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La guerre est-elle absurde ?

Publié le 20/05/2005

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Tout à l'heure nous devinions les hommes dans la multiplicité de leurs actions individuelles, maintenant, c'est l'histoire abstraite qui commande et nous considère comme des spectateurs (« l'histoire nous met devant les yeux «). Les personnages du théâtre deviennent des entités : le mal, la corruption des moeurs (« l'iniquité «). Le décor : la ruine des empires. L'histoire, avec ses ruines, est toujours plus forte que l'homme avec ses empires. Enfin nous entendons les plaintes bruyantes (« les lamentations «) des individus qui pleurent sur la ruine de leurs cités, tout comme Jérémie pleurait sur la destruction de Jérusalem par les Chaldéens. La contagion des cris de douleur, présents ici-même (« nous l'entendons «), est plus forte que le spectacle. Nous-mêmes ne pouvons « qu'être remplis de tristesse «. C'est le moment de la réflexion, nourrie des mouvements précédents, exprimant la pensée la plus générale : tout menace d'être ruiné. Cette « pensée de la caducité en général « reprend de manière laïque « la vanité des vanités, tout est vanité « de L'Ecclésiaste. Le second mouvement nous conduit à l'affliction morale.

  Voltaire dans son Dictionnaire philosophique peint la guerre comme suit : « Ces multitudes s’acharnent les unes contre les autres, non seulement sans avoir aucun intérêt au procès, mais sans savoir même de quoi il s’agit. Il se trouve à la fois cinq ou six puissances belligérantes, tantôt trois contre trois, tantôt deux contre quatre, tantôt une contre cinq, se détestant toutes également les unes les autres, s’unissant et s’attaquant tour à tour ; toutes d’accord en seul point, celui de faire tout le mal possible. Le merveilleux de cette entreprise infernale, c’est que chaque chef des meurtriers fait bénir ses drapeaux et invoque Dieu solennellement avant d’aller exterminer son prochain «. La guerre serait donc absurde par manque de sens, de but, en tant que simple expression de la violence étatisée. Pourtant, si elle peut paraître absurde, il n’en reste pas moins qu’elle apparaît parfois le dernier et ultime moyen rationnel de venir à bout d’une situation. C’est donc le sens la guerre, son fondement et sa légitimité qui sont en question.

            Si la guerre peut relever de l’absurde (1ère partie), elle n’est reste pas moins un moyen politique parfois pertinent (2nd partie), nous invitant à réfléchir sur l’existence de « guerre juste « (3ème partie).

« précédents, exprimant la pensée la plus générale : tout menace d'être ruiné.

Cette « pensée de la caducité engénéral » reprend de manière laïque « la vanité des vanités, tout est vanité » de L'Ecclésiaste.Le second mouvement nous conduit à l'affliction morale.

Il désigne les acteurs de l'histoire, d'une part la nature,d'autre part les hommes (avec leur volonté du mal).

D'où un double sentiment humain, d'une part l'affliction morale,d'autre part une révolte.

Il est possible de faire autrement.

Certes nous pouvons pleurer sur les ruines provoquéespar une nature à la fin toujours plus forte que l'homme, mais pour ce qui est de l'homme, et de ses exactions, uneautre histoire est sans doute possible.Bien qu'un instant nous puissions en douter (« si tant est »), le spectacle du monde ne nous a-t-il pas appris qu'iln'y a pas, dans tout ce que nous avons vu, d'esprit du bien.

Alors échapperions-nous à la règle commune.

Oui, sansdoute, les sentiments qui sont les nôtres (tristesse, affliction, douleur) témoignent de notre moralité.Le troisième mouvement, où nous passons du spectacle au tableau, est encore plus terrifiant.

Loin de l' «exagération oratoire » - qui emporterait peut-être l'adhésion, mais qui, manipulatrice, est ici parfaitement inutile – ilsuffit, dit Hegel, seulement (« rien qu'en ») de relater (c'est le propre de l'histoire d'être une relation avecexactitude...

Autrement dit, ce qui pourrait être décrit est exact.

Plus de dénonciation de la nature, commeresponsable des ruines.

Mais une accusation portée cette fois uniquement contre l'homme.

Car c'est bien uneactivité humaine qui « inflige » délibérément...

Triomphe du mal, avec son cortège de malheurs, du vice sur la vertu,de la perversion contre l'innocence.

Et qui fait de l'histoire un malheur généralisé, où tout est corrompu, puisque lemal, comme la peste, porte tout aussi bien sur les personnes, sur les peuples, sur les Etats.

Et qui en vise « les plusbeaux échantillons ».

Rien n'est épargné, aussi rien ne saurait nous apaiser.

Au malheur le plus haut répond ladouleur la plus profonde. 2.

Mais , avec ironie, Hegel note que cette douleur, qui certes nous frappe, mais qui est relative aux souffrancesdes autres, dans le passé, ne nous laisse pas sans voix.

Elle ne nous empêche pas de formuler en nous-mêmes lessentences toutes faites du sens commun.

Car ce spectacle, tout horrible qu'il fut, nous n'y participons pas, il étaitpensé, plutôt que vu.

Et, en fin de compte, c'est cette pensée seulement (« cette douloureuse réflexion ») qui étaitpénible.

Les sentences (prononcées en forme d'épitaphes) viennent déjà atténuer les choses.Formulation creuse qui ne fait rien que répéter ce qui est déjà : « il en a été ainsi ».

Invocation d'une force plusforte que nous, qui nous déresponsabilise : ce n'est pas nous, « c'est le destin ».

Démission avouée : « on n'y peutrien changer ».

Que le monde continue dans le futur comme il a été dans le passé.D'ailleurs le monde nous appelle, mais un autre monde, non pas celui, terrible, de l'histoire universelle, mais celuiterre à terre, lié strictement à la sphère de nos activités actuelles (« présentes »).

Celui dont nous sommes lecentre : nos affaires, nos buts, nos intérêts.

Monde quotidien qui s'oppose par sa tranquillité aux troubles del'histoire, qui se manifeste par sa proximité contraire au lointain des désastres (« la masse des ruines »), quis'impose par la clarté de son évidence si différente de la confusion de tout le reste.Ce contraste entre notre histoire universelle est si fort que, nous prenant pour le centre de tout (ce qui définitl'égoïsme), nous venons à « considérer » cet autre monde, comme quelque chose de lointain, qui se situe ailleurs,d'où l'idée de spectacle.

Tout à l'heure il nous effrayait (mais nous effrayait-il vraiment tant que cela ?), maintenantnous en jouissons.

Cela se passe si loin dans le temps, si loin dans l'espace.

De l'autre côté.

Tout un fleuve, touteune mer nous sépare de cela.

On songe aux vers de Lucrèce : « Il est doux, quand la vaste mer est soulevée par lesvents, d'assister du rivage à la détresse d'autrui.

»Mais est-ce bien le même homme qui est capable de jeter un regard sur l'histoire du monde extérieur, et qui enmême temps, incapable de rien comprendre, s'enferme dans son monde intérieur ? 3° La paix comme horizon de l'Histoire La raison (...) énonce en nous son veto irrésistible : Il ne doit yavoir aucune guerre ; ni celle entre toi et moi dans l'état de nature,ni celle entre nous en tant qu'États, qui bien qu'ils se trouventintérieurement dans un état légal, sont cependant extérieurement(dans leur rapport réciproque) dans un état dépourvu de lois - carce n'est pas ainsi que chacun doit chercher son droit.

Aussi laquestion n'est plus de savoir si la paix perpétuelle est quelquechose de réel ou si ce n'est qu'une chimère et si nous ne noustrompons pas dans notre jugement théorique, quand nousadmettons le premier cas, mais nous devons agir comme si lachose qui peut-être ne sera pas devait être, et en vue de safondation établir la constitution (...) qui nous semble la pluscapable d'y mener et de mettre fin à la conduite de la guerredépourvue de salut vers laquelle tous les États sans exception ontjusqu'à maintenant dirigé leurs préparatifs intérieurs, comme versleur fin suprême.

Et si notre fin, en ce qui concerne sa réalisation,demeure toujours un voeu pieux, nous ne nous tromponscertainement pas en admettant la maxime d'y travailler sansrelâche, puisqu'elle est un devoir. Emmanuel Kant, Métaphysique des moeurs, Première partie :Doctrine du droit. I - LES TERMES DU SUJET. »

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