce qui était latentdevient clair quand nous le percevons, explicite et grossi, chez les autres ; comme on discerne plus aisément à l'oeilnu certains détails d'une coupe anatomique après s'être aidé du microscope.

Ce que fait l'observation d'autrui, l'artd'un grand écrivain peut le réaliser.

Il arrive que le drame et surtout le roman exhibent à la conscience duspectateur ou du lecteur certaines de ses tendances profondes qu'aucune introspection n'eût réussi à dévoiler. D) CONNAISSANCE PAR LE TRAITEMENT DONT ON EST L'OBJET DE LA PART D'AUTRUI. Nul n'échappe au jugement de ses semblables, aux sanctions de son groupe.

L'homme qu'on loue ou qu'onrécompense, celui qu'on blâme, qu'on frappe, qu'on exclut, est relevé ou abaissé dans l'estime qu'il a de lui-mêmepar le traitement dont il est l'objet de la part d'autrui.

L'idée que j'ai de moi-même se règle dans une large mesuresur l'idée que j'ai de l'idée que les autres ont de moi.Est-ce là un procédé valable de connaissance ? On doit sans doute faire une part à l'hypocrisie et à la politesse quime dérobent en quelque mesure l'opinion réelle qu'autrui a de moi.

Cette opinion même peut être faussée parl'intérêt bu la passion ; et par l'ignorance, car chacun n'a qu'un point de vue étroit, superficiel, sur ses semblables.

Ilreste que la société, dans son ensemble, est essentiellement intéressée à mettre l'individu au rang qu'il mérite, dansla place où il est capable de la servir ; elle a donc intérêt à bien savoir ce qu'est, ce que vaut chacun de nous, et ànous le notifier. Conclusion. Le procédé d'investigation qui d'abord nous semblait être le plus direct et le plus sûr n'est pas le plus révélateur.

«Chacun, dit Nietzsche, est pour lui-même l'être le plus distant.

» C'est par le dehors, surtout, qu'on se connaît, parle déploiement et par les effets perceptibles de ses dispositions intérieures.

Ce résultat de l'analyse ne doit pas noussurprendre.

Car le fait subjectif pur, tel que veut le saisir l'introspection, n'est qu'une abstraction.

La vie mentaleest faite de la relation de l'homme au monde ; elle ne se réalise pleinement qu'au niveau de ce monde que l'hommeutilise ou transforme.. »

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