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La déconstruction des modèles chez Baudelaire

Publié le 07/09/2013

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baudelaire

 

Les thèmes qui, dans Les Fleurs du Mal, proviennent du romantisme

sont repensés et renouvelés au sein d'une évolution

créatrice qui se définit avant tout par sa singularité. Dans

cette perspective, la distinction habituelle entre la tradition et

la nouveauté se révèle peu pertinente. Dès lors on ne verra

pas d'opposition entre les différentes étapes de cette évolution,

mais l'approfondissement et l'amplification de quelques

notions fondamentales qui se définissent comme l'expression

d'une nécessité intérieure et non comme un signe d'appartenance

à une école littéraire quelconque. Cela confirme que

les grandes oeuvres sont grandes justement en cela qu'elles

sont inclassables. Le rapport de Baudelaire au romantisme

est un magnifique exemple de la force que la création poétique

puise dans la déconstruction des modèles, dans la désacralisation

des idées reçues et des formes héritées du passé.

Il en est ainsi de l'aspiration à l'idéal aussi bien que de la

purification par la souffrance ou du rôle de l'inspiration dans

la création poétique. Ces trois grands axes proviennent effectivement

du romantisme, mais ils se chargent dans la poétique

baudelairienne de significations nouvelles. On peut

même dire que la première différence entre la poétique baudelairienne

et le mythe romantique apparaît dans la transformation

objective des matériaux empruntés à l'expérience individuelle

que le poète s'emploie à couler dans des formes qui

les «transcendent«. Il y a contamination incessante entre le

vécu et un imaginaire qui s'appuie sur les grands mythes de la

culture occidentale, tels que le romantisme les a actualisés.

Le moi haïssable

On sait, par ailleurs, que le romantisme s'est essentiellement

défini comme l'expression des sentiments personnels. En cela

il a constitué une libération pour l'art et la littérature de cette

époque, prisonniers des schémas généraux et abstraits de

l'héritage classique.

Dans cette perspective, Baudelaire se rattache à ce mouvement

par l'origine autobiographique de son inspiration. On a

un exemple de ces résonances dans le premier poème des

Fleurs du Mal, «Bénédiction«, qui s'ouvre sur le rappel douloureux

du rejet subi par Baudelaire dans son enfance, lors

du remariage de sa mère. Or, comme on l'a déjà dit, ce

sentiment d'exclusion a été à l'origine de sa vocation poétique.

L'incompréhension constante dont il a souffert par la

suite ne pouvait que confirmer cette incompatibilité entre la

normalité de la vie et la volonté de se consacrer à l'art. Il est

donc naturel qu'il ait dans son poème inversé la relation de

cause à effet entre l'une et l'autre.

Il est vrai qu'il importe d'avoir toujours à l'esprit la distinction

entre le moi existentiel et le moi créateur. Mais il existe

entre ces deux sujets de constantes passerelles qui font circuler

le courant entre l'oeuvre et la vie.

La poétique de Baudelaire repose, en fait, sur la convergence

entre l'expérience existentielle et une conception providentialiste

du monde et de l'histoire fondée sur la croyance

au péché originel. La nostalgie d'une enfance mythifiée va

donc nourrir la foi dans un paradis perdu. Le traumatisme de

la rupture avec la mère est à l'origine d'une démarche qui

constamment s'efforce de trouver dans la vision d'une humanité

déchue l'explication d'une vie placée sous le signe de

l'exil et du naufrage. Cette correspondance entre la destinée

collective, le sens que Baudelaire attribue à !'Histoire et un

destin personnel constitue le fondement de sa poétique.

Grâce à cette analogie rassurante, le poète, d'une part, rattache

les méandres de sa propre histoire au cours de !'Histoire

universelle. On comprend donc qu'il ait adhéré avec enthousiasme

au système d'interprétation qu'il trouvait dans la philosophie

de Joseph de Maistre. Baudelaire donnait ainsi une

signification rationnelle à une expérience qui, sans cela, aurait

sombré dans une gratuité absurde. Cette relation sousjacente

entre l'abstrait et le concret, entre la sphère des

émotions et le monde des idées, est l'axe qui génère la réversibilité

baudelairienne, cette conversion incessante des élans

vers l'idéal en retombées du spleen et réciproquement. La

création poétique aura la tâche de régulariser, d'harmoniser

ce mouvement cyclothymique.

baudelaire

« vécu et un imaginaire qui s'appuie sur les grands mythes de la culture occidentale, tels que le romantisme les a actualisés.

Le moi haïssable On sait, par ailleurs, que le romantisme s'est essentiellement défini comme l'expression des sentiments personnels.

En cela il a constitué une libération pour l'art et la littérature de cette époque, prisonniers des schémas généraux et abstraits de l'héritage classique.

Dans cette perspective, Baudelaire se rattache à ce mouve­ ment par l'origine autobiographique de son inspiration.

On a un exemple de ces résonances dans le premier poème des Fleurs du Mal, «Bénédiction», qui s'ouvre sur le rappel dou­ loureux du rejet subi par Baudelaire dans son enfance, lors du remariage de sa mère.

Or, comme on l'a déjà dit, ce sentiment d'exclusion a été à l'origine de sa vocation poéti­ que.

L'incompréhension constante dont il a souffert par la suite ne pouvait que confirmer cette incompatibilité entre la normalité de la vie et la volonté de se consacrer à l'art.

Il est donc naturel qu'il ait dans son poème inversé la relation de cause à effet entre l'une et l'autre.

Il est vrai qu'il importe d'avoir toujours à l'esprit la distinc­ tion entre le moi existentiel et le moi créateur.

Mais il existe entre ces deux sujets de constantes passerelles qui font circu­ ler le courant entre l'œuvre et la vie.

La poétique de Baudelaire repose, en fait, sur la conver­ gence entre l'expérience existentielle et une conception provi­ dentialiste du monde et de l'histoire fondée sur la croyance au péché originel.

La nostalgie d'une enfance mythifiée va donc nourrir la foi dans un paradis perdu.

Le traumatisme de la rupture avec la mère est à l'origine d'une démarche qui constamment s'efforce de trouver dans la vision d'une huma­ nité déchue l'explication d'une vie placée sous le signe de l'exil et du naufrage.

Cette correspondance entre la destinée collective, le sens que Baudelaire attribue à !'Histoire et un. »

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