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Un Etat de droit peut-il mener une guerre préventive contre un Etat voyou ?

Publié le 19/07/2009

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droit

Analyse du sujet

 

·         Eléments de définition

 

                         Etat = du latin status qui signifie situation, et de stare qui signifie tenir                        debout.

1.      Terme qui apparaît au XVIe  siècle pour désigner une institution de type nouveau : le pouvoir politique, de plus en plus autonome par rapport à l’ordre religieux et familial, tendant à gérer la société entière comme un « ordre public «.

-          Dans la société moderne organisée : « regroupement de pouvoirs de caractère institutionnel qui monopolise dans les limites d’un territoire la contrainte physique légitimée comme moyen de domination et dans ce but réunit dans les mains des dirigeants les moyens matériels de gestion. « (Weber). L’organisation étatique comprend le gouvernement et l’organisation de la société.

-          Pour les contractualistes (Hobbes De Cive + Léviathan, Spinoza = Traité théologico-politique ch. XX, Locke = Deuxième traité du gouvernement civil) : résultat d’un pacte ou contrat par lesquels s’unissent les volontés individuelles. Instance qui personnifie cette union et transcende les volontés, « personne publique qui se forme par l’union de toutes les autres, qui prenait autrefois le nom de Cité, et prend maintenant celui de République, lequel est appelé par ses membres Etat quand il est passif, souverain quand il est actif, puissance en le comparant à ses semblables « Rousseau, Du Contrat Social, LI, ch. VI, VII + LII, ch. III, IV + LIII, ch. IV.

-          Chez Hegel: forme la plus accomplie de la réalisation de l’Esprit s’objectivant dans le monde du droit. Médiation de l’universel, il ne saurait se réduire à un contrat (Principes de la philosophie, §257-258 + La Raison dans l’histoire)

-          Pour Marx, produit conceptuel typique de l’idéologie universaliste masquant les rapports sociaux de domination (L’idéologie allemande, Manifeste du parti communiste)

2.      Dans la sociologie contemporaine : « l’Etat moderne émerge comme une exigence de contrat sur fond de violence et de contrainte. «

 

                         Guerre =

1. Au sens large : toute espèce de lutte ou de combat y compris les phénomènes de concurrence et les rapports conflictuels.

2.   Au sens politique : épreuve organisée sous forme de lutte armée entre des Etats ou à l’intérieur d’un Etat. Une définition en extension de la guerre distingue :

- La guerre d’intimidation ou guerre froide, qui se maintient au stade de « l’observation armée «.

- Le conflit armé qui conduit à une confrontation meurtrière par un processus d’escalade dans la violence et « d’ascension aux extrêmes « (Clausewitz, De la guerre).

 

·         Angles d’analyse

 

 Il s’agit ici de distinguer nettement, dans un premier temps, ce qu’on appelle Etat de droit d’un côté et Etat voyou de l’autre ; l’un semble être mis, justement, en opposition par rapport à l’autre. L’Etat de droit peut être défini à la fois comme un Etat légitime (c’est-à-dire qui a été élu et choisi par la volonté générale, notamment au moment du suffrage universel, ou en tout cas celui qui, selon la Constitution en vigueur dans tel pays, gouverne légitimement), mais c’est aussi celui dans lequel les droits fondamentaux des citoyens sont non seulement garantis mais encore fondés. A l’inverse, l’Etat voyou est soit (ou plutôt précisément tout à la fois) celui qui usurpe le pouvoir (c’est-à-dire qui exerce son autorité de manière tyrannique, despotique ou encore dictatoriale en faisant régner la force plutôt que le droit), mais c’est aussi celui qui bafoue sciemment les droits de l’homme et du citoyen.

 Dans ce contexte d’opposition, il semble a priori légitime, pour un Etat de droit de mener une guerre préventive contre un Etat voyou. Mais qu’est-ce encore qu’une guerre préventive ? C’est précisément dans le cas où l’équilibre pacifique de la planète serait en danger, serait menacé par cet Etat voyou.

 Mais c’est précisément la légitimité, et plus profondément encore le fondement même de cette légitimité, qui sont ici mis à la question.

 On s’interroge donc sur les limites légitimes de la souveraineté d’un Etat de droit. Cette souveraineté, légitime et fondée à l’intérieur du pays, est-elle sans borne, c’est-à-dire lui donne-t-elle le droit d’intervenir dans un pays qui n’est pas le sien, ou sa compétence est dépassé, même lorsque les droits de l’homme sont menacés ? C’est donc bien la nature, l’essence même de la souveraineté qui est ici enjeu. Et avec, c’est bien le statut des relations internationales qui est ici mis à la question.

 

Problématique

 

            Est-ce parce qu’un Etat exerce légitimement son autorité au sein de son pays qu’il a le droit, la légitime possibilité d’intervenir dans un Etat jugé voyou, c’est-à-dire un Etat tyrannique ou dictatorial qui bafoue les droits de l’homme et du citoyen ? Est-ce qu’au nom de la paix internationale et de l’équilibre planétaire, un Etat, fût-il de droit, a la compétence légitime  pour s’immiscer dans les affaires intérieures d’un autre Etat, fût-il voyou ?

droit

« Plan I- Au nom de quoi un Etat de droit pourrait-il mener une guerre préventive contre un Etat voyou ? · Au nom de l'équilibre mondial : Il semble en réalité tout à fait légitime à un Etat de droit de mener une guerre préventive contre un Etat voyou dans la mesure où ce dernier estconsidéré comme une menace pour l'équilibre mondial et pour la paix internationale.

Eneffet, en tant que tel Etat est souverainement légitime, il peut tout à fait chercher àgarantir (avec d'autres Etats eux-mêmes légitimes) l'équilibre mondial en déclarant la guerreà un Etat défini comme voyou au sens où il bafouerait sciemment les lois internationales envigueur.

On pourrait ainsi prendre l'exemple de la guerre froide : il s'agissait bien d'uneguerre préventive, qui n'est pas aller jusqu'au conflit armé et destructeur, mais qui avaitjustement pour but de rétablir l'équilibre mondial et ainsi redresser l'échiquier politiqueinternational. · Au nom des droits de l'homme : Mais, plus encore que pour « punir » un Etat qui ne respecterait pas le droit international (il serait voyou par rapport au droit international), ilsemble tout autant légitime pour un Etat de droit d'intervenir quand un Etat bafoue sespropres lois et bascule dans un régime tyrannique ou dictatorial.

En tant justement qu'il estun Etat de droit, celui-ci semble avoir la légitimité pour rappeler à l'ordre, par les armes s'ille faut, un Etat voyou, c'est-à-dire un Etat qui ne respecterait pas les droits de l'hommes,et qui ne règnerait que par la force et la peur.

Cette fois-ci l'Etat est voyou au sensintérieur du terme, et non plus seulement au sens extérieur : c'est son propre droit nationalqu'il bafoue.

A priori, il apparaît nécessaire d'intervenir quand un Etat nie les droits del'homme.

Ne pas intervenir serait alors synonyme, en quelque sorte, de non assistance enpersonne en danger.

La légitimité d'un Etat de droit pour mener une guerre préventive dansce cas ne semble pas faire l'objet de grandes difficultés théoriques (en apparence aumoins). · Au nom de la sauvegarde de la paix intérieure : Dans certains cas, la guerre extérieur d'un Etat de droit contre un Etat voyou peut même être un moyen (cynique mais efficace)de maintenir, voire de renforcer une paix intérieurs devenue trop fragile, trop chétive.

Cetargument était déjà évoqué par les Lois de Platon (dans le cadre d'une légitimation des politiques de colonisation de certaines cités par d'autres cités).

C'est d'ailleurs ce quereprend Hegel dans les Principes de la philosophie du droit , § 324.

un Etat de droit peut avoir intérêt à mener une guerre préventive contre un Etat voyou qui menacerait sonpropre équilibre national.

Mais c'est justement ici que se soulèvent, en définitive, lesproblèmes quant à la véritable légitimité d'une telle guerre. II- Le droit de non-ingérence interdit à un Etat extérieur (de droit ou non) de s'immiscer dans les affairesintérieures d'un autre Etat, fût-ce pour y garantir la paix · Le droit international (droit public externe ou droit des gens) pose, à côté du droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, le droit de non-ingérence d'un Etat dans la vie d'un autreEtat, fût-ce dans l'intention de sauver la paix et la sécurité intérieure de cet Etat. · L'extérieur (c'est-à-dire le ou les Etats extérieurs, même de droit) n'a, en fait, pas de droit sur l'intériorité géographique, juridico-politique et culturelle d'un Etat. · C'est d'ailleurs ce sur quoi Kant insiste dans Projet de paix perpétuelle (5 e article, Prélude en vue de la paix perpétuelle).

La sauvegarde du droit intérieure (civile) est doncmoins importante, aux yeux du droit international, que le principe de la souveraineté et dela liberté inaliénable des peuples-Etats (souveraineté et liberté qui renvoient aussi bien àleur autonomie intérieure, droit de disposer d'eux-mêmes et de légiférer pour eux-mêmes àl'intérieur de leurs frontières, qu'à leur indépendance vis-à-vis des Etats extérieurs). · La défense de la paix intérieure (civile) n'est donc jamais un prétexte légal (dans le cadre du droit international) pour justifier une intervention armée ou non, une ingérenced'un Etat dans l'intériorité dans un autre Etat. · Le droit international interdit donc qu'en temps de paix comme en temps de guerre un Etat s'immisce de l'extérieur dans les affaires intérieures d'un autre Etat, même voyou.C'est l'une des règles fondamentales du droit international qu'un Etat extérieur n'a pas ledroit d'intervenir dans un conflit intérieur à un autre Etat, dans un Etat en proie à uneguerre civile (même si c'est pour soutenir une révolution contre un gouvernementillégitime). · Le mal d'un Etat intérieur ne doit être légalement guéri que de l'intérieur et par l'intérieur, en aucun cas par l'intervention d'une puissance étrangère (même de droit). · Si le droit international autorisait un Etat à s'immiscer dans la guerre civile d'un autre Etat, ce serait nécessairement venir en aide à l'une des deux parties engagées dans laguerre civile.

Et donc, au lieu de résoudre le problème de la guerre civile, cette interventionextérieures envenimerait la guerre civile et éloignerait toujours davantage la paix intérieure. · L'ingérence est donc légalement interdite, non seulement parce qu'elle détruit le principe de souveraineté et nie la liberté des Etats, mais encore parce qu'elle n'atteint. »

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