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Commentaire Littéraire sur « Parfum exotique »

Publié le 13/09/2011

Extrait du document

Ce sonnet fait partie de la section « Spleen et Idéal « des Fleurs du Mal (1857) de Baudelaire. L’actrice Jeanne Duval en est l’inspiratrice. Baudelaire la surnommait « la Vénus noire « et a entretenu avec elle une longue et tumultueuse relation.  Le titre, qui évoque la sensation olfactive (« parfum «) et une notion d’ailleurs (« exotique «), évoque déjà l’idée de voyage des sens.  Plus précisément, nous allons voir comment le parfum de la femme aimée provoque chez le poète une évasion, un voyage intérieur vers une île paradisiaque, image de l’Idéal que l’écriture poétique permet de recréer.   

« cette forme poétique accentue l’impression d’harmonie parfaite.

Le poète en a totalement respecté les lois : deuxquatrains, deux tercets, des alexandrins, des rimes embrassées aux quatrains puis suivies et enfin croisées (notonsque les rimes féminines –marine/narine- et masculines –tamariniers/mariniers- s’entremêlent comme pour mimerl’entente harmonieuse qui règne entre les hommes et les femmes de cette île paradisiaque).

C’est donc un poème quirepose sur une structure parfaite, structure participant de cette quête de l’Idéal.De même que l’espace de l’écriture est parfait, l’image du cercle, qui est très présente, évoque un espace rassurant(le « cercle parfait »), une sorte de cocon maternel.

En effet, le « sein » de l’amante n’est pas sans évoquer l’imagedu cercle.

Mais il évoque aussi le sein de la mère nourricière, berçant le poète près de son sein et le réconfortantpar sa chaleur.

Par ailleurs, le singulier « ton sein » (synecdoque) montre bien qu’il s’agit ici d’un symbole.

En effet,le sein symbolise à la fois la sensualité et la maternité : il englobe les deux composantes de la féminité dans uneimage circulaire (il en « fait le tour »).

Ensuite, le « soleil » (v.

4) évoque lui-même l’image du cercle qui réchauffe etqui est source de vie.

Puis « l’île » représente également ce « cercle parfait » : espace protégé, loin du tumulte dela rue parisienne, un lieu apaisant où l’on vient se reposer après avoir connu les remous de la mer (v.

10-11).

Deplus, l’assonance en (o) évoque aussi l’image du cercle protecteur, et l’allitération en (m) traduit la douceur del’harmonie qui inonde le poème (cf « Invitation au voyage »).

La femme est ici un guide fiable et fidèle grâce à sonparfum.

Elle est une présence rassurante et le poète semble lui faire une confiance absolue : ainsi le cercle n’est-ilpas celui qui enferme mais celui qui protège.Par ailleurs, les symboles et les « correspondances » participent de cette harmonie idéale du poème.

PourBaudelaire, l’homme traverse des « forêts de symboles » et le poète semble capable de transcrire les « confusesparoles » de la « Nature »(cf« Correspondances ») puisque le poème abonde lui-même en symboles.

Tout d’abord, lecharme envoûtant de la femme aimée est symbolisé par son parfum qui subjugue le poète tel un chef puissant.

Leport symbolise le « port d’attache », repère du poète (à la fois point de départ du voyage mais aussi lieu reposantdu retour).

On retrouve ici l’image du cercle, de la boucle.

Enfin, comme nous l’avons dit précédemment, le « sein »symbolise à la fois la sensualité et la maternité, et l’île représente un espace rassurant, maternel.

Les sensationssont également multiples et reflètent l’unité du monde sensible.

En effet, pour Baudelaire, « les parfums, les couleurset les sons se répondent » (cf « Correspondances »).

C’est le principe des correspondances ou de la synesthésie.Tout d’abord, les couleurs prédominantes (rendant ce poème très pittoresque) sont le jaune, le bleu et le vert.

Parla synesthésie ou le jeu des correspondances, le jaune évoque la chaleur, le bleu et le vert la fraîcheur (reliant lavue et le toucher, voire le goût).

Vers 12 à 14 : ici s’entremêlent trois sensations (l’odorat, la vue, l’ouie).Nous pouvons donc remarquer que les cinq sens sont présents dans le poème : la vue grâce aux couleurs et auxnombreuses descriptions, l’odorat grâce au parfum de la femme et de « l’air » v.

13, le goût par les « fruitssavoureux », le toucher par le climat et le « corps mince et vigoureux », et enfin l’ouie par le « chant des mariniers »v.

14.

De même, les quatre éléments naturels sont représentés : le feu (v.

4), l’air (v.

13), l’eau (v.

11) et la terre(v.

3 « rivages »).

Ainsi le poème traduit-il une respiration de tout le corps, une harmonie des cinq sens et dumonde.

Grâce au parfum de la femme et aux images qu’il suscite, le poète « prend le large », « met les voiles »,s’évade pour s’unir de toute son âme à la création tout entière.

Notons la place du mot « âme » à la césure dudernier vers : elle est au centre et à la fin du poème.

Le déterminant possessif opère un retour sur l’intériorité dupoète, mais ce n’est pas une intériorité fermée, prisonnière du « cercle », c’est une « âme » qui est en lien avectoutes les sensations qu’offrent le monde extérieur et les éléments de la nature.

« Parfum exotique » est un poèmelumineux, qui reflète le plaisir et la paix intérieure.

Il traduit une ouverture de l’âme du poète, un mouvement versl’Idéal, une respiration du corps et de l’esprit, dans une harmonie parfaite, que l’écriture poétique transcrit ourecrée. La rêverie du poète, bercé par la présence féminine et guidé par son parfum, s’évade donc vers l’image onirique d’unparadis exotique, un ailleurs idéal, lieu réunissant toute la beauté du monde et dont la poésie recrée l’harmonie.C’est un voyage immobile, voyage intérieur fait d’images et d’impressions, un chemin poétique qui conduit del’intimité amoureuse à un ravissement personnel du poète.

C’est un Idéal sensuel et spirituel auquel le poète accèdegrâce au pouvoir du corps de la femme aimée, et de son « parfum exotique ».. »

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