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Dans quelle mesure, la logique de « différenciation », est-elle à la base des comportements individuels et des pratiques sociales ?

Publié le 01/03/2011

Extrait du document

 

Document 1

 

On peut demander à la gymnastique - c'est la demande populaire [...] - de produire un corps fort et portant les signes extérieurs de sa force, ou, au contraire, un corps sain - c'est la demande bourgeoise [...] Les poids et haltères, qui sont sensés développer la musculature ont longtemps été - surtout en France - le sport favori des classes populaires ; et ce n'est pas par hasard non plus que les autorités olympiques ont tant tardé à accorder la reconnaissance officielle à l'haltérophilie qui, aux yeux des fondateurs aristocratiques du sport moderne, symbolisait la force pure, la brutalité et l'indigence intellectuelle, c'est-à-dire les classes populaires. [...]

La plupart des sports collectifs, basket-ball, handball, rugby, football, dont la pratique déclarée culmine chez les employés de bureau, les techniciens et les commerçants, et aussi sans doute les sports individuels les plus typiquement populaires, comme la boxe ou la lutte, cumulent toutes les raisons de repousser les membres de la classe dominante :

-  la composition sociale de leur public [...] ;

- les valeurs engagées, comme l'exaltation de la compétition ;

- et les vertus exigées, force, résistance, disposition à la violence, esprit de sacrifice, de docilité et de soumission à la discipline collective [...].

Au contraire, les sports « bourgeois «, pratiqués principalement pour leurs fonctions d'entretien physique et pour le profit social qu'ils procurent, ont en, commun de reculer bien au-delà de la jeunesse l'âge limite de la pratique et peut-être d'autant plus loin qu'ils sont plus prestigieux et plus exclusifs (comme le golf).

 

              Pierre BOURDIEU  « Comment peut-on être sportif «, in Questions de sociologie

Les Editions de minuit   1981

 

Document 2

 

L'identification de classe s'était nourrie d'us et coutumes, d'arts de vivre, de cultures que chaque camp préservait jalousement. Jadis, le vêtement et l'habitat, le loisir et les sociabilités, la langue d'appartenance et même les formes de la tendresse, de l'intimité et du rêve distinguaient aisément l'ouvrier du bourgeois. Au premier coup d'œil, jusqu'à la fin des années 1950, on savait repérer la casquette et le chapeau, les appartenances étaient codées et l'on arborait sa différence. Que peut-il subsister de ce zonage social quand le jean et les tennis, le « survêt « du dimanche, le frigo et la télé, le voyage organisé et l'auto familiale n'arborent plus guère de signalisation de classe ? [...] Au bout du compte, ce sont des traits sociaux très neufs qui ont le plus fortement incité à ranger la classe au magasin des accessoires. Depuis le début des années 1960, la classe d'âge et la génération ont pris une plus forte lisibilité, avec un rôle bien typé des jeunes qui a eu tant de conséquences sur la consommation, les pratiques culturelles et les visions de la vie. Le meilleur accès à la connaissance à travers un enseignement de masse, les progrès parallèles de la médiatisation multiforme, ont introduit d'autres classifications économiques et mentales : on est diplômé, téléspectateur plus ou moins assidu, consommateur de rock ou fou de micro-informatique autant que cadre, agriculteur ou métallo [...].

 

Jean-Pierre RIOUX   in L'Histoire  n° 195  janvier 1996

 

Document  3  Au cours des 12 derniers mois

Sur 100 personnes de chaque groupe

Sont allées au théâtre

Ont visité un musée

Ont joué d'un instrument de musique

Ont lu 25 livres

Ont regardé Arte au moins une fois par semaine

Sont allées au cinéma

PCS chef   de

ménage

 

 

 

 

 

Cadres et professions intellectuelles supérieures

 

44

 

65

 

27

 

29

 

30

 

82

Professions intermédiaires

21

 

43

17

20

23

72

Employés

16

34

16

16

15

61

Artisans, commerçants et chefs d'entreprise

11

33

13

9

16

59

Ouvriers

6

22

12

6

15

44

Agriculteurs

5

20

7

10

16

32

Age

 

 

 

 

 

 

15-24 ans

24

40

34

13

16

83

25-39 ans

15

36

14

14

20

58

40-59 ans

17

33

8

15

22

45

60 ans et plus

10

24

4

12

23

21

 

Source : Enquête  Pratiques culturelles des Français    Ministère de la Culture et de la Communication, 1997

 

 

Document 4 Homo oeconomicus est dégagé de tout ce qui fait la vie en société, influences imitations, subordinations, déterminations sociales : c'est ce qu'on nomme son autonomie, ou encore sa "souveraineté". Il se détermine rationnellement, agençant les moyens rares dont il dispose de façon à maximiser ses fins […]. Etre libre c'est être "quitte de tous les autres" ( WALRAS ).

 

J-P DUPUY   Introduction aux sciences sociales  Ellipses 1992  p. 65-67

 

 

Document 5

 

La mode ne consiste pas dans un mouvement, mais dans deux : dans celui qui porte les inférieurs à chercher à ressembler aux supérieurs ; et dans celui par lequel les supérieurs abandonnent leur position précédente, afin de ne pas se laisser rejoindre par les inférieurs […].

Le souci de conformisme est fondamental dans le choix des vêtements : selon une enquête, les trois quarts des femmes interrogées déclarent qu'en suivant la mode elles cherchent surtout à ne pas se faire remarquer. D'autre part, à l'intention conformiste se mêle l'intention de "se distinguer", généralement traduite en termes d' "expression de soi".

Dès 1905, le philosophe et sociologue allemand Georg Simmel en avait eu l'intuition, et en proposait une interprétation. Selon lui, la mode satisfait à la fois le désir de réunion, de communauté avec les autres, et celui d'isolement, de différenciation. L'individu à la mode se sent différent original, et en même temps l'objet de l'approbation du plus grand nombre, qui se conduisent comme lui. La mode réalise donc un heureux équilibre entre le désir de conformité, d'approbation et de sécurité, et le désir de distinction, d'individualisme, de singularité.

 

D'après Jean STOETZEL   La psychologie sociale  Flammarion  1978  p. 281

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Document 6

 

Equipement en biens durables selon la catégorie socioprofessionnelle

 

 

F. NODE-LANGLOIS et L. RIGER  La consommation  Le Monde poche   1995

 

 

 

 

 

 

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