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DESCARTES: Troisième maxime

Publié le 17/04/2005

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Ma troisième maxime était de tâcher toujours plutôt à me vaincre que la fortune, et à changer mes désirs que l'ordre du monde et généralement, de m'accoutumer à croire qu'il n'y a rien qui soit entièrement en notre pouvoir que nos pensées, en sorte qu'après que nous avons fait de notre mieux, touchant les choses qui nous sont extérieures, tout ce qui manque de nous réussir est, au regard de nous, absolument impossible. Et ceci seul me semblait être suffisant pour m'empêcher de rien désirer à l'avenir que je n'acquisse, et ainsi pour me rendre content. DESCARTES

Dans a troisième partie du Discours de la méthode, Descartes développe ce qu'il appelle a "morale par provision". Elle est constituée de trois maximes destinées à servir de guide provisoire pour bien vivre, avant d'avoir atteint a connaissance véritable. La première consiste à respecter les lois, les coutumes et a religion de son pays, en suivant les opinions les plus modérées ; a seconde pose que nous devons suivre avec fermeté les décisions que nous avons prises.    Problématique    Que pouvons-nous faire pour bien vivre ? La troisième maxime propose une attitude générale qui rappelle les positions épicuriennes ou stoïciennes. Il est inutile de vouloir l'impossible, la sagesse consistant plutôt à s'adopter à la réalité pour mieux la maîtriser.    Enjeux    Il ne faut pas voir dans cette attitude cartésienne un renoncement au monde. Au contraire, Descartes affirme, à la différence des sagesses antiques, que nous devons devenir "maîtres et possesseurs de a nature" en développant les savoirs et les techniques. Il s'agit simplement ici de savoir ce que je puis effectivement faire, ce que je puis raisonnablement désirer. La souffrance vient souvent de l'inadéquation entre un désir insuffisamment éclairé par l'entendement et les circonstances contraires.

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« sciences sur le roc de la certitude. Mais une question nouvelle apparaît : pendant que je détruis mon ancienne demeure, pour en reconstruire unenouvelle, où vais-je loger ? « Car ce n'est pas assez, avant de recommencer à rebâtir le logis où l'on demeure, que de l'abattre […] il faut aussis'être pourvu de quelque autre où o puisse être logé commodément pendant le temps qu'on y travaillera. » Pendant que le doute m'oblige à n'admettre aucun principe, comment vais-je vivre, et vivre au milieu des autres, sur quels principes vais-je régler mes actes, moi qui rejette tous les principes ? Sur quels critères vais-jechoisir d'agir, pendant que je doute de tout ? La démarche intellectuelle de Descartes l'oblige à être irrésolu en ses jugements, de tout passer au crible du doute, mais « les actions de la vie ne souffrent aucun délai .

» « Ainsi, afin que je ne demeurasse point irrésolu en mes actions pendant que la raison m'obligerait de l'être en mesjugements, et que je ne laissasse pas de vivre dès lors aussi heureusement que je pourrais, je formais une moralepar provision. » La morale par provision consiste à se donner des règles d'action, temporaires et révisables, pour vivre et agir defaçon décidée et résolue, alors même que le doute me contraint à ne rien admettre pour vrai.

On est là à unmoment très particulier de la démarche cartésienne ; un moment où le divorce est possible entre raison & action.Ce qui prime dans l'ordre de la connaissance c'est la vérité.

Et elle impose le doute, la patience, la circonspection.Ce qui prime dans l'action, c'est la résolution, c'est de savoir prendre partie s'y tenir face à l'urgence de la vie.

Lamorale par provision ne correspond qu'à un moment précis de la vie : celui où j'entreprends une réforme intellectuelletotale alors même qu'il me faut continuer à agir. Elle est nécessaire au moment où mes actes ne peuvent pas encore parfaitement correspondre à la vérité, et ceciparce que je cherche une vérité que je n'ai pas encore atteinte.

Les règles de la morale par provision ou « morale provisoire » sont donc par essence révisables, et Descartes récrira une morale une fois sa métaphysique et sa physique fondées.

Pour l'instant, il s'agit de se donner les maximes les plus prudentes et les plus aptes à m'assurerle contentement, alors même que je ne dispose d'aucun principe ferme pour guider mon action.

Si l'on reprend lamétaphore de Descartes , elles correspondent à cette maison dans laquelle j'habite temporairement, pendant que je reconstruis mon palais. La première maxime de Descartes recommande un conformisme extérieur : puisque rien ne me dit quelles mœurs ou quelle religion adopter en toute connaissance de cause, autant m'en tenir à celles de mon pays.

Ce conformismen'est que la façade et n'implique aucune adhésion intérieure.

La seconde maxime consiste en un usage ferme etconstant de la volonté ; une fois une décision prise, il ne faut pas en démordre.

Si je me perds en forêt, il me faudrabien choisir, fut-ce au hasard, une direction, et si je veux ne pas m'égarer complètement, m'y tenir. La troisième maxime est : « de tâcher toujours plutôt à me vaincre que la fortune et à changer mes désirs plutôt que l'ordre du monde ».

Descartes affirme que cette règle est aussi facile à comprendre que difficile à appliquer.

En fait, il s'agit là d'une maxime d'inspiration stoïcienne, quasi directement recopiée d' Epictète , et qui nous invite à faire le départage entre : · d'une part ce qui dépend de nous, ce sur quoi nous avons un pouvoir ; · d'autre part ce qui ne dépend pas de nous, et dont nous devons nous exercer à ce qu'il ne nous touche en aucune façon. Le but que poursuivent les stoïciens, et Descartes ici, est de nous rendre les plus indépendants possibles des coups du sort, d'assurer au sujet la plus grande autonomie possible.

Or pour cela il faut NOUS vaincre, plutôt que denous en prendre à la fortune (au mode, au hasard) et changer nos désirs plutôt que de sombrer dans l'illusion deremodeler le mode suivant nos projets.

Comme le déclare Epictète : « Ce n'est pas en satisfaisant nos désirs que l'on se fait libre, mais en détruisant les désirs. » On voit ici naître l'opposition entre le sujet et la fortune, ses désirs et le monde.

En fait, il faut d'abord savoir faire ladifférence entre ce qui dépend de nous et ce qui n'en dépend pas, compter nos propres forces, et les mesurer àcelles du monde qui nous fait face. Ce qui m'appartient en propre et sur quoi j'ai un pouvoir, c'est moi-même, mes désirs, mes pensées, l'initiative demes actes. Par contre, les choses extérieures, ce qui prend pour moi la forme du hasard, l'action des autres, les conséquencesde mes actes, tout cela échappe à mon contrôle, dépasse mon pouvoir. Or, aussi évident que cela paraisse, les hommes n'ont pas conscience de cette opposition.

Comme le fait remarquerDescartes , nous ne désirons que ce qui nous semble possible.

Seuls les fous, c'est-à-dire ceux dont la raison est égarée, voudraient avoir des corps de diamant ou des ailes pour voler.

De même, je ne désire pas devenir roi duMexique, parce que j'ai clairement conscience que cela est impossible.

Par suite je ne souffre pas de ne pas pouvoir. »

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