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Y a-t-il une expérience en métaphysique ?

Publié le 19/02/2012

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 Les deux philosophes que nous venons de voir répondaient par la négative, l'un (Kant) disant que le domaine métaphysique est par définition au-delà de l'expérience, l'autre (Comte) disant qu'elle est illusoire et relève d'une attitude spirituelle historiquement dépassée. Mais c'est prendre le mot « expérience « dans un sens très restreint, celui d'expérience objective. Dans un tel sens, il n'y a pas d'expérience métaphysique et l'expression est évidemment contradictoire dans ses termes. Au sens le plus large, nous pouvons décrire trois genres d'expériences métaphysiques....

« instant et dans un acte simple, ce qui fait ('unite du reel et la signifi- cation de l'existant.

Et cette intuition est tellement simple, dit Bergson (inn La pensee et le mouvant « conf.

sur l'intuition) que le philosophe a pule toute sa vie pour l'expliquer, donnant une premiere formule puis rectifiant sa definition et rectifiant sa rectification, etc... Tout se passe comme si une idee, ou meme une image, s'etait presentee tout a coup lourde de tout un contenu implicite, par laquelle tout s'eclaire.

a Comprendre D un philosophe, inversement, c'est tenter de retrouver a travers son ceuvre, cette idee unique et simple qui est son a experience metaphysique D. Chez Berkeley ce serait pent-etre une vue du spectacle de la Nature debarrasse de toute la science, de tonte l'intelligence et des idees abstraites, poussiere que les hommes soulevent, et la Nature ainsi purifiee devient une relation du a moi B a Dieu ; chez Kant, ce serait peut-etre la revelation de l'activite incroyable de la Raison humaine, animee par un besoin devorant d'osdre univ ersel, imposant ses lois aux phenomenes et langant les hommes a Ia realisation de la Repu- blique ideale ; chez Bergson, ce serait le sentiment d'une sorte de pulsation de l'univers, alternance de tension, creatrice de formes vivantes...

et d'une detente, creatrice de matiere, le long d'une ligne d'evolution realisant indefiniment les virtualites de l'elan vital... La difference entre cette intuition metaphysique et !'intuition par laquelle un physicien par exemple decouvre une grande hypothese, est uniquement une difference d'ampleur et de profondeur, etant donne que Ia a grande hypothese D natt une philosophic est le centre d'une conception generale du monde. - II - L'epreuve determinante.

Ce deuxieme type d'a expe- rience metaphysique D est different du premier surtout en ce que la revelation de Video y est remplacee par une experience historique. A vrai dire, il y a toujours les deux et l'Idee ne se revele le plus souvent que dans une experience, qu'on pourrait appeler l'experience eructate.

II est des cas ola on ne saurait dire s'il s'agit d'une epreuve determinante ou d'une intuition metaphysique, d'un &Tenement vecu ou du resultat d'une meditation.

Tel serait le cas de ('experience metaphysique du a cogito D chez Descartes (cf.

ci-dessous, p.

130). Malgre les reproches que lui firent Maine de Biran et, depuis, tous les existentialistes, it semble bien, a lire les pages des « Meditations D (A Descartes raconte son intuition, qu'il a eprouva « le doute metho- dique comme la sensation d'a un homme qui se noie » parce que toutes les realites consistantes se liquefient autour de lui, et qu'il eprouva D le Cogito comme une delivrance de l'angoisse. Il est des cas oil, cependant, l'experience metaphysique se fait a !'occasion d'une experience de la vie qui prend tout d'un coup une dimension bouleversante. C'est ainsi que Nietzsche descendant des Alpes en 1870, tout inspire de Ia musique de Wagner, cut la revelation du principe de sa philo- instant et dans un acte simple, ce qui fait Funité du réel et la signifi­ cation de l'existant. Et cette intuition est tellement simple, dit Bergson (in « La pensée et le mouvant » conf.

sur l'intuition) que le philosophe a parlé toute sa vie pour l'expliquer, donnant une première formule puis rectifiant sa définition et rectifiant sa rectification, etc..

Tout se passe comme si une idée, ou même une image, s'était présentée tout à coup lourde de tout un contenu implicite, par laquelle tout s'éclaire.

« Comprendre » un philosophe, inversement, c'est tenter de retrouver à travers son oeuvre, cette idée unique et simple qui est son « expérience métaphysique ».

Chez Berkeley ce serait peut-être une vue du spectacle de la Nature débarrassé de toute la science, de toute l'intelligence et des idées abstraites, poussière que les hommes soulèvent, et la Nature ainsi purifiée devient une relation du « moi » à Dieu ; chez Kant, ce serait peut-être la révélation de l'activité incroyable de la Raison humaine, animée par un besoin dévorant d'ordre universel, imposant ses lois aux phénomènes et lançant les hommes à la réalisation de la Répu­ blique idéale ; chez Bergson, ce serait le sentiment d'une sorte de pulsation de l'univers, alternance de tension, créatrice de formes vivantes... et d'une détente, créatrice de matière, le long d'une ligne d'évolution réalisant indéfiniment les virtualités de l'élan vital...

La différence entre cette intuition métaphysique et l'intuition par laquelle un physicien par exemple découvre une grande hypothèse, est uniquement une différence d'ampleur et de profondeur, étant donné que la « grande hypothèse » d'où naît une philosophie est le centre d'une conception générale du monde.

— II — L'épreuve déterminante.

Ce deuxième type d'« expé­ rience métaphysique » est différent du premier surtout en ce que la révélation de l'Idée y est remplacée par une expérience historique.

A vrai dire, il y a toujours les deux et l'Idée ne se révèle le plus souvent que dans une expérience, qu'on pourrait appeler l'expérience cruciale. Il est des cas où on ne saurait dire s'il s'agit d'une épreuve déterminante ou d'une intuition métaphysique, d'un événement vécu ou du résultat d'une méditation.

Tel serait le cas de l'expérience métaphysique du « cogito » chez Descartes (cf.

ci-dessous, p.

130).

Malgré les reproches que lui firent Maine de Biran et, depuis, tous les existentialistes, il semble bien, à lire les pages des « Méditations » où Descartes raconte son intuition, qu'il « éprouva » le doute métho­ dique comme la sensation d'« un homme qui se noie » parce que toutes les réalités consistantes se liquéfient autour de lui, et qu'il « éprouva » le Cogito comme une délivrance de l'angoisse.

Il est des cas où, cependant, l'expérience métaphysique se fait à l'occasion d'une expérience de la vie qui prend tout d'un coup une dimension bouleversante.

C'est ainsi que Nietzsche descendant des Alpes en 1870, tout inspiré de la musique de Wagner, eut la révélation du principe de sa philo-. »

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