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La conscience est-elle donnée ou s'acquiert-elle ?

Publié le 06/02/2004

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En rabaissant ainsi mon orgueil, par une démystification dont la démarche critique est proprement philosophique, ne puis-je pas à nouveau faire coïncider ce que je suis avec ma conscience d'être ? La «confusion» de la conscience et de l'être chez le sageLa conscience naïve de soi n'est pas la connaissance de soi. Qu'il faille s'en méfier, c'est une attitude que connaissait déjà Descartes lorsqu'il dénonçait les opinions reçues et les puissances de l'enfance qui continuent d'agir sur nous («pour ce que nous avons tous été enfants avant que d'être hommes»). Ces illusions de la conscience sont aussi constamment dénoncées par Spinoza. Ce dont j'ai spontanément conscience c'est de ce que je veux, de ce que je désire et de ce que je fais mais non des causes réelles qui expliquent ce que je veux, désire et fais. Le bébé, l'enfant en colère, le peureux, l'homme ivre, le délirant, le bavard sont, pour Spinoza, autant de figures concrètes de cette illusion générale de l'homme qui dit «je», «moi» et qui se croit ainsi libre. En réalité «ceux qui croient qu'ils parlent, ou se taisent, ou font quoi que ce soit, par un libre décret de l'esprit, rêvent les yeux ouverts'.» Je suis donc autre que ce que j'ai conscience d'être (déterminé alors que je me crois libre). Mais cette erreur peut être reconnue et surmontée. C'est là, fondamentalement un projet éthique, réalisable par un effort de l'esprit, cherchant à comprendre les choses «par le troisième genre de connaissance», c'est-à-dire sous «une espèce d'éternité».
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« qu'une chose qui pense c'est aussi «une chose qui doute, qui conçoit, qui affirme, qui nie, qui veut, qui ne veut pas,qui imagine aussi et qui sent» ? Affirmation qui, à sa manière, témoigne que la conscience n'est pas, en dehors dece moment exceptionnel de la tension ultime du doute radical, en situation de repli.

Multiple dans sa forme, elle nese maintient que dans sa capacité d'affirmer ou de nier, de refuser ou de vouloir, en un mot par son rapport aumonde et à autrui.Cette position est celle de la phénoménologie.

Elle est reprise par Jean-Paul Sartre : «elle (la conscience) n'a pas de«dedans», elle n'est rien que le dehors d'elle-même et c'est cette fuite absolue, ce refus d'êtresubstance qui la constituent comme une conscience.» Identique à ma conscience, je ne suis donc moi-même quedans ce mouvement qui me met en rapport avec le monde et avec autrui — tension morale où le faire (actif)l'emporte sur l'être (passif), volonté qui s'exprime si bien en cette formule sartrienne : «Faire et en faisant se faire,et n'être rien que ce qu'on se fait». 2 Je suis autre que ce que j'ai conscience d'être La psychanalyse (avec la question de l'inconscient), la sociologie (avec la prééminence du social sur l'individuel), laphilosophie elle-même (avec la moderne disparition du sujet) concourent à mettre en question l'affirmation selonlaquelle je suis ce que j'ai conscience d'être.

Ne suis-je pas autre que ce que j'ai conscience d'être ? Une conscience éminemment fragile Ce «je suis» atteint sans intermédiaire dans le vécu psychologique du sens intime, dans ce qui survitmétaphysiquement au doute et qui coïncide alors avec l'existence (moment privilégié où je suis pleinement ce quej'ai conscience d'être), ou encore le «je suis» qui s'affirme comme tendu vers le monde dans le mouvement éthiquede l'«ekstase» — ce «je suis» n'est pas le «ce que je suis» de la vie quotidienne.

A chaque fois il s'agit d'un «jesuis» qui ne se donne pas comme en passant, mais bien au contraire dans l'instant privilégié d'une conquête réussie.Qu'il soit obtenu dans le cas trop rare d'un acte libre (Bergson), à la suite de méditations approfondies marquées parla contention de l'esprit (Descartes) ou encore à la suite d'une «mise hors jeu» du monde (Sartre).Or ce qui se livre dans l'expérience la plus courante, ce n'est pas une conscience forte mais une conscienceéminemment fragile sans cesse mise en cause par ses limites.

Certes la conscience est ce qui est capable de relierle passé au présent et de jeter un pont vers le futur en assurant ainsi la permanence du je.

Mais l'entière mémoiredu passé est vite recouverte par les exigences pressantes de la vie sociale et le moi est le plus souvent marqué parson impuissance à maîtriser son avenir.

L'épisode proustien de la «madeleine» en témoigne.

C'est, dit Proust, peineperdue que nous cherchions à évoquer notre passé.

Tous les efforts de l'intelligence sont inutiles.

L'édifice immensedu souvenir est comme réfugié dans l'odeur ou la saveur de quelque objet matériel que nous ne soupçonnons pas.Ainsi le passé ne se livre que, par hasard, dans la sensation que peut miraculeusement nous donner cet objet (ici, la«madeleine»).

Nous pouvons ne jamais rencontrer un tel objet et ainsi ne jamais retrouver notre moi antérieur.

Lamort inéluctable des êtres, la lente destruction des choses, la dissolution de la mémoire sont autant d'atteintesportées à la conscience qui ne survit dès lors qu'en se recroquevillant dans le présent.

Cette limitation de maconscience borne mon être. Les rêves, les actes manqués témoignent de l'inconscient Dans ce présent même auquel nous nous raccrochons, une partie de nous-même nous échappe.

Jeux de mots bieninvolontaires, lapsus incontrôlés, actes manqués, oublis, méprises nous laissent entrevoir qu'en nous-même «quelquechose» de latent se profile au-delà ou en deçà de ce qui se manifeste dans l'ordre rassurant de la réalité familière.Nous éprouvons aussi parfois le sentiment d'une inquiétante étrangeté face à ce qui devait rester caché et quipourtant se déclare : angoisse provoquée par de terribles histoires d'enfance, malaise à l'égard d'incompréhensiblesrépétitions qui scandent notre existence.

Et le rêve suggère avec encore plus de force qu'il y a en nous une partiequi nous échappe en livrant à notre conscience claire des matériaux que leur extravagance foisonnante nous fontprendre simplement pour insensés.

L'inconscient, cette découverte de Freud, longtemps tenue pour impensable, medécouvre que je suis bien plus ou autre que ce que j'ai conscience d'être.

Des idées, des images, des traces sont enpermanence et de manière radicale hors d'atteinte de la conscience. Arrière-monde qui nous unit aux exigences biologiques et où règnent en maître les pulsions sexuelles, les pulsions deconservation de soi et peut-être même les pulsions de mort.

Il y a bien au-delà de la conscience claire tout unespace inconnu à peine balisé sur ses marges par la réalisation des désirs refoulés. L'inconscient l'emporte largement sur le conscient. »

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