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Faut-il mépriser l'apparence ?

Publié le 21/01/2004

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Le sens commun laisse penser que les apparences sont méprisables, qu'il faut s'en méfier, mais aussi l'inverse. Par exemple, dans ces proverbes : « L'habit ne fait pas le moine et La plume fait l'oiseau Voilà pourquoi les références à l'opinion courante doivent être mesurées... Cependant, il n'est pas sans intérêt de partir d'une telle indétermination pour démarrer une argumentation. Les expressions courantes sont souvent riches, encore faut-il chercher ce qu'elles contiennent. Philosophiquement, même si l'illusion est une notion immédiatement appelée par le sujet, les contextes sont très variables et, devant un tel sujet, il faut savoir penser à toutes les parties du programme. C'est un sujet de synthèse. En effet, l'homme est confronté à l'apparence à de multiples niveaux : conscience, perception, jugement, désir, passion, existence, connaissance, discours, vérité, action, art, morale et politique, philosophie. Vous devez donc vous demander, notion par notion, s'il n'y a pas un exemple qui mettrait en scène la question, afin d'élaborer des arguments. Nous vous proposons des éléments de réflexion permettant d'organiser et d'aborder les éléments essentiels du sujet.   À en juger par des expressions populaires bien connues : « L'habit ne fait pas le moine », « Tout ce qui brille n'est pas d'or », l'apparence serait trompeuse, déceptive et source d'un mépris justifié.

À en juger par des expressions populaires bien connues : « L’habit ne fait pas le moine «, « Tout ce qui brille n’est pas d’or «, l’apparence serait trompeuse, déceptive et source d’un mépris justifié. Se demander s’il faut mépriser l’apparence revient donc à définir son mode opératoire : l’apparence est-elle trompeuse, masque-t-elle la réalité ? C’est à partir de l’analyse de l’apparence chez Platon que nous allons d’abord voir comment celle-ci possède un statut ambivalent, tantôt masquant l’être, tantôt y donnant accès. Nous verrons ensuite de quelle manière Hegel la pense, notamment en remarquant que l’être, pour se révéler, doit apparaître. Enfin, un détour par l’esthétique nous fera nous demander si, bien que l’être doive apparaître, l’apparaître ne peut être conçu pour lui-même, indépendamment de l’être.

« vrai, au monde intelligible, tantôt ce qui nous en éloigne et nous trompe sur la réalité des objets. Dans la célèbre allégorie de la caverne (République, VII), Platon présente dans un schéma simplifié le statut del'homme dans le monde : la duperie du nigaud qui prend des vessies pour des lanternes.

Il faut imaginer une caverneprofonde dans laquelle les hommes sont enchaînés face à la paroi du fond.

Ne pouvant tourner la tête, la réalité estpour eux ce mur sur lequel se déploient des jeux d'ombres.

A l'entrée de la caverne brûle un feu qui dispense unelumière suffisante pour découper sur ce mur les silhouettes des figurines que manipulent des montreurs demarionnettes, interposés entre le feu et la cloison.

Lorsqu'ils parlent, l'écho produit donne l'illusion aux captifs quece sont les ombres projetées qui prononcent ces paroles.

L'illusion est parfaite et peut ainsi durer toute une vie.Mais si on en débarrasse un de ses chaînes - et c'est la mission du philosophe que de délivrer l'homme de l'erreurpour le conduire à la vérité -, qu'on le force à tourner la tête pour découvrir le stratagème, il sera frappéd'étourdissement.

Par la force de l'habitude, les ombres de la paroi lui paraîtront plus réelles que cette nouvellevision des figurines manipulées devant le feu.

Il lui faudra un certain temps pour s'accoutumer à l'éblouissement dufeu et convenir qu'il ne voyait que l'ombre projetée des silhouettes qu'il voit désormais en réalité.

Si maintenant onconduit cet affranchi hors de la caverne, l'éblouissement sera encore plus grand, et il faudra encore plus de tempspour voir les vrais hommes et les vrais objets, dont les figurines n'étaient que les imitations.

Plus grande encore serala volonté de retourner dans le confort ténébreux de sa caverne.

A l'extérieur, il ne pourra d'abord observer que lesombres naturelles tant l'éclat est grand, puis les reflets des choses dans l'eau, puis les choses et les êtres en eux-mêmes.

C'est à la faveur de la nuit qu'il pourra lever la tête aux cieux pour contempler les astres, et après unelongue et patiente éducation regarder ce dont quoi toute réalité procède, ce qui donne l'être et la vie, la lumièresolaire.Le peu de réalité auquel il avait accès dans la caverne procédait donc de cela : cette réalité unique et lumineuse,cause universelle de toute consistance et de toute réalité.Ce sera alors son tour de descendre dans la caverne pour en avertir ses camarades.

Sous l'éblouissement du soleil, ilest plongé de nouveau dans les ténèbres, il passera pour un maladroit, un égaré ou un fou, tant il est vrai que nouspréférons nos chimères et nos faux-semblants à l'effort pénible d'ouvrir les yeux et de nous retourner pour gravir lapente qui nous achemine vers la vérité à laquelle nous ne sommes pas préparés.Cette allégorie illustre parfaitement la métaphysique platonicienne.

Nous sommes plongés, par nos habitudes quisont celles du commun des mortels, dans un monde de l'apparence et du faux-semblant.

Ce monde n'est pasentièrement faux (il suffirait alors d'en prendre le contre-pied pour accéder à la vérité), mais illusoire.

L'illusion n'estdonc pas une erreur, mais une imitation lointaine du vrai.

Il existe un arrière-monde véridique et consistant donttoutes nos illusions tirent leur semblant d'être.

Ce monde est celui des Idées, immuables et universelles dont toutesles choses existantes sont des imitations grossières et approximatives.

Pour saisir la vérité, il faut se détourner dusensible et penser.

Ce monde vrai tire son être propre d'une seule et unique réalité qui est le Bien (le soleil, raisonpour laquelle on présente la vérité comme une lumière qui dissipe les ténèbres.) II – Hegel : l'apparence révèle l'essence Hegel prend appui sur le premier type d'apparence évoqué par Platon, tout en l'approfondissant.

En effet, selon lui, pour être connu, l'être doit nousapparaître, c'est-à-dire se donner une apparence.

Il ne s'agit plus cependantde comprendre l'apparence comme un point d'appui pour l'intelligence, unsigne indiquant l'être lui-même, mais de voir que l'apparence est le lieu mêmede manifestation de l'être. On ne peut donc plus simplement distinguer l'être de son apparaître, mais il faut comprendre que l'apparaître est le lieu même où se manifestel'être.

Il n'y a plus de distinction à opérer entre ce que l'on voit des choses etce qu'elles sont en soi, puisque pour soupçonner ce qu'elles sont en soi, ilfaut bien que cela nous apparaisse.

Sans cela, l'être reste à jamaisinconnaissable. III – L'expérience esthétique : il n'y a qu'apparence Dans ce processus de réhabilitation de l'apparence, celle-cin'apparaît donc plus comme un voile masquant l'être.

Cependant, ne peut-onsonger à un type d'apparence qui ne soit la révélation d'aucun être, d'aucuneessence ? L'expérience esthétique semble faire appel à une telle idée, au sensoù l'oeuvre d'art ne renvoie à rien d'autre qu'à elle-même. Si j'utilise le mot « chaise » pour désigner la chaise que je vois, le tableau qui représente une chaisen'indique, lui, aucun objet présent dans le monde ou aucune Idée.

Le tableau est présent dans sa matérialité : ils'agit aussi bien de la chaise que je contemple, que des couleurs utilisées, la texture des matériaux (collages,petites masses de peintures, à-plats, etc.) ou le support lui-même (bois, toile, pierre, etc.).

La présence massive del'oeuvre en fait une pure apparence, au sens où elle ne renvoie rien.

Ce n'est pas son être qui apparaît (auquel cas,il ne le ferait ici que d'une certaine manière), mais c'est plutôt son apparaître qui épuise son être.

Ce que je vois dela toile correspond intégralement à ce qu'elle est. Conclusion :. »

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