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La conscience peut-elle errer ? (ou la conscience peut-elle être source d'illusions ?)

Publié le 05/02/2004

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conscience
Bergson, L'Energie spirituelle, 1919. « Sans donner de la conscience une définition qui serait moins claire qu'elle, je puis la caractériser par son trait le plus apparent : conscience signifie d'abord mémoire. » Bergson, L'Energie spirituelle, 1919. On constate donc bien que sans errer à proprement parler, la conscience est écartelée entre des tendances qui ne sont pas toutes de pure rationalité : elle est mouvement, avancée et retour, elle travaille sur elle-même et ses possibles. Troisième partie : La conscience et ses limites La psychanalyse a signifié la défaite de la conscience comme prétention à la domination de soi et à la maîtrise des différents processus mentaux. « L'hypothèse de l'inconscient est nécessaire [...], parce que les données de la conscience sont extrêmement lacunaires. » Freud, Métapsychologie, 1952 (posth.). La conscience de ce point de vue erre, sans le savoir le plus souvent, donnant des réponses inappropriées parce que des souvenirs ensevelis empêchent la clarification objective de certaines situations auxquelles le sujet est confronté.
conscience

« ce qui accompagne toutes mes représentations de choses particulières.

Plus précisément, la conscience estune fonction qui permet de synthétiser les multiples sensations de choses extérieures et de faire qu'il n'y aitpas un chaos d'impressions mais une représentation distincte des choses.

La conscience est en ce sensuniverselle, commune à tous les hommes.

Notons de plus que le « Je » ou sujet de Kant se distingue radicalement de celui de Descartes, car pour ce second le « Je » est une chose tandis que pour le premierc'est une fonction ou encore un pouvoir.

En tant qu'elle est unité du sujet la conscience ne saurait êtreerrance.

Pourtant, comprendre la conscience de manière aussi univoquement positive, comme si la conscienceétait non seulement toujours sûre d'elle et faculté qu'il faut croire sans jamais en douter, est insuffisant pourcomprendre l'essence même de la conscience qui doit alors être repensée profondément. II.

La conscience ou l'errance de soi Croire que la conscience ne peut pas errer, et lui accorder a fortiori une confiance aveugle, apparaît comme laplus grande illusion qu'est jamais produite la conscience elle-même.

En effet, la conscience peut errer bienqu'elle se leurre elle-même, la certitude de sa propre infaillibilité la rend justement faillible.Car si la conscience est d'abord et avant tout donatrice de sens, elle ne peut plus être pensée simplementcomme modèle de toute vérité en quoi trouverait réalisé l'adéquation du sujet à l'objet dans une puretransparence à soi.

Parce qu'il est par essence anticipation, le désir dans son trajet dessine un parcours dontle sens m'échappe en partie et que la conscience échoue à ressaisir totalement.

L'homme pour une part resteobscur à lui-même.

c'est pourquoi, de Descartes à la philosophie contemporaine, le procès de la conscience n'acessé de s'instruire.

Retournant contre elle l'arme par laquelle la conscience croyait du moins pouvoir s'assurerd'elle-même, des penseurs modernes comme Marx, Nietzsche ou Freud ont porté le doute à l'intérieure de laconscience elle-même.Loin d'être l'instance de vérité par excellence, ils voient en elle la source d'illusions, dont la plus tenace estsans aucun doute celle de la liberté ou d'une autonomie du sujet dont la conscience prétend justementtémoigner.

Malgré les apparences, la conscience ne détient pas sur elle-même la vérité du sens de sespensées ou de ses actes.

C'est ailleurs qu'il faut alors la chercher : dans le corps – comme Spinoza l'affirmait déjà -, dans les structures sociales pour Marx, dans nous instincts les plus reculés selon Nietzsche.La conscience erre au sens où elle produit des illusions dont la plus fondamentale, disions-nous, est celle dulibre-arbitre.

On peut en effet dénoncer comme une illusion de la conscience la croyance que les hommes secroient libres, ignorants en effet des causes qui les déterminent à agir (Ethique, LII, proposition II, scolie).

Laconscience est donc errance, elle apparaît même errance profonde puisque non seulement elle se fourvoierelativement à la nature de ses objets, mais elle se fourvoie elle-même en croyant être une norme decertitude.C'est parce que la conscience est profondément errante, qu'elle est la source d'illusion profonde, queNietzsche affirmer qu'il faut se défier de ce qu'on appelle la « vois de la conscience ».

En ce sens Nietzsche prend le contre-pied total de Rousseau.

Il en reprend l'analyse au §335 du Gai Savoir : La question est desavoir si ces sentiments moraux dont parle Rousseau sont effectivement inscrits comme il le dit au coeur de laconscience, indépendamment de toute acquisition, de toute assimilation ou si au contraire, ils sont l'objetd'une assimilation à l'issue de laquelle ils passeront pour naturels, spontanés.

La question est de savoir à quoion reconnaît un acte moral ? A cette question, l'interlocuteur fictif donne une réponse en trois temps.Nietzsche répond que cela fait trois actes et non pas un seul.

Mais là n'est pas en fait le problème pour lui.

Leproblème est de savoir d'où vient le jugement qui commande l'action ? De la conscience ! De la voix de laconscience, qui ne peut pas être immorale puisqu'elle fixe ce qui est moral.

On retrouve là la thèse deRousseau, celle d'une conscience immédiatement morale en ce qu'elle sait constitutivement ce qui est bien etce qui est mal.

Les objections de Nietzsche sont de deux ordres : une est relative à l'origine de cette voix etdes ses impératifs, l'autre relative à la manière avec laquelle on lui obéit.

D'abord, en faisant appelle trèsclairement à la conscience réflexive, la conscience qui examine les contenus et les actes de conscience, ilinvite à comprendre que l'idée selon laquelle ce que dicte la conscience est moral n'est qu'une croyance, c'est-à-dire quelque chose qui n'est pas fondé, qui n'a rien de rationnel.

Une simple foi en sa conscience, ou, commeon l'a vu plus haut avec le texte de Rousseau, une confiance faite à sa conscience qui ne repose sur rien.

Uneconfiance accordée sans examen, sans raison valable.

Car, lorsqu'on réfléchit à propos de cette voix, on estforcé de constater qu'elle ne vient pas de la conscience, que ce que la conscience nous recommande de fairene se trouve pas constitutivement en elle, mais procède d'autre chose que d'elle : des instincts, despenchants, des expériences et de ce qu'on ne sait pas, de notre naïveté.

Ses impératifs ont une genèse, uneorigine dans autre chose que la conscience et lorsqu'on a découvert d'où ils viennent, il apparaît qu'il était biendangereux de faire confiance à sa conscience.

La conscience n'est pas constitutivement conscienced'impératifs moraux, ne sait pas constitutivement ce qui est bien et ce qui est mal, elle le sait de manièredérivée et aussi de manière variable d'un individu à un autre puisque la genèse des impératifs moraux dépend àla fois de la nature singulière de chacun et de son histoire propre.

Ensuite, réflexivement, il invite à sedemander comment on se rapporte à ce que notre conscience recommande.

Cette remarque est relative à lamanière d'agir après avoir entendu la voix de sa conscience.

Non seulement la voix de la conscience n'est pasinhérente à la conscience elle-même, mais on peut l'entendre et lui obéir de bien des façons différentes.

Desorte que l'action morale qu'on croit si simple est en réalité à la fois complexe et très diversifiée.

La consciencen'est pas constitutivement morale parce que ce qu'elle sait du bien et du mal n'est pas inscrit en elle, maisprocède de quelque chose d'extérieur à la conscience, et dont la pure moralité est contestable.

Nietzsche nenie pas l'existence de cette voix, il nie qu'elle n'ait pas d'autre origine que la conscience elle-même, et ilconteste sa moralité.

De sorte qu'il évite ainsi la critique de Rousseau : il y a bien une voix, il est possible desentir son coeur, mais ce qui parle, ce n'est pas la conscience! Comprenons donc avec cette analyse. »

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