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Le culte des morts est-il un signe d'humanité ?

Publié le 19/03/2004

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Cela signifierait que celui qui ne rend pas de culte n'est pas humain, un animal par exemple ou un barbare (ainsi les nazis ont refusé les sépultures aux juifs qu'ils exterminaient dans les camps. N'était-ce pas un signe de leur inhumanité et de leur barbarie ?). Rendre un culte aux morts serait alors témoigner de notre humanité culturelle par opposition à la nature, à l'animalité, à la divinité aussi qui ne meurt pas ; en rendant un culte on commémore et on s'inscrit dans l'histoire, la tradition. Recevoir un culte quand on meurt, c'est d'une certaine manière être reconnu comme homme et comme humain participant de cette histoire et de cet héritage d'humanité. Le culte des morts est aussi un devoir de mémoire d'une certaine manière, un rite qui nous fait homme au sens où l'humanité est culturelle. Donc il y a effectivement quelque chose qui a à voir avec l'idée de signe au sens de signification : on signifie notre appartenance à la communauté humaine. Le culte donne un sens à notre existence. Ce sujet a également un enjeu anthropologique (voir le livre de Louis-Vincent Thomas, Anthropologie de la mort, 1re et 3e parties surtout). Pourtant, l'humanité peut-elle accepter cette forme de superstition, de croyance ?

Le culte des morts est l'ensemble des cérémonies (sépulture, commémoration, etc.) par lesquelles nous honorons nos disparus. C'est la reconnaissance symbolique de notre héritage culturel : le monde dans lequel nous vivons est celui que nous ont préparé nos ancêtres, et ce que nous sommes est en partie dû à eux. Auguste Comte disait : "L'humanité est faite de plus de morts que de vivants". Tout ce que les morts ont dit, pensé, fait, nous l'avons en héritage.

Première partie : Culte, sacré et interdits

Deuxième partie : La double négation de l'homme selon G. Bataille

 

« introduction « Parce que l'homme participait au lot divin, fait dire Platon à Protagoras, d'abord il fut le seul des animaux à honorerles dieux, et il se mit à construire des autels et des images divines ; ensuite il eut l'art d'émettre des sons et desmots articulés » {Protagoras, 322a).

Ainsi, c'est le sentiment de la transcendance qui caractériserait en premier lieul'homme.

Toutefois l'archéologie nous apprend que l'homme a honoré, semble-t-il, ses morts avant que d'inventerdes dieux.

Mais en quoi le culte des morts peut-il être un signe d'humanité ? Première partie : Culte, sacré et interdits a) On définit traditionnellement le culte comme « l'hommage qu'on rend à un dieu par des actes de religion ».

Maiscette définition nous semble trop étroite : rendre un culte aux morts n'implique pas qu'ils soient considérés commedes dieux.

En réalité, il convient d'entendre par culte l'hommage que l'homme rend au divin, compris au sens large detranscendance, de surnaturel, ou plus exactement au sacré, c'est-à-dire à tout ce qui apparaît comme doué d'une «énergie dangereuse, incompréhensible, malaisément maniable, éminemment efficace » (R.

Caillois), provoquant chezl'homme un sentiment ambivalent de terreur et de confiance, d'effroi et de respect.

Ce que R.

Otto résumait enfaisant du sacré un mysterium tremendum, un mystère terrifiant, mais aussi fascinant.

Ce caractère contradictoiredu sacré, ajouté au fait qu'il ne peut être mêlé — sous peine d'engendrer un désordre catastrophique dans l'ordredes choses — au profane puisqu'il lui est radicalement étranger, explique que le sacré soit la catégorie ambiguë dupur et de l'impur, de la sainteté et de la souillure. b) Ce sont ces rapports du sacré avec le profane que marquent et règlent les interdits, les « tabous ».

Frapperquelque chose d'interdit(s), c'est en effet signifier qu'il appartient à la sphère du sacré, c'est l'exclure du mondeprofane, et c'est protéger ce dernier contre son intrusion, laquelle pourrait le détruire.

Rendre un culte, honorer,c'est donc maintenir à distance, c'est se protéger. c) Dans ces conditions, nous pouvons nous demander si c'est le culte des morts qui est un signe d'humanité, ousimplement le culte de quelque chose, c'est-à-dire l'affirmation du sacré, de la transcendance d'un « tout-autre »,que manifestent — et que fondent — les interdits, ce sacré étant primitivement conçu comme une force diffuse etimpersonnelle, puis différenciée en entités plus ou moins anonymes, pour enfin s'unifier et se concentrer dans unDieu unique, celui des religions monothéistes.

Le culte des morts serait alors, en tant qu'il peut être ramené à unsystème d'interdits, un signe d'humanité au même titre que tous les autres interdits, par exemple les interditssexuels, notamment la prohibition de l'inceste.

Telle est la position de G.

Bataille, qui estime que le culte des mortspermet de saisir, voire de dater, le passage de l'animal à l'homme. Deuxième partie : La double négation de l'homme selon G.

Bataille Pour Bataille, l'homme se définit par un double être de négation : il nie la nature, le donné naturel et se nie lui-même.

L'homme n'est pas un animal comme les autres puisqu'il ne se satisfait pas du donné naturel.

Lorsque Batailledit qu'il le nie, il signifie qu'il le modifie, le transforme.

En d'autres termes, l'homme est un être qui se construit unmonde.

L'homme est un être de technique qui n'est pas nécessairement adapté au monde qui l'entoure mais quiadapte ce monde à ses besoins.

Il y a donc une différence radicale entre le monde naturel et le monde culturelhumain.

Mais cette négation ne porte pas simplement sur le monde extérieur, elle porte également sur l'homme lui-même puisque tout individu quitte cette naturalité première qui fait de lui simplement un être de besoins.

L'hommen'est pas qu'un être de besoins, en quoi son éducation fait qu'il ne vit pas seulement selon ses pulsions ; parexemple, l'éducation consiste à apprendre à vivre ensemble et donc à différer ses désirs.

Bataille montre alors le lienentre ces deux négations simplement parce que la négation du donné naturel est aussi négation de sa propreanimalité. • Rappel des données de la préhistoire. Comme le montre A.

Leroi-Gourhan dans Les Religions de la préhistoire, nous ne possédons pour le paléolithiqueinférieur (avant 80 000 av.

J.-C.) aucun témoignage résistant à l'examen d'un culte des morts ou d'un cultequelconque.

En revanche, « l'enfouissement [des morts], avec éventuellement un dépôt [d'objets], est pour lepaléolithique moyen [de 80 000 à 35 000 av.

J.-C] pratiquement assuré.

Au paléolithique supérieur [de 35 000 à 9000 av.

J.-C], la sépulture est certaine, l'usage de l'ocre [pour orner les tombes] l'est aussi, mais avec moins de. »

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