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histoire du droit

Publié le 26/11/2012

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HISTOIRE DU DROIT Manuel : Histoire du droit et des institutions dans la France médiévale et moderne, de Albert RIGAUDIERE, Economica (4ème édition, 2010). Période historique très longue (5ème siècle - 1789). Pas de cours d'histoire contemporaine. Ancienne France (13 siècles), divisée en 3 sous-périodes. 1° : chute de l'Empire Romain due au invasions (5ème siècle, 476) - période franque ou Haut Moyen-Age (seconde moitié du 9ème siècle), avec les règnes successifs des Mérovingiens (Clovis) ; disparition de la dynastie au profit des Carolingiens (milieu du 8ème siècle), fondés par Pépin le Bref en 751, puis Charlemagne (décadence et disparition en 987). 2° : Moyen-Age. 987 = avènement des Capétiens (Hugues Capet), s'achève au milieu du 15ème siècle (1453), fin de la guerre de Cent ans. 3° : 1453 - 1789 : les Temps modernes, l'Ancien Régime. Droit et institutions des périodes 2 et 3 ; cela reviendra à se pencher sur l'ensemble des règles qui, à un moment donné, organise la vie en société ; envisager le statut juridique, des groupes, des individus. Droit permet aux individus de vivre ensemble ; organisation du cadre politique, administratif, économique, social dans lequel nous vivons. Délimitation du champ du cours. Idée de départ édictée par les abords des systèmes juridiques antérieurs. Retour aux racines historiques de ce droit. PARAGRAPHE PREMIER : LES RACINES DU DROIT FRANÇAIS Le droit français est largement redevable à trois apports fondamentaux : l'apport de Rome, l'apport de la religion, du christianisme, et un apport germano-franc. Ces influences se sont croisées. L'apport de Rome A l'origine, Rome n'est qu'une petite cité au territoire restreint ; elle a à sa tête un roi, destitué vers -509, pour créer la République (res publica). De vastes conquêtes territoriales et la mise sur pied d'institutions complexes sont les caractéristiques essentielles de l'histoire républicaine, jusqu'en -27 avant JC. République : Le pouvoir est réparti entre le peuple organisé en comices (assemblées dont la fonction essentielle est de voter les lois et d'élire les magistrats). Le Sénat (composé d'anciens magistrats) vote des senatus-consultes et ratifie ou refuse les lois des assemblées en leur conférant son auctoritas (pouvoir propre des magistrats). Ensuite, tous possèdent la potestas, et les plus importants ont l'imperium. Auctoritas  (du verbe augere, augmenter) : est un pouvoir qui permet à celui qui en est titulaire d'augmenter, en lui donnant plus d'efficacité, la valeur d'un acte juridique ou d'un droit. Il a un champ d'application très large, aussi bien en droit privé qu'en droit public. A ce titre, l'auctoritas permet de contrôler l'élaboration d'une loi, de s'y opposer ou de la renforcer. La potestas désigne toute forme d'autorité reconnue par le droit à une personne sur une autre personne ou sur des biens (droit subjectif). L'impérium désigne un pouvoir à caractère militaire ; droit de commandement fondé l'origine, sur la force et le prestige du chef. Sous la République, ce pouvoir est accordé aux magistrats à l'issue du vote d'une loi (la lex curiata de imperio) ; procède à la levée des troupes, de les commander en campagne, de nommer à tous les commandements militaires et d'imposer des tributs ; seul le titulaire de l'imperium peut célébrer le triomphe après une victoire et détient le pouvoir disciplinaire sur ses troupes. Mais ces procédés républicains s'avèrent aristocratiques et conservateurs : effondrement au profit de l'Empire. 1° : L'Empire romain, modèle du pouvoir La consistance de l'héritage romain est considérable :les germano-francs n'ont pas pu s'imposer aux gallo-romains, ni leurs institutions, car ils étaient peu nombreux et pas assez oppressifs , leurs règles étaient élémentaires comparées au droit romain remarquable ; les barbares ne pouvaient pas imposer leur droit aux populations locales, car leur droit était trop peu élaboré. Pour cette raison, le droit romain a marqué l'époque franque (476 - 987). Au cours de l'histoire française, le droit romain va connaitre des périodes de renaissance, et ce droit très élaboré a marqué l'Occident pour toujours ; on va emprunter au droit romain tout au long de l'histoire, dans deux domaines. Tout d'abord, le pouvoir, puis les sources du droit ; l'Empire romain reste le modèle du pouvoir ; le droit romain reste le modèle du droit et c'est vrai à l'époque contemporaine. L'apport romain est ici double : l'Empire romain a légué en matière de pouvoir à la Gaule un concept ignoré, le concept d'Etat et une organisation administrative très élaborée. Le concept d'Etat (res publica) : Puissance de commandement, d'organisation, distincte de la personne des individus investis de cette puissance. La Gaule et les princes barbares ignorent totalement ce concept d'origine romaine. Rome a défini les caractères de l'Etat. Rome a aussi défini les caractères de l'Etat et constitue des apports supplémentaires qui vont s'inscrire dans l'héritage politique romain : la souveraineté étatique a un fondement populaire : c'est le peuple souverain qui se dote de la forme de gouvernement de son choix ; l'Etat est investi de la suprême puissance, soit la puissance absolue de commandement (à partir du 15ème, L'Etat a la souveraineté, l'imperium, la puissance de commandement de l'Etat). L'autre apport des romains en matière de concept d'Etat : l'Etat a un objectif, le bien commun des membres de la collectivité ; l'Etat représente l'intérêt général. Enfin, d'après les romains, la puissance de l'Etat est limitée : l'Etat est soumis au droit, et il ne peut pas disposer librement de la chose publique (res publica). Notre droit public a énormément hérité des romains (droit constitutionnel). Une organisation administrative : Ce qui caractérise ce système administratif, c'est la concentration du pouvoir en un point unique du territoire (le pouvoir est à Rome) ; mais l'Empire romain est immense ; pour le gouverner, il faut hiérarchiser l'administration, que l'Empereur, le pouvoir central, délègue une fraction de ses compétences à des agents placés dans une organisation administrative très hiérarchisée. L'Empire d'Occident est immense (pas très peuplé) ; cet empire est sous-peuplé. L'empire d'Occident est divisé en 2 préfectures du prétoire  ; le préfet du prétoire est un vice-empereur ; il y a la préfecture des Gaules, qui englobe la Gaule (territoire), la Grande-Bretagne actuelle, la péninsule ibérique et le territoire correspondant au Maroc actuel. La préfecture des Gaules est divisée en diocèses, eux-mêmes divisés en provinces, dirigées par un gouverneur ; les provinces sont divisées en districts. 2° L'Empire romain, modèle du droit Après la chute de l'Empire romain d'Occident, le droit romain ne disparait pas pour autant, et qui a pu inspirer de nombreux textes de l'époque suivante, la période franque. Le droit romain fera un véritable retour en force à 2 époques de notre histoire : au 12ème siècle, ainsi qu'au 16ème siècle. Le droit romain renaissant marquera beaucoup la partie sud de la France ; étant un droit écrit, le droit romain marquera la partie méridionale de la France jusqu'à la Révolution française. Aujourd'hui, il est bien difficile de s'écarter du modèle romain dans de nombreux domaines ; il est certain qu'aujourd'hui, il existe une étroite filiation, une attache profonde entre notre droit et le droit romain ; attaches profondes entre les 2 systèmes juridiques (en matière de mariage, de droit du patrimoine, de personnalité juridique, d'incapacité, soit les mineurs incapables, les majeurs incapables, etc, d'obligations, de contrats, de droit des successions). Mais il y a eu des périodes d'oubli du droit romain (fort heureusement, en matière de droit romain, il y a eu une oeuvre gigantesque, une oeuvre que l'on retrouvera au Moyen-Age en Occident, grâce à l'oeuvre de l'Empereur Justinien, qui a fait faire des compilations du droit romain). On connait le contenu du droit romain, mais en matière de droit, on connait également, venant des romains, la science du droit : l'idée que le droit est essentiel, a pour fonction d'organiser des rapports justes entre les hommes, soit que droit et justice sont en relation, car il existe une justice objective dont le droit doit être l'expression, et donc les romains vont formuler leurs droits en fonction de cet impératif de justice (élaboration d'une science du droit qui est la science du juste et de l'injuste). En matière d'apport, en matière de droit, les romains sont le premier peuple de l'Antiquité à avoir laïcisé le droit ; ce soit laïc fera partie du legs fait à l'Occident ; si ce caractère laïc va se perdre du fait de l'influence de l'Eglise, même si le retour de la laïcisation sur le modèle romain se fera à partir du 14ème siècle. L'apport chrétien Là aussi, l'apport est double : pouvoir et droit. 1° : Eglise et pouvoir Quel est le legs de l'Eglise ? L'Eglise apporte des idées et un modèle d'organisation centralisé. Plan idéologique L'Eglise formule une idée essentielle qui va être majeure pendant l'Ancienne France : l'idée du dualisme de Dieu et du pouvoir : selon l'Eglise, il existe deux autorités : L'autorité spirituelle incarnée par le Pape L'autorité laïque (temporelle) incarnée par le Roi ou l'Empereur L'Eglise dissocie et sépare la religion et l'Etat ; dans l'Antiquité, l'Eglise et l'Etat étaient liés ; or l'Eglise sépare les deux. Mais le christianisme, tout en présentant la séparation des deux, le pouvoir laïque/étatique a une origine divine. Selon Saint Paul, tout pouvoir vient de Dieu ; plus tard, au 5ème siècle, Saint-Augustin tempère cette idée ; tout en réaffirmant l'origine divine du pouvoir, il ajoute que même si le pouvoir a une origine divine, ce sont les hommes qui choisissent les lois et les chefs. Plan institutionnel L'Eglise présente une organisation centralisée , qui servira de modèle aux Etats laïcs ; à l'origine, à Rome, il y a un évêque, qui parvient à imposer son autorité sur l'Eglise, et c'est ainsi que le titre de Pape apparait au 4ème siècle ; le Pape (chef de l'Eglise) se voit reconnaitre un pouvoir important, dans différents domaines : premièrement, un pouvoir de juridiction en matière religieuse ; deuxièmement, il est aussi le détenteur du pouvoir exécutif et il a aussi le pouvoir de faire le droit de l'Eglise (pouvoir législatif), pouvoir qui s'exerce dans la vie interne de l'Eglise sous forme de textes nommés les décrétales du Pape ; il est le chef de l'Eglise, mais il y a en dessous de lui une hiérarchie ecclésiastique : Chaque évêque dirige une circonscription ecclésiastique, le diocèse. Enfin, un clergé inférieur dirigé par l'évêque dans chaque diocèse ; le clergé séculier (vit dans le siècle, au milieu des fidèles, soient les prêtres des paroisses dans le diocèse) ; ainsi que le clergé régulier (formé de moines, vivant selon une règle de vie, et chaque abbé dirige l'abbaye). Cette organisation va inspirer les Etats. 2° : Eglise et droit Le droit spécifique de l'Eglise se forme au premier siècle ; ce droit se forme à partir de sources diverses ; oeuvre de synthèse. (formé à partir de l'Empire romain, donc comportant du droit romain). On y trouve également un certain nombre de règles juridiques contenues dans l'Ancien testament, ainsi que les préceptes moraux des pères de l'Eglise, ceux qui ont vécus entre le 1er et le 6ème siècle. Ce droit de l'Eglise était un droit coutumier qui va tendre de plus en plus vers des actes écrits, formulés (décrétales), ainsi que les textes qui émanent des grandes assemblées ecclésiastiques : les canons, soit les résolutions rédigés dans les assemblées d'évêques, les Conciles , ce qui forme le droit canon, puis de droit canonique. L'apport germanique et franque L'apport des germains et des francs se situe dans deux domaines : 1° : L'apport germanique Peuple du Nord et de l'Est, les germains arrivent en Gaule ; germanus/germani, soit « voisin(s) «, soit les voisins du peuple gaulois. L'arrivée des germaines a contribué au démantèlement de l'Empire romain ; ces nombreux peuples ont introduit en Occident et en Gaule certaines valeurs, parfois contraires aux valeurs romaines : le sens de la valeur individuelle, le sens de l'indépendance et de la liberté Germains et pouvoir Très éloigné du monde romain ; ignorance totale du concept d'Etat, de res publica ; ils connaissent la soumission personnelle et volontaire envers un chef. Qui est le chef ? Celui qui est parvenu à s'imposer parmi les autres, grâce aux aptitudes physiques et intellectuelles (stratège militaire). Des hommes (tribus) se groupent spontanément autour d'un chef (le compagnonnage militaire, le chef avec ses compagnons). Malgré cela, l'organisation politique est faible ; en principe chaque tribu avait un chef, un roi ; ce roi était choisi par l'Assemblée des guerriers ; seulement, peu à peu, le rôle de ce chef, de ce roi a tendance à diminuer quelque peu, car les décisions importantes ne sont pas prises par le chef seul, mais par l'Assemblée des fidèles (par exemple pour partir au combat) ; le roi est un chef de guerre ; très vite chez les germains et surtout chez les francs, la noblesse a tendance à disparaitre, tous les hommes libres aptes à porter les armes sont considérés comme égaux, car il s'agit d'une société égalitaire (contrairement à la société romaine). Germains et droit Peu de connaissance du droit de ces peuples (puisque droit coutumier) ; avant leur entrée dans l'Empire romain, peu de connaissances car pas d'écrits. Ce que l'on connait de ce droit provient de Jules César, à travers ses commentaires écrits lors de guerres contre les germains, et aux écrits de l'historien latin Tacite. Quel est leur droit ? Un droit qui traduit des caractères analogues et identiques à ceux relevés en matière de pouvoir. D'abord, l'importance du groupe et la reconnaissance de l'individu. Par exemple, en matière de droit du patrimoine, pendant longtemps ont subsisté des vestiges de communisme agraire : la propriété immobilière n'existe pas, mais existent des biens communs, mis à la disposition de toute la communauté ; il existe des droits d'usage collectif (liberté de pêcher, de chasser, de cueillir des fruits, soient des vestiges de communisme agraire). Malgré cela, ils sont propriétaires de leurs quelques meubles ou de leur bétail : lorsque un propriétaire mourait, ses meubles étaient enterrés avec lui ou brûlés. Autre exemple, en matière de droit pénal, existe la vengeance privée dans une société qui ne connait pas l'Etat, mais prône l'importance du groupe et de la famille. Autre exemple, en droit familial, on reconnait chez les germains une certaine capacité juridique aux enfants, on reconnait une personnalité juridique à la femme qui est propriétaire de sa dot. Dans cette société, le pouvoir du père et du mari est beaucoup moins absolu qu'à Rome (droit de tuer ses enfants, sa femme, etc à Rome). 2° : L'apport franc Règnes de dynasties ; mérovingiens qui fut une dynastie faste, avec pour fondateur Clovis (481 - 511) ; c'est une période importante car ce roi est parvenu en l'espace d'un règne à unifier la Gaule et il est surtout parvenu à fortifier la légitimité de son pouvoir (pas seulement par ses victoires militaires) ; ce roi barbare s'est fait baptiser, et accomplit alors un geste politique majeur : à partir de ce baptême, la monarchie franque/barbare s'assure le soutien de l'Eglise. Cette dynastie s'essouffle alors ; la dynastie carolingienne lui succède , en commençant parfaitement avec Pépin le Bref (751 - 768) ; ce dernier ajoute à la monarchie en se faisant sacrer ; il institue le sacre royal. Son fils Charlemagne (768-814) est un roi conquérant, si bien que pour gouverner cet ensemble territorial, il devient empereur à Noël 800. Son fils Louis le Pieu (814-840) redécouvre le concept d'Etat des romains ; après ces périodes, les deux dynasties connaissent les échecs politiques ; néanmoins, ces deux dynasties vont beaucoup léguer à la dynastie Capétienne puisque l'héritage en matière de pouvoir et de droit est considérable. Francs et pouvoir Ce que vont léguer les Carolingiens est une certaine idée du pouvoir ; le roi est sacré à partir du 8ème siècle : que cela symbolise-t-il ? Une idée du pouvoir, une doctrine du pouvoir, soit la théocratie royale (gouvernement de la cité par Dieu ; c'est le gouvernement de la cité par les hommes auxquels Dieu a donné mission de gouverner). Le roi franc sacré dirige la chrétienté et il est assimilé à un prêtre, un chef religieux ; sa mission est de défendre la chrétienté et l'Eglise, et d'aider son peuple à marcher dans la voie droite pour gagner le salut. Ce corps de doctrine, la cité royale est très important car il sera véhiculé par l'Eglise à travers les siècles, et l'Eglise continuera à le véhiculer alors que la monarchie sera tombé dans un grand Etat de faiblesse. Ce corps de doctrine servira de tremplin idéologique à l'ascension de la dynastie capétienne. Ces fondements du pouvoir demeureront ; la royauté, malgré son déclin, aura toujours une légitimité grâce à ce corps de doctrine. Cette époque carolingienne va apporter autre chose à la dynastie capétienne ; elle va apporter, du modèle carolingien, l'image du prince qui gouverne avec autour de lui, un conseil , un entourage de fidèles. Le déclin carolingien va léguer quelque chose à la société du 10ème siècle, va laisser de profondes traces dans le monde féodale des 10ème et 11ème siècle : le Moyen-Age va hériter d'un système très répandu sous les carolingiens ; système de liens personnels ; au temps du déclin caroligien, l'Etat recule ; de ce fait, les carolingiens ont recours à ce que l'on va appeler le système vassalique pour se procurer des soldats : la vassalité, alors que l'Etat disparait, repose sur une relation d'homme à homme, sur une relation de type contractuel ; le plus faible (vassal) a une obligation d'obéissance et de service ; le plus fort a une obligation de protection. Ce schéma politique sera retrouvé à différents échelons de la société, car les grands dignitaires feront comme le Roi ; avec les multiplications des relations contractuelles naissent les notions de contre-pouvoir, visant à affaiblir l'Etat, et qui créé des barrières entre le Roi et ses sujets. Avec la disparition de l'Etat se produit l'inévitable : l'espace territorial se fragmente. L'Etat est remplacé par les chefs locaux. Francs et droit Les carolingiens, à côté des armes et de la contrainte, ont aussi utilisé le droit, pour instaurer leur autorité ; ils ont voulu créér un droit unitaire en s'inspirant de la tradition romaine ; alors ils vont faire des textes, les capitulaires (petits chapitres) et voulaient les faire appliquer à l'ensemble de l'Empire ; ils n'y sont pas très bien parvenus ; De toute façon, faire un droit unitaire, cela représente une très brève parenthèse dans l'histoire de cette époque, mais cet effort a été fait. Une autre source au temps carolingien va contribuer d'un droit applicable à tous. Cette source est le droit canonique qui connait un magnifique effort ne va cesser de se perfectionner. Désir d'unité du droit ; malgré cela, ce désir représente bien peu dans le monde franc, puisque le monde est fait d'un amalgame de peuples qui vivent sur un autre territoire ; quel droit appliquer quand il y a plusieurs peuples sur un même sol ? L'application du droit dans l'espace territorial se fait selon un principe ; de nos jours, le droit est appliqué selon le principe de la territorialité : le droit français s'applique à tous ceux qui habitent sur le territoire français. A l'époque franque, ce principe ne s'applique pas : c'est le principe de la personnalité des lois ; chaque peuple a son propre système juridique, chaque peuple a ses lois , et on applique à ce peuple sa loi, où qu'il se trouve. Par définition, la loi personnelle de chaque individu, c'est sa loi d'origine. Ce principe va être appliqué durant plusieurs siècles, et deviendra alors inapplicable, car ce principe ne peut résister à l'usure du temps : avec le temps, des peuples vivant sur un même territoire finissent pas fusionner, ne serait-ce par le mariage. L'existence de plusieurs droits sur un territoire finit par faire oublier le droit, ne serait-ce que parce que les juges ne peuvent connaitre les lois de tous les peuples. Le principe de la personnalité des lois s'efface au profit du principe de la territorialité, ce qui signifie que la loi est la même pour tous dans un territoire donné : émerge alors un droit territorial coutumier, qui représentera l'essentiel du droit aux temps féodaux. PARAGRAPHE DEUX : DROIT ET POUVOIR  Chez les peuples, domine une double préoccupation : se doter d'un droit ; se doter d'une forme de pouvoir. Le droit et le pouvoir peuvent revêtir plusieurs formes (il n'existe pas de société sans droit). Comment le droit apparait-il ? Quelles sont ses sources ? Ses sources sont très variables selon les époques, selon la forme donnée au pouvoir. Le droit peut être créé par le temps (la coutume). La coutume se formant avec le temps, vient de la base, se forme toujours en marge du pouvoir. Le droit peut aussi résulter de l'influence de certains personnages, de certains jurisconsultes. Le droit peut émaner de l'autorité, de l'Etat ; il faut remarquer que le pouvoir, quel qu'il soit veut édicter le droit, veut dire ce que le droit doit être. Mais un pouvoir faible parvient difficilement à faire accepter le droit, tandis qu'un pouvoir fort parvient à imposer un droit. La question majeure qui se pose est la suivante : Quand le pouvoir et le droit se rencontrent-ils ? Lorsque le pouvoir revêt sa forme la plus élaborée, soit l'Etat. C'est l'Etat qui va le mieux parvenir à mettre en place un ordre juridique. Seulement, il faut constater qu'historiquement, l'Etat n'a pas toujours existé (l'Etat français n'existe que depuis le 15ème siècle). C'est la dynastie capétienne qui va conduire une politique résolue de construction de l'Etat ; cette dynastie va s'efforcer de rassembler sur un territoire lentement réunifié, sur un territoire bien délimité, des populations diverses, qui n'avaient pas les mêmes traditions, coutumes. Dans un territoire donné, apparait alors une population dotée d'un gouvernement ; soient les 3 critères de l'Etat (territoire, population, gouvernement). L'acte structurant de ce cours est l'Etat et son histoire (corrélation entre droit et pouvoir entre 987 et 1789). En réalité, cette période de 8 siècles a connu 3 phases : 10ème - milieu du 12ème : pouvoir et droit morcellé dans un cadre local). 12ème - 15ème : l'institution monarchique s'affermit peu à peu et redevient créatrice de droit. 15ème -18ème : l'autorité royale tend à tout absorber et affirme de plus en plus son pouvoir législatif. PREMIERE PARTIE : LE MORCELLEMENT DU POUVOIR ET DU DROIT A L'EPOQUE FEODALE (FIN 10ème -MILIEU 12ème). A la fin du 10ème siècle, fin d'une période de très longue période d'insécurité ; début d'une ère nouvelle, nouvelle époque car la longue période de déplacement des peuples, de migration des peuples, s'est achevée (fin des invasions). Ces migrations ont duré 8 siècles ; les pays français ne connaissent plus d'invasion véritable ; période de sécurité, qui va s'accompagner d'une véritable expansion économique ; le pouvoir protecteur s'est rapproché de l'individu. Le royaume franc s'est morcelé, s'est divisé en principautés, en seigneuries, en territoire de taille variable ; ces chefs locaux assurent la protection. Les prérogatives royales (régaliennes) sont exercées par ces seigneurs. 987, le dernier Carolingien (Charles de Lorraine) est évincé et les grands du royaume élisent pour roi un personnage qui s'appelle Hugues Capet, duc de France, duc d'Ile-de-France. Cette date est fameuse. C'est la date qui consacre la fin de la dynastie carolingienne et le passage de la dignité royale dans le lignage capétien (dynastie capétienne, qui va durer 800 ans). Mais ce domaine royal, en 987, représente peu d'éléments ; c'est une bande de terre dans la région parisienne, de Compiègne (Nord) jusqu'à Orléans (Sud), soit 100km de long. Les premiers rois capétiens de la fin du 10ème sont des rois faibles dont le règne est mal connu. Hugues Capet (987-996), Robert le Pieu (996-1031), Henri Ier (1031-1060), Philippe Ier (1060-1108). Le redressement capétien va s'amorcer avec le successeur de Philippe Ier. Louis VI (1108-1137) : met de l'ordre dans le domaine royal, bat les féodaux. Louis VII (1137-1180) : roi moins habile que Louis VI mais qui a la chance d'avoir un très bon conseiller. Ce conseiller est l'abbé qui dirige l'Abbaye de St-Denis, Abbé SUGER (dirige le royaume pendant 2 ans lorsque Louis VII est à la croisade) Suger meurt en 1161 , Louis VII met la dynastie capétienne en danger ; en 1137, le futur Louis VII avait épousé l'héritière du duché d'Aquitaine, Aliénor d'Aquitaine ; mariage intéressant pour la monarchie. Aliénor apportait des territoires, les provinces (Auvergne, Limousin, Poitou, Périgord, Gascogne). En 1151, Louis VII se sépare d'Aliénor en faisant annuler le mariage : Aliénor était sa parente, selon lui. Louis VII aurait amené Aliénor en croisade et aurait eu des relations avec des chevaliers. Aliénor épouse alors le futur roi d'Angleterre, Henri Plantagenêt. Or, Henri Plantagenêt n'est pas encore roi d'Angleterre, mais ce futur toi d'Angleterre est vassal du roi de France, possède des terres (Anjou, Maine, Touraine, Normandie) ; Aliénor lui apporte alors ses biens (Limousin, Auvergne, Poitou, Périgord, Gascogne), ce qui créé une situation grave : le futur roi d'Angleterre est maitre de presque toute la France maritime du Nord au Sud ; avec toutes ses provinces, le futur roi d'Angleterre est maitre d'environ 35 des départements actuels, ce qui représente 10 fois le domaine royal. En 1154, Henri Plantagenêt succède à son père, devient le roi Henri II d'Angleterre. C'est le début de la Guerre entre le roi de France et le roi d'Angleterre. Cette guerre s'achève en 1259 (« première guerre de Cent ans). Louis VII meurt en 1180. La situation territoriale du Roi de France n'a pas changé, malgré que ce roi ait progressé sur le plan politique. Il commence à être reconnu ; sa situation territoriale reste la même, le roi lui succédant est Philippe II Auguste. Le processus de dislocation de l'empire carolingien entamé au 9ème siècle s'accélère au 10ème siècle. L'Etat se désagrège complètement : l'économie est devenue rurale et fermée ; les finances sont inexistantes ; chez ces rois, existe une conception patrimoniale du pouvoir. Les rois considèrent que leur pouvoir est leur propriété ; autre facteur de désagrégation, pratique de la vassalité ; hiérarchie administrative insuffisante : les particularismes régionaux peuvent s'exprimer. Au 10ème siècle, la rencontre du pouvoir et du droit se fait dans un cadre transformé ; au cours de la période considérée (période féodale, période seigneuriale) ; le pouvoir s'exerce désormais dans un cadre local. Le droit est devenu territorial, mais ce droit territorial se forge dans un cadre étroit, dans le cadre de chaque seigneurie ; le morcellement est encore plus grand qu'au temps de la personnalité de la loi. Morcellement du pouvoir, morcellement du droit. Chapitre 1 : L'Etat démembré aux temps féodaux Au cours de cette période féodale, le territoire est géographiquement divisé en une multitude de seigneuries, et bien évidemment les dimensions de ces seigneuries sont extrêmement variables, et leurs limites sont toujours incertaines. Dans ce monde divisé, il existe toujours un roi, mais la situation politique de ce dernier est fortement ébranlée ; ce roi est faible. Cependant, au cours de cette période, on commence à percevoir des signes annonciateurs du renouveau futur de l'Etat. Le pouvoir est entre les mains de chefs locaux. Le pouvoir aux mains des seigneurs Le système féodal et seigneurial est une forme d'organisation politique et sociale, une forme d'organisation résultant de l'échec de la politique des souverains carolingiens. Dans cette forme d'organisation, l'Etat semble irrémédiablement condamné (par.1), et le pouvoir a une assise locale, la seigneurie (par.2). Paragraphe premier : Un nouveau pouvoir aux antipodes de l'Etat : le système féodal. Le système féodal présente plusieurs caractères qui attestent ou qui montrent un système qui s'inscrit dans un monde décomposé, un monde où l'Etat ne peut plus assumer sa mission. Il y a ce système féodal. Le lien féodal Par le jeu de la relation vassalique, les rapports politiques ont désormais une base contractuelle : un homme (vassal) entre dans la dépendance d'un autre homme (seigneur) ; et, chacune de deux parties au contrat, le vassal et le seigneur a des obligations envers l'autre. Ce contrat vassalique passé entre deux hommes a un effet politique majeur : ce contrat produit un effet politique majeur, celui de déstabiliser l'Etat pour plusieurs raisons. Le lien féodal est un lien qui rattache directement un vassal à un seigneur. L'autorité du seigneur constitue un écran entre le pouvoir central (Etat) et la base. Ce phénomène contractuel se répète à tous les niveaux de l'exercice du pouvoir. Autrement dit, ce type de contrat se généralise. Toute la société va être organisée sur ce modèle. Les hommes sont rattachés à des chefs locaux au lieu d'être rattaché au roi. Or, ces hommes qui s'engagent dans le contrat vassalique sont l'aristocratie. Tous ces contrats représentent la société politique et combattante, une société que le roi ne maitrise plus, alors que chaque seigneur au niveau local se constitue des clientèles, des formations de combat. On voit de plus en plus de contre-pouvoirs, d'écrans. Par voie de conséquence, le vassal a des obligations vis-à-vis de son seigneur, et il n'en a donc pas envers l'Etat : il se produit alors un transfert qui aboutit à écarter le roi du jeu politique dernier élément : comme le vassal rend des services à son seigneur, il faut le rétribuer ; le seigneur va prendre l'habitude de lui concéder un fief à son vassal à charge de service. Le résultat est que ces concessions de fief étant nombreuses (car beaucoup de contrats), elles ont pour conséquence de compromettre l'assise territoriale et politique de l'Etat ; l'Etat se trouve alors affaiblie. Les fiefs échappent au contrôle royal. Tout cela va s'inscrire dans une hiérarchie : la hiérarchie féodale. La hiérarchie féodale Le contrat fait naitre des relations de nature politique et militaire, soit des relations inscrites dans un cadre géographique étroit (seigneurie) ; un cadre relativement exigu. Par conséquent, pour ces hommes, il est bien difficile d'ignorer l'environnement politique et militaire. Il existe une surabondance de groupes politiques locaux du fait de la disparition de l'Etat ; cela existe à la fin de l'époque carolingienne ; A cette époque, tous ces groupes locaux créent une sorte d'anarchie. Mais peu à peu, tout cet ensemble de groupes politiques locaux va s'organiser, et va se créer alors un ordre féodal, soit une hiérarchie féodale, soit chaque groupe (seigneur, vassal) n'est pas pleinement indépendant. A chaque groupe correspond un contrat ; chaque groupe s'intègre dans une hiérarchie. Chaque groupe constitue un maillon. Chaque seigneur est le vassal d'un autre seigneur, et ce seigneur est lui-même le vassal d'un seigneur plus fort, etc. La pyramide va se mettre en place, avec à son sommet le roi. Aux 10ème et 11ème siècles, organisation féodale. Féodalité : organisation politique hiérarchisée. Le pouvoir est exercé par des chefs de groupe, dans une période de défaillance de l'Etat ; cette organisation créée une certaine cohésion politique. On est face à une architecture ordonnée, de mieux en mieux réglée. Une hiérarchie bien maitrisée qui aurait pour sommet le Roi, pourrait composer le morcellement territorial. Mais ce n'est pas le cas, car les conditions nécessaires ne sont pas réunies, à savoir qu'il faudrait que l'autorité soit assurée au sommet (autorité réelle), or ce n'est pas le cas, le roi a perdu toute autorité au 10ème siècle. Il faudrait aussi que la fidélité des vassaux à la base, existe véritablement, ce qui est loin d'être le cas, puisque bien des vassaux vont songer à leurs intérêts politiques et économiques et seront assez infidèles. Le système a du mal à fonctionner ; cette hiérarchie féodale n'est pas très bien assurée ; la hiérarchie féodale du 11ème siècle constitue un danger pour l'Etat. Le morcellement territorial Immense empire carolingien aboutit à des territoires exigus séparés. A la fin de l'empire carolingien, le processus de morcellement de l'empire s'accélère. A la fin du 9ème siècle apparaissent de grandes principautés, des territoires autonomes. Ces territoires se situent dans la périphérie du royaume ; ces zones furent à l'époque carolingienne, des zones de commandement militaire, tels que la Flandre, la Bourgogne, l'Aquitaine, la Normandie, la Bretagne. Puis, on entre dans une 2ème phase au siècle suivant ; dans la 2ème moitié du 10ème siècle, les régions du centre de la future France sont affectées ; des territoires aux dimensions plus modestes que les précédentes se rendent autonomes : il s'agit de territoires qui étaient des circonscriptions administratives qui seront autonomes (Maine, Anjou). Enfin, à la fin du 10ème siècle, on assiste à une 3ème étape du processus. Il existe encore des troubles ; la population locale ont le sentiment que la sécurité ne peut venir d'en haut (du roi), ni du prince territorial ; pour être protégés, il faut avoir un chef local, mais qui ? Ces chefs ont des origines variées ; ce sont d'anciens subalternes administratifs. Des hommes qui n'avaient rien mais qui perçoivent l'opportunité de prendre des terres, et donc s'emparent du pouvoir ; d'où , ils construisent des châteaux, protègent des invasions ; ces châteaux sont en bois, puis des forteresses à tours carrées et rondes. Les populations voient dans ces chefs des seigneurs (protection) ; ces hommes ont une assise foncière, un château, une autorité sur la population ; ces hommes constituent leur seigneurie, en y exerçant un pouvoir à l'intérieur, les prérogatives de la puissance publique (justice et police) ; au tout début du 11ème siècle se constituent les premières dynasties de châtelains ; le phénomène se généralise dans toute l'Europe. La seigneurie va devenir le lieu où on exerce le pouvoir. Désormais, il existe de nouvelles répartitions géographiques du pouvoir ; il existe un ordre politique nouveau, qui délaisse le sommet, qui s'organise à la base, autour du château. Mais la seigneurie revêt un double visage ; la seigneurie présente un aspect foncier ; elle est une organisation économique, comme un grand domaine ; elle est le cadre de vie d'une population ; il existe une forme d'organisation de la production agricole. C'est aussi le cadre d'une organisation politique et administrative où le seigneur exerce un pouvoir. II) L'organisation politique de la seigneurie, cadre de l'exercice du pouvoir La seigneurie, quelle qu'elle soit, est toujours une unité de pouvoir, un pouvoir à la fois militaire, financier, et judiciaire. Le pouvoir militaire du seigneur Le pouvoir militaire du seigneur représente le droit de guerre (droit privé), presque illimité. Le droit de guerre, en « droit privé « presque illimité L'armée seigneuriale est conçue dans la perspective des conflits privés ou voisins ; à l'origine, aucune autorité ne peut limiter cette guerre privée. De nos jours, le droit de guerre n'appartient qu'à l'Etat souverain, alors qu'au Moyen-Age, les guerres privées sont légales et appartiennent aux seigneurs. Le seigneur (chef local) dispose d'un pouvoir militaire à plusieurs facettes. Quels sont les justificatifs de la guerre ? La guerre est faite car il y a une sorte de résurgence de la vengeance privée (faida germanique) ; autrement dit, le recours aux armes appartient à tout seigneur quelle que soit son importance, qui veut défendre son droit bafoué, les atteintes portées à ses biens, à sa famille. C'est donc bien une vengeance privée. Ici, le seigneur agit en tant que particulier ; il exerce son droit de vengeance. Mais, le seigneur fait la guerre pour une autre raison : il apparait dans le cadre de son territoire comme le seul protecteur des populations ; c'est lui qui maintient la paix, qui apaise les troubles. Si l'Etat s'effondre, le seigneur est détenteur d'une parcelle de souveraineté. Il protège tous les hommes situés sur son territoire ; il a la garde de sa seigneurie. La guerre se fait aussi si c'est lié à la mentalité de son époque ; la guerre est une source de profit ; c'est une raison d'être. On fait la guerre parce qu'il aime se battre. Bien des conflits n'ont d'autre signification que le désir. Conséquences désastreuses sur les populations sans défense ; mais, la guerre représente un phénomène juridique, soit elle obéit à des règles. Si le seigneur respecte ces règles, on va dire que les meurtres, pillages, etc, tous ces méfaits ne sont que des conséquences du fait juridique qu'est la guerre, et donc ne sont pas punissables. Le droit de guerre réglementé par la coutume La coutume a soumis la guerre privée à des règles. Les règles sont relatives au déroulement du conflit : la guerre n'est légitime qu'à partir du moment où elle a été régulièrement déclarée de la façon suivante : très simple, par défi d'un seigneur envers un vassal, ce qui ne repose sur aucun écrit. La guerre peut être interrompue par une trêve ; mais elle peut aussi cesser définitivement par voie judiciaire (la justice met fin au litige) ; il peut également, dès le Moyen-Age, avoir un traité de paix (écrit), soit un accord résultant d'une convention écrite. Mais le recours au droit n'est pas obligatoire pour mettre fin à une guerre, autrement dit, la fin de la guerre peut résulter de simples faits matériels. Guerres qui concernent l'armée seigneuriale : c'est une armée faite de diversité ; les deux adversaires entrainent derrière eux beaucoup de monde, des gens qui savent se battre ou non ; ils conduisent derrière eux tous les membres de leur lignage. Il existe une étroite solidarité familiale ; tous les parents, jusqu'à un degré lointain, vont à la guerre. Les vassaux impliqués dans le contrat vassaliques s'impliquent aussi ; le seigneur attend de ses vassaux des services militaires. Dans cette guerre vont venir aussi les gens de la famille, les vassaux, mais aussi les hommes libres, les roturiers. En réalité, le seigneur a peu à attendre de ses roturiers, car ils sont des travailleurs de la terre et ne savent pas de battre ; les roturiers seront alors les fantassins pour participer à la guerre défensive ; souvent, leur service militaire se limitera à quelques corvées, quelques services ; peu aptes à la guerre. La guerre privée limitée par l'Eglise Conséquences catastrophiques (atrocités, destructions) ; anarchies (institution organisée). L'Eglise va réagir dans les dernières années du 10ème siècle : des chefs de l'Eglise (évêques, abbés) vont s'émouvoir des conséquences désastreuses de ces guerres : grandes assemblées ecclésiastiques, en Aquitaine, et l'Eglise se rend vite compte que supprimer la guerre, ce n'est pas possible. Alors l'Eglise va essayer de la limiter de deux façons : tout d'abord, en faisant échapper certaines catégories de personnes et de biens à la guerre. On appelle ça la paix de Dieu. Cette institution a été confirmée par le Pape Urbain II en 1095, lorsqu'il a prêché la première croisade (aller se battre hors du territoire français). Il est interdit d'attaquer les hommes d'église (les clercs, les pèlerins) ; interdit d'attaquer les femmes et les enfants, les laboureurs, les marchands. Certains biens et certains lieux sont également protégés : interdiction d'attaquer les établissements ecclésiastiques, les cimetières, les instruments servant au travail de la terre (moulins, instruments agricoles, animaux de laboure). Enfin, la trêve de Dieu : cette mesure est ordonnée pour la première fois en 1027 dans un Concile tenu en Catalogne ; quelle est la signification ? Il est décidé que les hostilités devront être suspendues pendant certaines périodes de l'année. Initialement, interdiction de se battre le dimanche (jour du Seigneur) ; interdiction des combats du mercredi soir au lundi matin ; puis, interdiction durant la période du Carême, la semaine de Pâques, la période Noël. Or, les contrevenants à ces mesures de la paix de Dieu et de la trêve de Dieu s'exposaient à des sanctions rigoureuses, soit l'excommunication. Mais malgré cela, l'Eglise eut du mal à faire respecter ces mesures ; mesures répétées au cours de différents conciles, aux 12e et 13e ; elles eurent le mérite d'exister ; le pouvoir royal renaissant va commencer à prendre le relais de l'Eglise pour imposer sa paix. Finances et police seigneuriale Le seigneur assure la police ; il doit faire le nécessaire pour assurer le bien-être matériel sur son territoire. En matière de police, comme dans les autres domaines, il a supplanté l'Etat. Ainsi, il fait des règlements : il a le pouvoir de ban, de prescrire, de faire des règlements. Il perçoit des prestations en nature. La police seigneuriale Le seigneur peut prendre toute mesure nécessaire à l'administration de la seigneurie. Etant chargé de la police, il exerce donc une mission d'ordre public dans 3 directions : il protège les personnes et les biens (tous ceux qui n'entrent pas dans la hiérarchie féodale, qui ne savent pas se battre, soit les hommes d'église, les paysans, les étrangers, assure la garde des églises situées dans sa seigneurie) ; il crée et entretient l'infrastructure seigneuriale (voies de communication, construit un certain nombre d'installations nécessaires à la population, fours, moulins) ; il a la police du commerce, il fixe à l'intérieur de sa seigneurie, les poids et mesures, délivre les autorisations pour ouvrir un commerce (les très grands seigneurs ont le pouvoir de battre leur monnaie, d'avoir leur atelier monétaire). Tout cela représente pour le seigneur un profit. Finances seigneuriales Le seigneur tire les revenus de la police, grâce à des agents qui sont les prévost ; il a reçu une délégation du seigneur. Les ressources proviennent souvent de la terre, par des loyers ; le seigneur a également des contrat avec ses vassaux et a donc des revenus ; mais à côté de ses revenus, il y a aussi des ressources fiscales (pas d'Etat, pas d'administration fiscale), mais il y a malgré tout des levées de taxes et d'impôts. Le seigneur fait payer sa protection Il a le droit d'aubaine sur les étrangers ; le seigneur a le droit de s'approprier les biens d'un étranger mort sur ces terres (droit d'aubaine). Dans cette société du Moyen-Age, il y a un groupe de juifs qui font du commerce, et sont donc assujettis au paiement de taxes spéciales. Aux 10e et 11e, la majorité de la population paysanne n'est pas libre. On les appelle les serfs, qui sont assujettis à de lourdes charges. Lorsque le seigneur se déplace dans sa seigneurie pour l'inspecter, il dispose d'un droit de réquisition des biens ; il dispose également du droit de gîte chez les habitants. Cette protection, il la fait payer principalement par le prélèvement d'un impôt direct. Cet impôt direct est la taille, qui pèse sur tous les serfs (non-libres) et sur les roturiers (libres), tandis que les nobles et les hommes d'église ne payent pas cette taxe. On peut manger à côté des profits précédents, le produit des amendes prononcées en justice (profits de justice très nombreux). Entretien et les « services publics « de la seigneurie sont sources de profit Premièrement, le seigneur bénéficie d'un travail gratuit ; l'entretien des voies de communication s'effectue sous forme de corvée, des serfs, des roturiers. Le seigneur tire également profit de la circulation des marchandises, de la circulation des personnes, puisqu'il perçoit des péages (droits de passage) , en établissant des barrages sur les ponts, sur les routes, sur les rivières. Le seigneur met un certain nombre de biens à la disposition des habitants ; on dit que le seigneur impose ce que l'on appelle ses « banalités «, en créant dans sa seigneurie, des installations, en utilisant son droit de ban, son pouvoir de prescrire ; le seigneur impose l'utilisation de certains équipements (four obligatoire, moulin obligatoire, pressoir de vigne obligatoire), empêchant toute concurrence, et en tire une redevance. D'où le service public : utilisation d'un service en payant une redevance. Autre banalité, le ban-vin, lorsque le seigneur fixe la date des vendanges, et se réserve pendant un certain temps, après les vendanges, l'exclusivité de la vente du vin. Par un autre ban, il décide du début des moissons. Le seigneur taxe commerçants et artisans Le seigneur est responsable de la police et du commerce, en percevant des redevances de la part des marchands et des artisans qu'il a autorisé à ouvrir une boutique ; à l'occasion des foires et des marchés publics, il lève des taxes de stationnement et d'étalage ; il perçoit des droits sur la vente des marchandises. Le pouvoir judiciaire du seigneur Dans le monde féodal, il existe un grand nombre de juridictions très diverses (justices du roi, justice de l'Eglise, les villes du royaume qui ont des juridictions spécifiques) ; justice dans la seigneurie. La justice dans la seigneurie revêt de nombreuses facettes et la procédure judiciaire revêt un caractère très archaïque. Les catégories de justice Deux catégories ont un caractère privé : Justice que l'on appelle la justice féodale liée au contrat vassalique ; cette justice féodale est compétente pour juger certains litiges qui s'élèvent entre les chefs militaires à propos du travail vassalique. Cette justice n'est pas une justice permanente ; cette justice-là n'est convoquée que lorsqu'un litige se présente ; autour du seigneur qui préside, siège les militaires et les vassaux. Un litige sera jugé pour les vassaux par le seigneur ; on pratique le jugement par les pairs, il s'agit d'un litige relatif au contrat vassalique. Justice foncière liée au contrat passé entre le seigneur et ses paysans libres ; c'est un litige qui s'élève à propos de la terre qui a été concédé aux paysans libres. Justice seigneuriale : justice qui découle des puissances publiques du seigneur ; c'est la justice de l'Etat qui est entre les mains du seigneur. Cette justice s'étend à tous les sujets de la seigneurie, et la compétence du seigneur est presque illimitée. Seuls les hommes d'église échappent à la justice du seigneur. Donc le seigneur est compétent pour juger toutes les catégories d'affaires (matière civile, matière pénale). Mais il faut ajouter que tous les seigneurs n'ont pas les mêmes pouvoirs en matière de justice puisqu'on fait la distinction entre la Haute justice et la Basse justice. Haute justice : la justice qui appartient aux seigneurs d'une certaine importance, et c'est une justice qui, en matière pénale, juge les affaires les plus graves, les affaires qui sont assorties de sanctions très nobles. En matière civile, la Haut justice va juger les litiges les plus importants ; la Haute justice a toujours des signes emblématiques (seigneur haut justicier). Seul le seigneur haut justicier possède le carcan (collier de fer attaché à un poteau). Le seigneur haut justicier possède également le pilori. Le délinquant est tout simplement exposé publiquement. Il possède également les instruments de mise à mort, de pendaison, les fourches patibulaires (pendaison de plusieurs nombreuses). Le seigneur bas justicier va juger les petites affaires. Une procédure féodale archaïque  Le seigneur délègue sa compétence à son agent. La procédure est entièrement orale (pas de jurisprudence écrite) ; lorsqu'on veut se référer à un jugement antérieur, on doit avoir recours à des témoins qui ont participé à des jugements précédents. La procédure est également formaliste, soit que les parties au procès doivent se présenter en personne devant le tribunal ; la représentation judiciaire n'est pas admise. D'autre part, les parties au procès doivent utiliser sans erreur devant le juge, des formules consacrées par l'usage, soit les parties au procès doivent prononcer certaines paroles sans erreur ; avant d'aller au procès, certaines formules doivent être connues par coeur. Une seule erreur peut faire perdre le procès. Autre caractère archaïque, c'est une procédure à caractère accusatoire : il appartient à l'accusé d'apporter la preuve de son innocence, à l'inverse des procédures inquisitoires des sociétés modernes. Le mode de preuve est le duel judiciaire, ou la preuve par bataille : dès le début du procès, une des parties provoque l'autre en duel ; la solution du procès dépend de l'issue de l'épreuve. Si l'accusé remporte le combat, alors il est innocent car Dieu l'a sauvé et blanchi (ordalie bilatérale). Mais dans certaines coutumes subsistent des ordalies unilatérales, telle l'ordalie de l'eau ou l'ordalie au fer rouge. Chaque seigneur est souverain ; la décision de justice rendue par le seigneur est toujours rendue en premier et dernier ressort. Dans cette société du 10e et 12e siècle, l'appel n'existe pas. Il existe un système de preuves irrationnel (ordalie) qui fait appel à Dieu ; on ne saurait faire appel d'une décision rendue par Dieu. Le seigneur détient les droits de la puissance publique. Il détient des droits de puissance publique tombés dans son patrimoine ; dans cette société, on assiste au triomphe de la primauté seigneuriale ; cependant, même si on assiste au triomphe de la primauté seigneuriale, dans le monde féodal, l'institution royale n'a pas disparue (le roi existe toujours). L'institution royale est très affaiblie. Section 2 : Le faible poids de l'autorité royale La monarchie capétienne subit à ses débuts la contamination du système féodal. Le pouvoir royal, très faible, a beaucoup de mal à dépasser la féodalité. Hugues Capet est ni plus, ni moins un seigneur. Le roi n'est pas à la tête d'un Etat car la France est très divisée géographiquement. Dans ces conditions, deux questions se posent : quel est l'étendue du pouvoir royal ? Le roi parvient-il à dominer le monde féodal ? La faible assise du pouvoir royal. Le roi est installé sur un petit domaine royal qu'il peine à maitriser ; mais s'il y parvient, l'emprise du roi sur le royaume de France n'a pas vraiment d'existence. Le roi et son domaine Les royaumes carolingiens se sont décomposés ; les rois du 9ème siècle n'ont pas cessé de dilapider leur royaume. Ces royaumes se sont totalement décomposés, si bien qu'il reste bien peu de choses au premier roi capétien, et le domaine des premiers capétiens est tout simplement une principauté territoriale qui est géographiquement étirée, et formée de seigneuries agglomérées. Le domaine royal est donc exigu, mais il présente d'autres éléments de faiblesse, à savoir que ce domaine est morcelé, pas d'un seul tenant : à l'intérieur de ce domaine royal existe des seigneuries indépendantes, des hommes qui sont relativement puissants, et qui n'hésitent pas à défier le roi, à provoquer le roi (Paris et Orléans). Ce domaine présente une autre faiblesse, à savoir qu'il est inséré dans un étau, par des seigneuries majeures qui sont alors des rivaux, dont le plus important est le duché de Normandie ; ainsi décrit, ce domaine parait bien plus faible que certains grands seigneurs de France (le roi est plus faible que le duc d'Aquitaine). Le roi exerce une autorité sur les terres de son domaine. Il y a tout de même des seigneurs qui viennent faire écran à son autorité. Le roi et le royaume de France Le roi peut-il étendre son emprise dans une certaine mesure, en dehors de son domaine ? Peut-il exercer son pouvoir de ban (prescrire, faire la loi), qui était jadis celui de l'empereur carolingien ; peut-il imposer des mesures à tous en dehors de son domaine ? L'action royale n'a pas cessé de reculer entre 987 et le début du XIIe siècle. Dès le 10e siècle, certaines régions comme la Bretagne, l'Aquitaine, la Gascogne, les régions méridionales de la France, toutes ces régions-là ignorent toute puissance royale. Autrement dit, pour toutes ces régions-là, la puissance royale est nulle, et finalement, au terme de resserrements successifs, il est vrai que le roi ne peut dépasser le domaine royal. Au cours des 1ers siècles capétiens, on peut parler de déclin de l'autorité royale. Lorsque le roi Philippe Ier sera sacré en 1059, aucun grands seigneurs ne sera présent au sacre. Ce recul de l'autorité royale aura quand même un effet positif, il permettra au roi de mettre de l'ordre dans son domaine. Lorsqu'il aura mis de l'ordre dans son domaine, ce roi pourra repartir à la conquête de l'autorité. En théorie, le roi conserve ses prérogatives traditionnelles, militaires, judiciaires, législatives. La réalité est que ces pouvoirs sont vidés de leur contenu, sont inexistants, en manque de moyens. Ce qui sera qualifié un jour de souveraineté n'existe pas. Donc on a un roi à la tête d'un petit domaine, un royaume au limites mouvantes, changeantes, mal établie. Le roi ne peut pas commander dans ce royaume. Il ne peut pas s'imposer à des grands seigneurs totalement indépendants de lui. La question est de savoir dans quelle mesure ce roi peut-il jouer de sa situation de seigneur féodal  pour s'imposer, pour soumettre la hiérarchie féodale ? Le roi et la hiérarchie féodale Le roi n'est pas un chef d'Etat mais un seigneur comme les autres. Il possède donc des vassaux : qui sont-ils ? Le roi parvient-il à dominer le système féodal ? Dans quelle mesure peut-il devenir le premier de tous ? La puissance féodale du roi en France mineure  La France mineure correspond au domaine royal, à un ensemble de seigneuries aussi bien dans le domaine qu'indépendantes. Dans cette zone, plus le roi est proche géographiquement, plus les liens vassaliques sont nombreux et respectés. Ainsi, à l'intérieur du domaine proprement dit, le roi a de nombreux vassaux sur lesquels il a une emprise directe puisque le roi passe des contrats vassaliques jusque dans la petite aristocratie. Dans les intervalles du domaine morcelé, le roi parvient par le biais du contrat vassalique à s'attacher des vassaux. De même qu'il parvient à avoir des vassaux en marge du domaine. Grâce aux contrats féodaux et vassaliques, le roi parvient à dominer une grosse partie de l'Ile-de-France. Mais plus on s'éloigne, plus le nombre de vassaux diminue, plus le nombre de contrats vassaliques diminue. Des rapports juridiques en France mineure Des rapports lâches entre le roi et les princes territoriaux. En théorie, selon le droit féodal, les princes territoriaux (ducs, comtes), doivent prêter hommage au roi et doivent être ses vassaux puisque le roi est au sommet de la hiérarchie féodale. En réalité, la plupart de ces seigneurs sont éloignés du roi, ne viennent jamais à la cour, et ces seigneurs refusent tout simplement de prêter hommage. Au tout début du 12e siècle, le roi développe une politique visant à multiplier les contrats vassaliques à son profit, essaie d'obtenir l'hommage des grands. On a là l'annonce d'un certain redémarrage. Au début du 12e, il existe d'autres signes qui annoncent l'ascension capétienne. En effet, si l'affaiblissement du roi est réel (politique et géographique), si les structures étatiques ont complètement disparu, il faut quand même souligner que le roi est un seigneur, mais il n'est pas un seigneur comme les autres. L'institution royale demeure avec un prince, un roi, qui est le continuateur de la tradition carolingienne ; les premiers temps capétiens sont porteurs du renouveau futur de l'Etat. Section 3 : L'aube d'un renouveau de l'Etat L'institution royale est très faible ; l'institution royale demeure avec des éléments de force, de faiblesse qui favoriseront l'essor de la monarchie. Le roi a sous les yeux des exemples, en particulier l'exemple de son allié de toujours, l'Eglise. L'Eglise offre un modèle d'organisation centralisée, une force centralisée. Les structures de l'Eglise offriront au roi des inspirations dans sa politique de reconstruction. Le roi trouve aussi des modèles chez certains de ses puissants voisins, chez le Duc de Normandie, dont la seigneurie est très bien organisée. Le roi saura habilement tirer parti des querelles fréquentes à l'intérieur des grandes dynasties féodales. Il entretiendra les révoltes chez ses rivaux ; parallèlement, il remet de l'ordre dans son domaine. Le domaine est petit, étouffé, mais on peut aussi dire que le domaine royal occupe une situation exceptionnelle, il est au centre du pays. Il est au milieu des principautés, à la rencontre des deux grands fleuves qui procurent la richesse. C'est un avantage considérable, d'autant que figure l'ancienne Lutèce, Paris. Or, Paris est appelé à un bel avenir. Paris devient au 12e le centre administratif du royaume, puisque jusqu'au 12e, les rois étaient itinérants, se déplaçaient avec leur cour. Au 12e, le roi Louis VI se fixe à Paris. Il existe des éléments qui vont favoriser les progrès de la hiérarchie ; mais ces éléments ne suffisent à expliquer ces progrès. L'institution royale repose sur des bases solides, sur des éléments de droit, qui en font la solidité. Quels sont les fondements juridiques qui font la force de la monarchie ? Si les premiers capétiens n'ont qu'un petit domaine, ils possèdent des avantages sur leur voisins dont ils sauront tirer profit. Les rois du 12e vont rapporter des succès significatifs sur la féodalité (fondements juridiques). Le roi et l'idéologie royale Cette idéologie royale s'appuie sur une idéologie du pouvoir qui constitue l'essentiel du legs carolingien, et elle repose sur un mode de transmission du pouvoir. Ce mode de transmission du pouvoir apparait comme le premier geste politique, habile, du roi capétien. Une conception du pouvoir héritée des carolingiens Dans la mentalité du 10e, le roi reste dans l'esprit de tous, le représentant de Dieu (vicaire), choisi par Dieu, celui dont les prières attirent les bénédictions du Ciel. Dans ce contexte existe un aspect visible important, soit le sacre royal. C'est un élément grave et grandiose. Au sacre correspond un cérémonial très important ; le sacre produit des effets très importants. Premièrement, le roi sacré. Le cérémonial du sacre se déroule comme au temps carolingien, en présence d'une foule nombreuse et de nombreux ecclésiastiques (prélats, évêques), dont l'archevêque de Reims, qui va sacrer le roi. La cérémonie du sacre (cérémonial constant) obéit à un rituel fixe très tôt. Tout d'abord, le roi fait une promesse. Il fait la promesse de faire régner la paix, l'ordre, d'assurer la justice dans son royaume, de défendre le roi, de respecter l'Eglise. Les evêques et les laïcs approuvent la promesse royale ; le roi reçoit l'onction comme un prélat : sur certaines parties du corps du roi, l'archevêque va répandre de l'huile sainte sur le front, les mains, les pieds, tandis que les assistantes chantent des psaumes. Dans le cadre de cette cérémonie religieuse, le roi ayant reçu l'onction est loin du seigneur, il est devenu l'élu de Dieu. Le roi va recevoir des mains de l'archevêque les insignes de la fonction. Le roi reçoit un anneau qui symbolise l'union de la royauté avec son peuple ; il reçoit une épée qui servira à combattre les ennemis de la foi. Il reçoit aussi le sceptre royal, symbole de la puissance ; il reçoit aussi cet objet en forme de main, la main de justice, qui matérialise la fonction de justice du roi. Il reçoit également la couronne. Dans le cadre de cette cérémonie religieuse se déroule une messe ; à la suite de cette cérémonie, les hommes de l'aristocratie présents prêtent serment de fidélité, hommage au nouveau roi. Ce roi est sacré ; il devient un prince différent des autres princes territoriaux ; il devient un roi prêtre, celui qui représente Dieu sur terre, chargé d'une mission sacerdotale. Ce personnage élu de Dieu est roi par la grâce de Dieu, et ça lui confère un prestige immense auprès de son peuple. Il a un pouvoir surnaturel. Chacun est persuadé que ce roi prêtre sur qui nul ne peut porter la main, peut faire des miracles (comme le Christ) ; on pense que ce pouvoir supérieur lui confère celui de guérir par simples touchers certains malades atteints d'une maladie très répandue, la maladie des écrouelles (inflammation tuberculeuse atteignant les ganglions lymphatiques du cou). Il faut évoquer la fonction royale. La mission du roi sacré se situe dans la tradition carolingienne. Les théologiens de la fin du 10e véhiculent la conception théocratique du pouvoir : le roi est élu de Dieu, il assure certaines missions et notamment le pouvoir militaire partout ou cela est nécessaire et la défense militaire contre tout ennemi extérieur. En cas de péril grave, il peut lever des armées dans tout le royaume. Il a également le pouvoir de s'opposer aux entreprises militaires des grands féodaux. Etant roi sacré, il assure la protection des églises, envers lesquelles il va se montrer dangereux ; il va faire en sorte que le droit de l'Eglise soit bien appliqué. C'est aussi un justicier ; il doit veiller à ce que les droits de chacun soient bien respectés. Autrement dit, le roi représentant de Dieu sur terre, doit agir en conformité à la promesse de son sacre. Cette mission du roi inscrite dans la promesse du sacre ne correspond pas à la réalité parce que, dans le domaine du royaume morcelé, les pouvoirs militaires, judiciaires ou législatifs, sont bien difficiles à mettre en oeuvre. Il existe une conscience collective ; chacun dans le royaume, qu'il soit humble, seigneur, reconnait le charisme découlant du sacre du roi, cette prééminence royale. S'il existe une conscience collective, il existe aussi une conscience royale, et il y a chez le roi capétien, des vues très porteuses pour l'avenir. Le roi et son entourage ecclésiastique auront la ferme volonté de doter le royaume de structures efficaces qui permettront sur le long terme de reconstruire l'Etat. Cela veut dire que cette idéologie prometteuse fera un jour du roi un chef d'Etat, gardien de son royaume, protecteur, et juge, et un chef d'autant plus solide que ces idéologues du 10e/11e auront magnifié cette vocation supérieure du roi. Une politique dynastique habile des premiers capétiens En 987, un homme est élu roi (Hugues Capet) , et va donner son nom aux rois de la 3ème capétiens. Les contemporains n'ont pas donné une signification particulière à cet évènement. Il est élu car il aurait pu être le dernier carolingien, mais ceux-ci furent battus car Hugues Capet était soutenu par l'archevêque de Reims, Adalberon de Reims. Mais l'évènement est passé presque inaperçu. Avec Hugues Capet, pourtant, s'ouvre le temps d'une grande dynastie, et la naissance du grande dynastie. La naissance de cette dynastie découle d'un acte politique majeur, puisque Hugues Capet a modifié les règles de transmission du pouvoir ; il existe un nouveau mode de transmission du pouvoir, de dévolution, qui découle d'une véritable stratégie assurant sa pérennité. Les écueils de la transmission du pouvoir L'élection a pour inconvénient d'affaiblir l'institution royale car elle est remise entre les mains des grands de l'aristocratie. Eviter les inconvénients de l'hérédité : si ce roi meurt en laissant plusieurs fils, le danger réside dans la politique de partage. Cette situation de partage a eu des effets catastrophiques sous les deux dynasties précédentes. Les nouvelles règles de la transmission du pouvoir Le nouveau roi introduit le principe héréditaire mais pas n'importe comment : il fait élire et sacrer son fils (Robert le Pieu), quelques mois après sa propre élection. Lorsqu'arrive le règne de Philippe Auguste (1180), ce dernier jugea inutile de faire élire et sacrer son fils par anticipation, car ce n'était plus la peine, puisque le principe de l'hérédité l'avait emporté. Dès le règne d'Hugues Capet sont établis côte à côte deux souverains égaux (un vieux et un jeune, le père et le fils), et figurer tous deux dans les actes juridiques. Hugues Capet introduit la règle de primogéniture : à partir de lui, l'ainé des fils est associé ; c'est une pratique qui va devenir une règle coutumière. L'élection de 987 fait naitre une dynastie , la dynastie capétienne. Au-delà des règles évoquées de primogéniture, de l'admission progressive du principe héréditaire, il faut ajouter que la dynastie capétienne va être particulièrement chanceuse, car pendant 3 siècles eurent toujours des fils, ce qui leur éviter de se poser le problème (« miracle capétien «). C'est ce fils ainé qui aura la charge de reconstruire l'Etat. Le roi et ses premiers succès sur la féodalité La politique royale des premiers rois capétiens connait deux orientations. La première est d'assoir sa situation territoriale, mais aussi assurer sa position face à la hiérarchie féodale. Le premier objectif des capétiens est d'assurer leur autorité à l'intérieur du domaine. En 30 ans, le roi Louis VI parvient à accomplir une oeuvre de pacification efficace ; à la mort de son père, son fils Louis VII est un prince territorial incontesté dans son domaine ; il est à la tête d'un domaine bien policé. Au début du 12e, la monarchie a désormais un véritable noyau de puissance. A partir de ce domaine, la monarchie va peu à peu reconstruire, reprendre en main le royaume de France. Deuxièmement, les capétiens souhaitent aussi faire triompher le prince de suzeraineté partout dans le royaume ; ils veulent avoir une prééminence incontestée au sein de ce système féodal. A partir de 1108, Louis VI, les efforts entrepris apportent quelques résultats. Le roi obtient l'hommage du comte de Flandre. Suzerain : inscrit dans la hiérarchie féodale par le contrat vassalique Souverain : inscrit pour tous les sujets. En 1151, le roi d'Angleterre Henri II (duc de Normandie) accepte de prêter hommage à Louis VII. Cela dit, le plus souvent, le roi doit composer avec les seigneurs ; le roi doit se soumettre aux exigences des grands féodaux. Le temps du pouvoir royal retrouvé va s'ouvrir plus tard avec le règne de Philippe Auguste. Dans ce monde féodal, le pouvoir n'est plus en mesure d'assumer ses missions majeures, en particulier l'élaboration de la règle de droit. A l'époque, quelles sont les modes de formation du droit si le roi est exclu ? Quelles sont les sources du droit de la fin du 10e au milieu du 12e ? CHAPITRE 2 : UN ORDRE JURIDIQUE DIVERSIFIE Sur ce territoire morcelé, il ne peut y avoir un seul droit applicable à tous les sujets, émanant d'une seule autorité. Dans cette période de confusion, de guerre privée, qu'en est-il du droit ? Le droit n'a pas disparu. Le droit ne dépend plus de l'Etat pour son existence. La création du droit résulte essentiellement de pratiques locales et d'habitudes variables d'une région à l'autre, ; au morcellement territorial correspond un morcellement coutumier (Section 1) ; autant dire que la législation écrite très importante à l'époque de l'empire romain est très rare (Section 2) ; dans la 1ère moitié du 12e apparaissent les premiers signes de renaissance d'un droit de l'Etat futur. Section 1 : Le morcellement coutumier Au 10e, les lois du roi ont disparu et il n'existe plus guère de techniciens du droit. Alors cette absence de loi, de techniciens de la loi, laisse un vide. Le droit va venir de la base : il s'agit de la coutume. La coutume est une notion délicate (I) ; à l'absence d'un pouvoir fort, le champ est vaste. La coutume va être retrouvée dans tous les aspects de la vie juridique, du droit (II) Aux 11e et 12e, nous verrons que la coutume va connaitre ses premières manifestations écrites (sources documentaires qui nous permettent de connaitre la coutume) (III) Les caractères de la coutume La coutume se définit comme un usage juridique de formations spontanées, un usage accepté par tout le groupe social intéressé. Un usage non écrit émanant de la base A l'époque considérée, il n'existait pas de lois écrites. Dans toute société, il faut organiser la vie du groupe. Les hommes imaginent des comportements, des pratiques. Ces comportements admis par le groupe vont devenir le cadre juridique, un cadre à l'intérieur duquel se structurent les relations sociales. La coutume nait d'une série d'actes, d'actes publics qui vont concerner tout le groupe, et nait dans un état paisible, pas dans la violence. Si les usages s'imposent au groupe social, c'est qu'ils sont voulus par le groupe. S'il n'y a pas d'adhésion du groupe, la coutume n'existe pas. Pour que cet usage existe véritablement, il faut qu'il soit répété régulièrement. Le temps créateur de la coutume Le temps est créateur ; le temps suscite des habitudes, il rythme la vie, il impose des modes vestimentaires, des modes alimentaires, le temps peut créer des relations. Le fait de rompre n'est pas sanctionné juridiquement. Le temps est aussi créateur de droit, il créé la coutume ; on passe graduellement du respect des usages à l'autorité de la coutume. Les actes fondateurs de la coutume doivent avoir été répétés pendant un certain temps, depuis si longtemps qu'on n'a pas le souvenir du contraire : c'est la coutume immémoriale (ancêtres). La vraie coutume est l'usage dont on ne sait depuis quand il existe et dont on a constaté l'application ; on ne sait pas comment il s'est formé. En pratique, de nombreux usages médiévaux deviennent coutume car les parties qui les invoquent se mettent d'accord pour dire qu'il y a coutume ; la coutume n'est pas seulement l'usage immémorial ; les populations intéressées peuvent faire une convention pour créer une coutume. Enfin, on peut dire qu'à toute époque, le temps est créateur de droit. Malgré la pléthore législative, des coutumes se forment dans diverses parties du droit positif. Pour certains juristes, la coutume ne peut naitre que de la volonté du législateur (juriste qui nient toute existence de la coutume). La doctrine marxiste ne reconnait que le droit venant de l'Etat. La coutume est la source exclusive du droit. Usage non écrit émanant de la base ; le temps créateur. Un usage obligatoire Le groupe concerné donne sa force obligatoire à la coutume ; en répétant un usage de façon identique, le groupe manifeste son adhésion à l'usage, et donc, en le répétant pendant longtemps, il donne une force obligatoire à la coutume (coutume du groupe à laquelle chacun doit obéir. Personne ne peut déroger sous peine de sanction. La coutume est forcément bonne puisque les membres du groupe l'ont voulue, et donc les membres du groupe sont liés par la coutume ; ils sont liés, mais aussi les générations futures sont liées par la coutume. L'homme du Moyen-Age accepte cette rigidité de la coutume, alors que l'homme du Moyen-Age éprouve une certaine aversion pour les règles nouvelles. La coutume a aussi un caractère souple et mobile. Le groupe créateur de la coutume peut favoriser l'évolution de la coutume, soit qu'au bout d'un certain temps, il peut l'adapter à ses nouveaux besoins. Puis, le groupe peut considérer que la coutume est devenue inutile : il peut la faire disparaitre. La question posée est celle de l'application du droit, de la coutume. Que va-t-il se passer lorsque le juge constate qu'une coutume est injuste et déraisonnable ? Le juge ne peut écarter l'application de la coutume. Au Moyen-Age, il appartiendra au roi de juger de la qualité de la coutume ; le roi, en prenant de la force, aura le pouvoir d'écarter les mauvaises coutumes. En définitive, la coutume est un ensemble d'usage d'ordre juridique qui ont acquis force obligatoire dans un groupe socio-politique donné, par la répétition d'actes publics et paisibles pendant un laps de temps relativement long. Cette définition met en relief deux éléments constitutifs de la coutume : élément objectif, exercice d'une pratique constante, élément subjectif qui réside dans cette acceptation par le groupe, qui tient la pratique pour obligatoire. Un domaine juridique de la coutume dans un cadre géographique étroit. La coutume se développe dans une ère géographique ; la coutume régit les questions les plus variés, embrasse les principaux aspects du droit. La géographie de la coutume Les coutumes sont très nombreuses ; cela tient à l'extrême morcellement territorial, au cloisonnement des seigneuries. Le ressort de la coutume est souvent la seigneurie ; mais il peut y avoir, dans une même seigneurie, des coutumes diverses, et d'autres coutumes peuvent s'appliquer à plusieurs seigneuries, à une région entière. On fait donc une distinction : on dit qu'il existe des coutumes générales, des coutumes particulières. Coutumes générales : s'appliquent à un vaste ressort territorial (à toute une province, à une région entière, à une principauté féodale, à l'ensemble du domaine royal). Coutumes particulières : s'appliquent à une portion de seigneurie, à une ville, à un village, à un hameau (donc très nombreuses). Le résultat est qu'il existe un enchevêtrement des coutumes ; lorsqu'on parle de la géographie de la coutume, on est face à une réalité extrêmement complexe. Domaine de la coutume Régi des relations de pouvoir dans cette société, entre le seigneur et ses hommes ; elle apparait comme un frein au pouvoir de ban du seigneur. Elle est un frein à l'arbitraire. En ce qui concerne le prélèvement des taxes, l'exigence des corvées, la coutume établit un véritable équilibre entre ce qui peut être demandé par le seigneur, et ce qu'ils peuvent lui donner. Le domaine véritable de la coutume, c'est le droit privé, autrement dit, le statut de l'individu dans cette société est défini par la coutume. C'est la coutume qui détermine la condition de noble, de paysan libre (roturier), de paysan non-libre (serf) ; elle détermine la condition juridique des individus sous tous les aspects tels que le droit privé actuel : le mariage, la filiation, les incapacités, régimes matrimoniaux, successions. C'est la coutume qui fixe le régime des terres, des contrats. C'est elle qui organise les rapports féodaux, les obligations nées du contrat. Le domaine est vaste ; l'ensemble du phénomène est développé. Les premières sources documentaires de la coutume Par quels moyens peut-on les connaitre aujourd'hui ? Pour la période la plus ancienne, on possède des conventions passées entre particuliers, qualifiées de chartes, d'actes, qui, entre le 10e et le 12e, deviennent de plus en plus nombreux. Ce sont alors des actes notariés, des actes vassaliques. Ils existent sur parchemin, mais le plus souvent, ces actes ont été recopiés sur des registres, et généralement, ils ont été recopiés sur des registres d'origine ecclésiastiques, les cartulaires, comportant un inventaire de biens et les coutumes des rédacteurs. Egalement, des documents plus généraux, notamment des chartes de ville, des statuts municipaux ; à un moment donné, le roi ou tel seigneur va accorder des privilèges à telle ou telle ville. La plupart de ces privilèges mis par écrit sont des confirmations d'un régime antérieur, d'un régime qui avait été créé par la coutume. Ces chartes existent pour certaines elles au 11e, mais elles se répandent surtout au 12e. L'Europe vit tout l'autorité de la coutume, créatrice d'un droit dont la justification est l'ancienneté ; ce droit coutumier est une sorte de relais entre Rome et les écoles médiévales (en défaillance du pouvoir). Dans ce monde, la législation écrite bien peu de place. Section 2 : La rareté de la législation écrite Le pouvoir normatif du droit ne peut pas s'exprimer réellement et le droit romain est assez méconnu à cette époque. Un pouvoir normatif vide de contenu Le roi est le continuateur des carolingiens, et donc, en théorie, le droit conserve la majesté de commandement, et par conséquent il conserve le pouvoir normatif. En pratique, c'est très différent, il n'a pas les moyens d'imposer ses décisions, puisque on a vu qu'il ne peut pas dépasser les limites du domaine. Il est gardien de la coutume. Un royaume sans législateur Avec l'émiettement du pouvoir carolingien, la loi a disparu ; la loi faisait le roi. Cependant, même si elle a disparu, le souvenir de la loi ancienne demeure surtout, le souvenir de la loi romaine. Lorsque les germains ont envahi la Gaule, il y avait plusieurs peuples, dont les Wisigoths, qui ont occupé l'Aquitaine pendant quelques temps. Au 5e siècle, roi des Wisigoths, Alaric, a ordonné la mise par écrit de la loi des Wisigoths, de leurs coutumes. Mais ces coutumes mises par écrit ont été imprégnées du droit romain existant encore. Dans la loi des Wisigoths mise en application en écrite et une loi écrite composé de droit barbare et de droit romain, il s'agit du bréviaire d'Alaric écrit à Aire-sur-Adour. L'empereur Justinien a également fait faire une compilation du droit romain. Ce travail reste dans les mémoires. Il n'existe plus de lois nouvelles. Il n'y a plus de législation royale, soit qu'il n'y a plus de règles générales, de règles impersonnelles applicables à l'ensemble du royaume, à l'ensemble de la population. Il n'y a même plus de règles applicables à l'ensemble d'un groupe social déterminé. Le roi capétien du 11e et les princes territoriaux ne formulent plus de règles qui sont de l'essence de la loi ; leurs actes ont une portée réduite. Leurs actes sont simplement des chartes qui ne visent que des intérêts particuliers. Les bénéficiaires de ces chartes sont parfois des individus isolés ; le plus souvent, les bénéficiaires sont des communautés ecclésiastiques : le roi fait rédiger un acte de donation au profit d'une abbaye, un acte d'exemption de charges au profit d'un établissement ecclésiastique. Les rois et les grands seigneurs prennent aussi des règlements de police applicables dans un cadre géographique étroit, dans le cadre de leur seigneuries ou de leur petit domaine royal. Le roi a quand même un autre pouvoir, le roi, gardien de la coutume. Le roi, gardien de la coutume La coutume s'impose à tous, y compris au roi. Le roi est gardien de la coutume. Souvent, le roi confirme des coutumes existantes. Une communauté s'adresse à lui. Le roi confirme certaines coutumes par écrit. Il fait rédiger une charte de confirmation des coutumes d'un groupe, d'une église, d'une ville. Le roi peut avoir, en matière de droit coutumier, un rôle actif, ça veut dire qu'il peut mettre fin à une coutume déraisonnable, qu'il juge mauvaise. Dès qu'il juge qu'une coutume est mauvaise, il peut y mettre fin. Il arrive aussi que le roi puisse prendre des mesures dérogatoires à la coutume existante, en remplaçant une mesure par une autre. Le pouvoir normatif du roi va renaitre peu à peu lorsque le roi constatera que dans tel ou tel domaine de la coutume, il existe un vide juridique. Face à des situations nouvelles, à des besoins nouveaux, le roi va compléter la coutume. Jusqu'au 12e, tout cela représente bien peu de choses, un royaume sans législateur, un roi seulement gardien de la coutume. Le roi n'a pas encore la capacité de faire la loi. Le droit romain oublié Dans le royaume de France, on a oublié le droit romain ; évidemment, lorsqu'on franchit les Alpes, en Italie, le droit romain n'a jamais été totalement oublié. Certains érudits ont toujours étudié le droit romain. On peut même penser que, en Italie, certaines écoles monastiques ont continué à enseigner le droit romain. Partout en Europe, on méconnait ce droit. La décadence de ce droit est quasi-totale. Jusqu'au 11e, on connait un texte du droit romain en France, soit le Code théodosien, Code qui n'est connu que dans le midi, dans un cadre géographique étroit, connu en Espagne, quasiment oublié. Il faut aussi ajouter que ce droit, qui s'inscrit dans un cadre géographique étroit, le Midi, n'est plus le droit romain antique, c'est un droit qui a perdu de sa pureté, car il a été altéré au fil des siècles par des emprunts au droit germanique. On a plus de droit romain pur. De toute manière, partout en Europe, le droit repose sur la coutume. Partout, le droit coutumier prévaut et ne laisse que peu de place au droit écrit, et la coutume, qui est partout, constitue un véritable obstacle, à la renaissance du droit écrit et du droit romain. Il faut tout de même dire que le droit romain, présent au Midi, n'est pas totalement absent car l'Eglise veille sur le droit romain en intégrant dans son droit canonique des règles romaines. L'Eglise veille sur ce précieux héritage, héritage conservé à l'abri des monastères. Les hommes d'Eglise érudits continuent à étudier ce droit en attendant des conditions favorables à la diffusion de la culture juridique romaine antique, et ce droit est préservé à l'abri des monastères. Il se passe en matière de droit ce qui se passe en matière de pouvoir. Au début du XIIe, on perçoit des signes annonciateurs du renouveau. Section 3 : Les signes annonciateurs d'un renouveau législatif Vers le milieu du XIIe siècle, le roi édicte quelques mesures à portée générale, de façon très discrète. Puis, apparaissent aussi des signes annonciateurs, précurseurs d'une renaissance du droit romain, et dans le même temps, l'Eglise continue à parfaire son droit. Les premières apparitions d'un pouvoir normatif royal Initialement, les règlements royaux ne contenaient que des dispositions de police rurale (règlements pour fixer la date des moissons). Ces mesures de police ne dépassaient pas les cadres du domaine. Dans la seconde moitié du XIe siècle, le roi Philippe Ier, a la prétention de faire la loi dans tout le royaume, mais, réalité, c'est une déclaration royale, ambitieuse, et peu réaliste, non suivie d'effets, et le roi reste ce qu'il a été depuis des siècles. Avec son fils Louis VI, au début du XIIe siècle, la royauté connait un certain réveil, grâce au conseiller royal, le moine SUGER, un homme politique qui va oeuvrer au développement de l'autorité royale. Seulement, cette époque de Louis VI n'a pas laissé de loi générale applicable à l'ensemble du royale ; sous le règne de Louis VII, on commence à trouver quelques manifestations d'un pouvoir législatif royal retrouvé, et ces règlements royaux applicables à tous, portent un nom (pas de loi, pas d'ordonnance...) : ce sont des établissements, des textes de portée générale qui établissent des règles nouvelles. En vérité, pour le règne de Louis VII, il y en a bien peu. On cite souvent un établissement de 1155, dont un texte rédigé au nom du roi, un texte assez important puisqu'il décrète une paix de 10 ans dans tout le royaume en faveur des églises, des marchands, des laboureurs. Mais il faut quand même dire que, pour l'heure, le pouvoir normatif royal demeure très limité. Les grands seigneurs, les grands princes territoriaux, agissent comme le roi et tentent de s'ériger comme le roi, veulent faire des établissements chez eux. Pour le roi, la tâche est rude, compliquée, tout comme pour les grands princes territoriaux qui veulent imposer la loi chez eux. On est alors dans un monde morcelé, dans un monde féodalisé. Par conséquent, lorsque le roi veut faire la loi, pour que le texte nouveau soit applicable, il lui faut l'adhésion de ses vassaux directs, et c'est parfois compliqué d'obtenir l'adhésion de l'aristocratie qui entoure le roi, autrement dit, faire appliquer un texte, c'est compliqué car cela passe toujours par des consultations des grands de l'aristocratie ; cela passe par des négociations difficiles qui peuvent déboucher sur un accord politique pour faire arriver à faire appliquer un établissement royal. Les signes précurseurs de la renaissance du droit romain Au 10e et 11e, le droit romain est pratique ignoré. A la fin du 11e apparaissent les premiers signes de la renaissance du droit romain et ce mouvement commence en Italie, et au 12e, ce mouvement gagnera la France. Comment est né le droit romain ? Cette renaissance provient du développement commercial des villes d'Italie du Nord ; ces villes vont connaitre une grande fortune au Moyen-Age (Pise, Genes, Venise), des villes qui ont besoin, pour leurs affaires, d'un droit -commercial- élaboré, davantage que le droit coutumier. Le modèle le plus parfait de cohérence est le droit romain. Le centre de la renaissance du droit romain, Bologne, qui se trouve au Sud-Ouest du Venise. La prééminence de Bologne, qui va devenir le centre de renaissance du droit romain, vient de son heureuse prééminence géographique. Dans cette ville, va enseigner un maitre remarquable qui aura des disciples, qui répandront les doctrines de ce maitre en Europe : il s'agit de Irnerius. Il est le fondateur de l'école de Bologne. Il enseignait, était avocat, était juge, et va enseigner le droit romain pendant longtemps, entre 1088 et 1125. Il enseigne alors qu'on vient de redécouvrir le Digeste de Justinien, retrouvé à Pise, qui contient toute la littérature juridique latine, tous les écrits des jurisconsultes. C'est une compilation du droit romain des II et IIIe siècles. Ce Digeste est la doctrine des grands jurisconsultes, texte tombé dans l'oubli. Irnerius va acquérir une grande célébrité dans son enseignement. Sa méthode d'enseignement va être employée par ses disciples. On leur donne un nom très connu. On va les appeler les glossateurs. Ils vont être très marqués. Ils vont constituer une école, l'Ecole des glossateurs. Quel était la méthode d'enseignement ? Ils enseignait devant quelques étudiants, le professeur lisait un texte de droit romain, et ce texte, il l'interprétait le texte devant ses étudiants, et le résumait en une formule très brève, résumant le texte, appelée la glose, et les étudiants qui avaient les textes écrivaient la glose en marge du texte. Ils ajoutaient un sigle désignant le nom du maitre. Dans le courant du XII, la renaissance du droit romain va gagner du terrain. Le droit romain arrive en France au XIIe siècle. Les maitres se déplacent et viennent en France. Avant cette arrivée du droit romain et des glossateurs, certains auteurs français connaissaient déjà un peu le Digeste, et passé le milieu du XIIe, cette connaissance du droit romain va se parfaire et s'accélérer. Le droit romain va alors dominer toute l'histoire des siècles suivants (13e, 14e). La naissance d'une science canonique L'Eglise fait ce qu'elle faisait au siècle précédent, elle fait des lois pour l'Eglise (décrétales du Pape, ou encore les Conciles qui produisent des canons). Du 10e au 12e siècle, les canons conciliaires sont très nombreux, de même que sont nombreuses les décrétales du pape. Le développement législatif de ces autorités est tellement important qu'il faut, à un moment donné, se livrer à un travail de compilation du droit de l'Eglise. Pourquoi ? Parce qu'il faut que les autorités judiciaires disposent de recueils commodes qui vont leur permettre d'inspirer leurs sentences. Si on fait des compilations, c'est parce que, si on réunit tous ces textes, c'est parce que, dans les écoles ecclésiastiques, il est nécessaire que les maitres aient des recueils de textes pour l'enseignement. L'Eglise a une compilation ; l'Enseignement doit être dispensé dans de bonnes conditions. On va voir apparaitre des collections canoniques. En Occident, entre le milieu du 9e jusqu'au milieu du 12e, une quarantaine de collections canoniques ont été produites. Toutes ces collections vont être éclipsées par un texte capital, le décret de Gratien. C'est une compilation qui marque le terme de cette histoire des collections canoniques, et c'est une compilation qui a été composée vers le milieu du 12e. L'auteur de cette compilation est un moine de Bologne qui a su bénéficier des travaux antérieurs, de toutes les collections existantes, et à partir de cela, il a réalisé une compilation. Il a réuni 3800 textes, qui sont des décrétales, des canons, qui sont exposées à l'intérieur de l'ouvrage, d'une façon ordonnée, et il y a eu de la part de Gratien, un travail personnel. Il a essayé, dans ce texte, d'effacer les contradictions qu'il pouvait y avoir d'un texte à l'autre, de faire comprendre les choses. Dans cette compilation, les contradictions étaient inévitables car les textes étaient d'origine diverse parce qu'ils avaient été rédigés dans des époques différentes. Gratien a essayé de les concilier dans de brefs commentaires. C'est un recueil de textes, mais pas que ça. C'est aussi une oeuvre de doctrine, avec une pensée propre à Gratien. Ce texte est considéré comme important car il ouvre la voie à une doctrine juridique nouvelle, la doctrine du droit canonique, et très vite, cet ouvrage va être reconnu par les autorités, et va avoir un caractère officiel. Il ne faut pas oublier que l'auteur, Gratien, vivait à Bologne. Autrement dit, il vivait dans la ville universitaire la plus réputée d'Europe à cette époque, et par conséquent, cette oeuvre, le décret de Gratien, ne pouvait avoir que du succès. Ce texte, comme le Digeste, va servir à l'enseignement, comme les compilations de Justinien, c'est-à-dire que l'on va étudier le décret de Gratien, selon les mêmes méthodes d'enseignement, la méthode de la glose. On va voir apparaitre, dans l'université, ce qu'on a appelé les facultés de droit canon, qui vont prendre rapidement le titre de faculté de décret. Le Digeste donnait naissance à un nouveau départ du droit romain, tandis que le décret de Gratien était à l'origine de la science canonique, et donc, à partir de là, deux discipline allait naitre : avec le Digeste, qui contient le droit privé, allait naitre la discipline des légistes, encore appelés les civilistes, et puis, avec le décret de Gratien, c'est la discipline des canonistes. Ces deux disciplines voisines (droit romain et droit canonique) vont générer des rivalités du 12e au 16e siècle. CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE Le roi est faible jusqu'au 12e siècle. Le roi n'a pas vraiment de pouvoir normatif, le royaume est morcelé, et le droit est presque uniquement coutumier intégralement. Pouvoir et droit ont eu une évolution parallèle qui se poursuit au 12e siècle, et bientôt, dans la seconde moitié du 12e, des transformations profondes vont avoir lieu. En effet, le règne du roi qui va succéder à Louis VII, le règne de Philippe Auguste marque le début d'une période faste, des structures nouvelles se mettent en place, c'est-à-dire que, avec ce règne, le roi imagine et met en place, met en oeuvre, des moyens pour s'assurer la maitrise du royaume, un royaume que jusque-là, les structures féodales avaient ébranlé. Effectivement, avec le règne de Philippe Auguste, une ère nouvelle s'ouvre. C'est une époque où les éléments de la renaissance de l'Etat futur se multiplient. Le pouvoir se renforce, et, sous le règne de ce roi, le pouvoir normatif royal va progresser, mais naturellement, tout cela va se faire dans la difficulté. Il faudra du temps pour que l'Etat naisse véritablement. PARTIE 2 : LA DOUBLE RENAISSANCE DU POUVOIR ETATIQUE ET DU DROIT ROYAL (milieu 12e- milieu 15e) Cette longue période a connu des évolutions complexes. 13e : les trois grands serviteurs de la monarchie capétienne A la mort de Louis VII, son fils , Philippe II Auguste, lui succède, et Philippe Auguste, dans tous les sens du terme, a eu un grand règne, d'abord, il a régné 43 ans (1180- 1223). Non seulement, il a régné longtemps, mais il a fait énormément de choses positives. Son premier mérite fut de donner à la monarchie une base territoriale solide, puisqu'il va notamment s'emparer des territoires, des possessions du roi d'Angleterre (Normandie, Poitou) et lorsque Philippe Auguste meurt en 1223, il laisse un domaine royal dont la superficie se trouve multipliée par 5 en l'espace d'un règne de 43 ans. L'autre mérite de ce roi est non seulement d'avoir été un rassembleur du territoire mais aussi de développer une administration modèle : il est le premier à avoir donné une bonne assise administrative au royaume. Il se dote d'un appareil administratif. Troisième mérite, celui de remporter des victoires significatives sur la féodalité : il est le premier grand capétien ; son fils, Louis VIII, qui a régné de 1223 à 1226, son propre fils est agé de 12 ans ; s'ouvre alors la régence, Blanche de Castille, l'épouse de Louis VIII, qui va poursuivre la politique d'expansion territoriale. Son fils sera le deuxième roi capétien, car Louis IX (Saint-Louis) suivi de Philippe IV Le Bel. 14e et 15e : les temps difficiles Après la régence de Blanche de Castille, le règne de Louis IX dit Saint-Louis commence. Saint-Louis est le roi qui va donner à la France l'alliance pieuse entre la monarchie et la religion, en donnant l'auréole du Saint à la monarchie. C'est le roi qui incarne la justice, il est le justicier, le roi rendant la justice sous son chêne dans le Bois de Vincennes ; c'est le roi qui va poursuivre ce qu'avait commencé Philippe Auguste. Il perfectionne l'administration. C'est aussi un personnage important dans la mesure où il va remporter des succès significatifs sur la féodalité. Il va régner ainsi jusqu'en 1270, et organise alors une croisade. Il part avec ses troupes pour Tunis où il meurt de la peste. Ce règne est celui d'un roi qui a laissé beaucoup moins de traces. Son fils Philippe III le Hardi qui règne entre 1270 et 1285, complète l'oeuvre de ses prédécesseurs. Arrive le règne du troisième grand capétien, Philippe IV Le Bel (1285-1314). C'est un rassembleur de terres. On peut dire qu'il a été un bon artisan de la centralisation française. C'est un roi centralisateur. Avec lui, le domaine royal s'agrandit de la Champagne. La reine Jeanne, apporte dans sa dot, la Champagne au domaine. Sous le règne de ce roi qui agrandit le domaine. L'idée de souveraineté royale commence à s'affirmer. Le roi n'est plus uniquement un roi seigneur qui domine des groupes de féodaux. Le roi est désormais souverain, soit qu'il s'impose à l'ensemble de ses sujets. Il s'impose à l'ensemble de ces sujets grâce à l'action des juristes, qui ont appris le droit romain (les légistes). Ils comprennent que le droit romain peut être, pour le roi, une arme très utile, qui va permettre au roi d'augmenter son pouvoir. Philippe Le Bel est celui qui va s'employer à affaiblir la féodalité, il essaie d'amoindrir le rôle du Pape. Le roi ne doit pas être soumis à l'autorité du Pape. Philippe Le Bel s'en prend à tous ceux qui ont de l'argent pour conforter les finances royales. Il fait disparaitre l'Ordre du Temple. Lorsque Philippe Le Bel meurt en 1314, les cadres du royaume apparaissent désormais solides, davantage que 150 ans auparavant. 14e et 15e : les temps difficiles Philippe Le Bel a trois fils ; le dernier fils n'a pas d'héritier. Celui va régnera en 1328 est un neveu de Philippe Le Bel , qui se nomme Philippe de Valois, qui prend le nom de Philippe VI de Valois. Son accession au trône marque la fin des capétiens directs. A présent, la dynastie des capétiens Valois qui débute avec ce nouveau roi. C'est une branche cadette des capétiens. L'oeuvre des capétiens directs avait été immense, car lorsque Philippe VI montre sur le trône, il n'y a plus que quatre grands fiefs qui ne font pas partie du domaine : la Flandre, la Bretagne, la Bourgogne, et l'Aquitaine. Cinq valois vont se succéder : Philippe VI de Valois, Jean II Le Bon, Charles V, Charles VI, Charles VII. Cette période est extrêmement trouble, parce que la Guerre de Cent ans (1337), périodes d'épidémies, de troubles sociaux, de crises politiques. Pendant cette période, la monarchie est fragilisée ; parmi les crises qui mettent en danger la monarchie, une des crises, sous le règne de Charles VI. Monté sur le trône en 1380, mort en 1422. En 1380, il est encore trop jeune. Charles VI voulait faire des réformes. Malheureusement, en 1392, il devient fou. Les princes du sang veulent s'emparer du pouvoir. C'est une période de grand désordre en France. Une rivalité oppose deux princes : le Duc de Bourgogne (cousin du roi), Jean Sans Peur, face au frère du roi, Louis d'Orléans. Louis d'Orléans se fait assassiner par Jean Sans Peur en 1407. Ce meurtre va entraner une terrible guerre civile en France. Elle va se diviser en deux avec d'un côté les Armagnacs : le parti de celui qui a été assassiné, face aux Bouguignons. C'st une période de lutte pour le pouvoir. Jean Sans Peur a pour alliée la reine Isabault de Bavière (femme de Charles VI). Jean sans Terre est en passe de devenir roi de France, mais Charles VII le fait assassiner en 1419. La reine Isabault, signe avec les anglais le traité de Troyes en 1420, en vertu duquel Charles VII est écarté de la succession au profit du roi d'Angleterre. Le roi d'Angleterre avait épousé une fille qui s'appelait Catherine, la fille de Charles VI. Le roi d'Angleterre est le successeur du roi de France. Le roi d'Angleterre, Henri V, meurt en 1422, la même année que Charles VI. Henri V laisse un fils trop jeune pour régner, et donc Charles VII s'intitule roi de France. Jeanne d'Arc va contribuer à le faire sacrer. Cette période est une période de désastre. Cependant, il faut dire que malgré ces désastres, la situation de la monarchie s'est redressée, d'autant que l'aristocratie s'est affaiblie. Les épreuves de la guerre de Cent Ans ont formé définitivement la nation française. Cela veut dire qu'au milieu du 15ème siècle, il existe désormais un Etat avec un territoire bien délimité, et une population consciente de son appartenance à une même nation, et enfin, il existe aussi un gouvernement royal et un gouvernement qui se montre soucieux de développer une politique centralisatrice. En trois siècles jalonnés de périodes stables ou troublées, l'institution royale s'est peu à peu affirmée. L'Eglise essaie de contrôler les sources du droit (Chapitre 2) CHAPITRE 1 : L'AFFIRMATION DE L'INSTITUTION ROYALE Le roi n'était qu'un seigneur parmi les autres. On a vu apparaitre, dans la période précédente, quelques signes annonciateurs d'un renouveau. Mais, c'est surtout à partir de la fin du 12e que le roi échafaude des stratégies pour lutter efficacement contre la féodalité. Au départ, l'administration royale et l'autorité royale sont étroitement mêlés à la société féodale, et il faut toujours composer avec la féodalité. Le roi est inféodé. Au 13e siècle, le roi commence à s'affirmer au-dessus du monde féodal. Pour cela, le roi a mené des actions de terrain nombreuses. Il a utilisé pour s'imposer à la féodalité, des finesses juridiques répétées. En fin de comptes, l'action du roi capétien va porter ses fruits, va être suivi d'heureux effets dans trois domaines complémentaires, qui donnent vie et réalité à l'Etat. Une assise territoriale renforcée (Section 1) ; une autorité rénovée (Section 2) ; des moyens de gouvernement adaptés (Section 3). Section 1 : une assise territoriale renforcée Les capétiens sont parvenus à rattacher les unes après les autres les principales principautés féodales. Par quels moyens sont-ils parvenus à affaiblir l'assise de la féodalité ? Par quels moyens sont-ils parvenus à reconstruire et réunir les grands fiefs ? Il ne suffit pas de maitriser un territoire. Les rois carolingiens et capétiens avaient aussi réuni le territoire, encore faut-il le préserver contre les aliénations, les démembrements. C'est pourquoi les capétiens ont complété leur oeuvre de reconstitution du domaine en mettant au point un appareil juridique visant à conserver leur nouvelle puissance territoriale intacte. La réunion des principautés féodales au domaine royal Le domaine est un territoire restreint ; mais à partir de la fin du 12e, ce domaine ne cesse de s'agrandir, par extension territoriale successive. Les rois capétiens poursuivent un objectif dans cette oeuvre de reconstruction. L'objectif est de faire coïncider un jour domaine et royaume. Cependant, cette tâche du roi capétien, de reconstruire, va être difficile, car à la fin du 12e, si le roi agrandit son territoire, certains princes territoriaux font la même chose et prennent de la puissance le duc de Bourgogne réussit à réunir un vaste territoriale ; d'autre part, la Bourgogne est une principauté riche et bien organisée. Face au roi, il y a un pouvoir. Il faut évoquer aussi les possessions importantes en France d'Henri II Plantagenet. Cependant, le mouvement de concentration territoriale va quand même profiter à la royauté française, qui sera freinée par ses deux concurrents de taille. Comment le roi agrandit-il le royaume ? Par plusieurs moyens, principalement de droit. Le recours au moyen de droit Utilisation des règles de retour des fiefs On parle de réversion (« qui revient «). La réversion va parfois jouer à titre de sanctions. Si un vassal ne remplit pas ses engagements, ses obligations nées de la relation féodale, son seigneur supérieur peut lui reprendre son fief, en appliquant d'une sanction féodale. Cette reprise du fief en cas de faute du vassal se nomme la commise en droit féodal. Exemple : en 1200, le roi d'Angleterre, Jean Sans Terre, entre en conflit avec un de ses vassaux d'Aquitaine. A ce vassal aquitain, il lui avait pris un château et sa fiancée. Le vassal va voir le seigneur suprême du Duc d'Aquitaine, le roi de France, Philippe Auguste. Philippe Auguste envoie un messager à Jean Sans Terre en le convoquant devant sa cour pour le sanctionner. En vertu de la procédure féodale, le roi Philippe Auguste fait prononcer la confiscation de tous les fiefs français du vassal Jean Sans Terre. On agrandit alors le domaine. Autre exemple, la déshérence : si un vassal vient à décéder sans héritiers, le fief peut revenir au vassal supérieur. Utilisation des règles de patrimonialité des fiefs Au 12e, le fief est devenu patrimonial ; il est devenu transmis à ses héritiers, il peut même être vendu, aliéné. Cela veut dire que puisque il est patrimonial, il peut faire l'objet d'opérations juridiques variées. Il peut être transmis par succession, vendu. Il peut surtout être apporté par mariage. Il existe de nombreux exemples de mariages qui ont permis d'agrandir le domaine royal. Cela qui a inauguré cette politique est Louis VII (Aliénor d'Aquitaine). Cela s'est mal terminé. Louis VII a inauguré cette politique. Philippe Auguste va épouser la nièce du Comte de Flandre, qui lui apporte l'Artois. Politique de Louis IX ou Saint-Louis : il marie son frère, Alphonse de Poitiers à l'héritière du comté de Toulouse. Une des clauses du contrat de mariage prévoit que, dans l'hypothèse où le ménage n'aurait pas d'enfants, il est prévu dans le contrat de mariage que le comté de Toulouse serait rattaché au domaine royal. Philippe Le Bel se marie en 1284, avec l'héritière du royaume de Navarre, héritière du comté de Champagne. La Champagne va donc être rattachée au domaine royal. Acquisition par voie de succession, autrement dit que le roi peut être bénéficiaire d'une succession. Philippe Auguste à hérité de l'Amiénois par voie successorale. Autre moyen, l'achat de seigneurie. Moyen largement utilisé, dans un contexte favorable, aussi bien par le roi que par les princes territoriaux. Dans la seconde moitié du 12e, la terre perd de son importance ; on entre dans une économie monétarisée. Le commerce se développe, et les seigneurs voient leurs sujets s'enrichir par le commerce, par la production. Les seigneurs s'appauvrissent (car la richesse de la terre périclite). Alors que les ressources des seigneurs diminuent, les besoins s'accroissent (voyages, croisades, renouveau commercial, luxe). Les seigneurs, autrefois austères, veulent satisfaire leur besoin de luxe. Alors, ils empruntent à ceux qui ont de l'argent, à la bourgeoisie. Certains de ses seigneurs se ruinent. Le phénomène concerne de nombreux petits seigneurs, mais également des grands seigneurs. Alors, les princes territoriaux et le roi sont à l'affut de bonnes affaires, et c'est ainsi qu'au 13e, au 14, il rachète des seigneuries, des portions de seigneuries. En 1239, Saint-Louis achète, en Bourgogne, le comté de Mâcon. Philippe Le Bel achète le comté de Chartres, de Lamarche. En 1349, le roi achète le Dauphiné. Le recours à la guerre et à la négociation Lorsque la commise a été prononcée contre Jean Sans Terre, Philippe Auguste a du alors prendre les armes pour contrer les réticences de Jean Sans Terre. Philippe Auguste réalise alors une annexion par les armes des provinces françaises du roi d'Angleterre. On pourrait parler aussi du rattachement du Languedoc, qui a été préparé par des opérations militaires lancées contre les cathares. Le Languedoc est rattaché par le traité de Paris en 1229. Le roi capétien doit aussi, après avoir rassemblé, doit éviter des précédents fâcheux. Il faut éviter les partages, les aliénations de royaume. Et donc, il fallait trouver des moyens permettant de déroger au droit féodal. Il fallait créer un droit royal spécifique. Le statut du domaine de la couronne Comment le roi est-il parvenu à faire coïncider le domaine et le royaume ? L'idéal était de consacrer un principe qui, sur le plan des droits administratifs, aura beaucoup d'importance, il s'agissait de consacrer l'inaliénabilité du royaume. Autrement dit, admettre ce principe revenait à admettre le passage d'un statut de droit privé à un statut de droit public. Reconnaitre ce principe signifiait que la mentalité royale s'était transformée, soit que le roi abandonnait ses conceptions féodales, et renonçait à se comporter comme ses prédécesseurs. Pour admettre ces principes, il faudra du temps, puisque au 13e, et au début du 14e, les rois n'hésitent pas à disperser des bouts de territoire pour gratifier de bons serviteurs. Donc le domaine reste aliénable. Les choses vont évoluer dans le courant du 14e, car il y avait un décalage entre le souci d'agrandissement du domaine et la gestion désastreuse du domaine. On aliénait des parties de domaine. C'est la raison pour laquelle ce principe important connaitra des atténuations, des exceptions. La naissance du principe d'inaliénabilité Cette naissance s'est réalisée en plusieurs temps. Au 14e, il y eut des réactions contre les pratiques anciennes, les aliénations domaniales, des donations de domaine, qui ont eu pour effet de diminuer les ressources royales. Mais, malgré les réactions royales, les dilapidations du domaine se poursuivent sous le règne du premier successeur de Philippe Le Bel, de Louis X. Mais le roi suivant, autre fils de Philippe Le Bel, Philippe V, sera le premier à réagir contre ses aliénations, dans une série d'ordonnances. Il supprime, révoque toutes les aliénations de domaine qui avait été faites depuis le règne de Louis IX. Voilà un roi dénonce les excès de ses prédécesseurs et conteste les aliénations des domaines. Mais la règle d'inaliénabilité n'est pas encore formulée. Il faut ajouter que, si cette législation dénote une prise de conscience. Cette législation ne va pas être suivie immédiatement d'effets, car il y avait un enracinement d'habitudes anciennes. Cependant, les successeurs de Philippe V vont suivre son exemple. Petit à petit va naitre une idée, l'idée que le domaine royal est d'une nature autre que le domaine féodal. Par conséquent, on estime que ce domaine doit être inaliénable. Au 14e, en 1364, Charles V donne toute sa valeur au principe, car il fait ajouter une formule au serment du sacre. Désormais, domaine et couronne sont liés. On va parler non plus du domaine du roi mais du domaine de la couronne. Au 15e, plusieurs textes vont renforcer le principe d'inaliénabilité, et ce principe signifie donc que la couronne a désormais un patrimoine. Le roi est seulement usufruitier du domaine, il ne pas aliéner ce domaine. Le domaine de la couronne est l'ensemble des biens, des terres, et des droits qui sont entre les mains du roi. Le roi en a hérité de son prédécesseur. Tout ce qui lui est parvenu, tous ces droits acquis par voie successorale constituent le domaine fixe de la couronne. Outre ce qui a été acquis du roi précédent, il faut ajouter tout ce qui est acquis par le roi durant son règne, son domaine privé. Le domaine privé peut encore en aliéner des parcelles. Lorsqu'il meurt, tout ce qu'il a aliéné rejoint le domaine fixe. Cette distinction émane des juristes du 14e qui se sont inspirés du droit romain. A Rome, le domaine de l'empereur (fiscus), inaliénable. Ce principe est donc admis au 15e, par la doctrine. C'est un principe qui émaille la législation. Les rois voient dans ce principe une règle fondamentale, une règle essentielle. Ce principe apparait dans différents textes. Il n'y a pas encore un texte qui lui est spécifiquement consacré. Il faudra attendre l'oeuvre législative de la seconde moitié du 16e pour trouver le texte manquant. En attendant ce texte, il existe encore des entorses au principe d'inaliénabilité nonobstant les efforts royaux. Une des entorses va être érigée en exception légale. Il s'agit de la pratique des apanages. La dérogation au principe, les apanages Pratique qui s'explique par la conception féodale du domaine, une conception héritée des temps anciens. Elle permet au roi de constituer, au profit de ces enfants, autres que l'ainé. Elle permet de donner une dotation en terres. Cette dotation va permettre de bien vivre. Ces enfants sont apanagés. Pourquoi « apanage « ? Ad panem : pour le pain, la subsistance. L'origine historique des apanages Ils appliquent le droit féodal, puisque le droit féodal avait pour souci de tempérer la rigueur du droit d'ainesse. Cette coutume rejaillit sur la succession à la couronne ; elle est la contrepartie de la primogéniture. Le roi récupère une institution du droit féodal. A partir de cette institution, il va forger les bases d'un droit spécifiquement royal. Le roi Louis VIII , en faisant son testament en 1226, il fait mention pour la première fois des apanages. Une pratique règlementée La difficulté était de faire admettre aux cadets la règle de l'ainesse. Pour leur faire admettre cette règle, il fallait obligatoirement leur donner des compensations. Donc, le principe des apanages était obligatoire, mais il fallait la règlementer, car elle risquait de réduire à rien, à néant le principe d'inaliénabilité. Comment règlementer ? Les spécialistes du droit romain, les légistes, vont édifier une théorie de l'apanage, une théorie faite de restrictions. Les bénéficiaires d'un apanage n'auront pas tous les droits sur leur apanage. Première restriction est la clause de réversion (de retour) : cela signifie que, dès lors qu'un apanagiste meurt sans héritiers directs, l'apanage fait retour au domaine royal. L'apanage ne peut pas passer à des neveux, ni à des frères, mais au domaine royal. A partir du 14e, la clause de réversion joue en cas d'absence d'héritier mâle : l'apanagiste ne peut donner des apanages aux filles, en les excluant de la succession en général. Clause de retour, clause de réversion. On limite aussi les droits des apanagistes. En quoi ceci consiste-t-il ? Lorsqu'un apanage est constitué, des dispositions sont prises pour ne concéder à l'apanagiste que des droits réduits, des droits de nature économique. Par exemple il va percevoir les revenus de la terre sur les paysans. Dans la mesure où il est juge, il va pouvoir conserver les amendes, conserver le produit des péages. Ce qu'il n'a pas, ce sont les droits de souveraineté. Même s'il est à la tête d'une grande province, les apanagistes ne peuvent pas frapper leurs monnaie, ni organiser des foires, ni anoblir un roturier, car ce sont des droits de souveraineté. L'apanagiste est un simple usager. La propriété de l'apanage demeure la couronne. Une pratique dangereuse En effet, même assortie de limites, la pratique demeure dangereuse. L'apanage représente malgré tout une menace pour l'assise territoriale du droit, parce que c'est une amputation parfois considérable du domaine. Louis XVIII distribue à tous ses fils l'Artois, le Poitou, l'Auvergne, l'Anjou, le Maine. Cependant, jusqu'à la fin du 13e, le hasard a bien fait les choses et permis le retour des apanages au domaine. En revanche, au 14e, des provinces importantes vont échapper à la couronne et pour longtemps (Bourgogne laissée par le roi Jean Le Bon à son fils). Il faudra plus d'un siècle pour que la Bourgogne soit de nouveau rattachée. Il faudra attendre la guerre pour que la Bourgogne soit rattachée à la France. En principe, l'apanagiste est subordonné au roi, mais l'apanage a créé une féodalité supérieure souvent opposée au roi (ducs de Bourgognes). Cependant, cette pratique des apanages s'est maintenue, car c'est une pratique utile. Le maintien d'une pratique utile Les rois de cette époque sont entourés d'excellents juristes. La mission de ces rois est de restaurer l'Etat. On peut s'étonner qu'ils aient agi en père de famille, qu'ils se soient montrés soucieux de protéger leurs enfants. Comment ont-ils accepté de démembrer un territoire difficilement constitué ? Ces hommes sont soucieux de reconstruire l'Etat. En même temps, ils sont héritiers de conceptions patrimoniales du passé. Le choix de constituer des apanages n'est pas seulement l'héritage de conceptions patrimoniales appartenant au passé (stratégies politiques, assise de l'autorité royale). Première stratégie : Canaliser l'ardeur des cadets en leur donnant de quoi éviter les troubles. Deuxième stratégie : le roi fait de ses cadets des auxiliaires. Les domaines constitués en apanages ne sont pas n'importe lesquels. En général, ce sont des domaines nouvellement conquis. Que vont faire les frères apanagistes ? Ils vont préparer leur attachement à la couronne pendant une période transitoire (oeuvre de pacification interne). L'exemple le plus connu est celui du comté de Toulouse. Alphonse de Poitiers s'installe donc dans le comté de Toulouse. OEuvre de pacification d'autant plus facile qu'il a épousé la fille du comté de Toulouse. Il va conduire une politique en harmonie avec celle son frère , le roi, soit que dans le comté de Toulouse, il va introduire les techniques de l'administration royale. Il agrandit le domaine et multiplie les stratagèmes pour unifier le domaine. Mais le roi use de tous les moyens pour rénover son autorité. Section 2 : Une autorité rénovée Le roi devait parvenir à maitriser la féodalité. On a vu que, jusqu'au 12e, le roi ne parvient pas à asseoir son autorité. Les seigneurs constituent un écran entre le roi et les sujets. Finalement, à la fin du 12e et au début du 13e, le roi parvient à s'imposer à la féodalité, et, en fin de compte, il va parvenir au 13e, à occuper le haut de la pyramide féodale. Ces progrès sur la féodalité même sensibles ne sont pas suffisants, car le roi ne pouvait pas s'accommoder durablement de la présence de tous ces contre-pouvoirs. Il fallait les éliminer. Ce roi, qui était alors le premier des seigneurs, le suzerain, change de visage pour devenir souverain pour dominer tous ces sujets quels qu'ils soient et non les seuls seigneurs. La féodalité maitrisée Cette suprématie du roi, cette suzeraineté royale a été très tôt affirmée, mais elle est demeurée souvent théorique. Peu à peu, le roi parvient à obtenir l'hommage des princes territoriaux. Obtenir l'hommage des grands du royaume n'est pas suffisant car il n'a pas d'emprise sur les vassaux des princes territoriaux. Le roi va s'employer à contrôler l'ensemble de la pyramide féodale. Il vient à bout de la féodalité. Pour s'imposer, le roi dispose de deux atouts majeurs : il va mener, avec son administration, une action de terrain persévérante. Surtout , il bénéficie de la force intellectuelle de bons juristes. Le travail de ces légistes va être de multiplier les subtilités juridiques pour renforcer l'autorité royale, l'emprise royale. Comment faire pour développer cette emprise royale ? La première règle qui va être dégagée par ces juristes est la suivante : le roi n'est le vassal de personne (A) Le roi n'est le vassal de personne Le roi est un rassembleur de terres. D'une façon ou d'une autre, le roi peut recevoir la terre d'un grand seigneur. Mais en vertu du droit féodal, le roi devrait prêter hommage au seigneur de la terre (droit féodal). Mais, si on pose le principe que le roi est au sommet de la pyramide féodale, il ne doit d'hommage à personne. Ce point de doctrine dégagé par SUGER, au 12e, ne sera jamais contesté. Au 13e, la doctrine réaffirme le principe : le roi ne tient de personne, mais de lui et de Dieu. Cela veut dire que le roi est indépendant à l'égard de tous, y compris à l'égard du Pape. On affirme en même temps la position suzeraine du capétien. Cependant, le roi n'est le vassal de personne. Un autre adage vient rendre cette suzeraineté royale théorique : le vassal de mon vassal n'est pas mon vassal. Cela veut dire que le roi est suzerain de ses vassaux directs, mais pas des arrière-vassaux. Ils vont employer tous les moyens pour avoir de l'emprise sur la féodalité. La multiplication des vassaux directs Plusieurs stratégies pour avoir de l'emprise sur les vassaux directs. Reconstitution du domaine. Lorsque le roi réunit au domaine une province, le principe dégagé par les légistes allant à l'encontre du droit féodal, le roi devient le seigneur direct de tous les vassaux de la principauté, des princes territoriaux. Lorsqu'un territoire est annexé, le roi contrôle toute la hiérarchie. Le roi s'attache des seigneurs, en essayant de débaucher la clientèle vassalique des grands princes, en développant la technique dite du fief-rente. Ils sont victimes de la conjoncture économique du 13e. Bien des seigneurs endettés se tournent vers un seigneur qui a de l'argent. Ils se tournent vers le roi. En contrepartie, le roi leur verse une rente annuelle, de l'argent. Cela permet au roi d'avoir un plus grand nombre de vassaux. C'est un moyen de pression, car lorsqu'un vassal ne respecte pas son obligation, il suffit de respecter le versement de la rente. Il y a des rapports de subordination. Le roi fait aussi jouer la technique de l'hommage prioritaire. Au 13e, les choses sont très compliquées. Le roi reçoit de la part de ses vassaux des hommages-liges. Le roi option une priorité en matière de service. L'adaptation du droit féodal dans l'intérêt du droit Le rattachement des arrières-vassaux par la justice royale, soit lorsque un arrière vassal se plaint de son seigneur direct qui est vassal du roi, c'est le tribunal du roi qui est compétent pour connaitre de l'affaire. Jean Sans Terre. On va vers la suppression du principe de non-emprise sur les arrières vassaux. Au milieu du 13e, l'action des légistes favorise l'émergence de règles dérogatoires au droit féodal. Ces règles sont nombreuses. Une des principales concerne le domaine militaire, notamment un arrière vassal ne peut en cas de guerre, entre un seigneur et le roi, jamais faire guerre au roi. Finalement, un peu avant 1250, on assiste au renversement de l'Ancien principe, le vassal de mon vassal est mon vassal. Il est alors admis que les rapports vassaliques ne peuvent jamais jouer contre le roi. Il est admis, désormais, que le roi est au sommet de la hiérarchie féodale. Autrement dit, tout individu, quelle que soit sa position, est soumis au roi. L'individu, quelle que soit sa position dans la hiérarchie, n'est plus vassal au terme de l'évolution, ni arrière vassal, il est devenu sujet. Autrement dit, tous les individus qui composent la société française vers 1250, mais s'ils sont socialement inégaux, sont tous égaux dans la subordination. Autrement dit, l'idée de suzeraineté royale s'estompe, un nouveau principe émerge puisque les rois gouvernement tous ses sujets. C'est le principe de la souveraineté du roi et marque la fin de la suzeraineté. Pour en finir, vers 1260 est acquise l'idée d'une supériorité du roi à l'égard de tous. Le principe de cette supériorité du roi va être formulé par la doctrine des années 1280, notamment par Philippe de Beaumanoir, qui a écrit Les coutumes de Beauvaisie, lance la formule de la souveraineté royale en écrivant que « le roi est souverain par-dessus tous «. Le roi souverain Au fur et à mesure que les puissances féodales s'affaiblissent, que le domaine royal s'agrandit, la souveraineté royale se fortifie, et son contenu se précise. La souveraineté s'étend au domaine les plus variés. La question est la suivante : quel est le contenu de la souveraineté. Pour que le roi puisse assurer sa mission, la monarchie a besoin de fondements solides. La monarchie a besoin de principes immuables pour assurer sa stabilité. Sur la naissance de ces principes, nous verrons qu'il appartiendra aux juristes du Moyen-Age d'accomplir une oeuvre juridique majeure. Les juristes vont construire, forger, le premier droit constitutionnel de la France. Le contenu de la souveraineté Reprenant les théories des siècles anciens, les légistes du Moyen-Age font toujours de ce roi désormais souverain, un roi protecteur, un roi justicier, un roi gardien de l'intérêt général. La formule est le roi gardien du commun-profit. C'est une application des principes de la théocratie. Ce pouvoir royal devient effectif, réalité. Premièrement, le roi protecteur. La mission assure la paix. Le roi assure la paix Auparavant, l'Eglise assurait la paix. Au 13e, la paix du roi se substitue à la paix de l'Eglise. Pendant longtemps, l'Eglise assure le relais de l'état décadent. Le roi est en mesure d'assurer sa paix. Le roi renoue avec l'ancienne tradition monarchique du roi protecteur, avec l'ancienne tradition carolingienne. En définitif, en assurant effectivement la paix, il se conforme à la promesse de son sacre. Au 13e, les guerres privées restent nombreuses. Un fléau. Le roi va lutter contre ses guerres privées. Il devra attendre pour pouvoir les interdire complètement. Dans un premier temps, il se contente de prendre des mesures pour limiter ses guerres, pour assurer une paix spéciale. Le roi assure la paix. Les missions particulières prises pour assurer la paix. Il existe trois sortes de mesure qui sont assez originales. 1° : La quarantaine-le-roi A la fin du 12e instituée par Philippe Auguste, réplique à la trêve de Dieu. Quand un seigneur déclarait la guerre à un autre seigneur, il avait le droit d'attaquer aussitôt toute personne de la famille de son adversaire. Alors Philippe Auguste déclare qu'à l'avenir, à l'ouverture des hostilités, les parents des deux ennemis ne pourront être attaqués que 40 jours après l'ouverture des hostilités. Cela limite l'importance du conflit. 2° : Asseurement Il s'agit du serment de la promesse solennelle qu'une personne fait à une autre de ne pas l'attaquer. C'est une promesse de non-agression. Le roi a pu imposer cette promesse à une autre partie. Le roi peut imposer à un seigneur de ne pas attaquer telle autre personne. La violation de cette promesse, le bris d'asseurement, constituait une infraction gravissime. Le roi faisait promettre à une personne de ne pas en attaquer une autre. 3° : La sauvegarde Le roi prend l'habitude d'accorder à des personnes physiques ou à des personnes morales des lettres de sauvegarde. Cela veut dire que les porteurs de ces lettres, marchands qui sillonnent les chemins, ne peuvent pas être attaqués et, la violation de la sauvegarde royale constitue une infraction sévèrement punie (injure personnelle faite au roi). Au 13e, la sauvegarde royale est très recherchée, car celui qui l'enfreint s'expose à de très lourdes sanctions royales. Le roi deviendra suffisamment fort pour aller au-delà en interdisant les guerres privées. Louis IX avait essayé d'abolir définitivement les guerres privées inter seigneuriales en 1258 mais c'était prématuré. Cette interdiction va être renouvelée assez souvent, et on peut considérer que les guerres privées disparaissent au cours du 14e. A ce moment-là, la monarchie souveraine est en mesure de faire respecter son autorité. Mais il faut aller plus loin, car si les guerres privées disparaissent, cela est insuffisant. Le droit fait apparaitre son jus belli, son droit de guerre, c'est un droit royal. Il faut se donner des moyens, soit que le roi doit se doter d'une organisation militaire qu'il n'a pas. Le jus belli royal nécessite une organisation militaire. Cette organisation n'existe pas. L'armée royale est très déficiente. C'est une armée composée de vassaux. Aux 13e et 14e, il n'y a pas que des vassaux. Le roi engage des troupes soldées aux 13e et 14e. Mais ce système est très défectueux. Au début de la guerre de Cent ans, la France va subir plusieurs grosses défaites, car l'armée n'est pas bien organisée. Les compagnies de soldats engagées pour la durée de la guerre étaient licenciés pendant les périodes de trêves. Les compagnies de mercenaires devenaient des pillards qui terrorisaient la population. Le roi, retrouvant de l'autorité, va faire changer les évènements, notamment sous Charles VI. Il comprend que pour créer une véritable armée, il faut que cette armée soit complètement émancipée du droit féodal. Il faut que cette armée soit permanente. Le roi va légiférer. Il prend une ordonnance, du 02/11/1439. Cette ordonnance créé les compagnies d'ordonnance. Il s'agit de compagnies permanentes de cavaliers. L'ordonnance fixe le nombre de ces compagnies à 15. Cela représente un total de 9000 cavaliers qui recomposeront l'armée ; pour la plupart, ces cavaliers appartiennent à la noblesse. Puis, pour parfaire le système, une seconde ordonnance d'avril 1448, créant une infanterie (hommes à pied), les hommes la composant étant les francs-archers. Le système consiste à ce que chaque village de France devait fournir un archer, à raison d'un homme par 50 familles. On va ainsi composer l'infanterie. C'est une rupture avec la tradition ancienne car l'armée est cohérente. Charles VI créait ainsi la première armée française, au milieu du 15e, création contemporaine de la création de l'Etat. Devoir de production du roi qui assure la paix avec l'aide efficace. Un roi justicier Au 13e, les théoriciens de la souveraineté exploitent systématiquement cet attribut de la puissance royale. Les théoriciens proclament que toute justice émane du roi. Entre le 13e et le 15e, le roi dans ce domaine aussi, abandonne son image de seigneur. On voit un appareil judiciaire royal qui se modernise, qui fait des progrès très sensibles pour étouffer les antiques justices seigneuriales. Cette justice du roi souverain porte la marque de l'action des légistes. Elle exprime sa modernité à plusieurs points de vue. Un appareil judiciaire Il y a, dans cette organisation judiciaire, un agent qui joue un rôle déterminants, le bailli (nord), créé au temps de Philippe Auguste, ou alors le sénéchal dans le sud. Philippe Auguste fixe les baillis dans des circonscriptions administratives. Evidemment, la circonscription du bailli est le baillage. La circonscription du sénéchal est la sénéchaussée. Ce personnage a de nombreuses missions, mais il a des attributions judiciaires. Sa mission est de surveiller les agents inférieurs, seigneuriaux ou royaux, qui occupent un degré inférieur de justice, les prévôts. Dans un baillage, il y a plusieurs prévôtés. Les baillis sont de bons agents royaux. Ils sont nommés et révoqués par le roi. Le roi organise un véritable quadrillage du territoire. Ils sont nommés et révoqués par le roi. La justice royale se spécialise de plus en plus. Il va falloir créer un nouvel échelon judiciaire, soit le Parlement de Paris (13e). C'est un organe original issu de la cour du roi. Cet organe apparait sous Louis IX. C'est une cour royale qui juge à l'aide de personnages importants, les maitres de la Cour, qui sont des laïcs ou des hommes d'Eglise. Ces maitres de la Cour sont des techniciens spécialisés, des hommes qui connaissent le droit. Avec ses techniciens du droit, le Parlement se professionnalise. La fin du 13e voit aussi l'apparition du 1er ministère public, le parquet, soit des gens du roi, soit des hommes qui vont défendre les intérêts du roi devant le Parlement. C'est un début de jurisprudence royale La procédure était orale ; au 13e, la procédure se modernise. Elle devient écrite et apparaissent donc les greffiers, ceux qui vont prendre par écrit les décisions de justice au Parlement de Paris. Ils vont prendre note des arrêts du Parlement. Les archives nationales les détiennent, les olim, les registres des plus vieux arrêts du Parlement de Paris. Le premier mot inscrit sur le premier registre est olim. Un appel hiérarchique L'appel n'existait pas. Au 13e, l'appel fait son apparition sous l'action des droits savants, du droit romain. Le Parlement apparait comme une Cour d'appel ; il va juger en appel les décisions des baillis, des justices des grands seigneurs. La compétence du Parlement est souveraine. Il n'y a rien au-dessus du Parlement. Le Parlement statue en dernier ressort. Quant aux baillis, ils jugent les décisions des prévôts en appels. La procédure d'appel aboutit à rendre les justices seigneuriales subalternes à la justice royale. Une compétence élargie Les cours royales, les tribunaux royaux utilisent une procédure moderne et les juges des cours royales sont des professionnels. Ce sont des juridictions qui ont la faveur des justiciables. Elles apparaissent comme arbitraires. On entend plus du duel judiciaire. Les légistes, l'entourage royal multiplie les stratagèmes. L'entourage royal met tout en oeuvre pour réduire la compétence des juridictions seigneuriales. Deux techniques : Cas royaux. Première illustration de leur ingéniosité : ce sont les délits et les crimes qui portent atteinte à l'ordre public et qui doivent échapper aux juridictions seigneuriales. Crime de fausse monnaie ; contrefaçon du sceau royal, le crime de lèse-majesté. Mais la royauté n'a jamais donné une définition du cas royal et n'a jamais donné de liste des cas royaux. On est dans le domaine du flou juridique. Cela va permettre d'augmenter le nombre de cas royaux ; le juge royal s'empare d'une affaire quand elle concerne le roi et sa famille, mais aussi dès qu'il considère que l'ordre public est menacé, donc rien de plus fou que la notion d'ordre public. Prévention : permet de rogner la compétence des juridictions seigneuriales. La prévention suppose une affaire qui est de la compétence d'un seigneur. Seulement, le juge seigneurial se montre lent pour juger. Il ne juge pas dans des délais raisonnables. Il est « prévenu par le juge royal «, devancé. Il ne peut plus être dessaisi. A partir du 14e, les justices royales qui jugent d'une façon efficace et qui réduisent la compétence royale, et les justices ecclésiastiques vont commencer à décliner. Les tribunaux seigneuriaux et les tribunaux ecclésiastiques existeront jusqu'en 1789. Mais ce sont des juridictions seigneuriales, ecclésiastiques, qui vont connaitre un déclin continu, qui se fera toujours au profit de la juridiction royale. Le roi agit pour le commun-profit Le roi pourvoit à l'intérêt du royaume et doit prendre des mesures dans deux domaines, le domaine législatif et le domaine financier. Pendant longtemps, dans ces deux domaines, il n'a pas le choix et va s'appuyer sur le conseil de ces vassaux. Cela cessera. Il agira d'office, sans les vassaux. Au 13e les finances royales comme l'armée conservent leur caractère féodal, autant que les finances. Les revenus du roi sont ceux du domaine, autrement dit les revenus que tout seigneur prélève dans sa seigneurie. Ces ressources sont archaïques et insuffisantes. Le roi a besoin d'argent pour assurer les premiers services publics. Philippe le Bel s'empare des biens des Templiers, des juifs, qui se livre à des manipulations monétaires, a taxé le clergé par les décimes. Tout cela ne suffit pas ; les nécessités de la guerre de 100 ans imposent que l'on trouve des ressources nouvelles. Il va falloir mettre en place une vraie fiscalité. A l'origine, ces finances proviennent du domaine ; ce sont des biens confisqués qui procurent des ressources au roi. Pendant longtemps, la fiscalité royale était limitée aux aides féodales. Le roi procédait à des levées d'argent sur ses vassaux. Le problème est que les besoins de la monarchie vont croitre, les confiscations, les revenus du domaine, les levées sur les vassaux. Il va falloir procéder à des levées plus régulières. On procédé d'un prélèvement sur les vassaux à un prélèvement sur tous les sujets, soit de la suzeraineté à la souveraineté. Mais comment faire pour imposer tous les sujets ? Il fallait leur consentement à l'impôt, ou du moins le consentement de leurs représentants, qui se réunissent dans le cadre d'une grande assemblée pour représenter toute la société française, les Etats généraux (noblesse, clergé, Tiers-Etat). Le roi va s'adresser aux Etats généraux pour demander de l'argent. Ils vont consentir à l'impôt. En 1436, les Etats généraux se réunissent à Tours. Ils acceptent l'établissement d'impôts indirects sans limitation de durée. 3 ans plus tard, dans l'ordonnance de 1439, qui créé l'armée permanente. Charles VI établit l'impôt direct permanent (la taille royale). Tous ces impôts seront payés régulièrement. On a désormais une fiscalité contemporaine de la création de l'armée. Il y a donc une fiscalité indirecte et directe. Fiscalité indirecte : les aides, soit des impôts qui frappent la circulation et la vente de marchandises. Autre impôt, la gabelle, qui est un impôt qui frappe la vente du sel. Enfin, troisième impôt indirect, les traites. Ce sont des droits de douane perçus aux frontières de la France et des provinces. Fiscalité directe : la taille, soit un impôt de répartition. Chaque année, le roi déterminait une somme globale dont il avait besoin, et ce montant était réparti entre les circonscriptions financières. A l'intérieur de chaque circonscription, le montant de la taille était réparti entre les contribuables (jusqu'à la révolution française). Pour conclure sur ce point, on va dire que l'action des juristes du roi a permis le dépassement de la féodalité politique. On arrive au 15e siècle. L'émiettement du pouvoir, des droits de puissance publique. La reconquête du pouvoir s'achève. Il faut alors modeler les institutions de la France moderne. Pour cela, la dynastie capétienne a besoin de temps. Pour durer, il faut disposer de bases juridiques solides, qui mettront la monarchie à l'abri des crises juridiques parfois très graves. Certains principes vont s'ériger en donnant au pouvoir et à la couronne un véritable statut. Le statut de la couronne Ces principes ne sont pas des constructions théoriques. Ces principes se sont dégagés au gré des évènements. Si on revient au début de la dynastie capétienne, au début de la dynastie capétienne, la transmission de la couronne obéit à des règles. La couronne passe au fils ainé, qui a été associé au pouvoir du vivant de son père. Philippe Auguste n'éprouvera même plus le besoin d'associer son fils à son pouvoir, de faire procédé au sacre anticipé de son fils, parce que le pouvoir transmis au fils est incontestable. Désormais, sont admis, d'une façon incontestée, comme premier principe, l'hérédité et la primogéniture. Jusqu'au début du 14e, pas de règle. Il n'existe pas d'autre règle de dévolution. La transmission du pouvoir se fait sans difficulté, car il y a ce miracle capétien. Jusqu'au 14e, les capétiens ont toujours eu des fils pour leur succéder. Voilà qu'au 14e, les choses changent. Aux 14e et 15e, la monarchie se trouve confrontée à des difficultés qui la mettent en danger. A ces crises, il va falloir trouver des solutions juridiques, on va créer 3 nouveaux principes à côté de l'hérédité et la primogéniture. Nouveau principe, la masculinité. Principe d'indisponibilité, puis le principe de continuité. Le principe de masculinité Trois dates , 1316, 1322, 1328 (rois maudits). A la mort de Philippe Le Bel, en 1314, son fils lui succède, sous le nom de Louis X le Hutin, qui lui succède par coutume monarchique. A ce moment-là, des difficultés dynastiques vont surgir (Rois maudits). Successions de 1316 et 1322 et l'exclusion femmes. En 1316, deux ans après que Louis X Le Hutin soit roi, il meurt sans héritier mâle mais une fille ; mais la reine est enceinte. Il a également deux frères, Philippe et Charles. La situation est la suivante : si un fils vient à naitre, il deviendrait roi. Mais, il y a une chance sur deux, c'est une catastrophe. Toute solution irait à l'encontre de la pratique. Qui est susceptible de monter sur le trône. Mais, selon la pratique admise jusque-là, jamais une fille n'avait régné. On pouvait remettre la Couronne à un frère du roi. Mais cette solution avait le mérite de sauvegarder le principe de masculinité. En attendant, le frère du roi assure la régence. En novembre 1316, la reine accouche d'un garçon, Jean. Aussitôt après ce décès, Philippe, régent, se proclame roi et se fait sacrer à Reims en janvier 1317, Philippe V Le Long. Cette situation ne pouvait pas satisfaire tout le monde, et en particulier le Duc de Bourgogne, le frère de Philippe Le Bel, l'oncle maternel de Jeanne. Il soutient que la couronne doit revenir à sa nièce. Le nouveau roi Philippe V réunit une assemblée de barons, de partisans. On pose pour principe que « femme ne succède pas à la Couronne de France ; le royaume ne saurait tomber en quenouille «. Cependant, on peut ajouter qu'il existait des arguments favorables à la princesse ; le droit féodal acceptait la succession des filles. En d'autres temps, les femmes avaient porté la couronne (Byzance, Navarre). Cependant, ce sont les opposants qui vont gagner, afin que la femme ne règne pas, car les hommes d'Eglise étaient réticents et considéraient que le sacre ne pouvait être réservé qu'à la seule espèce masculine. Donner la couronne à une femme, cela représentait un danger, le risque, de faire passer le pouvoir en des mains étrangères. Philippe V meurt en 1322 en ne laissant que des filles pour lui succéder, mais le problème de sa succession et aussi tôt résolu puisque son frère Charles lui succède, sous le nom de Charles IV Le Bel. Les femmes sont exclues de la couronne de France. En 1328, Charles IV meurt, et le problème de la succession du roi défunt se pose de nouveau. Il n'a qu'une fille âgée de 2 ans. Il n'a pas de frère pour lui succéder. La reine accouche d'une autre fille. En vertu du principe admis précédemment, les deux filles sont écartées de la succession, le principe a été admis précédemment. Qui allait monter sur le trône ? 1328 et l'exclusion des descendants par les femmes Les prétendants possibles à la succession : les trois frères avaient une soeur, Isabelle, l'épouse du roi d'Angleterre, Edouard II. Le couple royal, Isabelle-Edouard, avait pour fils le futur Edouard III d'Angleterre. Edouard III était le petit fils de Philippe Le Bel, et donc le neveu des frères décédés. Edouard III, par rapport à ses oncles, était parent au 3e degré. Mais, s'agissant de roi d'Angleterre, pouvait-il devenir roi de France ? En France, beaucoup voulaient éviter de donner la couronne au roi d'Angleterre. Autre prétendant, Philippe Le Bel avait un frère, Charles de Valois. Le fils de Charles de Valois, Philippe de Valois, était donc cousin germain de Jean, Philippe V, Charles IV et Isabelle. Il était donc un parent au 4e degré. Le roi d'Angleterre devait donc hériter du trône. Mais la situation différa, sur un fondement juridique. Philippe de Valois assure la régence et convoque une assemblée à laquelle Edouard III se fait représenter. L'assemblée choisit Philippe de Valois qui devient roi sous le nom de Philippe VI de Valois. La situation est très aisée à comprendre. Il va développer une argumentation qui était une argumentation juridique. En réalité, guidée par des préoccupations d'ordre politique. Il fallait barrer l'accès au trône de Plantagenet. Dans un premier temps, Edouard d'Angleterre admet cette situation. Puis, quelques années après, il a grandi et revendique son droit à la couronne de France. Ce revirement devait marquer le début de la guerre de Cent Ans. Les légistes de Philippe VI développent un argument juridique contre le roi d'Angleterre tiré d'une ancienne loi de plusieurs siècles, à la loi salique, du peuple franc (francs saliens). Ils invoquent un article de la loi salique (Ve - Vie siècle, un article qui écarte les filles de la succession à la terre des ancêtres. Une terre partagée entre les fils. Il y une confusion entre l'origine de la propriété privée (loi salique) et la succession du royaume de France. Mais l'argument est admis, on s'appuie sur la loi salique en disant que « en vertu de la loi salique, sont exclus de la succession au trône de France les femmes, et les descendants par les femmes «. L'argument est imparable  car Edouard III descend d'une femme (Isabelle) alors que Philippe VI de Valois descend d'un homme (Philippe de Valois). En conclusion au milieu du 13e, il est donc admis que la couronne se transmet de père en fils, par ordre de primogéniture. Il est admis que les femmes et leurs descendants sont exclus, et qu'à défaut de descendant en ligne directe, c'est le collatéral le plus proche, le frère, le neveu, par les hommes, qui succède. A l'épreuve des faits et des circonstances politiques, un droit s'était formé. Mais bientôt, la monarchie allait être confrontée à d'autres menaces. Le principe d'indisponibilité de la couronne (1420) Ce nouveau principe fut forgé au contact des nécessités, sous le règne de Charles VI, de la guerre civile entre Armagnacs et Bourguignons. Dans un contexte trouble, de guerre civile, les bourguignons, favorables à l'alliance avec l'Angleterre, et appuyés par la reine, Charles VI, devenu fou, signe le traité de Troyes en mai 1420 entre la France et l'Angleterre. Ce traité faisait passer la couronne à l'héritier d'Angleterre à la mort de Charles VI, autrement dit, le dauphin de France, le futur Charles VI, qui était l'héritier normal, en vertu du règne jusque-là observé, le dauphin de France se trouvait exclu de la succession au profit du roi d'Angleterre. Ce traité ne fut jamais appliqué puisque le roi d'Angleterre meurt en 1422, et le roi d'Angleterre ne laisse qu'un jeune enfant. Charles VII reprend le combat, Jeanne d'arc l'aide, et Charles VII est sacré à Reims, le traité de Troyes est ruiné. Avec ce traité existait une menace très sérieuse pour la monarchie française. Comme la position du dauphin était écartée dès avant le traité de Troyes, certains juristes favorables à la cause royale. Certains juristes vont s'attacher à justifier juridiquement ce droit. La riposte vient d'un juriste nommé Jean de Terre Vermeille, et Jean Juvénal des Ursins. Ces juristes démontrent que l'exclusion que Charles VI a fait de son fils par le traité de Troyes est sans valeur, ce qu'ils nomment la théorie statutaire de la couronne. Ces juristes considèrent que la succession au trône est particulière. Ils disent que l'office royal est un office public. Le roi ne jouit de cet office que pendant sa vie, à titre viager. Donc Charles VI n'a pas le droit de modifier les règles de transmission. Autrement dit, un roi ne peut pas déshériter son fils, tout simplement parce que ce roi n'est pas propriétaire de la couronne, il en est le dépositaire durant sa vie. Les juristes vont plus loin en disant que le successeur ne peut pas refuser le trône. L'ordre de succession à la couronne est pré-établi , régi par une coutume supérieure. L'ordre de succession est supérieur à la volonté du roi. Cette coutume ne peut pas la changer. La succession est régie par un véritable statut qui dépasse le roi. Charles VII est l'héritier nécessaire. Continuité de la couronne Sous les premiers capétiens, le sacre avait beaucoup d'importance. C'est une cérémonie qui donne des pouvoirs importants au roi. C'est une cérémonie qui frappe les imaginations (valeur juridique du sacre). Au 14e, les conceptions évoluent. Il existe désormais un décalage entre l'attitude des milieux officiels et le comportement des masses populaires. Autrement dit, pour les milieux officiels, les théoriciens n'accordent plus une grande valeur juridique au sacre, alors que l'opinion populaire reste très attachée à la cérémonie du sacre ; cérémonie fastueuse. Pour le peuple, c'est toujours le sacre qui fait le roi. On peut dire que l'histoire de Jeanne d'arc est significative, car sa mission principale est de faire couronner Charles VII. Mais si c'est le sacre qui fait le roi, il peut très bien y avoir un intervalle de temps entre la mort du roi et le sacre effectif. Il peut y avoir une vacance du pouvoir qui peut durer des semaines, des mois. Les juristes vont enlever de son importance juridique au sacre et dégager un nouveau principe, le principe de la continuité ou d'instantanéité, principe établi au début du 15e par des ordonnances de Charles VI de 1403 et 1407. C'est une époque trouble ; il est stipulé qu'en cas de décès du roi, son fils ainé devient roi instantanément. Pour exprimer cette continuité va être inventé la formule « le roi est mort, vive le roi «. Cette formule ne sera utilisée qu'au 16e siècle, à la mort de François Ier. Mais le principe est tout de même acté. Le statut du roi ne meurt pas en France car le fils est roi à la seconde de la mort de son père. L'Etat continue, il n'y a pas de vacances. La personne change, mais l'Etat continue. Mais il faut compléter que ce principe de continuité a connu une exception de taille, avec les régences. Il y eut des époques au cours desquelles le successeur désigné était mineur, enfant au moment de la mort de son père. Pour cela, on abaisse l'âge d'accession au trône. Un édit de Charles V de 1314 fixe l'âge de règne à 14 ans. Mais il est arrivé que le futur roi ait moins de 14 ans. Il y a donc une régence. La régence ne repose pas sur des principes précis. Elle est laissée à l'initiative royale et les dispositions ont été très variées. En matière de régence, certains rois ont essayé de dégager les principes, mais à la mort du roi, le contexte est toujours favorable aux intrigues. Souvent, les intrigues ont bousculé ces principes. Même en cas de régence, il est admis que si le nouveau roi est mineur, c'est lui qui est censé gouverner par l'intermédiaire du régent. Cela donne essence à ce nouvel adage, « le roi de France est toujours majeur «. Il règne par l'intermédiaire du régent. L'autorité royale se rénove, mais on va voir que l'affermissement de l'institution royale nécessite des moyens de gouvernement adaptés. Section 3 : Des moyens de gouvernement adaptés Pour s'édifier, l'Etat doit se doter de structures administratives modernes. D'une part, il lui fait des organes de direction fiables. Mais, dans un Etat normalement constitué, il faut y ajouter la gestion territoriale, car le domaine s'élargit ; pour gouverner ce territoire, il faut le quadriller, il faut mettre en place une administration véritable. Les rouages gouvernementaux Les institutions centrales de la royauté rompent peu à peu avec les anciennes caractéristiques féodales et prennent une physionomie propre ; on s'éloigne de la féodalité. Les premiers capétiens, les grands seigneurs, étaient entourés d'une Cour féodale de seigneurs, de châtelains, de vassaux. Au 12esiècle apparait une seconde formation composée de gens, les fidèles, les serviteurs, qui vivent dans l'entourage du roi. Cette seconde formation est appelée l'hôtel du roi. Ces organes vont subir des évolutions. L'hôtel du roi , la cour du roi, une administration centrale rudimentaire jusqu'au début du 13e L'hôtel du roi est simplement une suite royale ; c'est un organe qui englobe les proches, les familiers du roi, tous les subalternes, ceux chargés du service quotidien, qui s'occupent de la cuisine, de la fourrière, des vins, des animaux, de l'écurie ; tous ces gens sont auprès du roi et constituent l'autel du roi ; il y a également au côté du roi ceux qui s'occupent du trésor, de la comptabilité, avec pour responsable le chambellan. Il y a aussi dans l'hôtel des hommes plus savants que les autres, les clercs, qui rédigent les actes. Il y aussi des chevaliers, qui assurent des fonctions diverses, des fonctions d'administration, de garde royale ; l'autel est formé d'un personnel hétéroclite. Ce sont des éléments composites, des gens aux fonctions variées. Mais, au sein de l'hôtel, il existe quelques personnages qui ont des fonctions de direction, importants, soit des gens qui assurent la direction des services domestiques et qui sont très proches du roi et bénéficient de ses faveurs. Dans cet hôtel, une poignée de personnages. Il y a un personnage qui porte le nom de sénéchal, personnage très important qui dirige les services de la maison du roi, qui administre les domaines du roi ; si le roi est absent ou indisponible, il peut remplacer le roi dans le commandement de l'armée, et c'est aussi le chef de la justice. Le sénéchal représente un danger pour la royauté. A la fin du 12e, ce personnage disparait, la charge est supprimée. Deuxième personnage important dans cet hôtel du roi, un personnage que l'on appelle le chambrier, c'est le gardien de la chambre du roi, il devient très vite responsable du Trésor, mais son rôle décline au temps de Philippe Auguste, car à ce moment-là, le roi confie la garde du trésor aux Templiers, à l'Ordre des Templiers. Troisième personnage, le bouteiller, a la charge de la cave et de l'administration des vignobles, et donc il veille à l'administration financière des domaines. C'est un office qui disparaitra sous Charles VII. Un autre officier, dans cet hôtel du roi, le connétable : c'est le chef des écuries royales ; mais, avec la disparition du sénéchal, le connétable va exercer des fonctions militaires, mais néanmoins réduites pendant longtemps. Le véritable chef de l'armée féodale était le roi. Cinquième personnage, le chancelier. C'est le personnage le plus important qui domine toute l'Histoire de la monarchie dès l'origine. Il a des fonctions politiques auprès du roi ; il est le chef des écritures, de ceux qui rédigent des actes. C'est lui qui garde le sceau royal, qui va permettre de sceller les actes. Sous Philippe Auguste, son rôle ne fait que croitre, et c'est normal, car, aux 12e et 13e, l'écrit et la culture se développent, et donc le rôle du chancelier va en augmentant. C'est une cour féodale, jusqu'au 13e. Jusqu'au 13e, le roi est un seigneur ; comme tout grand seigneur, le roi a sa cour féodale, une cour qui a pour fonctions de donner des avis au roi dans les différents domaines, politiques, administratifs, judiciaires. Mais, l'autorité royale progresse ; d'où, de nombreuses affaires deviennent trop techniques pour cette cour de vassaux, une cour qui est formée d'hommes qui savent se battre, qui ne sont pas des techniciens. C'est ainsi que, dès la fin du 12e, des techniciens commencent à prendre place dans la curia legis. Ces techniciens sont des clercs, des hommes d'église, ou des laïcs, qui ont fait des études et sont d'origine modeste, et qui, rapidement, vont devenir le noyau stable de la curia legis, alors que les vassaux, les hommes ayant composé la cour, n'assistent désormais qu'occasionnellement aux travaux de la curia legis. Au 13e, tout se complique, des spécialisations apparaissent au sein de la cour, de la curia legis. Ainsi vont apparaitre dans cette cour des professionnels, des spécialistes de la justice, des finances, des professionnels de l'administration. Une administration centrale spécialisée à partir du 13e Les transformations de l'hôtel du roi L'hôtel du roi subit effectivement des adaptations nécessaires au bon développement de l'autorité royale. Deux aspects majeurs. Un grand spécialiste de la guerre, le connétable Le connétable acquiert une autorité considérable sous Charles V ; le personnage est nommé dans cette fonction à vie et commande tous les gens de guerre sans exception, y compris les princes du sang. La puissance de ce personnage est incarnée par Bertrand du Guesclin, qui a été le premier grand chef des armées au 14e, en qualité de connétable et qui saura se montrer digne de sa charge dans le combat contre les anglais durant la Guerre de Cent Ans. Un grand légiste, le chancelier A partir du 13e, le chancelier est, depuis Philippe Le Bel, depuis la fin du 13e, surtout recruté parmi les légistes, parmi les spécialistes de droit romain. Jusqu'en 1789, il reste le ministre le plus important ; il reste responsable de la rédaction des actes royaux qui deviennent de plus en plus nombreux. Il reste gardien du sceau royal, pour sceller ses actes ; c'est une fonction essentielle, car avant de sceller un acte, avant d'apposer le sceau royal, il procède à un contrôle des actes royaux. Autrement dit, quel est son rôle ? S'il estime que la décision royale est inopportune, ou contraire au droit, non-conforme au droit, il en informe le roi, qui peut changer la teneur de l'acte. Le Chancelier est le collaborateur le plus proche du roi ; il est, en quelques sortes, le chef du gouvernement, chargé de présider le Conseil en l'absence du roi, chargé de représenter le roi devant les Etats généraux. Changements, le connétable devient un chef de guerre majeur, le chancelier, qui devient un chef de gouvernement. Un personnel de techniciens En effet, sous le règne de Louis IX, à la fin du 13e, des hommes instruits, des clercs de confiance, sont chargés de recevoir les plaintes des justiciables. Ce sont ces clercs qui vont déterminer si le dépôt de plainte est recevable, car n'importe qui peut déposer plainte contre le roi. Ces plaintes sont trop nombreuses, et il faut bien filtrer les plaintes. Leur fonction va au-delà de ce premier stade, car les clercs vont juger eux-mêmes les petites affaires et devenir des gens importants, les maîtres des requêtes, dont l'effectif ne va cesser de croitre au 15e pour faire face à l'inflation des plaintes. A leurs côtés va apparaitre une foule de secrétaires, de notaires, de petits officiers chargés des écritures des actes, des hommes placés sous l'autorité des maîtres des requêtes. Ces hommes sont au service direct du chancelier. D'autres sont attachés au service personnel du roi. A partir du 13e, les temps changent. Les démembrements de la curia legis Ces changements de la curia legis se sont amorçés au 13e siècle, mais la Cour du roi se démembre véritablement dans la deuxième moitié du 13e. On assiste alors à la création de trois organes, de trois institutions, qui vont constituer jusqu'à la fin du l'Ancien régime, les principaux rouages de l'Etat. Ces trois institutions sont le Conseil du roi, la Chambre des comptes, le Parlement de Paris. Le conseil du roi Institution majeur à laquelle des ouvrages entiers ont été consacrés. Dès le règne de Philippe Le Bel, cet organe se détache de la Cour ; il devient véritablement l'institution gouvernementale ; c'est un organe inséparable de la personne du roi. Sa proposition est très souple, puisqu'elle dépend de la seule volonté royale, avec une évolution. La part de l'élément féodal qui en constituait le noyau tend à décliner. Autrement dit, la place va être prise par l'élément professionnel, formé de gens instruits, de gens expérimentés. Autrement dit, ceux qui vont constituer un rôle majeur, ce sont les légistes, les spécialistes du droit romain. Ces légistes sont des hommes dévoués au roi, de bon conseil, des techniciens de l'administration, des hommes rompus aux subtilités de la politique. Le Conseil du roi, formé de ces légistes, est un organe consultatif, qui intervient dans tous les domaines importants qui peuvent concerner le royaume. Ce peut être des questions de politique extérieure, de finances, de la justice, de l'administration. Le Conseil s'intéresse à ces questions majeures. Quand le roi rend sa justice, il le fait dans le cadre du Conseil. La chambre des comptes Regroupe un petit nombre de spécialistes, chargée de vérifier les recettes et les dépenses par les agents royaux. Puis, cette chambre des comptes a également des fonctions de justice, des fonctions juridictionnelles, sur les officiers, sur les agents ayant des responsabilités financières. Mais son rôle est très large car elle veille aussi au domaine royal, à l'ensemble des terres. C'est elle qui est chargée de défendre les droits du roi. Cette chambre des comptes est l'ancêtre lointaine de la Cour des comptes créés par Napoléon Ier. Le Parlement de Paris Le Parlement est le lieu où l'on parle. Il se détache de la curia sous le règne de Saint-Louis. Très vite, on voit apparaitre une prépondérance de l'élément professionnel sur l'élément féodal. A l'origine, le Parlement était itinérant. Le Parlement va se fixer à Paris, très peu de temps après son apparition. Il se fixe dans le palais royal au coeur de l'Ile de la Cité. C'est là qu'il se réunit ; ce n'est pas un organe permanent. Il s'y réunit en sessions biannuelles. Son organisation s'articule en plusieurs chambres ; chaque chambre a des fonctions spécifiques. La plus importante de ces chambres est la Grand'chambre. C'est une chambre qui juge mais qui assume d'autres fonctions extrajudiciaires. Elle juge et assume des fonctions extrajudiciaires, notamment l'enregistrement des actes royaux et des ordonnances royales. A côté de la grand'chambre existe la chambre des enquêtes ; c'est une chambre d'instruction qui instruit les dossiers civils. La chambre criminelle, soit la tournelle, qui est compétente pour les affaires pénales. Ces deux chambres sont compétentes pour instruire les affaires civiles et pénales, ce sont deux chambres d'instruction. Ces affaires leurs sont transmises par une autre chambre, la chambre des requêtes dont l'attache est de fixer les affaires portées devant le Parlement. La tache principale du Parlement est de juger en appel (après les baillis et les sénéchaux). Le Parlement a une autre fonction, car à côté de cette fonction de justice, le Parlement est associé à l'exercice de la fonction normative. La loi ne peut s'élaborer sans une intervention du Parlement. L'administration centrale se spécialise, l'hôtel du roi se transforme avec les connétables et les chanceliers, la curia legis connait des démembrements par les 3 organes essentiels. Apparition des Etats Généraux Ils ont été réunis pour la première fois en 1302 par Philippe Le Bel. Leur réunion résulte d'une volonté royale d'étendre son information au-delà de sa cour. Ce qu'il veut c'est s'appuyer sur l'opinion de tout son peuple. Au sein de cette grande assemblée des Etats généraux, sont représentés les divers éléments de la population, clergé, noblesse, Tiers-Etat. Aux 14e et 15e, les Etats généraux sont convoqués régulièrement par le roi pour obtenir des aides financières, des subsides. Le gouvernement capétien, du 12e au 15e, s'est doté d'organes rénovés. C'est déjà beaucoup. L'Etat est en train de se construire, l'administration centrale se met en place. Mais c'est insuffisant, car pour maitriser le territoire, cette construction administrative doit être prolongée, cette action royale doit être prolongée sur l'ensemble du territoire. Il faut mettre en place, pour bien maitriser son territoire, une administration modernisée. Ce royaume qu'il reconstitue, il parvient à le garder car son entourage forme les lois, l'inaliénabilité du domaine, les apanages...auxquels doit s'ajouter l'administration pour maintenir l'Etat. Les capétiens vont y parvenir. La gestion territoriale Il s'agit, pour le roi, de passer d'une gestion domaniale à un gouvernement central. C'est un travail, un labeur long durant plusieurs siècles, un gouvernement contrôlant un vaste territoire. Il faut une administration efficace, un appareil d'Etat efficace. A l'époque féodale, le roi est comme les seigneurs dans leur ensemble. Le roi a des représentants locaux, des représentants dotés d'une compétence très large, les prévôts ; c'est par ces agents domaniaux que le roi exerce son autorité. Au 12e, le domaine s'agrandit, amenant à des structures administratives insuffisantes. Il faut les rénover et contrôler les prévôts. Les prévôts sont auteurs de nombreuses exactions, d'abus. Philippe Auguste créé alors un rouage supplémentaire, des hommes nouveaux, issus de son entourage. Ces hommes sont les baillis au Nord, et les sénéchaux au Sud. Ces hommes, baillis ou sénéchaux, à l'origine, sont chargés des missions d'inspection. Ce sont des inspecteurs. Ce sont des agents itinérants, à l'origine, puis se fixent dans des circonscriptions. Ils deviennent des agents sédentaires, qui se fixent dans des circonscriptions étendues, chacune englobant plusieurs prévôtés, les baillages ou les sénéchaussées, et à l'intérieur de ces circonscriptions, ces agents exercent de nombreux pouvoirs. Ils interviennent dans tous les domaines. Ce sont des agents que le roi maitrisera assez bien, ce sont des agents du pouvoir centralisateur, assez bien maitrisés par le roi. C'est à travers eux que s'exprime la souveraineté royale. Le roi organise leur subordination. Il les nomme, les mute, les astreint à venir rendre compte à Paris de leur gestion, devant le Parlement de Paris. Si le roi le juge nécessaire, il révoque ces agents. Avec le temps, le roi capétien va restreindre les pouvoirs des baillis, car certains parmi eux vont, même s'ils sont subordonnés, se montrer indociles, commettre des abus, des exactions. Peu à peu, le roi va confier à des spécialistes certains secteurs techniques de la gestion locale qui appartenaient aux baillis. Des secteurs entiers échappent aux baillis, notamment financiers ou militaires. C'est ainsi qu'à la fin du 15e, les baillis exercent une charge qui, en grande partie, est devenue honorifique. Cependant, les baillis se maintiendront jusqu'à la révolution. A côté d'eux, au niveau local, il y a de plus en plus de spécialistes de la gestion des affaires locales dans le domaine militaire. Il faut ajouter, pour être complets, que le roi, pour être efficace, organise des contrôles. Il s'agit de contrôler l'administration. C'est ainsi que Saint-Louis, Louis IX, envoie sur le terrain, ce que Philippe Auguste avait fait, des enquêteurs royaux en tournée d'inspection, des hommes dont la fonction va être de réformer les abus des baillis, qui iront sur place, un peu partout dans les provinces, dans les baillages, qui iront sur place défendre les intérêts du roi, de la monarchie. Enfin, dernier organe à côté des baillis, sénéchaux, enquêteurs, au 15e siècle apparait une institution satisfaisante, les gouverneurs. Le gouverneur est un personnage majeur, placé à la tête d'un territoire, beaucoup plus vaste que le baillage ; son territoire englobe toute une série de baillages. Sur ce territoire très étendu, il est investi de toutes les fonctions, de la plénitude des fonctions. Cela veut dire qu'il est un véritable vice-roi. En conclusion, en trois siècles, les capétiens ont réussi à mettre en place une véritable organisation administrative, dans laquelle les premières racines de la fonction publique prendront leur force. On a vu s'affermir l'institution monarchique ; on a vu la renaissance de l'Etat au 15e. Dans ce contexte nouveau, le pouvoir royal allait jouer un rôle de plus en plus grand dans la création de l'ordre juridique ; effectivement, dans les derniers siècles du Moyen-Age allait se faire la rencontre du pouvoir et du roi. CHAPITRE 2 : LES TENTATIVES ROYALES POUR GUIDER LE SORT DU DROIT Rôle joué par la monarchie dans la création de l'ordre juridique. Dès le bas Moyen-Age, du 13e au 15, le pouvoir agit sur trois plans dans ses rapports avec le droit. Il contrôle le droit, il fait le droit, mais aussi, troisième plan, il freine le droit. Cela signifie qu'il essaie de contrôler la coutume (Section 1). Comment le pouvoir royal met-il en oeuvre son pouvoir normatif (Section 2) ? Le roi freine, dans leur essor, les droits savants, les droits susceptibles de lui nuire, à l'instar du droit romain, ou comment il utilise les règles des droits savants en les modelant pour asseoir sa souveraineté (Section 3). Section 1 : Le contrôle progressif de la coutume Le roi intervient dans la vie du Droit comme il le fait sur le pouvoir féodal, soit qu'il intervient jamais avec brutalité, mais par touches successives, dans le respect de l'ordre juridique, institutionnel. Il cherche par divers moyens, à infléchir l'ensemble coutumier. L'objectif royal est clair, réaliser l'unité du droit dans une France où la coutume est partout. La coutume est créatrice d'une multitude d'identité régionale, locale ; alors le roi va agir lentement mais efficacement, sur la coutume. Dans un premier temps, il se contente de faire appliquer la coutume, mais en essayant de mieux la connaitre ; un jour, il va franchir un pas capital car il va encourager la mise par écrit des coutumes. Le roi se contente de faire appliquer la coutume et finira par la mettre par écrit. Le juge royal et le problème de la coutume La connaissance de ce droit oral est lié au développement de l'administration, soit qu'on va mieux connaitre la coutume dès lors que les baillis sont mis en place. Les différentes autorités de cette époque, administratives ou judiciaires, agissent au nom du roi et jugent pour lui. Dans un procès, on va appliquer la coutume. La première question est la suivante : quel est le droit applicable ? La coutume invoquée existe-t-elle, comment la prouver ? Lorsqu'un juge est saisi d'une affaire, il doit déterminer si la coutume existe, si la coutume est notoire, tenue pour existante, connue par tout le corps social. La partie au procès qui invoque cette coutume est dispensée d'en faire la preuve puisque chacun sait que la coutume existe. Le juge qui déclare qu'une coutume est notoire va s'informer par ces propres moyens. Comment peut-il affirmer qu'une coutume est notoire ? La coutume est notoire car elle a été approuvée par l'autorité souveraine ; le roi a accordé une charte à une communauté villageoise, à une communauté urbaine. Cette charte est une mise par écrit de coutumes. Dès lors que la coutume est écrite et figure dans une charte, elle est notoire. Il est aussi possible que la coutume ait été consacrée par des jugements précédents, les jugements forment une jurisprudence et la jurisprudence contient le Droit, soit que la jurisprudence porte mention de nombreuses coutumes existantes, et donc la jurisprudence sert de référence aux jugements suivants. La tache du juge est facilitée, car les décisions des juridictions sont mises par écrit. Il est de plus en plus fréquent de retrouver la trace de nombreuses coutumes car elles sont écrites dans des jugements. Le juge va appliquer discrétionnairement les coutumes notoires. Le juge royal, le bailli, le Parlement de Paris, va appliquer la coutume dans un sens favorable au roi par l'herméneutique. Que se passe-t-il lorsqu'un plaideur allègue une coutume dont on ignore si elle existe vraiment. L'environnement ne connait pas la coutume ; comment va-t-on faire, que va faire le juge ? Le plaideur, dans ce cas, invoque une coutume dont la notoriété est faible, doit faire la preuve de cette coutume ; pour cela, il existe des procédures. Une enquête va être effectuée ; les modalités de cette enquête varient selon qu'on est au Sud ou au Nord de la France. Quelles sont les modalités de l'enquête ? Dans le Midi, on procède à une enquête par témoin singulier : le juge écoute des témoins séparément ; dès lors que le juge recueille 2 témoignages concordants, la preuve de la coutume est faite, alors que dans le Nord, c'est plus complexe. Dans le Nord, on procède à une enquête, l'enquête par turbe. Les témoins arrivent en groupe et ne sont pas auditionnés séparément. Le groupe, turba, la foule en latin, représente le peuple, et est formé de dix personnes ; parmi ces dix personnes, ces tourbiers, l'une est désignée par les autres, et cette personne répond aux questions du juge au nom des autres ; le tourbier désigné déclare si la coutume existe ou n'existe pas, soit que la turbe est un jury qui se prononce sur l'existence de la coutume. Pour que la coutume soit tenue pour existante, il faut que les membres de ce jury décident et que la décision soit prise à l'unanimité. Dès qu'il y a, au sein de ce groupe de dix, une voie dissidente, la preuve de la coutume n'est pas faite. Cette procédure de l'enquête par turbe sera règlementée par une ordonnance de Saint-Louis de 1270. Le second aspect, concernant ce premier paragraphe, est le roi et la question de la coutume raisonnable. Le roi et la coutume raisonnable Dès le 11e, le roi intervient dans le domaine coutumier, on a vu que conformément à la promesse de son sacre, il doit assurer la justice, et abolir les mauvaises coutumes, car les mauvaises coutumes sont contraires au droit, à l'équité. En revanche, chaque fois que le roi l'estime utile, il confirme les coutumes jugées bonnes, jugées conformes à l'équité. Pour le groupe social concerné, la confirmation par l'autorité supérieure constitue un gage de sécurité ; notre droit est intouchable. Pour le roi, confirmer la coutume c'est aussi important, car c'est une occasion supplémentaire d'affirmer sa suprématie, son autorité. Les bénéficiaires de ces confirmations des coutumes sont de plus en plus nombreuses à partir du 12e, sont les églises, les communautés ecclésiastiques, les villes. Le roi confirme les coutumes par écrit, il en profite alors pour concéder par petites touches des droits nouveaux. En agissant ainsi, le droit qui concède, confirme, le roi contrôle les coutumes. Ces coutumes, petit à petit, il les coule dans le moule de l'ordre juridique qu'il créé. Il y a une évolution qui se fait petit à petit autour de quelques principes, de ces normes disparates on va créer une organisation juridique autour de quelques principes. L'oeuvre du roi est de bâtir peu à peu un droit cohérent dans un ensemble incohérent, par la confirmation, la modification des coutumes dans le sens de l'intérêt royal. Mais, il y a deux obstacles majeurs qui viennent freiner l'emprise royale sur la coutume. Le premier est la diversité coutumière. Les coutumes demeurent diverses jusqu'à la Révolution. Enfin, la coutume est orale. Dès le règne de Saint-Louis, le roi veut encourager la mise par écrit des coutumes ; c'est le début du processus qui, plusieurs siècles après, apportera le code civil. Dès le 13e, les rédactions privées se multiplient, se succèdent. La mise par écrit des coutumes encouragées par le Droit. Le haut Moyen-Age n'avait pas oublié l'usage de l'écrit hérité de Rome, mais rares étaient ceux qui savaient lire et écrire au 5°/10° ; au 12e, les relations d'affaires se développent ; c'est l'émergence du droit commercial. On ne peut se satisfaire de simples coutumes orales. Au 12e, l'instruction progresse ; de plus en plus de gens savent lire et rédiger. L'écrit se banalise peu à peu. Au niveau local, les manifestations écrites de la coutume deviennent plus nombreuses, des actes de la pratique plus nombreux, type les actes notariés, les chartes urbaines, les documents jurisprudentiels. Ce sont des documents majeurs, mais de portée modeste. Les 13e et 14e voient l'apparition d'un grand nombre de travaux qui sont des coutumiers privés, soit des textes qui rassemblent des coutumes, des ouvrages de coutumes, des compilations de coutumes. La rédaction de ces ouvrages n'est pas commandée par la royauté mais encouragée par elle. Ce sont des traités de droit coutumier, des compilations privées rédigées par des praticiens du droit, et parfois par des anonymes. Ces ouvrages ont un caractère territorial, soit qu'ils rassemblent les coutumes d'une région, d'une province, d'un baillage, d'une principauté. Donc, les coutumiers ne sont pas des rédactions officielles commandées par le pouvoir politique, ce sont des oeuvres privées. Mais, les rédacteurs sont souvent des agents royaux, des baillis, donc des gens qui agissent avec les encouragements du roi qui n'a rien commandé. Et, ces agents royaux, en compilant la coutume, ajoutent des dispositions dans un sens toujours favorable au droit royal en formation. Le roi favorise ces rédactions. Ces rédactions sont rencontrées surtout dans le Nord de la France. C'est dans le Nord de la France que le roi par l'intermédiaire de ces agents, va se frayer un passage dans le monde juridique. La rédaction des coutumiers commence vers la fin du 12e, avec les coutumiers normands. Ca n'est pas étonnant car les territoires normands se sont dotés très tôt d'une organisation politique très forte, et le droit normand a atteint très tôt un haut degré de maturité. Deux coutumiers normands, le Très ancien coutumier de Normandie, coutumier anonyme. C'est un texte rédigé vers 1190, dans lequel on a un tableau des institutions normandes. Un peu plus tard, vers le milieu du 13e, parait un autre ouvrage, le Grand coutumier de Normandie ; c'est une oeuvre très élaborée, qui est construite sur un plan méthodique. Ce n'est pas un texte désordonné. On a un texte qui raconte très bien le droit normand sous tous ces aspects. C'est un véritable code pour les tribunaux de Normandie. Le Grand coutumier de Normandie présente une grande curiosité car on s'y réfère souvent dans les iles de Jersey et de Guernesey. Mais différentes provinces françaises vont avoir leur coutumier au 13e : 1250, le Conseil à un ami, rédigé par un bailli, Pierre de Fontaines à la demande de Saint-Louis. 1260, région d'Orléans par un anonyme, le Livre de jostice et de plait. 1270, Les établissements de Saint-Louis, considéré par erreur comme commandé par Saint-Louis ; oeuvre anonyme relative à la Touraine et à l'Anjou. Mais le plus important est celui de Philippe de Beaumanoir qui a rédigé un ouvrage, les coutumes de Beauvaisis, l'oeuvre la plus remarquable du Moyen-Age, oeuvre rédigé entre 1279 et 1282, à une époque où Beaumanoir était balli de Clermont-en-Beauvaisis ; il décrit les coutumes de Beauvaisis mais il fait aussi des rapprochements avec les autres coutumes, il compare, expose des initiatives qu'il a eu comme bailli ; l'oeuvre est volumineuse, comporte 70 chapitres qui traitent de l'ensemble des matières juridiques privées et publiques. Au 14e, le mouvement important jusqu'alors se ralentit malgré de nouvelles rédactions, telles que le Grand coutumier de France, d'Ile de France, rédigé par Jacques d'Ableiges. Ces rédactions émanent de baillis, d'agents royaux, des rédactions qui annoncent la volonté royale de maitriser la coutume, qui annonce une rédaction plus officielle, car ces oeuvres, nombreuses, donnaient à la coutume une publicité. Il fallait une rédaction officielle pour donner à la coutume son authenticité. Entre 1300 et 1350, quelques réalisations locales sont conduites, sans plan d'ensemble. Par exemple, en 1417, en Poitou, l'autorité fait rédiger par plusieurs praticiens la coutume de Poitou, commandée par l'autorité ; c'est une petite initiative ; la première initiative se situe en 1454. Charles VII veut répondre à ce dire d'une rédaction officielle. Charles VII commande la rédaction de toutes les coutumes de France. Il fait dans l'article d'une de ses grandes ordonnances, l'article 125 de l'ordonnance de Montils-les-Tours. Cette oeuvre se réalisera-t-elle ? Mais ces expressions de la souveraineté royale vont au-delà de ces tentatives de contrôle de la coutume, car à l'époque, le roi retrouve son pouvoir normatif, son pouvoir de faire le droit. Section 2 : Le pouvoir normatif retrouvé Le droit royal est effectivement une source en expansion, en développement. Cependant, nous verrons que jusqu'au 15e, cette oeuvre reste relativement modeste. Le droit royal, source en expansion La loi du roi s'affirme peu à peu, s'affirme confortée par la doctrine et revêt des formes variées. Les progrès de la législation royale Question des ordonnances royales ; pendant longtemps, ces ordonnances royales se sont développées dans un cadre géographique restreint ; elles n'ont pas dépassé le domaine royal. Dès le milieu du 12e, le roi essaie de faire appliquer certaines de ces ordonnances en dehors du domaine. Comment faire appliquer une ordonnance royale en dehors du domaine ? Il réunit une cour de seigneurs, et demande aux différents seigneurs ayant accepté de venir de faire appliquer l'ordonnance chez eux. L'ordonnance devient applicable dans les domaines des seigneurs qui y ont souscris, qui ont donné leur accord. Elle n'est pas applicable sur les terres de ceux qui la refusent. Plus tard, au début du 13e, le roi demande toujours l'adhésion des seigneurs, des vassaux ; mais il prétend à présent que l'ordonnance souscrites par certains des seigneurs seulement ; il prétend que l'ordonnance souscrite par certains des seigneurs s'impose à ceux qui n'y ont pas adhéré. A la fin du 13, l'intervention des barons se réduit à une simple consultation des plus proches qui n'a plus d'influence sur l'application de la loi. L'appui des doctrines Au 14e, le pouvoir législatif du roi s'étend à l'ensemble du royaume, et au 14e le roi cesse de faire mention de l'approbation des seigneurs. Le roi bénéficie alors de l'appui des doctrines. La législation progresse, le roi s'impose à ce monde des seigneurs, mais il bénéficie de l'appui des doctrines. Le roi capétien est l'héritier de l'empereur carolingien ; sa mission est de rendre la justice, assurer la justice, protéger les sujets. Les théoriciens, la doctrine ne cessent de rappeler les bases théoriques du pouvoir, un pouvoir qui a souvent été géné par l'obstacle que constituait les seigneurs. La doctrine invente toujours cette conception du pouvoir carolingien. Pour les légistes du droit romain mais aussi pour les praticiens des coutumiers, le roi est vraiment l'organe de l'intérêt général, du commun-profit ; les auteurs disent qu'il est celui qui a la garde générale du royaume. Il se situe au-dessus des seigneurs. Les seigneurs ne représentent que des intérêts particuliers. Puisque ce roi représente l'intérêt général, il doit légiférer chaque fois que l'utilité publique est en cause. Les ordonnances royales du 13e rappellent cet objectif, affirment expressément cet objectif. En 1283, dans ces documents de Beauvaisis, Beaumanoir formule l'essentiel d'une doctrine du pouvoir législatif du roi. Il écrit la chose suivante : « le roi souverain par dessus-tous, a la garde générale du royaume. A ce titre, il peut faire tout établissement pour le commun-profit, et ce qu'il prescrit doit être obéit «. Pour justifier la conquête du pouvoir législatif du roi, les juristes invoquent aussi le droit romain, par l'utilisation d'adages empruntés au Digeste de Justinien, qui font du roi le maitre de la loi et du droit. Le prince est délié des lois. Ce qui a plus au prince, a force de loi. Les auteurs des coutumiers reprennent des formules à peu près analogues. Au 13e, ces affirmations sont un peu éloignées de la pratique, vécues car au 13e siècle la royauté bute encore sur des obstacles et ne parvient pas à faire accepter la suprématie de sa législation. Peu à peu, le pouvoir normatif du roi s'affirme tout en restant subordonné au droit divin. Les formes de la législation royale Ces écrits royaux sont sous deux formes : les innombrables actes qui s'attachent à régler des situations particulières, les actes qui s'adressent à un groupe, une personne ; autrement dit, dans ses écrits, le roi va accorder des lettres d'anoblissement, des privilèges, va conférer une grâce quelconque ; tout cela fait partie des actes courants de gestion, des actes courants d'administration que l'on qualifie de lettres royaux. Le pouvoir normatif s'appuie sur des actes à valeur générale ; au 13e, le terme le plus courant est celui d'établissements, employé par Beaumanoir. Au 14e, on emploie un autre vocable, ordonnances, préparées par le chancelier, textes signés par le roi ; le chancelier scelle les ordonnances, avec le grand sceau du royaume ; puis, un organe est appelé à intervenir, le Parlement, présent pour enregistrer les ordonnances royales. Avant de sceller l'ordonnance, le chancelier jouit d'un droit de remontrance : s'il le juge nécessaire, il peut s'adresser au roi en lui disant que l'ordonnance n'est pas conforme au droit , n'est pas claire ; le roi va faire connaitre sa volonté, soit en modifiant, soit en confirmant. Le chancelier va s'incliner devant la volonté royale. Le Parlement de Paris, concernant les ordonnances, va avoir un rôle majeur. Il peut présenter des remontrances au roi, en démontrant qu'il existe des raisons opposables au texte, le Parlement peut refuser d'enregistrer. La position du Parlement parvient au roi ; le roi peut accepter les remontrances du Parlement, peut accepter de surseoir à l'application de l'ordonnance, de la modifier, mais il peut aussi passer outre, ne pas tenir compte la volonté du Parlement. Le roi envoie alors au Parlement des « lettres de jussion «, soit qu'il ordonne au Parlement l'enregistrement. Alors, le Parlement peut s'incliner face à la volonté royale, il peut faire transcrire l'ordonnance sur un registre du Parlement, et sur ce registre le Parlement fait inscrire une mention, « lu et publié de l'exprès mandement du roi «. Le Parlement rejette sur le roi la responsabilité de l'ordonnance. Mais, autre phase de la procédure, le Parlement peut s'opposer de nouveau ; il peut faire de nouvelles remontrances au roi. On dit qu'il fait au roi des itératives remontrances, si le roi adresse de nouvelles lettres de jussion au Parlement, le Parlement peut s'incliner à la deuxième phase. Quelquefois, au lieu de passer par cette seconde phase, le roi décide de se rendre en personne au Parlement au lieu de passer par les secondes lettres de jussion, le roi tient « un lit de justice «. Au cours d'une séance extrêmement solennelle, le roi fait enregistrer l'ordonnance d'autorité. Alors, les ordonnances royales ne sont pas rédigées n'importe comment ; elles répondent à une structure précise ; ce sont des « lettres ouvertes « car chacun peut en prendre connaissance, plus tard de « lettres patentes «. Une ordonnance débute par l'adresse (à son peuple) ; un préambule (dispositions générales, sur la religion, sur les devoirs, les droits du roi...) ; les raisons ayant motivé l'ordonnance ; le contenu de l'acte (objet de l'ordonnance) ; l'ordonnance porte mention du lieu, de la date, de la signature du roi. Lorsque l'ordonnance est enregistrée par le Parlement, elle devient exécutoire ; elle est envoyée aux agents territoriaux qui en assurent la publication et l'application. Pour terminer, le pouvoir législatif du roi fait des progrès entre le 12e et le 15e. Ce pouvoir législatif du roi, qui a beaucoup progressé illustre la renaissance de la souveraineté royale ; mais il faudra considérer que l'oeuvre réalisée demeure modeste. Le droit royal, une oeuvre modeste Les interventions législatives du roi ne s'exercent que dans un champ restreint, réduit. La portée de la loi du roi est souvent insuffisante. Nous verrons aussi que le pouvoir législatif du roi connait des limites, des tempéraments. Le domaine réduit de la loi La coutume, encore au Moyen-Age, l'emporte largement sur la loi. Il y a aussi un vaste domaine qui appartient au droit canonique, au droit de l'Eglise ; la coutume, le droit canonique, vient restreindre le champ du droit royal. L'ordonnance royale régit principalement le droit public. Le droit privé est principalement régi par la coutume. A quelques exceptions près, les ordonnances royales concernent le droit public. Elles concernent la police du royaume, elles concernent le maintien de l'ordre, le contrôle de l'économie, la police des moeurs, la lutte contre les abus de toute sorte. Il y a aussi des ordonnances qui concernent tout ce qui concerne l'organisation du royaume, soit la fiscalité, la justice, l'administration, les services publics. Parmi ces ordonnances, l'ordonnance de 1155, qui est relative à la paix du royaume, qui établit une paix de 10 ans dans le royaume. L'ordonnance de 1190 qui concerne le droit public, la réorganisation de l'administration. 1254 et 1256, ordonnances de Saint-Louis relative à l'Administration. Les ordonnances se multiplient au 14e, afin de devenir de plus en plus nombreuses ; elles concernent le droit public. La portée de ces ordonnances est souvent insuffisante. Le peu d'effets de la législation royale Aux 14e et 11e, la royauté française connait des crises. La loi, qui est l'expression de la souveraineté, subit le contrecoup fâcheux de ces crises. C'est une époque où s'exprime une volonté de changement, de réformes, parce que le monde est en mutation. Il y a un sentiment d'insécurité, d'insatisfaction. Les rois successifs de cette période entendent ces besoins exprimés par leurs sujets. Les rois vont prendre des mesures, des ordonnances de réformation. L'exemple est donné par une ordonnance de Philippe Le Bel au début du 14e ; cette ordonnance de 1303 va être renouvelée une trentaine de fois. Vouloir réformer les institutions dans un monde en difficulté est une véritable obsession de la monarchie. Cette volonté de réforme témoigne de l'insuffisance des structures administratives, judiciaires, financières. Ces répétitions de mesures souvent grandioses, ambitieuses, attestent du peu d'effets de la loi, de l'inefficacité de la loi. Les limites au pouvoir législatif royal Ce qui limitait les pouvoirs du roi était le pouvoir féodal, seigneurial. Peu à peu, le roi législateur a su se libérer de l'emprise féodale. Mais, à partir du 14e, si le roi est bien l'auteur de la loi, les mesures qu'il prend sont souvent imposées par une force nouvelle que représente les Etats généraux. Les Etats commencent à s'occuper de législation royale sous les Valois, vers 1355-1358. En effet, à ce moment-là, les Etats généraux formés des représentants du Clergé, de la Noblesse, édictent, imposent au Dauphin Charles V un certain nombre d'ordonnances de réformation dans un contexte de crise. Par la suite, pendant un siècle et demi, les Etats généraux vont participer fréquemment à la législation. Ils expriment des voeux, des doléances, des souhaits. Ils présentent ce qu'ils souhaitent, devant le trône. En réalité, ces doléances sont bien souvent des exigences. On constate que bien souvent, les ordonnances royales se contentent de reprendre les demandes des Etats généraux. A partir de 1484, les Etats généraux ne se réunissent plus. Ils reparaissent en 1560. Pour en finir avec ces aspects, en définitive, le pouvoir royal progresse, mais lentement. Ce qui est sûr, c'est qu'il progresse sans cesse. Il progresse en empiétant sur le champ de la coutume. Peu à peu, au fil des siècles se met en place un ordre juridique fait de normes, de règles adaptées aux besoins, de normes fondées sur l'utilité publique, sur le commun profit. La maitrise progressive de ce pouvoir normatif constitue évidemment un attribut royal essentiel dans la reconstitution de l'Etat. Voilà quelles sont les sources du droit français. Cette période voit aussi l'essor des droits savants. Mesure dans laquelle ces droits savants vont conforter l'autorité royale. Section III : L'empreinte des droits savants Comment la France accueille-t-elle la renaissance du droit romain ? Le droit canonique poursuit-il son essor des siècles précédents ? La renaissance du droit romain Cette renaissance a généré un mouvement intellectuel très important. Cette renaissance a eu des conséquences majeures. L'étude du droit romain Glossateurs bolonais. Irnerius est entouré de disciples. Bologne est devenue la plus importante université juridique du Moyen-Age, car la renaissance du droit romain coïncide avec la création des premières universités. Le prolongement en France de l'enseignement des glossateurs. Au milieu du 12e, la réputation de l'enseignement dispensé par les glossateurs de Bologne s'étend rapidement. Forcément, la proximité de la France fait que cet enseignement y pénètre assez rapidement. Naturellement, cet enseignement pénètre d'abord dans le Midi. Les études romaines se développent assez rapidement à l'Est du Rhône. L'Est du Rhône se situe en terre d'Empire. Toute la partie Italie - Pays allemands sont terre d'Empire. Depuis le 10e, depuis 952, un Empire s'est constitué. Le Saint-Empire romain-germanique va se maintenir entre 952 et 1806. Le Saint-Empire romain-germanique, étendait sa nomination effective sur l'Allemagne, l'Italie. L'Empereur, conformément à la tradition impériale, prétendait dominer le monde. Cet empereur germanique se considérait en quelques sortes comme l'héritier des Césars. Par conséquent, la renaissance du droit romain ne pouvait que le conforter sans son ambition. Au milieu du 13e se créé des écoles de Droit françaises dans le Midi de la France, Avignon, Orange. Mais, à la fin du 13e, il existe un enseignement universitaire du droit dans les premières universités françaises. Le droit romain est étudié dans les universités de Toulouse et de Montpellier. Il y a donc un engouement pour les études romaines. Cet engouement suscite des réactions négatives de la part de l'Eglise. L'Eglise craint le développement de l'enseignement du droit romain. Elle redoute de voir le nouvel enseignement nuire à l'étude du droit canonique. La royauté manifeste de l'hostilité contre le droit romain, car les glossateurs considèrent le droit romain comme la législation vivante, applicable de l'Empire. Or, l'Empereur de cet empire prétend dominer le monde, le Royaume de France. Philippe Auguste interdit l'enseignement du droit romain à Paris, malgré un cours à Orléans. En France, on va donc enseigner le droit romain, sauf à Paris. En France, l'enseignement du droit romain s'oriente sur de nouvelles voies, avec une nouvelle école, avec l'école des post-glossateurs bolonais, au 13e. Quelle est la méthode de cette école ? Dans la 2e moitié du 13, l'ancienne méthode des glossateurs est supplantée par une autre, qui acquiert une grande notoriété. Cette nouvelle méthode s'appelle la méthode scolastique. C'est une méthode caractérisée par un raisonnement logique, fondée sur la rigueur de la démonstration. Autrement dit, avec cette nouvelle méthode, on se livre désormais à de véritables débats de doctrine. On abandonne l'étude purement littérale. Seconde école italienne, bartolistes, à la fin du 14e, l'école des postglossateurs est en décadence en France. Cette méthode française séduit les italiens, se répand à Bologne. La méthode française se répand à Bologne au 14e, à étudier les textes, à se livrer à des débats doctrinaux. L'un des principaux représentants était Bartole. Conséquences Les conséquences de la renaissance du droit romain. Ces conséquences sont doubles. Premièrement, le droit romain rival du droit coutumier. Le droit romain progresse rapidement dans le Midi. En revanche, il rencontre de sérieux obstacles dans le Nord, car le Nord est doté d'une infrastructure coutumière solide. On retrouve donc très vite l'opposition classique Nord/Sud. A partir de 1250 s'établit une distinction qui devait demeurer fondamentale jusqu'à la Révolution, entre les pays de droit écrit, de droit romain, et les pays de coutume dans le Nord. Va se dessiner une ligne séparative entre le Nord et le Sud. Ligne séparative d'Ouest en Est. Cette ligne s'étale de la Charente au Lac Léman. Le long de cette ligne, des provinces comme la Saintonge, le Limousin, le Périgord, suivent le droit romain. A la région d'Angoulême, le Poitou, ces régions appartiennent au Nord. En définitive, les pays de droit écrit sont les pays de droit écrit, romanisés, sont les pays de Langue d'Oc, et les pays de droit coutumier sont les pays de Langue d'Oïl. 1/3 du royaume était de droit écrit, 2/3 de droit coutumier. Cette distinction est relative. Il est vrai que dans le Midi, le droit romain constitue le droit commun. Mais dans le Midi, il existe aussi des coutumes dérogatoires au droit romain. Dans le Nord, on a vu que les coutumes constituent le droit commun, mais il faut quand même ajouter que le droit romain n'est pas complètement méconnu. Il y est étudié. Il jouit d'une autorité doctrinale. Il faut ajouter que dans le Nord, les rédacteurs des coutumiers. Deuxièmement, le droit romain, instrument du pouvoir royal. Ce droit romain est enseigné dans les universités. De ces universités juridiques sortent des maitres qui sont de fins juristes, des hommes qui ont acquis une solide formation en droit romain, qui ont étudié les lois de Rome. C'est important pour le pouvoir, car ces hommes que l'on appelle les légistes, beaucoup d'entre eux vont entrer au service des rois, et nombre d'entre eux avaient appris le droit romain dans les universités de pays de coutume. Cela veut dire qu'il existe une proximité du droit savant. Par conséquent, cette proximité allait peu à peu vaincre les réticences royales, d'autant que le droit romain allait rendre les plus grands services au pouvoir. Il allait rendre des services au pouvoir grâce à l'action de ces légistes, des légistes qui ont été les auteurs d'un véritable droit public, un droit public empreint de droit romain. Ce sont ces hommes qui disent que le roi est empereur en son royaume. Le roi a les mêmes prérogatives que l'empereur, il n'a plus à se méfier de lui ; par conséquent, puisque le roi n'a plus à se méfier du droit romain. Les légistes, grâce à leur action quotidienne auprès du roi, en se servant des textes du droit romain, allaient donner toute sa force à l'idée de souveraineté. Dans le même temps, le droit canonique allait continuer à se perfectionner. L'enrichissement du droit canonique Tout simplement, la période qui s'étend du 12e au 15e, cette période marque l'apogée de ce droit savant. C'est un droit savant qui a eu une grande influence sur le droit français. L'âge d'or du droit canonique Après le décret de Gratien au 12e, les papes continuent à légiférer par des décrétales. Le décret de Gratien est dépassé. Alors, les canonistes, les spécialistes de droit canon, composent de nouvelles collections de décrétales ; après le décret de Gratien, il y eut d'autres collections. L'ensemble de ces collections forment ce que l'on a appelé au 16e le corpus juris canonici, par imitation du corpus juris civilis. Depuis le 16e, on n'a pas jugé nécessaire d'ajouter à ce corpus de nouvelles décrétales publiées par les papes ; ces décrétales sont restées à l'Etat épart. Au 20e, les papes ont refondu le droit ancien. Ils ont ordonné la publication de codes canoniques qui reprennent l'ensemble de ces décrétales, semblables aux codes modernes. Les papes qui ont ordonné ces modifications sont Benoit XV en 1917 et Jean-Paul II en 1983. Influence du droit canonique Dans le domaine du droit public, le droit canon a joué un rôle majeur à l'époque de la défaillance de l'Etat. En premier lieu, le droit canonique a été le seul droit international pendant longtemps. Plus tard, lorsque le droit international se formera à part, il puisera pour se former dans des travaux antérieurs des canonistes. On a vu aussi que les premières interventions dans le domaine de la guerre émanent de l'Eglise (paix de Dieu, trêve de Dieu). C'est l'Eglise qui arbitre les différents entre laïcs. C'est aussi elle qui conserve les principes fondamentaux du droit public romain. Par exemple, lorsqu'est affirmé que le gouvernement s'exerce dans l'intérêt de tous. Enfin, en droit privé, la législation canonique a aussi inspiré le droit français dans de nombreux domaines. C'est notamment le droit de l'Eglise qui régit les questions matrimoniales, testamentaires, contractuelles. En 1453, s'achève la Guerre de Cent Ans ; on peut considérer que la féodalité est vaincue. L'Etat tel que nous le concevons est né avec ses principes constitutionnels, avec une organisation administrative renforcée, une armée (1439), des finances. La loi du roi a fait de sensibles progrès. Il faut ajouter que la monarchie souveraine qui dirige le jeune Etat français, doit compter avec de vigoureuses résistances ; tout n'est pas fait, des résistances qui la freinent dans son essor. Il existe toujours une noblesse puissante ; il existe aussi des identités locales, irréductibles. Il existe une vivacité coutumière. Cela veut dire que finalement, même si des progrès ont été faits, beaucoup restent à faire pour que s'affirme le pouvoir étatique. Sur la voie tracée, au cours des siècles médiévaux allait fournir des efforts pour assurer son autorité. Il faudra encore du temps.

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