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L'existence de lois est-elle un obstacle à la liberté ?

Publié le 28/03/2004

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Les enjeux du sujet Cette partie a pour but de vous aider à préparer la problématique en donnant du sens à la dissertation. Il s'agit ici de montrer pourquoi ce sujet est proposé: de quels obstacles s'agit-il ? Le sujet a pour but de montrer qu'il peut y avoir une conception illusoire, égoïste, de la liberté à la base du sentiment que les lois sont toujours un obstacle à la liberté. Par exemple, on a tendance à confondre la liberté avec le fait de pouvoir faire «tout ce que l'on veut». Il s'agit cette fois de montrer qu'il arrive effectivement que certaines lois soient un obstacle à la liberté: dans le cas des lois naturelles, parce qu'elles limitent le pouvoir d'action des hommes ; dans le cas des lois sociales, parce qu'elles sont oppressives. Pour construire une problématique Cette partie a pour but de construire l'architecture globale pour arriver au plan de la dissertation. Cela peut constituer le premier moment d'une première partie consacrée à exposer des arguments à l'appui de l'idée selon laquelle toute loi collective fait obstacle à la liberté. Un deuxième moment de cette première partie permettrait ensuite de montrer que la nécessité naturelle peut dresser des obstacles aux entreprises humaines (la nature m'impose de me nourrir, me protéger du froid, etc.). Il s'agira ici (et cela pourrait constituer la deuxième partie du devoir) de montrer que l'opposition entre liberté et loi sociale relève très souvent d'un préjugé dont on va mettre à jour les causes (le plus souvent, une fausse conception de la liberté individuelle).

S'il suffisait d'obéir aux lois pour être libre, alors les sujets d'une tyrannie connaîtraient la liberté. Pour Rousseau, la seule solution à ce problème à la fois politique et moral, c'est que je sois aussi l'auteur de la loi à laquelle je me soumets. Sur le plan politique, le « contrat social « garantit la liberté des citoyens non en les délivrant de toute loi, mais en faisant d'eux les auteurs de la loi : par le vote, les hommes se donnent à eux-mêmes leurs propres lois, en ayant en vue non leurs intérêts particuliers mais le bien commun à tous. De même, sur le plan moral, Kant, en se référant à Rousseau, montre que la loi de la moralité à laquelle je dois me soumettre (et qui s'exprime sous la forme d'un impératif catégorique) ne m'est pas imposée de l'extérieur, mais vient de ma propre conscience : je suis libre lorsque j'obéis au commandement moral, parce c'est moi-même qui me le prescris.

« 1.

Les lois, limites pour la liberté a) Les lois scientifiques• La définition traditionnelle de l'homme comme sujet libre, c'est-à-dire capable de choisir ses actes par sa volonté propre,indépendamment de toute contrainte extérieure, suppose toujours qu'il échappe en quelque sorte aux lois et déterminismes naturels.Ainsi, dans la philosophie de Descartes, l'homme, en tant qu'il a un corps, est soumis aux lois naturelles ; mais son âme, ouconscience, est posée comme une volonté radicalement libre.• Les sciences humaines contemporaines dénoncent l'illusion d'une conscience libre.

Sociologie, psychanalyse ou linguistique cherchentà découvrir les lois qui définissent à son insu les conduites de l'homme et qui les rendent, en droit, prévisibles comme n'importe quelphénomène naturel.• Ainsi, semble-t-il y avoir incompatibilité, en première analyse, entre l'existence d'un sujet libre et celle de lois qui le déterminent. b) Les lois morales et politiques• Si l'on considère l'individu comme un être qui vit nécessairement à l'intérieur d'une culture, d'une société, on soulignera que sa liberté«s'arrête où commence celle des autres.

Cette limite à l'exercice de la liberté individuelle est fixée par des règles morales et/oujuridiques, sous forme d'impératifs, de devoirs, d'obligations, d'interdictions, etc.• Schopenhauer pouvait donc écrire : "On n'est libre qu'étant seul.

Les lois de la société, quelle qu'en soit la forme, circonscrivent maliberté : je n'ai pas le droit de faire tout ce que je serais capable de faire si j'en décidais seul".• Ces perspectives sont proches de celles de l'opinion.

Ne sont-elles pas contestables, malgré leur apparente évidence ? 2.

Les lois, moyens de réaliser la liberté a) Les lois scientifiques Spinoza• Pour ce philosophe, être libre, c'est agir selon les lois de la nature.

La liberté d'affirmer ou de nierest une fiction : -Les hommes se trompent en ce qu'ils pensent être libres, et cette opinion consisteuniquement pour eux à être conscients de leurs actions et ignorants des causes par lesquelles ilssont déterminés.

L'idée de leur liberté, c'est donc qu'ils ne connaissent aucune cause à leursactions.

Car il disent que les actions humaines dépendent de la volonté, mais ce sont des mots, quine correspondent à aucune idée".

(Éthique, II, 25, scol.) La liberté authentique se donne commel'intériorisation de la nécessité.• D'autre part, la connaissance des lois de la nature, parce qu'elle rend possible une prévisionrationnelle, ne permet-elle pas de construire des techniques qui en sont l'application et qui peuventêtre libératrices ? Ainsi peut-on d'autant mieux prévenir ou guérir une maladie, donc s'en libérer,qu'on en connaît mieux les mécanismes et les lois. b) Les lois morales et politiques Rousseau• Si l'homme naturel parait plus libre que l'homme qui vit ensociété, il est en fait comme un animal soumis à "l'impulsion duseul appétit".

(Contrat social, 1, 8).

Seule l'existence socialerend possible intelligence, maîtrise de soi et donc libertéauthentique.• Dans un État idéal, la volonté individuelle ne serait pas simplement limitée par les volontés desautres individus.

Chaque individu a en effet la capacité et l'intelligence de vouloir le bien commun ;obéir à des lois qui seraient l'expression de la Volonté générale, ce serait donc obéir à sa proprevolonté bien comprise et ainsi être libre.

Dans ce que nous pouvons nommer une démocratieidéale, il n'y aurait plus incompatibilité entre une liberté essentielle à l'humanité et une solidariténon moins vitale.

Les lois seraient ce par quoi s'accomplit la liberté des hommes.• Cet idéal politique est inséparable d'une problématique morale.

Ainsi selon Kant : le Devoirauthentique est l'obéissance à la loi que pose la raison ; faire son devoir, c'est être autonome etdonc libre. Hegel• «Le système du droit est l'empire de la liberté réalisée”.

(Principes, Introduction, 4).

Autrementdit, le sujet de la locution «être libre» n'est qu'en apparence la volonté particulière de l'individu ;plus profondément, c'est l'État et ses lois.• Pour Hegel, l'histoire universelle est la réalisation de cette liberté, à travers les États qui se sontsuccédé, en particulier à travers l'État oriental, où "la liberté n'est que caprice", puis à travers les lois de la Cité antique, qui découvre que "quelques-uns sont libres, non l'homme en tant que tel", enfin à travers l'État moderne, quiaffirme et réalise progressivement la liberté de tous les hommes (cf.

La Raison dans l'Histoire).• La soumission aux lois de l'État n'apparaîtrait donc comme contradictoire avec la liberté qu'à des penseurs superficiels, incapables decomprendre la rationalité plus riche qu'exprime et incarne la loi de l'État.

"Le droit, l'ordre éthique, l'État, constituent la seule réalitépositive et la seule satisfaction de la liberté.

La seule liberté qui se trouve réellement brimée est l'arbitraire qui ne concerne d'ailleursque la particularité des besoins".

(ibid., 10-18, pp.

135-6). Conclusion Les lois ne constituent pas que des limites pour la liberté de l'homme : elles peuvent lui donner les moyens de la réaliser.

Sur le planscientifique, d'abord, la connaissance des mécanismes naturels fait que l'homme peut chercher à se rendre "maître et possesseur de lanature".

(Descartes).

Sur le plan politique, au sens large, et sur le plan moral, l'existence de lois qui règlent la conduite parait d'abordrestreindre la liberté ; mais on ne peut oublier qu'en dernière analyse l'homme est aussi l'auteur de ces règles, qu'il peut s'interrogersur leur valeur et travailler à les modifier.. »

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