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Faut-il aimer autrui pour le connaître ?

Publié le 05/04/2004

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Définition des termes : L’amour sera pris en trois sens. Il est tout d’abord une passion, l’homme est alors attiré irrésistiblement vers un objet ou une personne. Il peut également signifier la bienveillance, dans ce cas nous recherchons le bonheur de la personne aimée. Enfin l’amour peut signifier une union entre deux personnes, il n’a plus un sens physique dans ce cas mais un sens intellectuel, le fait pour deux âmes de se comprendre immédiatement. Nous distinguerons trois acceptions du verbe connaître. En premier lieu on le comprendra comme étant une activité théorique s’opposant à la sensibilité ; ensuite comme consistant à saisir la nature de quelque chose ou de quelqu’un. Enfin il peut lui aussi s’identifier au fait de s’unir à quelqu’un dans la mesure où la connaissance nous permet d’instaurer une relation de correspondance entre autrui et nous. La notion « autrui « doit elle aussi être élucidée, comme pour les deux autres notions trois sens seront distingués. Autrui, dans le cadre d’une relation passionnelle est réduit, à être un objet de plaisir. L’amour de bienveillance au contraire fait d’autrui un proche, un familier, un semblable. Mais autrui est avant tout ce qui n’est pas moi, ce qui m’est étranger et souligne une différence essentielle entre le moi et les autres hommes. Le sujet pose la question de savoir si aimer autrui est la condition de possibilité de sa connaissance. Or à première vue il est difficile de relier les deux opposés « aimer « et « connaître « qui appartiennent à des domaines différents qui paraissent inconciliables : la sensibilité et la connaissance, le pratique et le théorique, la subjectivité et l’objectivité. Problématique : L’amour est une passion, qui, loin de tranquilliser l’âme humaine, la bouleverse et peut à ce titre être rapproché d’un dérèglement. Comment de ce dérèglement une connaissance pourrait-elle naître dans la mesure où elle serait teintée de subjectivité et ne serait plus de ce fait véritablement connaissance ? Mais si connaître autrui suppose de ne pas l’aimer alors qu’est-ce qui déterminera l’homme à vouloir connaître ? 

« Transition : Si le fait d'aimer signifie être passionné pour autrui alors il ne peut être source de sa connaissance.

C'est en ce sens que l'on peut comprendre l'expression « l'amour rend aveugle ».

Loin de permettrede saisir objectivement la nature d'autrui la passion, dés le départ, biaise notre rapport à lui.

Nous aurons alorstendance à ne le considérer que subjectivement et nous nous empêcherons de véritablement le connaître. Deuxième partie : Pour connaître autrui il faut vouloir le connaître, le fait d'aimer peut alors être compris comme adjuvant dans la mesure où il nourrit cette volonté. 2.1 Amour comme aiguillon de la connaissance.

Connaître signifie saisir la nature bonne ou mauvaise de quelqu'un ou de quelque chose, aimer signifie tendre vers.

Autrui devient objet de connaissance parce que notreâme est portée vers lui. « Nous ne voulons, n'appétons ni ne désirons aucune chose, parce que nous la jugeons bonne ; mais au contraire, nous jugeons qu'une chose estbonne parce que nous nous efforçons vers elle, la voulons, appétons etdésirons.

» SPINOZA, Ethique, III 9 scolie. 2.2 L'homme est porté à connaître ce qui lui est proche.

Autrui objet d'amour est alors pris dans un sens restreint de familier ou de proche.

L'amourdont il est question est alors l'amour de bienveillance. « De là les contradictions apparentes qu'on voit entre les pères des nations : tant de naturel et tant d'inhumanité, des moeurs si féroces et descoeurs si tendres, tant d'amour pour leur famille et d'aversion pour leurespèce.

Tous leurs sentiments concentrés entre leurs proches en avaient plusd'énergie.

Tout ce qu'ils connaissaient leur était cher .

Ennemis du reste du monde, qu'ils ne voyaient point et qu'ils ignoraient, ils ne haïssaient que ce qu'ils ne pouvaient connaître. » ROUSSEAU, Essai sur l'origine des langues. « Amour de bienveillance, c'est-à-dire qui incite à vouloir du bien à ce qu'on aime.

» DESCARTES, Les Passions de l'âme, art.81. Transition : Introduire la volonté dans le processus de connaissance nous permet d'élever le fait d'aimer au rang de condition de la connaissance d'autrui.

Pour autant il semble délicatde tenir jusqu'au bout l'identification de la connaissance au jugement (cf.

citation de Spinoza).

En effet au lieu depenser la possibilité du jugement et de la connaissance comme découlant du fait d'aimer il vaut mieux repenser lestatut de la connaissance et envisager son antériorité à la fois quant au jugement et quand à l'amour.

D'autre partsi aimer autrui suppose qu'il soit un proche que ferons-nous de cette tendance à nous interroger sur la nature de cequi nous est inconnu qui est la condition du progrès de notre connaissance ? Troisième partie : Aimer autrui ne nous invite pas à le connaître puisque pour l'aimer il faut déjà le connaître. 3.1 Nous devons avoir une connaissance minimale de l'objet de notre amour. « Lorsqu'une chose nous est représentée comme bonne à notre égard, c'est-à-dire comme nous étant convenable, cela nous fait avoir pour elle de l'amour.

» DESCARTES, Les Passions de l'âme, art.

56. Ce n'est pas l'amour d'autrui qui est la source de la connaissance mais la connaissance d'autrui qui nous pousse à l'aimer. « Personne ne peut aimer ce qu'il ne connaît pas.

» SAINT AUGUSTIN, De la Trinité, X 15. 3.2 L'amour ne doit plus alors être compris comme passion mais comme union.

Autrui prend également un sens particulier, il est identifié à Dieu.

L'approche spinoziste nous permet de penser la possibilité d'un amourintellectuel qui récuse donc l'opposition initiale entre sensibilité et connaissance. « Du troisième genre de connaissance naît nécessairement un Amour intellectuel de Dieu. Car de ce troisième genre de connaissance naît une Joie qu'accompagne comme cause l'idée de Dieu, c'est-à-dire l'Amour deDieu, non en tant que nous l'imaginons comme présent, mais en tant que nous concevons que Dieu est éternel, etc'est là ce que j'appelle Amour intellectuel de Dieu.

» SPINOZA, Ethique, V 33 corollaire. CONCLUSION Le fait d'aimer autrui ne peut être la condition de sa connaissance parce que l'homme passionné n'est pas disposé à connaître, son entendement loin d'être éclairé par la passion est désorienté par elle.

Mais si aimer signifieêtre bienveillant envers autrui alors l'amour de bienveillance génère un intérêt, une attention, qui nous porte àvouloir connaître autrui.

Cependant cette solution est insatisfaisante dans la mesure où la relation entre le faitd'aimer et de connaître autrui est mal comprise.

Dans le texte de Rousseau ce qui est décisif et source de laconnaissance et de l'amour est la nature d'autrui, le fait qu'il soit un familier.

Le fait d'aimer autrui ne conditionnedonc pas le fait de le connaître mais c'est parce qu'autrui est un proche que nous sommes déterminés à le connaître. »

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