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Faut-il redouter les machines ?

Publié le 08/03/2004

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Le sujet appelle une réflexion critique sur le sens et la valeur réelle d'une crainte fort répandue dans le monde moderne : celle qu'inspire la technique productrice de machines. Les raisons d'une telle crainte sont multiples ; mais sont-elles de véritables raisons ? Y a-t-il un fondement légitime à la peur qu'inspirent les machines ? Comment rendre compte d'une crainte a priori paradoxale, si l'on considère le fait qu'en redoutant les machines, l'homme en vient à redouter ses propres productions ? Le sujet appelle donc à la fois une explicitation de la crainte des machines et une évaluation critique de celle-ci. Philosophiquement, il s'agit de statuer sur ce qui relève à la fois d'une représentation et d'une attitude. Si les machines manifestent un « pouvoir « néfaste, le tiennent-elles d'elles-mêmes, ou d'un processus qui leur préexiste et préside, par exemple, à leur utilisation ?

  • I) Il faut redouter les machines.

a) Le machinisme aliène le travailleur. b) Machine et division du travail. c) Les machines sont hors de contrôle.

  • II) Il n'y a pas à redouter les machines.

a) La machine allège le labeur de l'homme. b) La machine améliore notre efficacité. c) Technique et conditions d'existence.

.../...

« définition de la technique, comme celle d' Aristote, s'orientent à partir de ce lien.

Dans le chapitre VIII de sa « Physique », Aristote définit la technique à la fois comme imitation et commeprolongement de la nature.

Ce qu'on appelle ici technique, c ‘est cequ'Aristote nomme, en grec, « technè », et qui se comprend à la fois commetechnique et comme art.

si cette « technè » est imitative, c'est d'abordparce que la nature se présente comme une référence absolue etindépassable ; c'est aussi parce que l'activité technique se fonde sur unecompréhension de ce qu'est la nature.

Les relations entre science ettechnique illustrent nettement ce point : l'histoire des progrès techniquesentretient un parallèle avec l'histoire avec l'histoire des découvertesscientifiques, parce qu'il n'est pas un objet technique qui ne soit,consciemment ou non, l'application de ces lois de la nature que la sciencedécouvre.

L'adage par lequel Bacon disait qu' « on ne commande à la naturequ'en lui obéissant » prend ici tout son sens. RAPPEL: "On ne commande à la nature qu'en lui obéissant" BACONCette phase signifie que, pour agir ou transformer la nature, il convient d'enconnaître les mécanismes.

Ce n'est pas, par exemple, en rêvant comme Icareau vol des oiseaux que l'homme a pu s'élever dans les airs mais en dégageantles lois de la physique.

Bacon rompt ici avec une attitude purement passive etcontemplative de la Nature qui était le propre des Anciens. « ...

s'il se trouve un mortel qui n'ait d'autre ambition que celle d'étendre l'empire et la puissance du genre humaintout entier sur l'immensité des choses, cette ambition (si toutefois on doit lui donner ce nom), on conviendra qu'elleest plus pure, plus noble et plus auguste que toutes les autres ; or, l'empire de l'homme sur les choses n'a d'autrebase que les arts et les sciences, car on ne commande à la nature qu'en lui obéissant.

[...]La science et la puissance humaine se correspondent dans tous les points et vont au même but ; c'est l'ignoranceoù nous sommes de la cause qui nous prive de l'effet ; car on ne peut vaincre la nature qu'en lui obéissant ; et cequi était principe, effet ou cause dans la théorie, devient règle, but ou moyen dans la pratique.

» Francis Bacon. Notons que, dans la pensée aristotélicienne, la « technè » ne se contente pas d'imiter, elle prolonge aussi : ce quiveut dire que le médecin (dont Aristote prend souvent l'exemple) se contente de favoriser la nature chez sonpatient,, de catalyser une réaction.

Ainsi, et c'est bien là son actualité, l'analyse d'Aristote ouvre-t-elle la voie àl'idée, que nous allons retrouver, d'une technique qui aurait poussé la nature un peu (ou même beaucoup plus loin)que ce que la nature aurait fait par elle seule...Il y a donc un lien très étroit entre technique et nature, lien que redécouvre Descartes qui pense tout de suite, luiaussi, au registre de la médecine.

Les accents enthousiastes qui sont les siens dans la sixième partie du « Discours» montrent une inversion du lien, dans la mesure où la technique se présente comme une domination possible de lanature : il s'agit en effet pour lui de remplacer la « philosophie spéculative » par une « philosophie pratique » , « parlaquelle connaissant la force et les actions du feu, de l'eau, de l'air, des astres, des cieux et de tous les autrescorps qui nous environnent, aussi distinctement que nous connaissons les divers métiers de nos artisans, nous lespourrions employer en même façon à tous les usages auxquels ils sont propres, et ainsi nous rendre comme maîtreset possesseurs de la nature ».

On peut parler ici d'un projet technique de domination de la nature, dont on retrouvela tonalité chez Bacon (« commander » la nature) , projet qui montre que le lien entre nature et technique n'est nipauvre, ni univoque (puisque la technique peut nous en apprendre sur la nature).Si donc le dialogue entre la nature et la technique est si riche, comment se fait-il que le progrès des applications dela technique humaine vienne mettre en danger les équilibre naturels ? N'y a-t-il pas quelque paradoxe à ce que ladiffusion de CFC, diffusion qui obéit à une loi naturelle (celle de l'expansion des corps gazeux), compromettel'existence de la couche d'ozone, autre réalité naturelle ? Si la technique est dangereuse, c'est qu'elle en arrive àconfronter les unes aux autres des lois et les mécanismes naturels incompatibles entre eux.

Souvenons-nousd'Aristote ; «en « prolongeant » la nature, la technique l'emmène peut-être un peu trop loin, parce que, même si lafission atomique qui est le principe des bombes nucléaires est naturelle, la nature ne produit pas spontanément desbombes.

Dans le mythe du « Protagoras », Platon donnait d'ailleurs à la technique ce premier éclairage : Épiméthée,chargé de distribuer aux espèces mortelles les atouts et les qualités, avait été trop prodigue avec les autresespèces, ce qui fait que plus rien ne restait pour l'homme.

voulant réparer l'oubli, Prométhée subtilise à Héphaistoset Athéna le feu et la connaissance des arts, ce pour quoi il sera puni par Zeus, comme s'il fallait comprendre quece faisant il avait commis quelque acte répréhensible : avoir donné aux hommes le moyen d'aller trop loin. « Il fut jadis un temps où les dieux existaient, mais non les espèces mortelles.

Quand le temps que le destin avaitassigné à leur création fut venu, les dieux les façonnèrent dans les entrailles de la terre d'un mélange de terre et defeu et des éléments qui s'allient au feu et à la terre.

Quand le moment de les amener à la lumière approcha, ilschargèrent Prométhée et Epiméthée de les pourvoir et d'attribuer à chacun des qualités appropriées.

Mais Epiméthéedemanda à Prométhée de lui laisser faire seul le partage.

« Quand je l'aurai fini, dit-il, tu viendras l'examiner.

» Sademande accordée, il fit le partage, et, en le faisant, il attribua aux uns la force sans la vitesse, aux autres lavitesse sans la force ; il donna des armes à ceux-ci, les refusa à ceux-là, mais il imagina pour eux d'autres moyensde conservation [...].

Ces mesures de précaution étaient destinées à prévenir la disparition des races.

[...]cependant Epiméthée, qui n'était pas très réfléchi, avait, sans y prendre garde, dépensé pour les animaux toutes les. »

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