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Où faut-il chercher l'origine des passions ?

Publié le 03/12/2005

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Vernant). Telle est la question que se posent les Grecs dans toutes leurs tragédies. L'au-delà divin semble nécessaire pour expliquer l'inexplicable emportement du passionné. On retrouve une telle conception jusque chez Racine : « C'est Vénus tout entière à sa proie attachée » (Phèdre, 1,3). b) Dans une perspective en apparence très différente, Hegel écrivait : « Rien de grand ne s'est accompli dans le monde sans passion » (La Raison dans l'Histoire, coll. 10-18, p. 108). L'histoire nous montre en effet des grands hommes qui consacrent toutes leurs forces à la réalisation de leurs buts politiques, militaires, etc. On pourrait croire que l'histoire est faite par ces actions passionnées, qu'elle tient d'elles, et donc des grands hommes, son orientation et son sens. Mais, selon Hegel, c'est « la Raison qui gouverne le monde »; c'est elle qui, comme les dieux antiques, inspire ces passions à travers l'égoïsme desquelles se réalise toujours une Rationalité dont le sens échappe aux « acteurs ».

La passion est l'objet de discours contradictoires, qui la célèbrent ou la déprécient : on dit qu'elle libère, ou qu'elle aliène ; on lui associe dynamisme, vie intense, ou folie et malheur. Pour mieux la comprendre, ne faudrait-il pas commencer par s'interroger sur son origine, raison de ses effets ? Mais où faut-il chercher cette origine ?

« a) Rousseau, dans le Discours sur l'inégalité, affirme que « l'amour, ainsi quetoutes les autres passions, n'a acquis que dans la société son ardeurimpétueuse ».

Dans l'état de nature, l'homme est « borné au seul besoinphysique del'amour (...).

Le besoin satisfait, tout le désir est éteint ».

La vie socialedéveloppe l'amour-propre, « sentiment qui prend sa source dans descomparaisons », et celui-ci enveloppe tous les excès de la passion.

Ainsi, laprésence d'autrui est à l'origine de cette exagération d'une tendancenaturellement limitée.Cette idée a été reprise et diversement traitée par tous ceux qui ont soulignéle rôle des causes sociales, du milieu, des conditions historiques, etc.

Il estvrai que l'ambition, par exemple, ne se manifestera qu'à certaines conditions,et sa nature variera selon l'état de la société. b) Mais les circonstances extérieures ne peuvent peser sur un homme quedans la mesure où son être est disposé à les accueillir ; cette remarqueexplique qu'on ait pu parler ici du rôle du tempérament, de l'hérédité qui «prédispose », etc.

La psychanalyse, en particulier, cherche cette origine dansles processus psychologiques inconscients.Selon Freud, les conduites d'un homme passionné peuvent être comprisescomme les symptômes, indéchiffrables par la conscience ou l'introspection, deforces inconscientes dont l'organisation particulière s'est faite au cours de lapetite enfance.« La psychanalyse nous apprend que les émotions de notre enfance gouvernent notre vie, que le but de nospassions est de les retrouver », écrit F.

Alquié.

« Don Juan est si certain de n'être pas aimé que toujours il séduit,et toujours refuse de croire à l'amour qu'on lui porte, le présent ne pouvant lui fournir la preuve qu'il cherche en vainpour guérir sa blessure ancienne.

De même, l'avarice a souvent pour cause quelque crainte infantile de mourir defaim, l'ambition prend souvent sa source dans le désir de compenser une ancienne humiliation...

Mais ces souvenirsn'étant pas conscients et tirés au clair, il faut sans cesse recommencer les actes qui les pourraient apaiser » (LeDésir d'éternité, p.

23-24). c) Mais le passionné ne vit-il pas dans la mauvaise foi ? Le recours à la notion d'inconscient pour expliquer sonaliénation ne risque-t-elle pas de masquer sa responsabilité ? Sartre refuse qu'on situe l'origine de la passion d'unhomme hors de cet homme : « l'existentialiste ne croit pas à la puissance de la passion.

Il ne pensera jamais qu'unebelle passion est un torrent dévastateur qui conduit fatalement l'homme à certains actes, et qui, par conséquent,est une excuse...

L'homme est responsable de sa passion » (L'Existentialisme est un humanisme, p.

37-38).

L'originede la passion, c'est l'homme, être « condamné à être libre ». conclusion Chercher l'origine de la passion, c'est poser une question qui ne semble pas réductible à un problème de psychologie,dans la mesure où cette question en soulève d'autres, qui concernent les rapports de l'homme avec l'altérité : lesdieux, son corps, le temps, lui-même, enfin, la véritable énigme.. »

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