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Friedrich Nietzsche: L'histoire nous rend-elle plus modeste ?

Publié le 10/03/2005

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nietzsche
Le manque de sens historique est le péché originel de tous les philosophes : beaucoup, sans s'en rendre compte, prennent même pour la forme stable dont il faut partir la toute dernière figure de l'homme, telle que l'a modelée l'influence de certaines religions, voire de certains événements politiques. Ils ne veulent pas comprendre que l'homme est le résultat d'un devenir... que la faculté de connaître l'est aussi [...] Or tout l'essentiel de l'évolution humaine s'est déroulé dans la nuit des temps, bien avant ces quatre mille ans que nous connaissons à peu près ; l'homme n'a sans doute plus changé beaucoup au cours de ceux-ci. Mais voilà que le philosophe aperçoit des « instincts » chez l'homme actuel et admet qu'ils font partie des données immuables de l'humanité, qu'ils peuvent fournir une clé pour l'intelligence du monde en général ; toute la téléologie est bâtie sur ce fait que l'on parle de l'homme des quatre derniers millénaires comme d'un homme éternel sur lequel toutes les choses du monde sont naturellement alignées depuis le commencement. Mais tout résulte d'un devenir ; il n'y a pas plus de données éternelles qu'il n'y a de vérités absolues. C'est par la suite la philosophie historique qui nous est dorénavant nécessaire et avec elle la vertu de modestie.

1) Dégagez les étapes de l'argumentation de Nietzsche. 2) Comment comprenez-vous l'expression : « figure de l'homme «? 3) Pourquoi le mot « instincts « est-il mis entre guillemets ? A quels exemples l'auteur a-t-il pu penser ? 4) Essai personnel : La thèse de Nietzsche : « tout résulte d'un devenir; il n'y a pas plus de données éternelles qu'il n'y a  de vérités absolues « vous paraît-elle sujette à discussion ?  • Étapes de l'argumentation :  — Le manque de sens historique des philosophes.  — L'ignorance de la longue évolution humaine qui fait admettre.  — Le postulat d'une nature humaine, au regard des quatre mille ans que nous pouvons connaître.  — La nécessité d'une nouvelle philosophie.  • Quelques « instincts « que Nietzsche étudie dans son œuvre : l'instinct de connaissance, de vérité, l'instinct grégaire. Ces exemples devraient vous permettre de répondre à la question des guillemets.

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« l'homme.

La science nous apprend que ce que nous appelons l'homme n'est que la dernière forme prise par l'évolutionde l'espèce humaine.Cette forme actuelle, provisoire et relativement récente, succédant à celle des premiers hommes, plus proches dusinge que de nous, a été « modelée » par l'influence de certaines religions et en particulier, pour Nietzsche, par lechristianisme, qui a cherché à réprimer les instincts par l'apprentissage du renoncement, la condamnation desmanifestations du corps et le rejet des passions.La politique aussi a contribué à ce modelage, notamment par l'entremise de ceux des événements qui ont favorisé lebrassage et le métissage des peuples et des cultures.

Or, ce que les hommes ne veulent pas comprendre concernele fait que cet homme soi-disant porteur d'une « essence » ou nature éternelle, n'est en réalité que « le résultatd'un devenir ».Cet oubli, Nietzsche l'appelle « manque de sens historique », péché de tout philosophe qui prétend se placertoujours « du point de vue de l'éternité » ou qui, comme Kant ou Hegel, ne nous parle en guise d'histoire que de sa« portion » la plus récente et que l'on fait remonter à l'Antiquité.

Ce à quoi s'oppose cet extrait: Nietzsche s'oppose ici à toute la tradition philosophique en général, mais surtout à celles des doctrines qu'on aappelées « philosophies de l'histoire », comme la philosophie de Hegel.Contrairement à ce dernier, Nietzsche affirme ici qu'il nous faut étendre ce que l'on appelle l'histoire à des tempsbien plus reculés, car « tout l'essentiel de l'évolution humaine s'est déroulé dans la nuit des temps, bien avant cesquatre mille ans que nous connaissons à peu près »Al ne faut donc plus opposer, comme le faisait Hegel, la natureet ses cycles, qui existaient bien avant l'apparition de l'homme, et l'histoire, réduite à l'histoire humaine.En effet, et c'est là l'enseignement des théories de l'évolution, la nature possède aussi une histoire, en continuitéavec la nôtre.

Dans cette frange de temps très partielle que l'homme appelle « l'histoire » et où il « n'a sans douteplus changé beaucoup », les philosophes ont la prétention de lire des vérités éternelles.

Ils prennent la partie pour le« grand tout » que constitue la véritable histoire, celle de l'évolution.Il est vain de vouloir former, sur des données si réduites et si locales, des conclusions sur la prétendue natureimmuable de l'homme, comme celles tirées de l'examen de ses instincts.

La grande erreur vient donc de ce que l'onparle de l'homme de ces quatre derniers millénaires comme d'un homme éternel, qui n'a jamais changé et qui nechangera plus.

Or, tout résulte d'un devenir et l'homme lui-même évoluera, disparaîtra.Avec cette disparition, ce sont ces prétendues vérités absolues qu'il croit posséder qui disparaîtront aussi, car lafaculté de connaître de l'homme, elle aussi, est en devenir.

L'histoire ne doit donc pas être l'alibi de notre orgueil,mais nous rendre plus modestes, car nous sommes éphémères.

NIETZSCHE (Friedrich-Wilhelm). Né à Rocken en 1844, mort à Weimar en 1900. Il fit ses études à l'école de Pforta, puis, renonçant à la carrière ecclésiastique, il les termina aux Universités deBonn et de Leipzig.

La lecture de Schopenhauer et la rencontre avec Wagner sont les événements capitaux decette période.

En 1868, Nietzsche est nommé professeur de philologie grecque à l'Université de Bâle ; il conserva ceposte jusqu'en 1878, date à laquelle il fut mis en congé définitif pour raisons de santé.

Commence alors la série desvoyages de Nietzsche en Italie : Gênes, l'Engadine, Rapollo, Nice, la Sicile, Rome, Venise, lisant Empédocle, jouantChopin et Rossini.

Il découvrit Stendhal et Bizet.

Il passe les mois d'été à Sils-Maria, dans une petite chambre, faceà la montagne.

C'est à Turin, en janvier 1889, qu'il fut terrassé dans la rue par une crise de démence, probablementd'origine syphilitique, et qui se termina par la paralysie générale.

Ramené à Bâle, Nietzsche dut être interné quelquetemps dans une maison de santé ; puis, sa soeur l'accueillit auprès d'elle, à Weimar, où il mourut le 25 août 1900.

Laphilosophie de Nietzsche se caractérise par un amour passionné de la vie.

Ses premiers écrits concernent l'Art ;reprenant la terminologie de Schopenhauer, volonté et représentation, 'Nietzsche distingue l'art dionysien (musique): c'est l'exaltation tragique de la vie, l'état où l'homme a tendance à se confondre dans le monde ; et l'art apollinien(arts plastiques) : le principe apollinien est le principe contemplatif.

Le rêve apollinien s'oppose à l'ivressedionysiaque.

C'est dans le drame wagnérien que Nietzsche voit la réconciliation de ces deux principes.

Nietzsche faitla critique de la Connaissance et de l'Histoire.

Si la durée du monde n'a pas de terme, la nature cosmique ethumaine, cependant, ne varie pas, et les combinaisons qui constituent le monde sont limitées.

La vie que nousvivons, nous devons la revivre plusieurs fois.

La doctrine nietzschéenne de l'éternité est un éternel retour del'identique, qui surmonte la temporalité du temps.

Midi est l'instant éternel où le temps, arrêté, devient éternité.Nietzsche a toujours eu la nostalgie du soleil, de la Méditerranée, de la Grèce.

Après sa brouille avec Wagner, c'estBizet qui lui semble le plus grand musicien.

Les pages cruelles qu'il a écrites contre les Allemands, les pagesenthousiastes sur la civilisation juive, peuvent expliquer que Nietzsche n'ait pas exercé une grande influence, niphilosophique, ni littéraire, sur les Anglo-Saxons.

Brandès et d'Annunzio furent les premiers à saisir l'importance de lapensée de Nietzsche.

II faut accepter joyeusement la vie, et la volonté et l'imagination permettent seules. »

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