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En désobéissant aux lois, l'individu renonce-t-il à sa liberté ?

Publié le 27/08/2005

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Qu'il s'agisse des lois humaines ou de celles qui régissent les phénomènes naturels, la loi représente toujours une nécessité, un ordre inflexible qui exclut que tout puisse se faire, soit physiquement, soit moralement. Or si la liberté se mesure, comme le veut sa définition commune, à la capacité de la volonté à se réaliser, il semble que la loi constitue un obstacle à la liberté de tout faire. Mais d'un autre côté, l'existence de lois ou d'un ordre en général permet d'anticiper l'avenir et d'y obtenir ce dont nous sommes privés dans le présent. Au regard de la liberté, la loi et l'ordre paraissent donc ambigus. Il convient d'expliciter cette ambiguïté et d'en préciser les enjeux.
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« Nous avons vu que l'ordre était à la fois la condition et la limitation du désir.

L'homme vit l'ordre de manièrecontradictoire.

Mais cette ambivalence de l'ordre caractérise-t-elle aussi la loi ? La loi n'est-elle, comme nousl'avons supposé jusqu'ici, qu'un cas particulier d'ordre ? Ne faut-il pas reconnaître dans l'idée de loi une certainemanière de penser l'ordre ? 3.

La liberté comme dépassement de la loi A.

La fiction de la loiIl convient en effet de distinguer ces deux manières de penser l'ordre que sont les notions de loi et de régularité.Qu'il soit culturel ou naturel, l'ordre qui s'observe dans l'expérience n'est jamais qu'une simple régularité puisqu'il estimpossible d'en établir le caractère constant et absolu.

Ce n'est pas parce que le soleil s'est levé jusqu'ici tous lesmatins qu'il se lèvera tous les jours ainsi.

Interpréter la régularité empirique en terme de « lois » revient donc àabsolutiser l'ordre empirique.

En toute rigueur, une loi ne se constate jamais ; elle se postule ; elle se fonde sur unecroyance. B.

Une croyance aliénanteS'il existe un ordre immuable et absolu dans la nature, alors il faut le connaître.

Non seulement parce que cela peutnous être utile dans la vie mais parce que l'absolu nous oblige toujours : il a toujours quelque chose de sacré.L'absolu, c'est par définition ce que seul un point de vue divin peut connaître puisque la connaissance humaine estessentiellement relative (aux sens, à l'espace, au temps).

Il y a donc comme une contradiction exaltante pourl'intelligence humaine de croire qu'elle peut prendre connaissance, ne serait-ce que partiellement, d'un ordre absolu.Les sciences, dans cette perspective, en nous révélant les « lois » de la nature, nous rapprochent de laconnaissance divine.

Mais l'homme ne peut conquérir sa véritable liberté qu'en rompant avec cette métaphysique dela loi naturelle qui impose au sujet de ne pouvoir que se soumettre, au moins en pensée, à la réalité.

En effet,chercher à découvrir les lois du réel revient à l'accepter ou à ne le changer que dans les limites de ce que l'on saitde ses possibles.

La fiction des lois naturelles nous dépossède donc de notre disposition à inventer le monde, c'est-à-dire de notre liberté créatrice. C.

L'illusion politique de la loiDe la même manière, ce que nous convenons communément d'appeler les « lois » dans le domaine politique doitplutôt se concevoir philosophiquement comme de simples « règles » (ou « normes ») juridiques.

Tandis que la loi tiresa valeur absolue d'une autorité supérieure, la règle, elle, se présente plutôt comme une disposition relative à telleou telle fin, dans tel ou tel contexte.

Il est donc toujours possible d'en apprécier la valeur, c'est-à-dire sonefficacité et d'y obéir raisonnablement.

Dans un État démocratique où par définition l'ordre politique est issu de ladélibération collective, les « lois » sont considérées par les citoyens comme de simples « règles », toujourssusceptibles d'être révisées si elles s'avèrent injustes ou nuisibles aux yeux du plus grand nombre.

Un peuple n'estlibre qu'à la condition qu'il ne sacralise pas l'État auquel il accepte d'obéir. D.

La liberté est créationLa liberté se joue en effet précisément dans cette capacité pour l'homme à ne pas se soumettre à l'ordre en place.Contrairement à ce que prétend l'opinion commune, il ne suffit donc pas de faire ce que l'on veut pour faire preuvede liberté.

Agir en accord avec soi-même, c'est demeurer prisonnier de soi.

Le degré de liberté se mesure, pour unindividu comme pour un peuple, à la capacité de changer, d'innover, de se dépasser soi-même : continuer à être soi,mais autrement.

Ainsi l'artiste, d'une œuvre sur l'autre est-il à la fois fidèle à lui-même et en perpétuelle invention delui-même.

S'il se répète, s'imite, son oeuvre devient la caricature d'elle-même.

Elle cesse d'être libre et vivante.Ainsi la question de la liberté peut-elle se résoudre en termes de temporalité : être libre, c'est déjouer la tentationdu passé à s'ériger en loi de l'avenir.

Cette manière d'envisager l'avenir comme toujours ouvert annule l'idée mêmede loi. Conclusion L'homme risque donc, en prenant les règles pour des lois, de se dépouiller de sa liberté créatrice aussi bien dans ledomaine politique (obéissance aveugle) que dans son rapport plus général au monde (attitude contemplative, refusde créer).

L'ordre, qu'il soit naturel ou culturel, n'empêche pas l'homme d'assumer sa condition d'être libre à lacondition toutefois qu'il le reconnaisse comme relatif et provisoire, comme l'étape d'une histoire qui est encore endevenir.. »

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