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Les contemporains d'un événement peuvent-ils en comprendre le sens ?

Publié le 31/01/2004

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            2° Rapporter un événement au fil directeur de l'histoire exige une compréhension rétrospective             Il semble cependant possible de distinguer différents niveaux de compréhension d'un événement : on peut ainsi penser que si les contemporains peuvent dégager les causes passées d'un événement, seule la connaissance de ce qui suit l'événement permet de l'intégrer dans une vision plus large du cours de l'histoire. Ainsi, dans la perspective de Hegel, l'histoire suit un progrès qui lui donne sa direction et sa signification : il s'agit de l'avènement progressif de l'Esprit, ou de la Raison de l'humanité, qui se traduit par une liberté croissante et une prise de conscience de cette liberté. Donner sens à un événement consiste alors à le situer comme étape dans cette réalisation progressive de l'Esprit. Il faut pour cela pouvoir replacer l'événement dans le cours de l'histoire universelle qui lui donne son sens : or, cela ne peut être fait que de manière rétrospective : nous pouvons ainsi, à notre époque, percevoir la Grèce antique démocratique comme la première manifestation de l'Eprit, et donc de la liberté, mais une telle analyse ne pouvait être accessible aux contemporains de cette démocratie. L'importance d'un événement, ce qui donne à un fait sa pertinence pour l'histoire, ne peut donc être saisie que de manière rétrospective, par rapport à ses conséquences.             3° Le sens que ses contemporains donnent à un événement fait partie du sens de cet événement             Si les contemporains d'un événement ne peuvent avoir accès aux conséquences lointaines de cet événement permettant de le replacer dans le cours global de l'histoire, on peut cependant penser que le sens que les contemporains donnent à l'événement est lui-même partie prenante du sens de cet événement. C'est ce qui est affirmé par le sociologue Max Weber : lorsque le sociologue cherche à comprendre les causes et les conditions d'un état ou d'un événement caractérisant la société, il ne peut faire abstraction du sens que les contemporains, les acteurs de cet événement lui ont donné. Le sociologue ne peut prétendre analyser les faits sociaux comme des choses abstraites de ce sens. Ainsi, même si les contemporains donnent un sens à l'événement différent de celui qu'en donnera, avec le recul, le sociologue, il n'en reste pas moins que ce sens donné pas les contemporains a informé l'événement ou ses conséquences de manière particulière.  Les interprétations fournies par les contemporains d'un événement ne doivent donc pas se comprendre en termes de fausses ou de justes, mais en tant qu'elles deviennent elles-mêmes parties prenante de ce que le sociologue analyse.

Il est aujourd'hui possible de comprendre les événements dans lesquels nous sommes plongés à condition de diversifier les analyses. La distance temporelle n'est pas la clé d'une prétendue histoire objective. Mais, l'historien a traditionnellement besoin d'une distance temporelle. Elle seule permet la diversité de l'information, l'inscription des faits au sein d'une intrigue globale, et le désengagement idéologique.

« Il semble cependant possible de distinguer différents niveaux de compréhension d'un événement : on peut ainsi penser que si les contemporains peuvent dégager les causes passées d'un événement, seule la connaissancede ce qui suit l'événement permet de l'intégrer dans une vision plus large du cours de l'histoire.

Ainsi, dans laperspective de Hegel, l'histoire suit un progrès qui lui donne sa direction et sa signification : il s'agit de l'avènementprogressif de l'Esprit, ou de la Raison de l'humanité, qui se traduit par une liberté croissante et une prise deconscience de cette liberté.

Donner sens à un événement consiste alors à le situer comme étape dans cetteréalisation progressive de l'Esprit.

Il faut pour cela pouvoir replacer l'événement dans le cours de l'histoire universellequi lui donne son sens : or, cela ne peut être fait que de manière rétrospective : nous pouvons ainsi, à notreépoque, percevoir la Grèce antique démocratique comme la première manifestation de l'Eprit, et donc de la liberté,mais une telle analyse ne pouvait être accessible aux contemporains de cette démocratie.

L'importance d'unévénement, ce qui donne à un fait sa pertinence pour l'histoire, ne peut donc être saisie que de manièrerétrospective, par rapport à ses conséquences. 3° Le sens que ses contemporains donnent à un événement fait partie du sens de cet événement Si les contemporains d'un événement ne peuvent avoir accès aux conséquences lointaines de cetévénement permettant de le replacer dans le cours global de l'histoire, on peut cependant penser que le sens queles contemporains donnent à l'événement est lui-même partie prenante du sens de cet événement.

C'est ce qui estaffirmé par le sociologue Max Weber : lorsque le sociologue cherche à comprendre les causes et les conditions d'unétat ou d'un événement caractérisant la société, il ne peut faire abstraction du sens que les contemporains, lesacteurs de cet événement lui ont donné.

Le sociologue ne peut prétendre analyser les faits sociaux comme deschoses abstraites de ce sens.

Ainsi, même si les contemporains donnent un sens à l'événement différent de celuiqu'en donnera, avec le recul, le sociologue, il n'en reste pas moins que ce sens donné pas les contemporains ainformé l'événement ou ses conséquences de manière particulière.

Les interprétations fournies par lescontemporains d'un événement ne doivent donc pas se comprendre en termes de fausses ou de justes, mais en tantqu'elles deviennent elles-mêmes parties prenante de ce que le sociologue analyse.

Conclusion On peut penser tout d'abord que les contemporains d'un événement sont les plus aptes à en comprendre lesens, parce qu'ils possèdent, contrairement à l'historien de l'avenir, une source d'information directe : mais cetémoignage direct peut également fausser la compréhension, s'il n'est pas corrigé par des méthodes d'analyserigoureuses.

Cependant, une telle compréhension ne peut, par définition, situer la singularité de l'événement dans lecours global de l'histoire.

Les contemporains peuvent au mieux dégager les causes passées de l'événement et fairedes hypothèses sur ses conséquences à long terme, mais si l'on pense que seul un principe dirigeant tout le coursde l'histoire permet une compréhension complète, alors celle-ci ne peut être que rétrospective.

On peut alorsaffirmer que cela ne doit pas amener à ne tenir pour rien le sens que les contemporains d'un événement lui donnent,car ce sens influence lui-même le cours de l'histoire et constitue une interprétation sur laquelle doit s'appuyer touterecherche rétrospective du sens de l'événement. « La science sociale a presque horreur de l'événement.

Non sans raison : le temps court est la plus capricieuse, laplus trompeuse des durées.

» Braudel, Écrits sur l'histoire, 1969. « Qu'est-ce qu'un événement? Est-ce un fait quelconque? Non pas.

C'est un fait notable.

Or comment l'historienjuge-t-il qu'un fait est notable ou non ? Il en juge arbitrairement, [...] car les faits ne se divisent pas, de leur proprenature, en faits historiques et en faits non historiques.

» Anatole France, Le Jardin d'Épicure, 1894. « C'est la multiplicité et la durée des effets produits, c'est l'intensité de la répercussion dans l'espace et dans letemps qui caractérisent l'événement.

[...] De même qu'il y a des hasards indifférents et des événements, il y a desindividualités négligeables et des personnages.

» Henri Berr, La Synthèse en histoire, 1911.. »

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