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Commentaire D'Un Extrait De La "Métapsychologie" De Freud

Publié le 20/07/2010

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freud

« On nous conteste de tous côtés le droit d'admettre un psychisme inconscient et de travailler avec cette hypothèse. Nous pouvons répondre à cela que l'hypothèse de l'inconscient est nécessaire et légitime, et que nous possédons de multiples preuves de l'existence de l'inconscient. Elle est nécessaire, parce que les données de la conscience sont extrêmement lacunaires; aussi bien chez l'homme sain que chez le malade, il se produit fréquemment des actes psychiques qui, pour être expliqués, présupposent d'autres actes qui, eux, ne bénéficient pas du témoignage de la conscience. Ces actes ne sont pas seulement les actes manqués et les rêves, chez l'homme sain, et tout ce qu'on appelle symptômes compulsionnels chez le malade; notre expérience quotidienne la plus personnelle nous met en présence d'idées qui nous viennent sans que nous en connaissions l'origine, et de résultats de pensée dont l'élaboration nous est demeurée cachée. Tous ces actes conscients demeurent incohérents si nous nous obstinons à prétendre qu'il faut bien percevoir par la conscience tout ce qui se passe en nous en fait d'actes psychiques; mais ils s'ordonnent dans un ensemble dont on peut montrer la cohérence, si nous interpolons les actes inconscients inférés. Or, nous trouvons dans ce gain de sens et de cohérence une raison, pleinement justifiée, d'aller au-delà de l'expérience immédiate. Et s'il s'avère de plus que nous pouvons fonder sur l'hypothèse de l'inconscient une pratique couronnée de succès, par laquelle nous influençons, conformément à un but donné, le cours des processus conscients, nous aurons acquis, avec ce succès, une preuve incontestable de l'existence de ce dont nous avons fait l'hypothèse. L'on doit donc se ranger à l'avis que ce n'est qu'au prix d'une prétention intenable que l'on peut exiger que tout ce qui se produit dans le domaine psychique doive être connu de la conscience. «  Freud, Métapsychologie, pp. 66-67

En soutenant, ainsi que nous avons vu qu'il le faisait, "le droit d'admettre un psychisme inconscient et de travailler avec cette hypothèse",  Freud ne défend pas seulement ses théorie et pratique psychanalytiques, ainsi que celle du cercle de chercheurs qui s'est constitué autour de lui. Il nous permet aussi de comprendre, à la lumière de sa propre hypothèse, celle de l'inconscient, la nature et la fonction de toute hypothèse scientifique, qui est d'expliquer ce qui, bien souvent, est inexplicable au moyen de la seule observation, alors même que l'on doit toujours partir d'elle et y revenir si l'on veut faire œuvre de science. Sa plaidoirie présente donc pour nous un intérêt épistémologique de premier ordre.

freud

« répond : "l'hypothèse de l'inconscient est nécessaire et légitime, et ...

nous possédons de multiples preuves de l'existence del'inconscient." Il va le démontrer.

Il se contente pour l'instant d'exposer son argumentaire.

Il démontrera tout d'abord que l'on nepeut pas se passer de cette hypothèse.

Sans elle il serait impossible de comprendre bon nombre de nos comportements.

Aussiest-elle on ne peut plus "nécessaire", au sens d'indispensable.

Il montrera ensuite, dans la foulée, que l'on est en droit del'admettre dans la mesure où elle permet effectivement de comprendre ces comportements, autrement dit dans la mesure où elleremplit bien son rôle explicatif, ce qui la rend, en tant qu'hypothèse, parfaitement "légitime", étant donné qu'il est dans la fonctiond'une hypothèse de fournir une explication.

Il ne lui restera plus dès lors, avant de renvoyer ses adversaires dans les cordes, qu'àleur faire observer qu'il est possible, en s'appuyant sur cette hypothèse, d'influer "sur le cours des processus conscients", influencecaractéristique de toute vérification expérimentale de la justesse d'une hypothèse. Pour prouver, ainsi qu'il vient de le déclarer, que l'hypothèse de l'inconscient est nécessaire, Freud part du fait que "les donnéesde la conscience sont extrêmement lacunaires" et il va montrer que c'est le cas aussi bien "chez l'homme sain" que "chez lemalade", autrement dit chez tout le monde ! L'inconscient ne serait donc pas une anomalie, présente seulement chez certainssujets, mais une composante essentielle, universelle, du psychisme humain.

Que faut-il entendre par "lacunaire " quand Freudinvoque, à l'appui de son hypothèse, "les données lacunaires de la conscience " ? Il faut entendre par là que ce dont nous avonsconscience ne trouve pas totalement son explication dans ce précisément dont nous avons conscience.

La lacune, le manque,n'est autre ici qu'un déficit explicatif.

Ce dont nous sommes conscients est l'effet de causes dont nous ne sommes pas conscients.On le voit à ceci que nous ne sommes pas capables d'expliquer nombre d'idées qui nous viennent, de sentiments que nouséprouvons et de gestes que nous posons.

Ainsi en va-t-il, fait observer Freud, non seulement des "actes manqués", des "rêves" etdes "symptômes compulsionnels chez le malade" mais également de nombre de nos "idées qui nous viennent sans que nous enconnaissions l'origine, et de résultats de pensée dont l'élaboration nous est demeurée cachée ".

Les actes manqués, comme leurnom l'indique, n'atteignent pas l'objectif conscient qu'on leur assignait : on les fait sans savoir pourquoi on les fait tout en sachantpourtant qu'on les accomplit.

Lorsque, par exemple, on emploie un mot à la place de celui que l'on voulait utiliser, on est bienincapable le plus souvent de trouver une explication à ce ratage.

Par ailleurs rares sont, reconnaissons-le, parmi les rêves dontnous nous souvenons ceux que nous sommes capables d'interpréter : il nous paraissent le plus souvent farfelus.

Ceux qui, tels lesmaniaques de tous ordres, ceux qui sont atteints de ce que l'on appelle aujourd'hui des T.O.C., des troubles obsessionnelscompulsifs, posent des actes malgré eux, le font sans pouvoir s'en empêcher, tout en ignorant ce qui les pousse à les accomplir.Quant aux idées qui nous viennent sans que l'on sache d'où elles nous viennent, comment les expliquer ? Nos intuitions les plusgéniales comme nos toquades les plus loufoques ont en commun de nous paraître comme étant irrationnelles, à la mesure de notreincapacité à en rendre raison, en raison de l'ignorance où nous sommes de leur origine.

Voilà qui devrait nous convaincre dechercher ailleurs que dans ce dont nous sommes conscients l'explication de tant de conduites inexplicables.

C'est ce que Freudnous propose de faire en nous demandant de reconnaître la nécessité de son hypothèse de l'inconscient : ce qui ne vient pas de laconscience doit bien venir d'ailleurs, et donc de l'inconscient, il faut en convenir : "Tous ces actes conscients , dit-il, demeurentincohérents si nous nous obstinons à prétendre qu'il faut bien percevoir par la conscience tout ce qui se passe en nous en faitd'actes psychiques".Reste toutefois à s'assurer que l'hypothèse de l'inconscient est en mesure de répondre à notre attente d'explication en apportantsur nos conduites l'éclairage que la conscience ne peut pas leur fournir.

Aussi Freud montre-t-il immédiatement que l'hypothèsede l'inconscient est non seulement nécessaire mais aussi légitime : "ils s'ordonnent dans un ensemble dont on peut montrer lacohérence, si nous interpolons les actes inconscients inférés.

" Reprenons pour le comprendre le premier des actes évoquésantérieurement.

Un acte manqué devient compréhensible si je suppose qu'il est le fruit d'une intention inconsciente qui encommande secrètement l'exécution.

Si je dis « bonsoir » au lieu de dire « bonjour » à quelqu'un, alors même que je voulais lui direbonjour, n'est-ce pas parce qu'il y avait en moi, sans que je m'en rende compte, le désir de signifier quelque chose à travers ce"bonsoir", par exemple mon désir de ne plus voir cette personne de si tôt ? L'hypothèse de l'inconscient, on le voit, aurait donc lepouvoir, qui la légitimerait en tant qu'hypothèse, d'expliquer mon lapsus, que je pourrai dès lors, avec Freud, tenir pour révélateurdes mes intentions profondes, si profondes qu'elles m'échappent à moi-même.

La bienséance, dont mon sur-moi, intériorisationdes normes sociales, est le gardien, expliquerait Freud, m'interdit de déclarer en face ce que je pense tout bas, tout simplement !Mais mon désir de le dire néanmoins finit par l'emporter, en empruntant un chemin détourné, celui du lapsus.

Aussi Freud peut-ilconsidérer qu'il a le droit de transgresser l'interdit qu'impose la science de tenir pour existant scientifiquement ce que l'on ne peutpas observer : "nous trouvons, dit-il, dans ce gain de sens et de cohérence (celui que permet l'hypothèse de l'inconscient ) uneraison, pleinement justifiée, d'aller au-delà de l'expérience immédiate.

" Il répond ainsi à ceux, nombreux, qui lui contestent "ledroit d'admettre un psychisme inconscient et de travailler avec cette hypothèse".

Il les oblige à reconnaître la légitimité de sonexplication.Reste toutefois à prouver que l'hypothèse retenue est confirmable par les faits.

Une chose est d'expliquer, c'en est une autre de lefaire validement, en étant accrédité par l'observation de changements comportementaux obtenus en application de l'hypothèse.Aussi Freud donne-t-il l'estocade finale à ses adversaires en écrivant : "s'il s'avère de plus que nous pouvons fonder sur. »

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