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Granger, La Raison

Publié le 22/02/2012

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Soit le principe d'identité, que l'on énonce souvent sous la forme : A est A, et que, dans le Sophiste, Platon formulait : l'Être est. Pour qui le considère comme une règle de pensée, il présente en fait un double sens. Métaphysique tout d'abord : à savoir que la réalité, en tant que telle, est immuable. Dans la mesure où cette lampe, cette table sont des êtres réels, elles ne sont que ce qu'elles sont. C'est énoncer un postulat de permanence et d'immobilisme universel, que l'on peut naturellement tempérer en ajoutant que les apparences de l'Être, les phénomènes sont changeants. De là vient que cette lampe se ternit, que cette table se patine. Mais est-ce bien en ce sens métaphysique qu'il faut prendre ce principe, si l'on veut en faire l'une des expressions de la pensée rationnelle ? Certes non, car son affirmation est contestable, et périodiquement contestée au cours de l'histoire. Il faut donc se résigner à lui donner un sens beaucoup plus modeste, mais aussi plus efficace, que nous appellerons sens linguistique. Le principe d'identité signifie alors que toute désignation doit être permanente à l'intérieur d'un même discours. Ce que j'ai une fois appelé a, c'est ce que j'appelle a encore dans mon texte ; les diverses occurrences du même symbole renvoient, sauf avis contraire, à un même objet de pensée. Cette règle d'interprétation du langage est évidemment l'un des fondements du symbolisme, puisque les signes, en tant qu'objets matériels, varient toujours plus ou moins d'une occurrence à l'autre, ne satisfont pas en eux-mêmes au principe d'identité ; le principe de permanence de désignation fonde alors implicitement leur valeur comme signes. Gilles-Gaston GRANGER, La Raison, 1974. PUF, 1974, pp. 51-52

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