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La connaissance de soi peut-elle ne pas être illusoire ?

Publié le 25/03/2004

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Il y aurait en nous u « réservoir » de forces et de désirs (ou pulsions) dont nous n'aurions pas conscience, mais qui agiraient sur nous.. Pour le dire brutalement, en ce sens, l'homme n'agirait pas (ne choisirait pas ses actes e toute connaissance de cause, dans la clarté), mais serait agi (c'est-à-dire subirait, malgré lui, des forces le contraignant à agir) : il ne serait pas « maître dans sa propre maison », il ne serait pas maître de lui. Empruntons à Freud un exemple simple. Un président de séance, à l'ouverture dit « Je déclare la séance fermée » au lieu de dire « Je déclare la séance ouverte ». Personne ne peut se méprendre sur ses sentiments ; il préférerait ne pas être là. Mais ce désir (ne pas assister au colloque) ne peut s'exprimer directement, car il heurterait la politesse, les obligations sociales, professionnelles, morales du sujet. Notre président subit donc deux forces contraires : l'une parfaitement en accord avec les obligations conscientes, l'autre qui ne l'est pas et qui ne peut s'exprimer directement, ouvertement. Il y a donc conflit, au sein du même homme, entre un désir conscient, conforme aux normes morales et un autre désir plus « gênant ». Or, dans notre exemple, ce second désir, malgré la volonté de politesse du président, parvient à s'exprimer, mais de façon détournée, anodine : on dira que « sa langue a fourché ». Ici, l'exemple est simple dans la mesure où le président a sans doute parfaitement conscience qu'il ne veut pas être là.

« La conscience est le fondement de toute connaissanceLorsque Descartes entreprend de soumettre tout savoir à l'épreuve dudoute, l'unique certitude qui résiste au doute est celle du Cogito ergosum: «Je pense, donc je suis».

La conscience, c'est ce qui me faitconnaître non seulement que j'existe, mais encore qui je suis, «unechose pensante», source de connaissance et de vérité.Le Je pense donc je suis apparaît au début de la quatrième partie du «Discours de la méthode », qui présente rapidement la métaphysique deDescartes.

On a donc tort de dire « Cogito ergo sum », puisque ce texteest le premier ouvrage philosophique important écrit en français.Pour bien comprendre cette citation, il est nécessaire de restituer lecontexte dans lequel elle s'insère.

Le « Discours de la méthode »présente l'autobiographie intellectuelle de Descartes, qui se fait le porte-parole de sa génération.

Descartes y décrit une véritable crise del'éducation, laquelle ne tient pas ses promesses ; faire « acquérir uneconnaissance claire & assurée de tout ce qui est utile à la vie ».En fait, Descartes est le contemporain & le promoteur d'une véritablerévolution scientifique, inaugurée par Galilée, qui remet en cause tousles fondements du savoir et fait de la Terre, jusqu'ici considérée commele centre d'un univers fini, une planète comme les autres.

L'homme estdésormais jeté dans un univers infini, sans repère fixe dans la nature, enproie au doute sur sa place et sa fonction dans un univers livré aux lois de la mécanique.

Or, Descartes va entreprendre à la fois de justifier la science nouvelle et révolutionnaire qu'ilpratique, et de redéfinir la place de l'homme dans le monde.Pour accomplir cette tâche, il faut d'abord prendre la mesure des erreurs du passé, des erreurs enracinées ensoi-même.

En clair, il faut remettre en cause le pseudo savoir dont on a hérité et commencer par le doute :« Je déracinais cependant de mon esprit toutes les erreurs qui avaient pu s'y glisser auparavant.

Non quej'imitasse en cela les sceptiques, qui ne doutent que pour douter ; car, au contraire, tout mon dessein netendait qu'à m'assurer, et à rejeter la terre mouvante & le sable, pour trouver le roc & l'argile.

» (« Discours dela méthode », 3ième partie).Ce qu'on appelle métaphysique est justement la discipline qui recherche les fondements du savoir & deschoses, qui tente de trouver « les premiers principes & les premières causes ».

Descartes, dans ce tempsd'incertitude et de soupçon généralisé, cherche la vérité, quelque chose dot on ne puisse en aucun casdouter, qui résiste à l'examen le plus impitoyable.

Cherchant quelque chose d'absolument certain, il vacommencer par rejeter comme faux tout ce qui peut paraître douteux.« Parce qu'alors je désirais vaquer seulement à la recherche de la vérité, je pensais qu'il fallait [...] que jerejetasse comme absolument faux tout ce en quoi je pourrais imaginer le moindre doute, afin de voir s'il neresterait point après cela quelque chose [...] qui fut entièrement indubitable.

»Le doute de Descartes est provisoire et a pour but de trouver une certitude entière & irrécusable.Or il est sûr que les sens nous trompent parfois.

Les illusions d'optique en témoignent assez.

Je dois doncrejeter comme faux & illusoire tout ce que les sens me fournissent.

Le principe est aussi facile à comprendreque difficile à admettre, car comment saurais-je alors que le monde existe, que les autres m'entourent, que j'aiun corps ? En toute rigueur, je dois temporairement considérer tout cela comme faux.A ceux qui prétendent que cette attitude est pure folie, Descartes réplique par l'argument du rêve.

Pendantque je rêve, je suis persuadé que ce que je vois et sens est vrai & réel, et pourtant ce n'est qu'illusion.

Lesentiment que j'ai pendant la veille que tout ce qui m'entoure est vrai & réel n'est donc pas une preuvesuffisante de la réalité du monde, puisque ce sentiment est tout aussi fort durant mes rêves.

Par suite je dois,si je cherche la vérité : « feindre que toutes les choses qui m'étaient jamais entrées en l'esprit n'étaient nonplus vraies que l'illusion des songes ».Mais le doute de Descartes va bien plus loin dans la mesure où il rejette aussi les évidences intellectuelles, lesvérités mathématiques.

« Je rejetai comme fausses toutes les raisons que j'avais prises auparavant pourdémonstrations.

»Nous voilà perdu dans ce que Descartes appelle « l'océan du doute ».

Je dois feindre que tout ce qui m'entouren'est qu'illusion, que mon corps n'existe pas, et que tout ce que je pense, imagine, sens, me remémore estfaux.

Ce doute est radical, total, exorbitant.

Quelque chose peut-il résister ? Vais-je me noyer dans cet océan? Où trouver « le roc ou l'argile » sur quoi tout reconstruire ? On mesure ici les exigences de rigueur et deradicalité de notre auteur, et à quel point il a pris acte de la suspicion que la révolution galiléenne avait jetéesur les sens (qui nous ont assuré que le soleil tournait autour de la Terre) et sur ce que la science avait crupouvoir démontrer.« Mais aussitôt après je pris garde que, cependant que je voulais ainsi penser que tout était faux, il fallaitnécessairement que moi, qui pensais, fusse quelque chose.

Et remarquant que cette vérité : je pense donc jesuis, était si ferme et si assurée, que les plus extravagantes suppositions des sceptiques n'étaient pascapables de l'ébranler, je jugeai que je pouvais la recevoir, sans scrupule, pour le premier principe de laphilosophie que je cherchais.

»Il y a un fait qui échappe au doute ; mon existence comme pensée.

Que ce que je pense soit vrai ou faux, jepense.

Et si je pense, je suis.

Le néant ne peut pas penser.

La première certitude que j'ai est donc celle demon existence, mais comme pure pensée, puisque, en toute rigueur, je n'ai pas encore de preuve de l'existencede mon corps.

Quand bien même je nierais que le monde existe, que mon corps existe, que je puisse pensercorrectement, je ne pourrais remettre en cause ce fait : je pense, et par suite, je suis.

La volonté sceptique. »

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